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04/02/2004 | LUXEMBOURG | N°16790

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 04 février 2004, 16790


Tribunal administratif N° 16790 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 juillet 2003 Audience publique du 4 février 2004 Recours formé par Monsieur … et consorts contre une décision du bourgmestre de la commune de Grevenmacher en présence de Monsieur … en matière d’établissements classés

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16790 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 29 juillet 2003 par Maître Charles UNSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Messieurs …, …, dem

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Tribunal administratif N° 16790 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 juillet 2003 Audience publique du 4 février 2004 Recours formé par Monsieur … et consorts contre une décision du bourgmestre de la commune de Grevenmacher en présence de Monsieur … en matière d’établissements classés

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16790 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 29 juillet 2003 par Maître Charles UNSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Messieurs …, …, demeurant à L- … , et …, …, demeurant à L-…, ainsi que de Madame …, …., demeurant à D- …, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du bourgmestre de la commune de Grevenmacher du 2 juillet 2003 accordant à Monsieur …, demeurant à L-…, l’autorisation de remplacer dans la boulangerie artisanale exploitée à L- … le four existant de la marque Winkler par un four à tubes annulaires de la marque Hein (modèle EA 5050-20) ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Marcel HERBER, demeurant à Esch-sur-

Alzette, du 30 juillet 2003, portant signification de ce recours à l’Administration communale de la ville de Grevenmacher, ainsi qu’à Monsieur … ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 12 décembre 2003 par Maître Jean MEDERNACH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de l’Administration communale de la ville de Grevenmacher ;

Vu la notification de ce mémoire en réponse par voie de télécopie adressée en date du 12 décembre 2003 au mandataire des consorts … ;

Vu les pièces versées en cause et plus particulièrement la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Christiane JOST, en remplacement de Maître Charles UNSEN et Jean-François STEICHEN, en remplacement de Maître Jean MEDERNACH, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 28 janvier 2004.

Suivant décision du bourgmestre de la ville de Grevenmacher du 6 janvier 1994, Monsieur … a obtenu l’autorisation d’établir et d’exploiter une boulangerie artisanale dans la résidence « … » sise à L-….

A la suite d’une demande afférente adressée à l’Administration communale de Grevenmacher le 8 mai 2003, le bourgmestre, par décision du 2 juillet 2003, a autorisé Monsieur … à remplacer dans le cadre de l’exploitation de sa boulangerie artisanale le four existant de la marque Winkler par un four à tubes annulaires de la marque Hein (modèle EA-505020) en relevant expressément que « - la surface de cuisson au four sera réduite d’environ 20 m2 à 14,30 m2 - à part le brûleur aucun moteur, ni aucun ventilateur ne tourne au nouveau four - le brûleur s’enclenche beaucoup moins souvent à cause de l’énorme capacité d’accumulation du foyer réfractaire - le remplacement contribue à une économie en consommation d’énergie et une réduction du niveau acoustique ».

Par requête déposée en date du 29 juillet 2003, Messieurs …, … et Madame …, ont fait introduire un recours contentieux tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision prévisée du bourgmestre du 2 juillet 2003.

Il y a lieu de relever liminairement que les consorts … sont propriétaires en indivision, suite au décès de leur mère, Madame …, veuve …, survenu le 21 août 2003, d’un appartement sis au premier étage dans la résidence « … » à Grevenmacher.

A l’appui de leur recours, ils exposent d’abord subir un grave préjudice suite à l’exploitation illégale de l’entreprise artisanale concernée, étant donné que leurs locataires successifs seraient gênés de jour et de nuit par le bruit excessif et les émanations désagréables en provenance de la boulangerie et que suite aux agissements qualifiés de fautifs de Monsieur …, plusieurs locataires auraient déjà quitté les locaux loués.

Ils font valoir plus particulièrement à cet égard que l’exploitation de la boulangerie concernée serait interdite suivant les articles 6 et 7 du règlement général de copropriétaires de la résidence « … », mais que malgré de nombreuses interventions de leur part, Monsieur … continuerait à y exploiter cette boulangerie.

En droit, ils soutiennent que la modification litigieuse serait à considérer comme étant substantielle et qu’à ce titre, le bourgmestre aurait dû observer la procédure prévue par l’article 10, alinéa 1 de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, sous peine de commettre une violation flagrante de la loi, ainsi qu’un excès, voire un détournement de pouvoir.

La ville de Grevenmacher conclut principalement à l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des demandeurs, en faisant valoir qu’ils resteraient en défaut d’établir que l’inobservation éventuelle des règles par eux épinglées serait de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin.

