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03/11/2003 | LUXEMBOURG | N°16263

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 03 novembre 2003, 16263


Tribunal administratif N° 16263 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 avril 2003 Audience publique du 3 novembre 2003 Recours formé par 1) Monsieur … et 2) le restaurant chinois « … », … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16263 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 avril 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le… , de nationalit

é chinoise, demeurant à … Chine, ainsi que par le restaurant …, établi à L-…, tendant à l’...

Tribunal administratif N° 16263 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 avril 2003 Audience publique du 3 novembre 2003 Recours formé par 1) Monsieur … et 2) le restaurant chinois « … », … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16263 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 avril 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le… , de nationalité chinoise, demeurant à … Chine, ainsi que par le restaurant …, établi à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre du Travail et de l’Emploi du 8 janvier 2003, refusant d’accorder à Monsieur … un permis de travail pour un emploi de cuisinier auprès du restaurant … préqualifié ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé auprès du greffe du tribunal administratif le 9 juillet 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Louis TINTI et Monsieur le délégué du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 octobre 2003.

Par arrêté du 8 janvier 2003, le ministre du Travail et de l’Emploi, ci-après dénommé « le ministre », a refusé de faire droit à la demande en obtention d’un permis de travail présentée par Monsieur …, de nationalité chinoise, pour un emploi auprès du restaurant chinois « … » exploité par Monsieur … en qualité de cuisinier « pour les raisons inhérentes à la situation et à l’organisation du marché de l’emploi suivantes :

- des demandeurs d’emploi appropriés sont disponibles sur place : 79 cuisiniers, dont 24 avec CATP inscrits comme demandeurs au bureau de placement de l’administration de l’emploi - priorité à l’emploi des ressortissants de l’Espace Economique Européen (E.E.E.) - recrutement à l’étranger non autorisé ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 9 avril 2003, Monsieur … et le restaurant … ont fait déposer un recours contentieux tendant à l’annulation de l’arrêté ministériel prévisé du 8 janvier 2003.

Le délégué du Gouvernement conclut d’abord à l’irrecevabilité du recours pour autant qu’introduit par le restaurant … au motif de l’absence d’indication de la forme juridique de l’entité requérante.

Conformément aux dispositions de l’article 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, la requête introductive doit comporter notamment le nom du requérant.

Concernant plus particulièrement l’hypothèse d’une personne morale, en l’espèce le restaurant …, cette exigence implique l’indication exacte de la forme juridique de l’entité requérante ceci notamment afin de vérifier les conditions tenant à l’existence d’une personnalité juridique autonome, susceptible d’agir en justice.

Les parties demanderesses n’ayant pas autrement pris position par rapport à ce moyen d’irrecevabilité à travers un mémoire en réplique, ni encore fourni en cause des éléments permettant de suppléer à la carence afférente signalée par le délégué du Gouvernement, le recours est irrecevable pour autant qu’introduit par le restaurant ….

Aucun recours au fond n’étant prévu en la matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit par Monsieur … qui est également recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur fait exposer que le restaurant exploité par Monsieur… est spécialisé dans la cuisine chinoise et que toutes les démarches entreprises par Monsieur… auprès de l’administration de l’Emploi luxembourgeoise (ADEM) afin de se voir proposer un cuisinier chinois seraient restées vaines sur une durée relativement longue.

Il estime que dans la mesure où aucun cuisinier n’aurait été proposé à Monsieur… par l’ADEM, la décision litigieuse constituerait non seulement une position ministérielle non-conforme aux textes de loi internes, mais encore une grave violation de la liberté du commerce, étant donné qu’elle aurait pour effet de mettre gravement en cause la viabilité économique du restaurant concerné.

Quant au fond le délégué du Gouvernement relève notamment que suite à la déclaration d’une vacance de poste pour un cuisinier chinois, l’ADEM aurait précisément assigné un cuisinier chinois, à savoir un dénommé Monsieur … , mais que l’intéressé n’aurait cependant pas été engagé au motif qu’il habiterait trop loin de son lieu de travail.

