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22/10/2003 | LUXEMBOURG | N°13431

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 octobre 2003, 13431


Numéro 13431 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 mai 2001 Audience publique du 22 octobre 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 13431 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 mai 2001 par Maître Claude WASSENICH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l

’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le… , de nationalité yougoslav...

Numéro 13431 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 mai 2001 Audience publique du 22 octobre 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 13431 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 mai 2001 par Maître Claude WASSENICH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le… , de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 19 décembre 2000 lui refusant l’entrée et le séjour sur le territoire du Grand-

Duché de Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Claude WASSENICH en sa plaidoirie aux audiences publiques des 29 septembre et 20 octobre 2003.

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Dans le cadre d’une demande en obtention d’une autorisation de séjour provisoire pour conjoint étranger, le ministre de la Justice s’était adressé à l’épouse de Monsieur … par courrier du 7 octobre 1999 pour solliciter plus particulièrement la remise d’une déclaration de prise en charge, non limitée dans le temps, précisant qu’elle prendra en charge tous frais de rapatriement du conjoint, au cas où après respectivement un, deux et trois ans après la célébration du mariage, il n’y aurait plus de communauté de vie et le conjoint ne disposerait pas de moyens personnels suffisants pour supporter ses frais de séjour ou de rapatriement, ceci sous la précision qu’un dossier incomplet ne serait pas pris en considération. L’épouse de Monsieur … n’ayant pas complété le dossier de demande en ce sens et le couple s’étant entre-

temps séparé, l’Association de Soutien aux Travailleurs Immigrés (ASTI) s’adressa au ministre de la Justice pour compte de Monsieur … par courrier du 8 février 2000 pour solliciter l’octroi dans son chef d’une autorisation de séjour pour raisons humanitaires, au motif que depuis l’introduction d’une demande en divorce par l’épouse de Monsieur … en août 1999 celui-ci serait sans domicile fixe et se verrait dans l’obligation de dormir à gauche et à droite dans des conditions insupportables. Il est précisé dans ledit courrier que Monsieur … « souhaite acquérir une autorisation de séjour afin de pouvoir mener une vie conforme à la dignité humaine et de pouvoir revoir son fils qu’il n’a plus revu depuis des mois ».

Par courrier datant du 18 décembre 2000 le ministre de la Justice prit position comme suit part rapport à cette demande :

« Suite à un réexamen de votre dossier, j’ai dû constater que vous êtes séparé de votre épouse et que la communauté de vie n’existe donc plus.

Pour le surplus, je constate que vous n’êtes pas en possession de moyens d’existence personnels légalement acquis vous permettant d’assurer votre séjour indépendamment de l’aide matérielle ou des secours financiers que de tierces personnes pourraient vous faire parvenir, tel que prévu à l’article 2 de la loi du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers .

Vu ce qui précède, je suis au regret de vous informer que je ne suis pas en mesure de vous accorder une autorisation de séjour. (…) » Le lendemain, 19 décembre 2000, le ministre de la Justice prit un arrêté de refus d’entrée et de séjour à l’encontre de Monsieur … aux motifs suivant :

« - défaut de moyens d’existence personnels ;

- séjour irrégulier au pays. » Par courrier datant du 8 mai 2001 Monsieur … s’adressa une nouvelle fois au ministre de la Justice pour lui soumettre un élément nouveau susceptible à son avis de faire revenir le ministre sur ses deux décisions de refus initiales des 18 et 19 décembre 2000, en l’occurrence un contrat de travail signé le 24 avril 2001 entre Monsieur … et la société à responsabilité limitée… , en faisant valoir qu’avec sa situation nouvelle il serait à même de subvenir lui-

même à ses propres besoins ainsi qu’aux besoins de son enfant, issu de son mariage, par le paiement d’une pension alimentaire.

Le ministre confirma ses décisions des 18 et 19 décembre 2000 par courrier du 9 mai 2001. Par ce même courrier le ministre informa le mandataire de Monsieur … de ce qui suit :

« Etant donné que l’intéressé fut demandeur d’asile avant le 1er juillet 1998 et qu’il a signé un contrat de travail en date du 24 avril 2001, je me permets de vous informer que l’intéressé peut déposer, dans les meilleurs délais, une demande de régularisation de sa situation auprès du service commun du ministère du Travail, du ministère de la Justice et du ministère de la Famille, 5, rue Guillaume Kroll, L-1882 Luxembourg (cloche d’Or), sans préjudice des suites qui y seront réservées. » Par requête déposée en date du 10 mai 2001, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant à l’annulation des décisions ministérielles prévisées des 18 et 19 décembre 2000.

