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17/11/2003 | LUXEMBOURG | N°16504

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 novembre 2003, 16504


Tribunal administratif N° 16504 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 juin 2003 Audience publique du 17 novembre 2003 Recours formé par Madame …-… et consorts, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16504 du rôle et déposée le 5 juin 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Brigitte POCHON, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …-…, née le …, agissant tant en son nom personnel qu’en nom

et pour compte de ses deux enfants mineurs … et … …, tous de nationalité yougoslave, demeur...

Tribunal administratif N° 16504 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 juin 2003 Audience publique du 17 novembre 2003 Recours formé par Madame …-… et consorts, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16504 du rôle et déposée le 5 juin 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Brigitte POCHON, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …-…, née le …, agissant tant en son nom personnel qu’en nom et pour compte de ses deux enfants mineurs … et … …, tous de nationalité yougoslave, demeurant actuellement ensemble à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 16 mai 2003, par laquelle il n’a pas été fait droit à sa demande en reconnaissance du statut de réfugié ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER en sa plaidoirie à l’audience publique du 10 novembre 2003.

______________________________________________________________________

Le 23 décembre 2002, Madame …-…, accompagnée de ses deux enfants mineurs … et … …, introduisit oralement auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Elle fut entendue en date du même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité ainsi que sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Madame …-… fut entendue en outre en date du 11 avril 2003 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Par décision du 16 mai 2003, lui notifiée par voie de courrier recommandé expédié en date du 27 mai 2003, le ministre de la Justice l’informa que sa demande avait été rejetée au motif qu’elle reposerait exclusivement sur des considérations économiques non susceptibles de justifier en tant que telles l’octroi du statut de réfugié et que par ailleurs le Kosovo, pour une Albanaise, ne saurait être considéré comme un territoire dans lequel des risques de persécution sont à craindre.

Par requête déposée en date du 5 juin 2003, Madame …-… a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision ministérielle prévisée du 16 mai 2003.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, seule une demande en réformation a pu être dirigée contre les décisions ministérielles entreprises. Le recours en réformation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Il s’ensuit que le recours subsidiaire en annulation est irrecevable.

A l’appui de son recours la demanderesse expose être ressortissante de l’ex-

Yougoslavie, originaire du Kosovo et de confession musulmane, ainsi que d’avoir quitté son pays d’origine en novembre 2002 pour aller en Hongrie et ensuite au Luxembourg dans le but d’y retrouver son mari. Elle estime que ce serait à tort que l’autorité ministérielle a refusé de faire droit à sa demande, étant donné qu’elle craint de retourner dans son pays d’origine et d’y être jugée et persécutée. Elle conclut à la réformation de la décision litigieuse par l’octroi dans son chef du statut de réfugié.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation de la demanderesse et que le recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par Madame …-… lors de son audition en date du 11 avril 2003, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments développés au cours de la procédure contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que la demanderesse reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, il se dégage clairement des déclarations non autrement rétractées en cause de la demanderesse que celle-ci s’est rendue au Grand-Duché de Luxembourg non pas par crainte d’être exposée dans son pays d’origine à des persécutions au sens de la Convention de Genève, mais en raison de la mauvaise situation économique à laquelle elle était exposée avant son départ, de sorte que le ministre de la Justice a valablement pu retenir que sa demande d’asile ne répond à aucun des critères de fond définis dans le cadre de l’article 1er, A. 2 de la Convention de Genève.

Il s’ensuit que le recours est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 novembre 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 3


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16504
Date de la décision : 17/11/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-11-17;16504 ?

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