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09/02/2004 | LUXEMBOURG | N°16809

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 février 2004, 16809


Tribunal administratif N° 16809 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er août 2003 Audience publique du 9 février 2004 Recours formé par les époux … et …, … contre une décision du directeur de l’Administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16809 du rôle et déposée du greffe du tribunal administratif en date du 1er août 2003 par Maître Jean-Pierre WINANDY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom des époux … et …, demeu

rant à L-…, tendant à la réformation de la décision du directeur d’Administration des Contribut...

Tribunal administratif N° 16809 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er août 2003 Audience publique du 9 février 2004 Recours formé par les époux … et …, … contre une décision du directeur de l’Administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16809 du rôle et déposée du greffe du tribunal administratif en date du 1er août 2003 par Maître Jean-Pierre WINANDY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom des époux … et …, demeurant à L-…, tendant à la réformation de la décision du directeur d’Administration des Contributions directes du 5 juin 2003 (n° 11955C du rôle), déclarant irrecevable sa réclamation du 20 mars 2003 dirigée contre le bulletin d’établissement séparé et en commun des revenus de l’entreprise collective …, société civile particulière, au titre de l’année d’imposition 1997, émis le 27 juin 2002 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 21 janvier 2004 ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment la décision directoriale entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Jean-Pierre WINANDY et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en leurs plaidoi… respectives à l’audience publique du 21 janvier 2004.

Considérant que la société civile particulière …, désignée ci-après par « la société … » a été constituée par acte authentique en date du 13 mars 1970 pour une durée de vie de 30 ans, ses statuts ayant été publiés au mémorial C n° 111 du 30 juin 1970 ;

Que l’objet de la société … était l’acquisition de 359,50 millièmes indivis d’une maison avec place et dépendances sise à Luxembourg, boulevard Royal, sa destruction et la construction d’un nouvel ensemble immobilier destiné à être attribué aux copropriétaires afin d’y exercer leurs activités ;

Que conformément à la volonté initiale de ses associés, la liquidation de la société … a été décidée par l’assemblée générale extraordinaire des associés en date du 10 mars 2000, la procédure de liquidation ayant été clôturée par décision de la même assemblée du 28 septembre 2000, cette dernière décision ayant été publiée au mémorial C de l’année 2001, page 23941 ;

Que le capital social de la société …, fixé à 36 millions LUF était représenté par 72 parts dont 4 parts étaient détenues en 1997 par Monsieur … Que par courrier du 22 mars 2001, le bureau d’imposition Luxembourg, Sociétés 3, a notifié à la société … son intention de procéder à un redressement des déclarations des revenus d’entreprises collectives et de co-propriétés déposées au titre des années 1997 à 2000 ;

Que des bulletins d’établissement séparé et en commun des revenus d’entreprises collectives ont été émis le 27 juin 2002 concernant les exercices 1997 à 2000 inclus ;

Qu’en application de la ventilation des parts des différents associés dans la société …, les bulletins en question ont établi pour chaque année concernée les quote-parts dans les revenus incombant à chacun d’eux, fixant ainsi plus particulièrement pour l’année 1997 dans le chef de Monsieur … détenteur de quatre parts sur 72, une quote-part de 1.912.602,- LUF par rapport à un bénéfice qualifié de commercial émargé à 29.676.833,-

LUF ;

Que ce montant de 1.912.602,- LUF ayant été repris au titre de revenu pour l’année 1997 dans son propre bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 1997, Monsieur … a réclamé le 30 septembre 2002 à son encontre concernant précisément l’imposition de cet élément de revenu ;

Que cette réclamation a été rejetée par le directeur de l’Administration des Contributions directes, désigné ci-après par « le directeur », suivant décision du 11 décembre 2002 au motif d’être irrecevable en tant que dirigée contre le bulletin d’impôt sur le revenu, une telle réclamation ayant dû être adressée à l’encontre du bulletin d’établissement séparé et en commun prévisé du 27 juin 2002 ;