A la suite d’un courrier adressé en date du 26 juillet 2001 par le délégué du Gouvernement au mandataire de Monsieur … pour suggérer que le recours en question risquerait d’être sans objet en cas de réponse positive à la demande de régularisation présentée par l’intéressé, l’affaire fut mise au rôle général en attendant une décision sur la demande en régularisation, ceci d’un commun accord entre parties.

Par courrier du 18 juin 2003, le mandataire de Monsieur … a demandé au tribunal de reproduire le rôle pour plaidoiries, faute de suite réservée à la demande en régularisation introduite.

Aucun recours au fond n’étant prévu en la matière le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit. Ledit recours est également recevable pour avoir introduit dans les formes et délai de la loi.

Le demandeur critique les décisions litigieuses par rapport au motif retenu basé sur l’irrégularité de son séjour au pays en faisant valoir que le caractère irrégulier de sa situation serait imputable à son épouse, laquelle aurait manifestement dû compléter le formulaire de prise en charge qui lui avait été envoyé par le ministère de la Justice afin de permettre la régularisation de la situation de son mari. Il se réfère en outre à ses démarches entreprises par l’intermédiaire de l’ASTI afin de régulariser sa situation pour soutenir que dans ces conditions, l’irrégularité de son séjour, dût-elle être retenue, ne pourrait être mise à sa charge.

Quant au défaut de moyens d’existence personnels lui reproché, il se réfère à son courrier du 8 mai 2001 par lequel il a porté à la connaissance du ministre l’existence d’un contrat de travail par lui conclu en date du 24 avril 2001 aux termes duquel il a été engagé à partir du 14 avril 2001 en qualité de manœuvre, pour une durée hebdomadaire de travail de 40 heures avec un salaire brut horaire alors fixé à 340 LUF.

Même si l’Etat, auquel le recours sous examen fut notifié par la voie du greffe en date du 9 mai 2001, n’a pas produit de mémoire en réponse dans le délai légal, le tribunal est appelé à statuer contradictoirement, ceci conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

L’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : – qui est dépourvu de papiers de légitimation prescrits, et de visa si celui-ci est requis, – qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Au vœu de l’article 2 précité, une autorisation de séjour peut dès lors être refusée notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (cf. trib. adm. 17 février 1997, n° 9669, Pas. adm. 2002, v° Etrangers, n° 121 et autres références y citées).

En outre, la seule preuve de la perception de sommes, en principe suffisantes pour permettre à l'intéressé d'assurer ses frais de séjour au pays, est insuffisante; il faut encore que les revenus soient légalement perçus (cf. trib. adm. 15 avril 1998, n° 10376 du rôle, Pas. adm 2002, v° Etrangers, n° 125). Ne remplissent pas cette condition les revenus perçus par un étranger qui occupe un emploi alors qu'il n'est pas en possession d'un permis de travail et qu'il n'est dès lors pas autorisé à occuper un emploi au Grand-Duché de Luxembourg et à toucher des revenus provenant de cet emploi (cf. trib. adm. 30 avril 1998, n° 10508 du rôle, Pas. adm 2002, v° Etrangers, n° 125 et autres références y citées).

En l’espèce, force est de constater qu’il ne se dégage ni des éléments du dossier, ni des renseignements qui ont été fournis au tribunal que le demandeur était, à la date de la décision ministérielle attaquée, autorisé à travers un permis de travail à occuper un poste de travail au Grand-Duché et qu’il pouvait partant disposer de moyens personnels propres suffisants et légalement acquis.

En l’absence de toutes précisions apportées en cours d’instance sur des raisons d’ordre humanitaire qui seraient le cas échéant de nature à justifier l’octroi d’une autorisation de séjour dans le chef du demandeur et à emporter l’annulation de la décision ministérielle déférée du 18 décembre 2000 sur cette base, le recours laisse partant d’être fondé quant à ce volet.

La même conclusion s’impose relativement à l’arrêté ministériel déféré du 19 décembre 2000.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 22 octobre 2003 par:

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, M. Thomé, juge, en présence de M. SCHMIT, greffier en chef.

s. SCHMIT S. LENERT 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 13431
Date de la décision : 22/10/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-10-22;13431 ?

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