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06/11/2003 | LUXEMBOURG | N°16402

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 06 novembre 2003, 16402


Tribunal administratif N° 16402 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 mai 2003 Audience publique du 6 novembre 2003 Recours formé par Madame … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le n° 16402 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 mai 2003 par Maître Marc MODERT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à Tirana (Albanie), de nationalité albanaise, demeurant actuellement

à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre du Travail et de l’Emploi du ...

Tribunal administratif N° 16402 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 mai 2003 Audience publique du 6 novembre 2003 Recours formé par Madame … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le n° 16402 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 mai 2003 par Maître Marc MODERT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à Tirana (Albanie), de nationalité albanaise, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre du Travail et de l’Emploi du 7 février 2003 portant refus dans son chef de la délivrance du permis de travail sollicité par elle en tant qu’agent d’entretien auprès de la société anonyme …, établie à L-… ;

Vu le mémoire en réponse déposé par le délégué du gouvernement au greffe du tribunal administratif le 6 août 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Olivier LANG, en remplacement de Maître Marc MODERT, et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-

Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

Par une déclaration d’engagement signée le 22 novembre 2002, la société anonyme … et Madame … introduisirent auprès de l’administration de l’Emploi une demande tendant à voir délivrer un permis de travail en faveur de Madame … pour un poste d’agent d’entretien avec une rémunération brute de 7,46 € de l’heure à raison de 30 heures de travail par semaine, avec effet au 3 juin 2002.

Cette demande se réfère à un contrat de travail conclu entre les parties en date du 31 mai 2002 suivant lequel Madame … a été engagée aux services de la société anonyme … avec effet au 3 juin 2002 en tant qu’agent d’entretien.

Par arrêté du 7 février 2003, le ministre du Travail et de l’Emploi, ci-après dénommé le « ministre », refusa la délivrance d’un tel permis de travail « pour les raisons inhérentes à la situation et à l’organisation du marché de l’emploi suivantes - des demandeurs d’emploi appropriés sont disponibles sur place : 2018 ouvriers non qualifiés inscrits comme demandeurs d’emploi aux bureaux de placement de l’Administration de l’Emploi - priorité à l’emploi des ressortissants de l’Espace Economique Européen - poste de travail non déclaré vacant par l’employeur - occupation irrégulière depuis le 30.05.2002 ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 6 mai 2003, Madame … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 7 février 2003.

Aucune disposition légale ne prévoyant un recours de pleine juridiction contre une décision de refus d’un permis de travail, seul un recours en annulation a pu être introduit en cause.

Le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Au fond, la demanderesse reproche tout d’abord au ministre d’avoir refusé la délivrance d’un permis de travail sur base d’une « motivation stéréotype », rédigée en des termes généraux, sans prendre position par rapport à sa situation concrète.

Elle estime que dans la mesure où ladite décision ne se serait référée qu’à des observations d’ordre général, ainsi que sur des « chiffres statistiques et des principes », le ministre n’aurait pas précisé de façon circonstanciée, en droit et en fait, les motifs de refus se trouvant à la base de sa décision sous analyse.

Concernant le motif d’annulation basé sur un défaut d’indication suffisante des motifs, qui est préalable, il y a lieu de relever qu’une obligation de motivation expresse et exhaustive d’un arrêté ministériel de refus d’une autorisation de travail n’est imposée ni par la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, ni par le règlement grand-ducal modifié d’exécution du 12 mai 1972 déterminant les mesures applicables pour l’emploi des travailleurs étrangers sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg, tandis que l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes dispose que toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux et qu’une décision refusant de faire droit à la demande de l’intéressé doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base.

Or, en l’espèce, l’arrêté ministériel déféré du 7 février 2003 énonce quatre motifs tirés de la législation sur l’emploi de la main-d’œuvre étrangère et suffit ainsi aux exigences de l’article 6 précité, cette motivation ayant utilement été complétée et explicitée par le mémoire en réponse du délégué du gouvernement, de sorte que la demanderesse n’a pas pu se méprendre sur la portée à attribuer à la décision litigieuse.

