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16/02/2004 | LUXEMBOURG | N°16886,16887

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 février 2004, 16886,16887


Tribunal administratif Nos 16886 et 16887 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits le 12 août 2003 Audience publique du 16 février 2004 Recours formés par la société du droit de Guernesey XXX Ltd contre deux décisions du directeur de l’Administration des Contributions directes en matières d’impôt sur le revenu des collectivités et d’impôt sur la fortune

JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 16886 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 août 2003 par Maître Aloyse MAY, avocat à la Cour, assisté de Maître Sabi

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Tribunal administratif Nos 16886 et 16887 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits le 12 août 2003 Audience publique du 16 février 2004 Recours formés par la société du droit de Guernesey XXX Ltd contre deux décisions du directeur de l’Administration des Contributions directes en matières d’impôt sur le revenu des collectivités et d’impôt sur la fortune

JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 16886 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 août 2003 par Maître Aloyse MAY, avocat à la Cour, assisté de Maître Sabine ZYLBERBOGEN, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société du droit de Guernesey XXX Ltd, société par actions, avec siège à … , Guernesey, Channel Islands, représentée par ses administrateurs actuellement en fonctions, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 12 mai 2003, (numéro C11353 du rôle) portant rejet d’une réclamation introduite le 28 février 2002 contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités des années 1997 et 1998, émis à son encontre le 24 janvier 2002, ainsi que contre les bulletins d’impôt sur la fortune des années 1998, 1999 et 2000, émis à son encontre le 24 janvier 2002 ;

II.

Vu la requête inscrite sous le numéro 16887 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 août 2003 par Maître Aloyse MAY, assisté de Maître Sabine ZYLBERBOGEN, tous les deux préqualifiés, au nom de la société XXX Ltd, préqualifiée, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du directeur de l’Administration des Contributions directes du 12 mai 2003 (numéro C11944 du rôle) portant rejet d’une réclamation introduite le 24 avril 2003, contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités des années 1999 et 2000, ainsi que contre le bulletin d’impôt sur la fortune de l’année 2001, émis à son encontre le 27 mars 2003 ;

I. et II.

Vu les mémoires en réponse du délégué du Gouvernement déposés au greffe du tribunal administratif en date du 15 décembre 2002 ;

Vu la constitution de nouvel avocat à la Cour de Maître Vinciane SCHANDELER, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, assistée de Maître Sabine ZYLBERBOGEN, préqualifiée, en remplacement de Maître Aloyse MAY, déposée au greffe du tribunal administratif le 15 janvier 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Sabine ZYLBERBOGEN et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 4 février 2004.

Le 28 février 2002, la société du droit de Guernesey XXX Limited, ci-après désignée par « la société XXX », introduisit une réclamation auprès du directeur de l'administration des Contributions directes ci-après désigné par « le directeur », pour se plaindre de ce que dans le cadre de l'établissement des bulletins d'impôt sur le revenu des collectivités des années 1997 et 1998 et sur la fortune des années 1998, 1999, 2000, respectivement émis le 24 janvier 2002, le bureau d'imposition n'a pas admis comme frais d'obtention fiscalement déductibles de ses revenus provenant de la location d'un immeuble appartenant à la société civile immobilière YYY, dont elle détient 50 % du capital, les intérêts débiteurs servis par elle sur un prêt qu'elle avait contracté pour octroyer à cette société une avance en compte courant en vue de l'acquisition de l'immeuble en question.

Le 24 avril 2003, la société XXX introduisit une réclamation tendant aux mêmes fins auprès du directeur relativement aux bulletins d’impôt sur le revenu des collectivités des années 1999 et 2000 et sur la fortune de l’année 2001, respectivement émis le 27 mars 2003.

Ces réclamations s'étant soldées par deux décisions directoriales d'irrecevabilité datant chacune du 12 mai 2003, la société XXX a fait déposer en date du 12 août 2003 au greffe du tribunal administratif deux recours tendant chacun principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation desdites décisions du directeur du 12 mai 2003.

Par requêtes déposées le 15 janvier 2004, elle a également sollicité le sursis à exécution de ces deux décisions directoriales en attendant que le tribunal administratif se prononce sur le mérite des recours introduits au fond.

Par ordonnances inscrites sous les numéros respectifs 17462 et 17463 du rôle, le président du tribunal administratif a reçu les deux requêtes en sursis à exécution en la forme, mais au fond les a déclarées non justifiées et en a débouté.

Les deux recours inscrits sous les numéros respectifs du rôle 16886 et 16887 étant étroitement liés quant à leur objet, il y a lieu, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de les joindre et d’y statuer par un seul jugement.

Par application des dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8 (3), alinéa 1er de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal. Ledit recours est également recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi. Il s’ensuit que le recours en annulation introduit à titre subsidiaire est irrecevable.

