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17/12/2003 | LUXEMBOURG | N°16839

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 décembre 2003, 16839


Numéro 16839 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 août 2003 Audience publique du 17 décembre 2003

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Recours formé par Monsieur … et son épouse, Madame … et consort contre deux décisions conjointes prises par les ministres de la Justice et du Travail et de l’Emploi en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16839 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 a

oût 2003 par Maître Sandra VION, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembo...

Numéro 16839 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 août 2003 Audience publique du 17 décembre 2003

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Recours formé par Monsieur … et son épouse, Madame … et consort contre deux décisions conjointes prises par les ministres de la Justice et du Travail et de l’Emploi en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16839 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 août 2003 par Maître Sandra VION, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le 25 mars 1959, et de son épouse, Madame …, née le …, agissant tant en leur nom personnel qu’en celui de leur enfant mineur … …, née le … à Luxembourg, tous de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision émanant du ministre de la Justice et du ministre du Travail et de l’Emploi, datant du 30 décembre 2002, par laquelle la délivrance d’une autorisation de séjour leur fut refusée, ainsi que d’une décision confirmative rendue sur recours gracieux par le ministre de la Justice en date du 15 mai 2003 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 28 août 2003 ;

Vu la lettre déposée au greffe du tribunal administratif le 9 septembre 2003 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, par laquelle elle informa le tribunal qu’elle a mandat d’occuper et occupera en remplacement de Maître Sandra VION ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en ses plaidoiries.

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A la suite d’une demande afférente présentée en date du 12 juillet 2001 par Monsieur … et son épouse, Madame …, agissant tant en leur nom personnel qu’en celui de leur fille … …, les ministres de la Justice et du Travail et de l’Emploi prirent le 30 décembre 2002 une décision conjointe portant refus de leur accorder une autorisation de séjour, aux motifs qu’ils ne disposeraient pas de moyens d’existence personnels suffisants légalement acquis leur permettant de supporter leurs frais de séjour au Luxembourg, «indépendamment de l’aide matérielle ou des secours financiers que de tierces personnes pourraient s’engager à [leur] faire parvenir » et que « pour le surplus [leur] demande en obtention d’une autorisation de séjour est également à rejeter au regard des directives applicables en matière de régularisation », dans la mesure où leur demande introduite « sur base de la catégorie D » ne remplissait pas les conditions prévues par la catégorie en question.

Le mandataire des époux …-… fit introduire par lettre du 6 février 2003 un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle prévisée du 30 décembre 2002, en versant à l’appui de ladite demande un nouveau certificat médical du docteur Ch.K. daté du 13 janvier 2003 pour conclure qu’au vu de l’état de santé de Madame …, la famille n’aurait pas été en mesure de retourner dans son pays d’origine.

Par décision du 15 mai 2003, le ministre de la Justice informa le mandataire des époux …-… qu’après avoir procédé au réexamen de leur dossier, et à défaut d’éléments pertinents nouveaux, il ne saurait réserver de suite favorable à leur demande.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 6 août 2003, Monsieur … et son épouse, Madame …, agissant tant en leur nom personnel qu’en celui de leur fille … …, ont fait introduire un recours tendant à l’annulation des décisions ministérielles précitées des 30 décembre 2002 et 15 mai 2003.

Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de leur recours, les demandeurs soutiennent remplir les conditions prévues par la catégorie D de la brochure intitulée « informations pratiques pour personnes concernées – Régularisation du 15 mai au 13 juillet 2001 de certaines catégories d’étrangers séjournant sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg », dénommée ci-après la « brochure », telle qu’établie par le gouvernement, en ce que Madame … serait atteinte d’une maladie d’une gravité exceptionnelle dans la mesure où elle souffrirait depuis plusieurs années de « problèmes gastriques » et où elle aurait subi une intervention chirurgicale le 21 mai 2001, à la suite de laquelle elle aurait été victime de plusieurs complications post-opératoires, tel que cela ressortirait notamment du certificat médical du docteur Ch.K. du 13 janvier 2003, précité. Par ailleurs, ce certificat médical préciserait que Madame … nécessiterait une « récupération de quelques mois », qui devrait se faire sous surveillance médicale régulière avec médication adaptée. Ils relèvent que ces conclusions médicales ne sauraient d’ailleurs être énervées par un avis du médecin de contrôle de l’administration du contrôle médical de la sécurité sociale instituée auprès du ministère de la Sécurité sociale, qui, en affirmant dans son avis du 13 août 2001 que l’état de santé de Madame … nécessiterait un traitement au Luxembourg d’environ 6 mois, aurait minimisé la pathologie dont souffrirait Madame …, étant donné que celle-ci, plus de deux ans après avoir introduit la demande précitée du 12 juillet 2001 est toujours dans l’incapacité de retourner dans son pays d’origine, au vu de sa maladie « d’une gravité exceptionnelle ».