L’existence et l’indication des motifs ayant été vérifiées, il y a lieu d’examiner si lesdits motifs sont de nature à justifier la décision ministérielle déférée, étant relevé qu’une décision administrative individuelle est légalement motivée du moment qu’un des motifs invoqués à sa base la sous-tend entièrement.

En l’espèce, parmi les quatre motifs invoqués à la base du refus ministériel déféré figure celui du défaut de déclaration de la vacance de poste.

C’est à bon droit que le délégué du gouvernement conclut au bien-fondé de ce motif de refus de délivrance d’un permis de travail à Madame …, en soutenant que le motif en question, tiré de l’absence de déclaration du poste vacant, a valablement pu être invoqué par le ministre à la base de la décision litigieuse, en se référant à l’article 10 (1) du règlement grand-ducal modifié du 12 mai 1972, précité, dans sa teneur lui conférée par le règlement grand-ducal du 29 avril 1999.

En effet, ladite disposition réglementaire dispose en son deuxième alinéa que « la non-déclaration formelle et explicite de la vacance de poste à l’administration de l’Emploi, conformément à l’article 9 paragraphe (2) de la loi modifiée du 21 février 1976 concernant l’organisation et le fonctionnement de l’administration de l’Emploi et portant création d’une commission nationale de l’Emploi, constitue un motif valable et suffisant de refus du permis de travail ».

Il échet de relever que la formalité de la déclaration de vacance de poste se justifie dans la mesure où, par l’accomplissement de cette formalité administrative, l’administration de l’Emploi est mise en mesure d’établir la disponibilité concrète sur le marché de l’emploi de demandeurs d’emploi prioritaires, suivant l’article 10 (1) du règlement grand-ducal précité du 12 mai 1972 et de l’article 27 de la loi précitée du 28 mars 1972, aptes à occuper le poste vacant, en assignant le cas échéant à l’employeur en question des ressortissants de l’Union européenne ou de l’Espace Economique Européen bénéficiant d’une priorité à l’embauche, susceptibles de remplir concrètement les fonctions ainsi déclarées vacantes.

En l’espèce, il se dégage non seulement de la déclaration d’engagement datée au 22 novembre 2002, du contrat de travail conclu entre la société anonyme … et Madame … en date du 31 mai 2002, mais également des explications fournies par le mandataire de la demanderesse que celle-ci a été engagée par la société anonyme … avec effet au 3 juin 2002, ce qui est pour le surplus confirmé par le certificat d’affiliation du Centre commun de la sécurité sociale émis le 22 novembre 2002, suivant lequel la demanderesse a même déjà travaillé depuis le 30 mai 2002 auprès dudit employeur.

Il est encore constant en cause que l’employeur n’a pas préalablement déclaré le poste vacant, ce qui n’est pas non plus contesté par la demanderesse.

Etant donné que la décision se justifie par le seul motif analysé ci-dessus, l’examen des moyens ayant trait aux autres motifs sur lesquels le ministre a encore fondé sa décision de refus, devient surabondant.

La conclusion ci-avant retenue ne saurait pas être énervée par le fait, comme il a été allégué par la demanderesse, mais non établi en cause à défaut de pièces afférentes figurant au dossier tel que soumis par le mandataire de la demanderesse au greffe du tribunal administratif, que celle-ci aurait antérieurement disposé d’un permis de travail l’autorisant à exercer un emploi au Grand-Duché de Luxembourg, qui serait venu à échéance, étant donné que le seul fait d’avoir bénéficié d’une telle autorisation de travail par le passé ne saurait autoriser la demanderesse à exiger qu’à l’avenir de telles autorisations soient émises en sa faveur, puisque, d’une part, il n’existe aucune disposition légale ou réglementaire qui accorderait à la demanderesse un tel droit et que, d’autre part, lors de chaque nouvelle demande tendant à la délivrance d’un permis de travail, il est tenu compte, au moment de l’émission de la décision afférente, de la situation du marché de l’emploi, telle qu’elle existe au jour en question.

Il suit des considérations qui précèdent que le recours en annulation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier-juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 6 novembre 2003, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 16402
Date de la décision : 06/11/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-11-06;16402 ?

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