A l’appui de ses recours, la société demanderesse fait valoir que les intérêts débiteurs en relation directe avec l’acquisition de sa participation dans la société civile immobilière YYY constitueraient, au sens de la loi concernant l’impôt sur le revenu, des frais d’obtention déductibles de sa base d’imposition et pouvant par conséquent être portés en déduction, dans le cadre de sa déclaration d’impôt sur le revenu, de sa quote-

part du revenu de location réalisé par ladite société civile. Elle s’empare à cet égard des dispositions de l’article 175 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu (LIR) pour soutenir que la société YYY, par application du principe de la transparence fiscale des sociétés civiles et de l’absence de personnalité fiscale distincte de celle de ses associés en découlant au regard de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt sur la fortune, serait à considérer comme étant transparente au regard des impôts directs avec la conséquence qu’il y aurait lieu de considérer qu’elle-même détiendrait non pas une participation dans une société civile immobilière luxembourgeoise, mais bien directement une quote-part d’un immeuble situé au Grand-

Duché de Luxembourg.

Le délégué du Gouvernement conclut que c’est à juste titre que le directeur a relevé dans ses décisions litigieuses que le revenu net de location des associés de la société YYY a été établi séparément et en commun, de sorte qu’une imposition basée sur ce bulletin d’établissement ne pourrait pas être attaquée au motif que les bases ainsi établies seraient inexactes. Il se réfère à cet égard aux dispositions du paragraphe 232, alinéa 2 de la loi générale des impôts du 21 mai 1931, telle que modifiée, appelée « Abgabenordnung » (AO).

A travers les décisions litigieuses, le directeur a à chaque fois déclaré irrecevables dans les termes suivants les réclamations introduites par la demanderesse ayant tendu à la déduction, au titre des revenus de location, des intérêts débiteurs encourus pour financer les avances à la société YYY dont l’objet était l’acquisition et la rénovation d’un immeuble :

« Considérant que le revenu net, provenant de la location de biens, réalisé dans le cadre de la société civile YYY a été établi séparément et en commun conformément aux § 215, alinéa 2, de la loi générale des impôts (AO) par le bureau d’imposition des sociétés compétent ;

Considérant que la prise en considération des frais, même de ceux qui sont particuliers à un associé, fait partie intégrante de cet établissement ;

Considérant qu’une imposition qui est basée en tout ou en partie sur des revenus établis séparément et en commun, ne peut être attaquée pour le motif que ces bases d’imposition seraient inexactes ;

Considérant qu’une telle réclamation ne peut être formée que contre le bulletin portant établissement dudit revenu (§ 232, alinéa 2 AO) ;

Considérant par ailleurs que si le bulletin d’établissement séparé et en commun a fait l’objet d’une réclamation, toute réformation du bulletin d’établissement entraînera d’office le redressement du bulletin d’impôt établi sur la base dudit bulletin d’établissement (§ 218, alinéa 4 AO) ; » Force est de constater que les critiques formulées par la société demanderesse ont trait exclusivement à la détermination de son revenu net de location en tant qu’associée de la société civile immobilière YYY, lequel revenu fut établi séparément et en commun par le bureau d’imposition des sociétés compétent conformément au paragraphe 215, alinéa 2 AO.

Or, le paragraphe 232, alinéa 2 AO, en disposant que « liegen einem Steuerbescheid Entscheidungen zugrunde, die in einem Feststellungsbescheid oder in einem Steuermessbescheid getroffen worden sind, so kann der Steuerbescheid nicht mit der Begründung angefochten werden, dass die in dem Fesstellungsbescheid oder in einem Steuermessbescheid getroffenen Entscheidungen unzutreffend seien. Dieser Einwand kann nur gegen den Feststellungsbescheid oder gegen den Steuermessbescheid erhoben werden », fait obstacle à la possibilité de critiquer utilement un bulletin d’impôt à travers des moyens visant exclusivement la fixation d’un revenu établi suivant bulletin d’établissement séparé et en commun, les critiques en question ne pouvant en effet être dirigées que directement contre ce dernier. (cf. trib. adm. 3 mai 2000, n° 11000 du rôle, Pas. adm. 2003, V° Impôts, n° 329 et autres références y citées, page 399).

Cette conclusion ne saurait être énervée par référence aux dispositions du paragraphe 11bis de la loi modifiée d’adaptation fiscale du 16 octobre 1934, tel qu’introduit par l’article 175 LIR, qui dispose notamment que les sociétés civiles sont considérées comme n’ayant pas de personnalité juridique distincte de celle de ses associés, étant donné que cette transparence fiscale reste sans incidence sur l’application du paragraphe 215, alinéa 2 AO, qui prévoit l’établissement séparé et en commun des revenus de location immobilière à la seule condition que plusieurs personnes participent aux dits revenus (« wenn an den Einkünften mehrere beteiligt sind »), cette condition étant manifestement remplie en l’espèce étant donné que la société demanderesse n’est pas seule détentrice du capital social de la société. YYY et que partant plusieurs personnes participent aux revenus de location dont question en l’espèce.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le directeur a valablement pu déclarer irrecevable les réclamations lui soumises, de sorte que les deux recours inscrits sous les numéros du rôle respectifs 16886 et 16887 sont à rejeter comme étant non fondés.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

prononce la jonction des rôles inscrits sous les numéros du rôle 16886 et 16887 ;

reçoit les recours en réformation en la forme ;

au fond les dits non justifiés et en déboute ;

déclare les recours en annulation irrecevables ;

condamne la société demanderesse aux frais .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 16 février 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16886,16887
Date de la décision : 16/02/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-02-16;16886.16887 ?

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