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08/12/2003 | LUXEMBOURG | N°16236

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 décembre 2003, 16236


Tribunal administratif N° 16236 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 avril 2003 Audience publique du 8 décembre 2003 Recours formé par la société anonyme … S.A., … contre des décisions du bourgmestre de la Ville de Luxembourg en matière de permis de construire en présence de la société anonyme … Luxembourg S.A., …

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16236 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 avril 2003 par Maître Yann BADEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg

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Tribunal administratif N° 16236 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 avril 2003 Audience publique du 8 décembre 2003 Recours formé par la société anonyme … S.A., … contre des décisions du bourgmestre de la Ville de Luxembourg en matière de permis de construire en présence de la société anonyme … Luxembourg S.A., …

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16236 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 avril 2003 par Maître Yann BADEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … S.A., établie et ayant son siège social à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation 1) d’une décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 10 janvier 2003 accordant à la société anonyme … S.A., établie et ayant son siège social L-…, absorbée par fusion, constatée suivant acte notarié du 14 avril 2003, par la société … Luxembourg S.A., établie et ayant son siège social à la même adresse, l’autorisation de construire un immeuble résidentiel à 28 logements sur le terrain sis à Luxembourg, 72, boulevard Prince Félix ; 2) pour autant que de besoin, d’une autorisation de principe du 28 janvier 2002 ainsi que toutes autres décisions préparatoires ; et 3) d’une autorisation de morcellement émise par la Ville de Luxembourg sous le numéro de référence P151;

Vu les exploits de l’huissier de justice Carlos CALVO, demeurant à Esch/Alzette, des 8 et 9 avril 2003 portant signification de ce recours à l’administration communale de la Ville de Luxembourg, ainsi qu’à la société anonyme …S.A. ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 3 juillet 2003 par Maître Jean MEDERNACH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu la notification de ce mémoire en réponse par voie de télécopie adressée aux mandataires des sociétés … S.A. et … Luxembourg S.A.en date du 3 juillet 2003 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 8 juillet 2003 par Maître Victor ELVINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … Luxembourg S.A.;

Vu la signification de ce mémoire en réponse … ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 3 octobre 2003 par Maître Yann BADEN au nom de la société … S.A. ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 8 octobre 2003 portant signification de ce mémoire en réplique à l’administration communale de la Ville de Luxembourg, ainsi qu’à la société … Luxembourg S.A. ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 7 novembre 2003 par Maître Jean MEDERNACH pour compte de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu la notification de ce mémoire en duplique par voie de télécopie adressée aux mandataires des sociétés … S.A. et … Luxembourg S.A. en date du 6 novembre 2003 ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 7 novembre 2003 par Maître Victor ELVINGER pour compte de la société … Luxembourg S.A. ;

Vu la notification de ce mémoire en duplique par voie de télécopie adressée aux mandataires de la société … S.A. ainsi que de l’administration communale de la Ville de Luxembourg en date du 7 novembre 2003 ;

Vu les pièces versées en cause notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Olivier TOTH, en remplacement de Maître Yann BADEN, Christian POINT, en remplacement de Maître Jean MEDERNACH, et Victor ELVINGER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 novembre 2003.

Suivant autorisation de bâtir référencée sous le numéro 554.2A.2002, émise en date du 10 janvier 2003, le bourgmestre de la Ville de Luxembourg accorda à la société …S.A., entre-temps absorbée par fusion par la société … Luxembourg S.A., l’autorisation de construire un immeuble résidentiel à 28 logements sur le terrain sis 72, boulevard Prince Félix à Luxembourg sous les conditions suivantes :

« 1. avoir obtenu l’autorisation de raccordement à l’égout avant de commercer les travaux de fondation ;

2. assainir par pompage les locaux situés en-dessous du niveau de la canalisation urbaine, l’administration communale déclinant toute responsabilité en cas de dégâts occasionnés par non-fonctionnement du système de pompage ;

3. se mettre en rapport avec le service de la circulation de la Ville afin de pouvoir aménager une clôture, un échafaudage et éventuellement un dépôt de matériaux sur la voie publique ;

4. pour autant que de besoin avant de commencer les travaux, être en possession d’une autorisation du Ministère des Travaux publics (Ponts et Chaussées) ;

5. pour autant que de besoin, se conformer aux lois du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles et du 18 juillet 1983 concernant la conservation et la protection des sites et monuments nationaux ;