Elle relève à cet égard que le four nouvellement autorisé présenterait des avantages et des innovations techniques importants, de nature à réduire de façon significative d’éventuelles nuisances que peuvent occasionner les installations d’une boulangerie artisanale, tel que cela serait d’ailleurs relevé dans le cadre de l’autorisation litigieuse.

Dans la mesure où les caractéristiques techniques du nouveau four contribueraient de manière significative à réduire les nuisances sonores dont se plaignent les demandeurs et que ledit four présenterait en outre l’avantage de s’enclencher beaucoup moins souvent que d’autres modèles en raison de la grande capacité d’accumulation du foyer réfractaire, les demandeurs ne disposeraient dès lors d’aucun intérêt à agir, ceci d’autant plus que le recours par eux introduit ne baserait sur aucun argument de fond et qu’aucun grief concret ne serait invoqué contre l’autorisation litigieuse.

Le recours ayant été signifié à Monsieur … en sa qualité de tiers intéressé, le tribunal est amené à statuer à l’égard de toutes les parties en l’espèce, encore que la partie tierce intéressée n’ait pas déposé de mémoire en réponse dans le délai de légal, le tout conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Toute partie demanderesse introduisant un recours contre une décision administrative doit justifier d’un intérêt personnel, distinct de l’intérêt général. Si les voisins proches ont un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’établissements classés, cette proximité de situation constitue un indice pour établir l’intérêt à agir, mais ne suffit pas à elle seule pour le fonder. Il faut de surcroît que l’inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin (cf. trib. adm. 12 janvier 1997, n° 9443 du rôle, confirmé par Cour adm. 24 juin 1997, n° 9843C du rôle, Pas. adm. 2003, V° Procédure contentieuse, n° 15 et autres références y citées, page 445).

En l’espèce, il y a dès lors lieu d’examiner si les demandeurs, en leur qualité de propriétaires d’un appartement situé au premier étage d’une résidence, au-dessus de la boulangerie litigieuse, justifient d’un intérêt à agir suffisant, étant entendu que l’appartement concerné est destiné à être affecté à l’habitation, même si les demandeurs ne font pas état d’une utilisation effective afférente à des fins personnelles.

Afin de déterminer si le projet litigieux est de nature à entraîner une aggravation concrète de la situation de voisin des demandeurs, il y a lieu de l’examiner au regard des inconvénients supplémentaires de voisinage éventuels engendrés par rapport à l’état existant.

En effet, s’agissant non pas d’une autorisation relative à l’exploitation d’une nouvelle boulangerie à l’endroit litigieux, mais d’un projet de remplacement d’un four existant, fonctionnant à l’heure actuelle sous le couvert d’une autorisation d’exploitation non autrement sujette à contestations de la part des demandeurs suivant les informations afférentes non contestées en cause de la ville de Grevenmacher, seule une aggravation de la situation existante pour les demandeurs en rapport avec le remplacement litigieux est susceptible de leur valoir la reconnaissance d’un intérêt à agir en l’espèce, étant donné que le principe même de l’exploitation d’une boulangerie artisanale à l’endroit litigieux ne saurait pas être utilement remis en cause à travers le recours sous examen compte tenu de son objet limité à l’autorisation du remplacement d’un four.

A cet égard, force est de constater que l’autorisation litigieuse relève elle-même essentiellement des éléments qui sont de nature à établir une amélioration plutôt qu’une aggravation de la situation pour le voisinage par l’effet du remplacement du four litigieux, en ce qu’il y est mentionné, de façon non sérieusement contestée, que la surface de cuisson au four sera réduite d’environ 20 m2 à 14,30 m2, qu’à part le brûleur aucun moteur, ni aucun ventilateur ne tourne au nouveau four, que le brûleur s’enclenche beaucoup moins souvent à cause de l’énorme capacité d’accumulation du foyer réfractaire et que le remplacement contribue à une économie en consommation d’énergie et à une réduction du niveau acoustique.

Dans la mesure où les développements afférents de la partie défenderesse déployés dans son mémoire en réponse et mettant d’avantage encore en évidence les innovations techniques importantes de nature à réduire de façon significative les éventuelles nuisances pouvant être occasionnées par les installations d’une boulangerie artisanale et en l’espèce plus particulièrement par le four y installé, n’ont été utilement contestés en phase contentieuse ni par écrit à travers un mémoire en réplique, ni oralement à l’audience des plaidoiries, le tribunal est amené à considérer l’absence d’aggravation de la situation de voisin des demandeurs comme étant établie et à constater qu’en l’état actuel du dossier, ils restent en défaut de justifier d’un intérêt à agir suffisant.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours est irrecevable.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

déclare le recours irrecevable ;

condamne les parties demanderesses aux frais .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 4 février 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16790
Date de la décision : 04/02/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-02-04;16790 ?

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