Le délégué du gouvernement conteste que le ministre de la Justice aurait commis une erreur manifeste d’appréciation des faits, en soutenant que notamment les certificats médicaux versés par les demandeurs ne feraient pas état d’une maladie d’une gravité exceptionnelle, mais retiendraient exclusivement que la récupération de Madame … « prendrait encore quelques mois ». Il estime que le fait pour le ministre de prendre sa décision confirmative le 15 mai 2003, à savoir quatre mois après l’établissement du dernier certificat médical qui lui a été versé de la part des demandeurs, ne saurait faire l’objet d’un quelconque reproche, d’autant plus qu’il se serait basé sur un nouvel avis du médecin de l’administration du contrôle médical quant à la gravité de la maladie de Madame …, ainsi que la possibilité de son retour dans son pays d’origine.

L’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : – qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Au vœu de l’article 2 précité, une autorisation de séjour peut dès lors être refusée notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (trib. adm. 17 février 1997, Pas. adm.

2003, V° Etrangers 2. Autorisations de séjour – Expulsions, n° 134 et autres références y citées, p. 208).

En l’espèce, force est de constater qu’il ne se dégage ni des éléments du dossier, ni des renseignements qui ont été fournis au tribunal, que les demandeurs disposaient de moyens personnels propres suffisants et légalement acquis au moment où les décisions attaquées furent prises.

A défaut pour les demandeurs d’avoir rapporté la preuve de l’existence de moyens personnels, le ministre de la Justice a dès lors valablement pu refuser l’autorisation de séjour sollicitée sur base de ce motif.

Au-delà de ces considérations tenant à l’application directe de l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972, les demandeurs entendent tirer argument du fait qu’à travers la brochure, le gouvernement aurait fixé des critères particuliers en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour.

Abstraction faite de la question de savoir si les critères contenus dans la brochure peuvent déroger à la loi précitée du 28 mars 1972, force est de retenir que les demandeurs avaient introduit leur demande de régularisation en soutenant qu’ils tomberaient dans la catégorie D suivant laquelle « la personne qui est atteinte d’une maladie d’une gravité exceptionnelle ne lui permettant pas de retourner, endéans un an, dans son pays d’origine ou dans un autre pays dans lequel elle est autorisée à séjourner » pourra être régularisée, en se référant à l’état de santé de Madame ….

Or, en l’espèce, il n’est pas établi à suffisance de droit à partir des éléments fournis en cause que l’état actuel de santé de Madame … serait compromis en cas de retour dans son pays d’origine. En effet, si le certificat établi par le docteur Ch.K. en date du 13 janvier 2003 permet de dégager qu’une surveillance médicale devrait être poursuivie « encore quelques mois » et que Madame … devrait bénéficier d’une « médication adaptée », cette conclusion ne permet pas à elle seule de dégager une impossibilité de faire procéder à cette surveillance dans le pays d’origine des demandeurs.

C’est partant à bon droit que le ministre de la Justice a pu se baser sur les avis de l’administration du contrôle médical des 4 novembre 2002 et 7 mars 2003, dans lesquels il a été retenu respectivement que d’après les investigations de ladite administration « un traitement médical lourd ou régulier n’est plus en route actuellement », que « rien ne s’oppose donc du point de vue médical au retour de Madame … dans son pays d’origine » et que Madame … « ne présente pas de pathologie médicale empêchant le rapatriement dans son pays d’origine ».

Force est dès lors de constater qu’il se dégage des éléments de fait qui précèdent, que les demandeurs ne remplissent pas les critères énoncés dans la brochure, de sorte que le ministre pouvait à juste titre refuser l’octroi d’une autorisation de séjour.

Il suit des considérations qui précèdent que les décisions ministérielles sont légalement fondées et que les demandeurs sont à débouter de leur recours.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 17 décembre 2003, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 16839
Date de la décision : 17/12/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-12-17;16839 ?

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