La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/11/2003 | LUXEMBOURG | N°16371

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 12 novembre 2003, 16371


Tribunal administratif N° 16371 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 mai 2003 Audience publique du 12 novembre 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

------------------------------------------------------------


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16371 du rôle et déposée le 2 mai 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur â

€¦, né le …, de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformati...

Tribunal administratif N° 16371 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 mai 2003 Audience publique du 12 novembre 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

------------------------------------------------------------

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16371 du rôle et déposée le 2 mai 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 12 février 2003, par laquelle il n’a pas été fait droit à sa demande en reconnaissance du statut de réfugié, ainsi que d’une décision confirmative sur recours gracieux prise par le prédit ministre en date du 31 mars 2003 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 juillet 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 3 novembre 2003.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Le 11 novembre 2002, Monsieur … introduisit oralement auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-

ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Il fut entendu en date du même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité ainsi que sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Monsieur … fut en outre entendu en date du 8 janvier 2003 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Par décision du 12 février 2003, lui notifiée en date du 18 février 2003, le ministre de la Justice l’informa que sa demande avait été rejetée au motif que sa situation d’insoumis invoquée à l’appui de sa demande, même à la supposer établie, serait insuffisante pour constituer une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève dans son chef.

Par lettre du 17 mars 2003, Monsieur … introduisit, par le biais de son mandataire, un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle prévisée du 12 février 2003.

Par décision du 31 mars 2003, le ministre de la Justice confirma sa décision négative antérieure.

Par requête déposée en date du 2 mai 2003, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation des décisions précitées du ministre de la Justice des 12 février et 31 mars 2003.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, seule une demande en réformation a pu être dirigée contre les décisions ministérielles entreprises. Le recours en réformation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Au fond, le demandeur fait exposer qu’il a quitté sa région natale au motif qu’il n’aurait pas pu accepter de participer, à travers son incorporation militaire dans les forces militaires yougoslaves, à des actions militaires contraires à sa conscience et à ses convictions politiques. Estimant être exposé, en cas de retour dans son pays d’origine, au risque d’être attrapé par l’armée de son pays d’origine et de subir une peine disproportionnée pour cause d’insoumission, il reproche à l’autorité administrative d’avoir fait une appréciation erronée des faits de l’espèce et d’être arrivée, à tort, à la conclusion que les faits par lui invoqués ne seraient pas de nature à établir une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que le recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne. - Dans ce contexte, il convient encore de préciser que le tribunal est appelé, dans le cadre d’un recours en réformation, à apprécier le bien fondé et l’opportunité d’une décision entreprise en tenant compte de la situation existante au moment où il statue.

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par Monsieur … lors de son audition, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments développés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, concernant le seul motif invoqué fondé sur l’état d’insoumission de Monsieur …, il convient de rappeler que l’insoumission n’est pas un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, puisqu’elle ne saurait, à elle seule, fonder dans le chef du demandeur, une crainte justifiée d’être persécuté dans son pays d’origine du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, paragraphe 2 de la section A, de la Convention de Genève.

En outre, il ne ressort pas à suffisance de droit des éléments du dossier que Monsieur … risque actuellement encore de devoir participer à des actions militaires contraires à des raisons de conscience valables ou encore que la condamnation qu’il risquerait d’encourir en raison de son insoumission serait disproportionnée par rapport à la gravité d’une telle infraction ou que la condamnation éventuelle soit prononcée pour une des causes visées par la Convention de Genève.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours sous analyse doit être rejeté comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 12 novembre 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16371
Date de la décision : 12/11/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-11-12;16371 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award