Que c’est ainsi qu’en date du 19 mars 2003, les époux … et … ont fait introduire une réclamation contre ledit bulletin d’établissement séparé et en commun des revenus d’entreprises collectives pour l’année 1997 émis le 27 juin 2002 ;

Qu’à l’appui de leur réclamation ils invoquent au niveau de l’énoncé des arguments l’annulation dudit bulletin d’imposition du 27 juin 2002, sinon la suspension des délais y relativement en ce que, d’une part, les exigences du paragraphe 205 (3) de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, telle qu’elle a été modifiée par la suite, désignée communément par « Abgabenordnung (AO) » n’auraient pas été respectées et que, d’autre part, ledit bulletin ne mentionnerait pas avec la clarté requise qu’étant un bulletin d’établissement en commun il aurait effet par rapport à tous les co-intéressés aux termes du paragraphe 219 (3) AO ;

Qu’ils font valoir essentiellement en argumentant par rapport à la Gepräge-

Rechtsprechung allemande que les revenus issus de l’activité de la société … seraient de nature civile et non commerciale et ne sauraient dès lors être considérés comme bénéfices commerciaux, mais auraient dû être qualifiés comme étant à imposer au titre de revenus de location sinon de revenus divers ;

Que par décision datée du 5 juin 2003, notifiée aux époux …-… le lendemain, le directeur a déclaré la réclamation irrecevable pour cause de tardiveté ;

Considérant que c’est contre cette décision directoriale du 5 juin 2003 que les époux …-… ont fait introduire en date du 1er août 2003 un recours en réformation ;

Que tout en reprenant pour l’essentiel le contenu de leur prédite réclamation du 19 mars 2003 dans le cadre de son dit recours en réformation, les demandeurs concluent à la recevabilité du recours compte tenu des exigences prévues par les paragraphes 205 (3) AO et 219 (3) AO précités, tout en sollicitant la réformation au fond du bulletin d’établissement séparé et en commun des revenus de la société … au titre de l’année d’imposition 1997 ;

Qu’il convient de souligner qu’à travers le dispositif de son recours les demandeurs n’ont point sollicité l’annulation du bulletin en question, aucun mémoire en réplique n’ayant par ailleurs été déposé ;

Considérant que le délégué du Gouvernement a déposé son mémoire en réponse le 21 janvier 2004, avant rapport, le jour auquel l’affaire a été plaidée, le représentant étatique faisant entrevoir lui-même la non-admissibilité dudit mémoire pour cause de tardiveté ;

Considérant que sans qu’il ne faille dans ces circonstances rouvrir les débats pour permettre aux parties de prendre position sur l’admissibilité du mémoire en réponse du délégué du Gouvernement, le tribunal est amené à constater que ce mémoire, déposé loin au-delà du délai de trois mois prévu par l’article 5 (1) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, est non admissible et partant à écarter ;

Que conformément aux dispositions de l’article 6 de la même loi, le tribunal est néanmoins amené à statuer à l’égard de toutes les parties suivant un jugement ayant les effets d’une décision juridictionnelle contradictoire ;

Considérant que sur base des dispositions combinées de l’article 8, paragraphe (3), alinéa 1 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et du paragraphe 228 AO, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit ;

Que ce recours ayant pour le surplus été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi il est recevable ;

Considérant que le bulletin d’établissement séparé et en commun pour l’année 1997 émis le 27 juin 2002, se trouvant à la base de la décision directoriale déférée, a établi conformément au paragraphe 215, alinéa 2 AO, les revenus réalisés par l’établissement commun, la société civile particulière …, en dégageant un bénéfice qualifié de commercial d’un montant total émargé de 29.676.833,- LUF ;

Que ce bulletin a été notifié à la société … à l’adresse … ;

