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17/11/2003 | LUXEMBOURG | N°16502

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 novembre 2003, 16502


Tribunal administratif Numéro 16502 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 juin 2003 Audience publique du 17 novembre 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16502 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 juin 2003 par Maître Michel KARP, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, de nationalité yougoslave, tendant à l’annulation, sinon à

la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 16 mai 2003, rejetant sa demand...

Tribunal administratif Numéro 16502 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 juin 2003 Audience publique du 17 novembre 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16502 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 juin 2003 par Maître Michel KARP, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, de nationalité yougoslave, tendant à l’annulation, sinon à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 16 mai 2003, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 24 septembre 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Sandra FADI, en remplacement de Maître Michel KARP, et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 novembre 2003.

Le 14 mars 2003, Monsieur … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Les 27 mars et 9 avril 2003, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 16 mai 2003, lui notifiée par courrier recommandé expédié le 26 mai 2003, le ministre de la Justice informa Monsieur … de ce que sa demande avait été refusée au motif que les menaces par lui invoquées ne constitueraient pas un motif suffisant pour obtenir le statut de réfugié, étant donné que le demandeur ignorerait tout des auteurs de ces menaces et qu’elles ne seraient dès lors pas nécessairement liées à un quelconque motif politique, ceci d’autant plus que le parti politique LDK dont Monsieur … déclare être membre depuis 1990 est le parti politique le plus important du Kosovo.

Le ministre a relevé en outre que le Kosovo, pour un Albanais, ne saurait être considéré comme un territoire où des risques de persécution seraient à craindre.

Par requête déposée en date du 5 juin 2003, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation de la décision ministérielle de refus prévisée du 16 mai 2003.

Encore qu’un demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation, l’existence d’une telle possibilité rendant irrecevable l’exercice d’un recours en annulation contre la même décision (cf. trib.

adm. 4 décembre 1997, n° 10404 du rôle, Pas. adm. 2002, V° Recours en réformation, n° 2, et autres références citées, page 517).

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées.

Il s’ensuit que le recours subsidiaire en réformation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Le recours en annulation est par voie de conséquence irrecevable.

Quant au fond, le demandeur fait exposer qu’il est originaire du Kosovo et il critique la décision déférée en faisant valoir qu’elle serait non justifiée, mal-fondée, qu’elle violerait la loi et qu’elle constituerait une erreur manifeste d’appréciation aux motifs suivants : 1) la situation à Mitrovica ne serait pas encore stabilisée et serait toujours dangereuse pour les Albanais. Le retour de Monsieur … à son ancien domicile serait impossible pour raisons de sécurité au nord de Mitrovica où ne résideraient plus que des Serbes qui y auraient chassé les Albanais. Il n’y aurait plus aucun Albanais qui habiterait au nord. De plus Monsieur … aurait reçu des menaces de mort. 2) A Mitrovica, Monsieur … n’aurait pas de travail et pas de logement et leurs moyens d’existence seraient pratiquement nuls. Il ressortirait d’un article du journal Washington Post du 22 juin 2002 que le problème dans le nord de Mitrovica où règnent les Serbes n’aurait pas été résolu par les forces des Nations Unies.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs et que leur recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

Force est de constater que la Convention de Genève envisage le pays d’origine du demandeur d’asile dans son ensemble, de sorte que le demandeur, faisant état exclusivement de craintes de persécution par rapport à la seule partie nord de la ville de Mitrovica, sans autrement étayer les raisons qui l’empêcheraient de s’installer dans une autre partie de son pays d’origine, reste en défaut d’établir, voire d’alléguer une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève.

Il s’ensuit que le ministre de la Justice a valablement pu refuser de faire droit à sa demande d’asile.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 novembre 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 3


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16502
Date de la décision : 17/11/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-11-17;16502 ?

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