Estimant qu’il n’appartiendrait pas à l’employeur d’apprécier si un demandeur d’emploi habite trop loin du lieu de travail surtout si ce dernier peut faire valoir un droit à une aide à la mobilité géographique, le représentant étatique fait valoir que ce serait à tort que le demandeur soutient que tous les moyens à la disposition de son employeur potentiel en vue de permettre l’embauche d’un salarié apte à répondre à ses besoins spécifiques auraient été épuisés. Il est au contraire d’avis que l’employeur n’aurait pas eu l’intention d’engager un demandeur d’emploi disponible sur place, ceci d’autant plus qu’il aurait signé un contrat de travail avec le demandeur… une semaine seulement après la déclaration de la vacance de poste, alors qu’un tel délai serait manifestement insuffisant pour permettre à l’ADEM de procéder utilement à des assignations de demandeurs d’emploi.

Conformément à l’article 27 de la loi précitée du 28 mars 1972 « l’octroi et le renouvellement du permis de travail peuvent être refusés aux travailleurs étrangers pour des raisons inhérentes à la situation, à l’évolution ou à l’organisation du marché de l’emploi », de sorte que l’autorité investie du pouvoir respectivement d’octroyer et de renouveler le permis de travail, a la faculté de le refuser en raison de considérations tirées des impératifs dérivant du marché de l’emploi du point de vue notamment de sa situation, de son évolution et de son organisation et ceci en vue de la protection sociale aussi bien des travailleurs désirant occuper un emploi au Grand-Duché que des travailleurs déjà occupés dans le pays (v. trav. parl. relatifs au projet de loi n° 2097, exposé des motifs, p.2) .

En l’espèce, la référence à la situation et à l’organisation du marché de l’emploi, étayée suivant le mémoire en réponse en ce que plus particulièrement un cuisinier chinois disponible sur le marché de l’emploi national, en l’occurrence le sieur ZHANG, a été assigné à l’exploitant du restaurant …, se justifie donc, en principe, face au désir de l’employeur d’embaucher un travailleur à recruter dans un pays tiers.

Par rapport à une vacance de poste, non contestée en l’espèce, il appartient au ministre d’établir, in concreto, la disponibilité sur place de personnes bénéficiant d’une priorité à l’embauche, susceptibles d’occuper le poste vacant, en prenant notamment en considération leur aptitude à pouvoir exercer le travail demandé.

En l’espèce il se dégage des informations fournies en cause par le délégué du Gouvernement à travers son mémoire en réponse et non utilement contestées par le demandeur que contrairement à la présentation des faits à la base de la requête introductive d’instance, l’exploitant du restaurant chinois … s’est vu assigner pour le moins un candidat potentiel par l’ADEM pour occuper le poste déclaré vacant de cuisinier chinois, de sorte qu’en l’absence de prise de position utile de la part du demandeur permettant d’établir que la personne concernée n’était pas apte à occuper le poste concerné étant donné que le motif invoqué qu’il habiterait trop loin de son lieu de travail ne constitue pas un motif valable, le tribunal est amené à constater que le ministre a valablement pu refuser la délivrance d’un permis de travail au bénéfice de Monsieur … sur base du seul motif tenant à l’existence de demandeurs d’emploi appropriés disponibles sur place.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé sans qu’il y ait lieu d’examiner plus en avant les autres motifs de refus ainsi que les moyens afférents formulés en cause par le demandeur.

PAR CES MOTIFS Le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours irrecevable pour autant qu’introduit par le restaurant « … » ;

reçoit le recours en annulation en la forme pour le surplus ;

au fond le dit non justifié et en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais ;

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 3 novembre 2003 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16263
Date de la décision : 03/11/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-11-03;16263 ?

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