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03/12/2003 | LUXEMBOURG | N°16566

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 03 décembre 2003, 16566


Tribunal administratif N° 16566 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 juin 2003 Audience publique du 3 décembre 2003 Recours formé par les époux … et … et consorts, …, contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16566 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 16 juin 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Etat de Serbie et Monténégro), de son Ã

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Tribunal administratif N° 16566 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 juin 2003 Audience publique du 3 décembre 2003 Recours formé par les époux … et … et consorts, …, contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16566 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 16 juin 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Etat de Serbie et Monténégro), de son épouse, Madame …, née le … , et de leurs enfants majeurs …, née le … et …, né le … ,demeurant actuellement tous ensemble à L- …, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 7 avril 2003 portant rejet de leur demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée et de celle confirmative, intervenue sur recours gracieux, du même ministre du 21 mai 2003 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 10 octobre 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH en remplacement de Maître Louis TINTI et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 17 novembre 2003.

Le 4 janvier 2001, Monsieur … et son épouse Madame … ainsi que leurs deux enfants majeurs Madame … et Monsieur … introduisirent une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour, la famille …-… fut entendue par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur leur identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Monsieur … fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié en date du 20 mars 2003.

Madame … fut entendue par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur ses motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié en date du 19 mars 2003.

Les deux enfants, à savoir, Monsieur … et Madame … furent entendus séparément respectivement le 21 février 2003 et le 21 mars 2003 par un agent du ministère de la Justice sur leur situation et sur leurs motifs à la base de leurs demandes en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 7 avril 2003, envoyée par lettre recommandée le 8 avril 2003, le ministre de la Justice informa la famille …-… qu’elle ne saurait bénéficier de la protection accordée par la Convention de Genève étant donné qu’il résulterait de leur récit qu’ils éprouveraient surtout un sentiment général d’insécurité qui ne saurait fonder une crainte de persécution au sens de ladite convention.

Par courrier de leur mandataire du 8 mai 2003, la famille …-… fit introduire un recours gracieux à l’encontre de cette décision de refus.

Par décision du 21 mai 2003, le ministre de la Justice confirma sa décision du 8 mai 2003.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 16 juin 2003 la famille …-… a fait déposer un recours en réformation à l’encontre des décisions ministérielles des 7 avril et 21 mai 2003.

L’article 12 (3) de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de leurs recours les demandeurs font valoir qu’ils sont originaires de Mitrovica et de religion musulmane, que leur départ aurait été motivé par le fait que Monsieur … et les siens craindraient des actes de représailles de la part notamment de certains Albanais du Kosovo lesquels reprocheraient à Monsieur … son adhésion au parti du L.D.K. et à Monsieur … le fait de ne pas avoir combattu au sein des forces armées de l’U.C.K.. Ils ajoutent que leurs craintes se seraient inscrites dans un contexte d’insécurité particulièrement prononcé à en juger par la tentative d’enlèvement de Mademoiselle … et aux menaces directement proférées à l’encontre de Monsieur …. Ils concluent que les autorités sur place ne réussiraient pas à assurer une sécurité suffisante à l’égard des habitants du Kosovo à en juger par les résultats de l’enquête diligentée suite à la tentative d’enlèvement de Mademoiselle … et le nombre extrêmement important de crimes non élucidés perpétrés dans cette région.

Le délégué du Gouvernement estime que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs, de sorte qu’ils seraient à débouter de leur recours.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne. Dans ce contexte, il convient encore de préciser que le tribunal est appelé, dans le cadre d'un recours en réformation, à apprécier le bien-fondé et l'opportunité d'une décision entreprise en tenant compte de la situation existant au moment où il statue.

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par les demandeurs lors de leurs auditions respectives telles que celles-ci ont été relatées dans les quatre comptes rendus figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que les demandeurs restent en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En l’espèce les demandeurs font essentiellement état de craintes de voir commettre des actes de violence à leur encontre de la part de membres de la population lesquels reprocheraient à Monsieur … son adhésion au parti du L.D.K. et à Monsieur … le fait de ne pas avoir combattu au sein des forces armées de l’U.C.K., mais ils ne démontrent point que les autorités administratives chargées du maintien de la sécurité et de l’ordre public en place ne soient pas capables d’assurer un niveau de protection suffisant aux habitants du Kosovo, étant entendu que les seuls faits concrets, à savoir, le fait que deux personnes seraient venues au travail de Monsieur … et la tentative d’enlèvement de Mademoiselle ne sont pas de nature à établir un défaut caractérisé de protection de la part des autorités actuellement en place.

Force est de constater que les craintes dont les demandeurs font état s’analysent en substance en un sentiment général d’insécurité lequel ne saurait fonder une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève.

De tout ce qui précède il résulte que le recours sous analyse est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en la notion en réformation à la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 3 décembre 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Spielmann, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

SCHMIT LENERT 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16566
Date de la décision : 03/12/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-12-03;16566 ?

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