6. se conformer au règlement ministériel du 18 janvier 1966 prescrivant un recensement statistique des constructions prévues de bâtiments et de logements au Grand-Duché ;

7. achever les travaux de gros-œuvre endéans 24 mois conformément aux plans approuvés, après ce délai la présente perdant tous ses effets ;

8. respecter les dispositions du règlement général de police du 26 mars 2001, ainsi que celles de l’article 101 du code de la route concernant les salissures de la voie publique causées par des travaux d’excavation et de construction. » Par requête déposée en date du 4 avril 2003, la société anonyme … S.A. a fait introduire un recours contentieux tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de l’autorisation de bâtir prévisée du 10 janvier 2003, ainsi que, pour autant que de besoin, d’une autorisation de principe du 28 janvier 2002 et de toutes les décisions préparatoires ayant précédé celle du 10 janvier 2003.

Le même recours est finalement dirigé contre une autorisation de morcellement qui, d’après la société demanderesse, semble avoir été émise par la Ville de Luxembourg sous le numéro de référence P151 en date du 12 juin 2002.

Aucun recours au fond n’étant prévu en la matière, le tribunal n’est pas compétent pour connaître du recours principal en réformation.

L’administration communale de la Ville de Luxembourg, ainsi que la société … Luxembourg S.A., concluent principalement à l’irrecevabilité du recours en annulation sous examen pour absence d’intérêt à agir dans le chef de la société demanderesse en faisant valoir que le projet litigieux n’aurait pas d’incidence concrète sur sa situation de voisin.

A cet égard la société demanderesse a exposé à l’appui de son recours être propriétaire de plusieurs immeubles sis à Luxembourg-Kirchberg, à l’intérieur du périmètre du plan d’aménagement particulier « Schoettermarial », et plus particulièrement des immeubles suivants :

« Résidence Désignation lot Adresse Résidence RUBIS A3-A5 local technique 1 113, rue des Maraîchers L-2124 Luxembourg OLIVINE B1 cave 8 17, rue J.P. Sauvage L-2514 Luxembourg CORAIL B6 caves 18a, 21, 22, 7, rue J.P. Sauvage 23, 24, 25 L-2514 Luxembourg CORAIL B7 cave 24 5, rue J.P. Sauvage L-2514 Luxembourg CORAIL B8 cave 8 3, rue J.P. Sauvage L-2514 Luxembourg CORAIL B9 cave 17 1, rue J.P. Sauvage L-2514 Luxembourg BERYL B11-23 cave 15 23, rue J.P. Sauvage L-2514 Luxembourg TOURMALINE B12 cave 17 25, rue J.P. Sauvage L-2514 Luxembourg ALEXANDRITE B13-29 cave 15 29, rue J.P. Sauvage L-2514 Luxembourg SAPHIR C1 cave 25 63, boulevard Prince Félix L-1513 Luxembourg BRILLANT C2 local technique jardinage 61, boulevard Prince Félix L-1513 Luxembourg EMERAUDE D parking 28 2-6, rue Baclesse L-1208 Luxembourg réserve 1 idem réserves 4, 5, 6 idem réserve 3 idem GRAND PARKING locaux techniques rue J.P. Sauvage CORAIL 1, 2, 3, 4, 5 L-2514 Luxembourg parking C1 idem parking C25 idem parking 7B idem local technique 2ième partie idem 81, Val des Bons Malades maison d’habitation 81, Val des Bons Malades L-2121 Luxembourg 91, Val des Bons Malades maison d’habitation 91, Val des Bons Malades L-2121 Luxembourg 6 garages idem Val des Bons Malades centrale thermique 91, Val des Bons Malades L-2121 Luxembourg » Elle relève que les terrains concernés tombent sous le champ d’application du PAP « Schoettermarial » et seraient adjacents aux terrains portant les numéros cadastraux 520/4310, 520/3218, 521/3337, 521/3338, 521/3339, 521/3889, 521/4079 et 521/4312, ayant appartenu à l’ancienne société …S.A. et situés à l’extérieur du PAP « Schoettermarial » formant une languette située entre les terrains portant les numéros cadastraux 440/3330, 440/3331 et 441/1956, appartenant à la Ville de Luxembourg et situés à l’intérieur du PAP « Schoettermarial ».

Elle estime dès lors qu’elle serait directement concernée, en sa qualité de propriétaire d’éléments immobiliers voisins, par le fait qu’une construction y est projetée et sera réalisée sur les terrains en question et que, à cet égard, le non respect de la procédure prévue en matière d’autorisation de construire serait susceptible de lui causer grief.