Que cette adresse apparaît comme étant l’ancien siège social de la société … ayant correspondu par ailleurs, au siège … de la BANQUE …, principal associé, ayant détenu 50 sur 72 parts de ladite société durant l’exercice 1997 ;

Considérant qu’il est constant que la procédure de liquidation de la société …, entamée suivant décision de l’assemblée générale extraordinaire des associés du 10 mars 2000, a été clôturée le 28 septembre de la même année et que cette décision a été publiée au mémorial C de l’année 2001, partant antérieurement à l’émission du bulletin du 27 juin 2002 ;

Considérant qu’il est de l’essence de la procédure d’établissement séparé et en commun qu’à toute hauteur de la procédure administrative et contentieuse, les décisions soient prises avec effet pour et contre tous les cointéressés ; que les décisions portant sur les questions communes au sens du paragraphe 215 AO précité doivent donc être prises à l’égard de tous les cointéressés et notifiées à chacun de ceux-ci, fût-ce par représentation ;

Considérant que du fait de la publication en 2001 de la clôture des opérations de liquidation de la société …, le bureau d’imposition était informé depuis lors, que la société en question avait, en principe, cessé d’exister, sauf le cas non vérifié en l’espèce d’une renaissance pour les besoins de la liquidation ;

Que dans ces circonstances le bureau ne pouvait plus se prévaloir utilement de la procédure simplifiée du paragraphe 219 AO pour notifier les bulletins à un seul associé avec effet pour et contre tous les autres ;

Qu’en effet, cette procédure suppose expressément l’existence d’une société au moment de la notification et n’est plus applicable aux associés une fois la liquidation de la société clôturée (cf. C.E. 19 décembre 1986, n° 7721 du rôle) ;

Considérant que le tribunal est amené à toiser le recours introduit dans les limites du dispositif, ensemble les motifs qui le soutiennent, sous peine de statuer ultra petita ;

Considérant que le représentant étatique, à travers son mémoire en réponse, ne conclut point à l’annulation du bulletin d’établissement séparé et en commun du 27 juin 2002 à la base de la décision directoriale déférée, se limitant à énoncer que « le tribunal statuera ce qu’il appartient », encore qu’il appuie son argumentaire sur l’arrêt précité du comité du Contentieux du Conseil d’Etat du 19 décembre 1986 (n° 7721 du rôle) ayant annulé dans des circonstances parallèles un bulletin d’établissement séparé et en commun sur les conclusions afférentes « de l’administration » ;

Considérant qu’il suit de ce qui précède que dans la mesure où à travers le dispositif de leur recours ensemble les motifs l’appuyant, les demandeurs sollicitent la réformation au fond du bulletin d’établissement séparé et en commun du 27 juin 2002, par réformation de la décision directoriale déférée, sans conclure expressément à travers ledit dispositif et les moyens qui le soutiennent nécessairement, à l’annulation dudit bulletin pour non observation de l’article 219 AO, le tribunal est amené à limiter la réformation à prononcer à l’encontre de la décision directoriale déférée sur ce que c’est à tort qu’elle a déclaré irrecevable la réclamation du 19 mars 2003 ;

Considérant que le directeur n’ayant pas eu l’occasion de se prononcer au fond, il convient de renvoyer le dossier devant lui en prosécution de cause pour voir statuer sur le mérite de ladite réclamation, étant donné que toute solution contraire aboutirait à ce que le contribuable soit privé de la faculté de voir toiser ses prétentions à un niveau précontentieux, la faveur incontestable du législateur ayant été de lui réserver toute chance de trouver à tel niveau non contentieux une solution valable au problème soumis.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en la forme ;

au fond, le dit justifié ;

réformant, déclare la réclamation non tardive, partant recevable et renvoie le dossier devant le directeur de l’Administration des Contributions directes en prosécution de cause ;

condamne l’Etat aux frais .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 9 février 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16809
Date de la décision : 09/02/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-02-09;16809 ?

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