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31/10/2003 | LUXEMBOURG | N°16864C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 00 novembre 2003, 16864C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 16864 C Inscrit le 8 août 2003 —————————————————————————————————————— AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI 20 NOVEMBRE 2003 Recours formé par … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié (jugement entrepris du 9 juillet 2003)  Vu la requête déposée le 8 août 2003 par laquelle Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, insc

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GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 16864 C Inscrit le 8 août 2003 —————————————————————————————————————— AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI 20 NOVEMBRE 2003 Recours formé par … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié (jugement entrepris du 9 juillet 2003)  Vu la requête déposée le 8 août 2003 par laquelle Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, a relevé appel au nom de …, né le …, de nationalité yougoslave, demeurant à L-…, contre le ministre de la Justice d’un jugement rendu le 9 juillet 2003 par le tribunal administratif dans la cause inscrite sous le numéro 15671 du rôle;

vu le mémoire en réponse déposé le 19 août 2003 par le délégué du Gouvernement;

vu les pièces régulièrement versées et notamment les décisions critiquées, ainsi que le jugement entrepris;

ouï le conseiller en son rapport ainsi que Maître Louis TINTI et le Délégué du gouvernement, Monsieur Jean-Paul REITER, en leurs plaidoiries.

 Par requête, inscrite sous le numéro 15671 du rôle, déposée le 29 novembre 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, …, né le … (Kosovo), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, a demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 5 juin 2002 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision implicite de rejet de son recours gracieux du 29 juillet 2002.

Le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement en date du 9 juillet 2003, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 8 août 2003.

L’appelant reproche aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause, alors qu’il a des origines serbes et qu’il serait de ce fait soumis à de nombreuses exactions commises au Kosovo à l’encontre de ceux qui ne sont pas albanais.

Le délégué du gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 19 août 2003 dans lequel il demande la confirmation du jugement entrepris.

La Cour estime, sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux premiers juges, que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

C’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition du 27 mai 2002, telles que celles-ci ont été relatées dans les comptes rendus figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments développés au cours des procédures gracieuse et contentieuse ainsi que les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur ne fait pas état à suffisance de droit de raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de leurs convictions et activités politiques, ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, le demandeur fait état de sa crainte de voir commettre des actes de violence à son encontre par des Albanais du Kosovo et estime que la crainte 2 afférente pourrait être reconnue comme motif d’octroi du statut de réfugié politique au vu de la situation instable et non sécurisée au Kosovo.

Force est dès lors de constater que le demandeur se prévaut d’actes de persécution émanant non pas des autorités publiques, mais de personnes privées. Or, s’agissant ainsi d’actes émanant de certains groupements de la population, une persécution commise par des tiers peut être considérée comme fondant une crainte légitime de persécution au sens de la Convention de Genève uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités publiques pour l’un des motifs énoncés par ladite Convention et dont l’existence doit être mise suffisamment en évidence par le demandeur d’asile.

En outre, la notion de protection de la part du pays d’origine de ses habitants contre des agissements de groupes de la population n’implique pas une sécurité physique absolue des habitants contre la commission de tout acte de violence, et une persécution ne saurait être admise dès la commission matérielle d’un acte criminel (cf. Jean-Yves Carlier : Qu’est-ce-qu’un réfugié ?, Bruylant, 1998, p.

113, nos 73-s). Pareillement, ce n’est pas la motivation d’un acte criminel qui est déterminante pour ériger une persécution commise par un tiers en un motif d’octroi du statut de réfugié, mais l’élément déterminant à cet égard réside dans l’encouragement ou la tolérance par les autorités en place, voire l’incapacité de celles-ci d’offrir une protection appropriée.

Or, l’actuel appelant a simplement affirmé une situation non suffisamment sécurisée pour permettre son retour sans soumettre le moindre indice concret de l’incapacité, encore à l’heure actuelle, des autorités compétentes de lui fournir une protection adéquate, voire alléguer une démarche concrète en vue d’obtenir la protection de la part des autorités en place. Il en résulte que le demandeur n’a pas dûment établi l’incapacité des autorités en place de lui assurer une protection adéquate.

S’y ajoute qu’il n’a fait état, ni lors de son audition, ni dans le cadre de son recours contentieux, d’un quelconque acte concret pour étayer sa crainte d’actes de persécution, de manière que celle-ci s’analyse en un sentiment général de peur sans que le demandeur n’ait établi un indice concret de persécution à son encontre.

Il suit de ce qui précède que l’appelant n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève, susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef, et que le jugement du 9 juillet 2003 est à confirmer, l’acte d’appel n’étant pas fondé.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement ;

reçoit l’acte d’appel du 8 août 2003 ;

le dit non fondé et en déboute ;

3 partant confirme le jugement entrepris du 9 juillet 2003 dans toute sa teneur ;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par Georges Kill, président Jean-Mathias Goerens, premier conseiller Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur et lu par le président Georges Kill en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

le greffier en chef le président 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16864C
Date de la décision : 31/10/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-11-00;16864c ?

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