Dans son mémoire en réplique elle fait par ailleurs préciser que si certaines de ses propriétés ne sont pas adjacentes au terrain qui doit accueillir la construction litigieuse, il n’en resterait pas moins que la résidence projetée se trouverait dans le champ de vision direct de ses propriétés concernées, de sorte que le projet de construction litigieux serait de nature à aggraver sa situation de voisin.

Elle fait valoir en outre qu’en conséquence de l’installation d’une chaufferie individuelle dans la résidence à construire, elle subirait les conséquences de cette installation de chauffage en raison plus particulièrement du produit résultant de la combustion du mazout servant au chauffage de l’immeuble, étant donné que l’immeuble projeté accusera une hauteur nettement inférieure à celle des résidences avoisinantes.

Toute partie demanderesse introduisant un recours contre une décision administrative doit justifier d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général. Si les voisins proches ont un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation constitue un indice pour établir l’intérêt à agir, mais ne suffit pas à elle seule pour le fonder. Il faut de surcroît que l’inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin (cf. trib. adm. 22 janvier 1997, n° 9443 du rôle, confirmé par Cour adm. 24 juin 1997, n° 9843C du rôle, Pas. adm. 2003, V° Procédure contentieuse, n° 19 et autres références y citées, page 499).

L’intérêt à agir dégagé à partir de la situation de voisin repose essentiellement sur la prémisse qu’en principe les voisins proches sont, par essence, appelés à se faire face au quotidien et se trouvent confrontés, de manière constante et inévitable, à l’aggravation concrète de leur situation de voisin alléguée à l’appui de leurs prétentions.

En l’espèce, force est de constater que les immeubles du chef desquels la société demanderesse se prévaut d’une situation de voisinage par rapport au projet litigieux constituent, à l’exception des deux maisons d’habitation sises 81 et 91, Val des Bons Malades à L-2121 Luxembourg, des caves, locaux techniques, réserves, parkings et garages, non affectés à l’habitation pour n’en constituer que des accessoires à finalité utilitaire.

Or, l’intérêt à agir s’apprécie non pas de manière abstraite, par rapport à la seule qualité de propriétaire d’un immeuble voisin, mais concrètement au regard de la situation de fait invoquée, de sorte que le tribunal ne saurait déceler en l’espèce sous quel aspect la situation concrète de la société demanderesse se trouverait aggravée par l’effet du projet litigieux, étant entendu que des désagréments notamment de vue en rapport uniquement avec l’occupation sporadique, par ailleurs non concrètement alléguée en cause dans le chef direct de la société demanderesse, d’immeubles de type cave, réserve, parking ou garage, ne sauraient être utilement retenus à ce titre, faute de présenter un caractère de gravité suffisant.

Concernant ensuite les deux maisons d’habitation sises 81 et 91, Val des Bons Malades, force est encore de constater qu’il se dégage des pièces versées au dossier que de par leur situation, ces deux immeubles ne sauraient être considérés comme caractérisant une situation de proche voisinage par rapport au projet litigieux, étant donné qu’ils se trouvent à une distance considérable, largement en aval de ce dernier et s’en trouvent séparés, entre autres, d’abord par l’ensemble résidentiel CORAIL B, ensuite, par la rue Jean-Pierre SAUVAGE, ainsi que par les résidences imposantes en volume dénommées EMERAUDE et SAPHIR se situant directement en face du terrain devant accueillir le projet litigieux.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que la société demanderesse ne justifie pas d’un intérêt à agir suffisant à l’encontre de l’autorisation de bâtir litigieuse en sa qualité de propriétaire des immeubles par elle énumérés à l’appui de son recours.

La même conclusion s’impose relativement au recours dirigé contre les actes préparatoires à cette autorisation de bâtir, y compris l’autorisation de morcellement n° P151 du 5 novembre 2001, étant donné que la société demanderesse indique elle-même compter cette dernière décision parmi les décisions préalables à l’autorisation de construire déférée et que par voie de conséquence le défaut d’intérêt à agir ci-avant dégagé par rapport à la décision constituant l’aboutissement des décisions préalables emporte nécessairement l’irrecevabilité du recours dirigé contre ces dernières.

Il s’ensuit que le recours introduit par la société … S.A. est irrecevable.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne la partie demanderesse aux frais .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 décembre 2003 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 7


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16236
Date de la décision : 08/12/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-12-08;16236 ?

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