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20/10/2003 | LUXEMBOURG | N°16275

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 20 octobre 2003, 16275


Tribunal administratif Numéro 16275 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 avril 2003 Audience publique du 20 octobre 2003 Recours formé par Madame …, … contre une décision prise par le ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16275 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 avril 2004 par Maître Marianne RAU, avocat à la Cour, assistée de Maître Saskia KONSBRUCK, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …

, de nationalité cap-verdienne, demeurant actuellement ensemble avec sa fille mineure…...

Tribunal administratif Numéro 16275 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 avril 2003 Audience publique du 20 octobre 2003 Recours formé par Madame …, … contre une décision prise par le ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16275 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 avril 2004 par Maître Marianne RAU, avocat à la Cour, assistée de Maître Saskia KONSBRUCK, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, de nationalité cap-verdienne, demeurant actuellement ensemble avec sa fille mineure… , née le … à Luxembourg, à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 25 juin 2002, lui notifiée le 14 janvier 2003, par laquelle l’entrée et le séjour au Grand-Duché de Luxembourg lui ont été refusés ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 2 juillet 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Saskia KONSBRUCK et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 13 octobre 2003.

Madame … déclare être arrivée au Luxembourg le 10 janvier 2000 et bénéficia d’une carte d’identité d’étranger en tant que ressortissante communautaire grâce à une carte d’identité portugaise qui se révéla falsifiée.

Le 23 mai 2001, elle fit l’objet d’un procès-verbal pour usage de documents d’identité portugais falsifiés.

Le 25 juin 2002, le ministre de la Justice prit une décision de refus d’entrée et de séjour libellée de façon suivante : « Art. 1er. L’entrée et le séjour sont refusés à …, née le …, de nationalité cap-verdienne, demeurent à L-….

L’intéressée devra quitter le pays dès notification du présent arrêté.

Motif :

- usage de pièces d’identité et de voyage falsifiés ;

- défaut de moyens d’existence personnels ;

- constitue par son comportement personnel un danger pour l’ordre public ;

(…) ».

Cette décision de refus d’entrée et de séjour fut notifiée à Madame … en personne le 14 janvier 2003.

Le 11 avril 2003, Madame … a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation contre la décision ministérielle de refus du 25 juin 2002.

Aucun recours au fond n’étant prévu en la matière, le tribunal n’est pas compétent pour connaître du recours principal en réformation. Le recours en annulation introduit à titre subsidiaire ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Madame … fait valoir qu’elle serait venue au Luxembourg en décembre 1998, qu’elle aurait fait connaissance de Monsieur…, travaillant et demeurant régulièrement au Luxembourg, et que de cette relation est issue … ,née le … à Luxembourg. Elle ajoute que leur relation est rompue depuis décembre 2002, mais qu’elle entretiendrait néanmoins de bonnes relations avec le père de son enfant. Elle précise qu’elle élève seule son enfant, mais qu’il y aurait une prise en charge minime du père.

Quant au motif invoqué du défaut de moyens d’existence personnels, elle expose qu’elle aurait occupé un travail comme serveuse dans un restaurant à partir de mars 2002, qu’elle aurait bénéficié d’une indemnité de congé de maternité et que depuis le 1er octobre 2002 elle bénéficierait également d’allocations familiales. Elle ajoute qu’elle se verrait également attribuer une allocation de la commune de Mersch de 800 € et ce jusqu’en mai 2003. Elle verse des extraits de compte couvrant la période de fin novembre 2002 à début mars 2003, desquels il résulte qu’elle dispose d’un solde créditeur sur son compte variant entre 6000 et 8000 € environ.

L’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-

d’œuvre étrangère, dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger:

- …, - qui est susceptible de compromettre la sécurité, la tranquillité, l’ordre ou la sécurité publics, - qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Au vœu de l’article 2 précité, l’entrée et le séjour au Grand-Duché de Luxembourg pourront dès lors être refusés notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (trib. adm. 17 février 1997, Pas. adm. 2002, V° Etrangers, sous Autorisations de séjour – Expulsions, n° 121 et autres références y citées, p. 149).

Etant donné que l’article 26 de la loi du 28 mars 1972 précitée dispose qu’ « aucun travailleur étranger ne pourra être occupé sur le territoire du Grand-

Duché sans permis de travail », il s’ensuit que l’étranger n’étant pas en possession d’un permis de travail et n’étant dès lors pas autorisé à occuper un emploi au Grand-

Duché de Luxembourg et à toucher des revenus provenant de cet emploi, ne justifie pas des moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour.

En l’espèce, force est de constater qu’il ne se dégage ni des éléments du dossier, ni des renseignements qui ont été fournis au tribunal que Madame … était, à la date de la décision ministérielle attaquée, autorisée à travers un permis de travail à occuper un poste de travail au Grand-Duché, voire s’adonnait à une activité indépendante, et qu’elle pouvait partant disposer de moyens personnels suffisants.

C’est partant à juste titre que le délégué du Gouvernement relève que le travail de serveuse mis en avant par la demanderesse est un travail exercé sans permis de travail valable, donc en infraction à la loi du 28 mars 1972.

Pour le surplus la demanderesse reste en défaut d’apporter la preuve qu’elle serait capable de subvenir à ses besoins par d’autres moyens que par le travail. A ce titre le ministre a valablement pu estimer que l’épargne de Madame …, de même que les allocations familiales, dont le versement n’est d’ailleurs étayé par aucune pièce, ne sauraient suffire pour retenir que la demanderesse dispose de moyens personnels suffisants pour subvenir à ses besoins.

Etant donné que la décision déférée du ministre de la Justice se justifie par ce seul motif, l’analyse des autres motifs de refus et des moyens présentés y relatifs devient surabondant.

La demanderesse invoque encore une violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et de l’article 9 de la Convention relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989 en ce que la décision déférée porterait atteinte à sa vie privée et familiale et ne respecterait pas les intérêts supérieurs de son enfant née le 22 octobre 2002.

Lorsque le juge administratif est saisi d’un recours en annulation, il lui appartient d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, ainsi que de vérifier si les éléments de fait dûment établis sont de nature à motiver légalement la décision attaquée. Pour faire cette analyse, le juge se place au jour où la décision a été prise.

Etant donné qu’il est constant en cause que l’enfant … est née le 22 octobre 2002, donc après la décision du ministre de la Justice du 25 juin 2002, on ne saurait reprocher au ministre de n’avoir pas pris en considération les intérêts de l’enfant.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le ministre de la Justice, au vu des faits qui lui ont été soumis au moment de la prise de la décision, a pu prendre la décision actuellement litigieuse, de sorte que le recours introduit contre celle-ci est à rejeter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit non justifié et en déboute ;

condamne la demanderesse aux frais, Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 20 octobre 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16275
Date de la décision : 20/10/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-10-20;16275 ?

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