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04/12/2003 | LUXEMBOURG | N°17192

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 04 décembre 2003, 17192


Tribunal administratif Numéro 17192 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 novembre 2003 Audience publique du 4 décembre 2003

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Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du Gouvernement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 17192 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 novembre 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au t

ableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … , de nationalité yougos...

Tribunal administratif Numéro 17192 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 novembre 2003 Audience publique du 4 décembre 2003

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Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du Gouvernement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 17192 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 novembre 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … , de nationalité yougoslave, actuellement placé au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière, tendant à la réformation d’un arrêté du ministre de la Justice du 10 novembre 2003 prorogeant à son encontre une mesure de placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification de l'arrêté en question;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 28 novembre 2003;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Yvette NGONO YAH, en remplacement de Maître Louis TINTI, et Monsieur le délégué du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 1er décembre 2003.

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Monsieur … fut placé, par arrêté du ministre de la Justice du 11 août 2003, lui notifié en date du 12 septembre 2003, au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification dudit arrêté dans l’attente de son éloignement du territoire luxembourgeois. Par arrêté ministériel du 10 octobre 2003, notifié le même jour à l'intéressé, la mesure de placement fut prorogée une première fois pour la durée d'un mois. Un deuxième arrêté de prorogation de la mesure de placement initiale fut pris en date du 10 novembre 2003.

Cette deuxième décision de prorogation est fondée sur les considérations et motifs suivants :

« Vu l'article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l'entrée et le séjour des étrangers;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière;

Vu mes arrêtés pris en date du 11 août 2003, notifié le 12 septembre 2003 et du 10 octobre 2003 décidant du placement temporaire de l'intéressé;

Considérant que l’intéressé est dépourvu du visa requis - qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays;

Considérant qu’un éloignement immédiat n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ».

Par requête déposée le 24 novembre 2003, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation à l’encontre de l’arrêté ministériel de prorogation du placement du 10 novembre 2003.

Etant donné que l’article 15, paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3.

l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre l’arrêté ministériel du 10 novembre 2003. Ledit recours ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours le demandeur fait valoir que les autorités administratives compétentes seraient restées en défaut de faire tous les efforts et toutes les démarches nécessaires en vue d’assurer que la mesure d’éloignement puisse être exécutée sans retard, dans les délais les plus brefs. Il estime que la condition posée par l’article 15 de la loi précitée du 28 mars 1972 relative à l’exigence d’une nécessité absolue en cas de prorogation d’une décision de placement ne serait pas remplie en l’espèce, l’autorité administrative compétente étant restée en défaut , à son avis, de démontrer qu’elle n’aurait pas été en mesure de procéder à l’exécution matérielle de son éloignement dans un délai plus bref.

Le délégué du Gouvernement relève à cet égard qu’en date du 15 juillet 2003, le ministre de la Justice avait sollicité un accord de principe auprès des autorités monténégrines en vue du rapatriement de Monsieur … vers son pays d’origine et qu’en date du 31 juillet 2003, lesdites autorités ont donné leur accord en vue du rapatriement de l’intéressé. Dans la mesure où les autorités monténégrines auraient toutefois tardé dans la délivrance d’un laissez-passer et que ce document n’aurait été remis à un fonctionnaire du ministère de la Justice en déplacement à Bruxelles qu’en date du 27 novembre 2003, ce n’est que dans les tous prochains jours que le rapatriement de Monsieur … aurait pu être organisé. Il relève en outre qu’au vu du nombre impressionnant d’infractions pénales commises par Monsieur … et au vu du fait qu’il ne s’était pas présenté au bureau d’accueil pour demandeurs d’asile en vue d’un retour assisté, il serait évident que la condition de la nécessité absolue se trouve remplie en l’espèce.

Conformément aux dispositions de l’article 15 (2) de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée, une mesure de placement peut « en cas de nécessité absolue être reconduite par le ministre de la Justice à deux reprises, chaque fois pour la durée d’un mois. » Il se dégage du libellé de la disposition légale prérelatée que le tribunal, appelé à statuer par rapport à une décision de prorogation d’une mesure de placement, doit analyser si le ministre de la Justice a pu se baser sur des circonstances permettant de justifier qu’une nécessité absolue rendait la prorogation de la décision de placement inévitable.

A cet égard le demandeur reproche aux autorités luxembourgeoises de rester en défaut de justifier de la nécessité absolue de proroger la mesure de placement pour la durée d’un mois.

Il se dégage des pièces versées au dossier que le ministre de la Justice a certes contacté dans un délai raisonnable les autorités monténégrines en vue du rapatriement de l’intéressé et que les diligences effectuées à cette fin ont donné lieu, dans un premier temps, à un résultat satisfaisant par l’émission d’un accord de principe par les autorités monténégrines en date du 31 juillet 2003. Force est cependant de constater que par la suite, pendant la période s’étendant du 31 juillet 2003 à la date de la prise de la décision litigieuses du 10 novembre 2003, le dossier administratif tel que versé en cause ne permet pas de dégager l’existence de démarches de la part des autorités luxembourgeoises en vue d’accélérer l’émission effective du laissez-passer nécessaire à l’exécution concrète de la mesure d’éloignement.

Or, si le tribunal est certes amené à admettre la possibilité-même de problèmes pratiques pouvant se présenter dans le cadre de l’émission de ce document à travers notamment une inaction prolongée afférente des autorités étrangères, il n’en reste cependant pas moins que les autorités luxembourgeoises ne sauraient être admises à rester passives par rapport à une attitude des autorités étrangères consistant à retarder l’émission d’un laissez-

passer sollicité, lorsque la personne concernée se trouve sous le coup d’une mesure de placement.

Dans la mesure où aucune pièce susceptible de documenter des démarches de la part des autorités luxembourgeoises en vue d’accélérer les formalités du rapatriement n’a pu être versée en cause, il se dégage dès lors des considérations qui précèdent que la condition relative à une nécessité absolue pour justifier l’arrêté ministériel litigieux laisse d’être respectée en l’espèce.

Il y a partant lieu de réformer l’arrêté ministériel déféré et d’ordonner la levée de la mesure de placement.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le dit justifié, partant, par réformation, ordonne la levée de la mesure de placement telle que prorogée par arrêté ministériel du 10 novembre 2003 ;

renvoie le dossier au ministre de la Justice aux fins d’exécution ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé et pronconcé à l’audience publique du 4 décembre 2003 par :

Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17192
Date de la décision : 04/12/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-12-04;17192 ?

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