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20/10/2003 | LUXEMBOURG | N°16227

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 20 octobre 2003, 16227


Tribunal administratif Numéro 16227 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 avril 2003 Audience publique du 20 octobre 2003 Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16227 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 4 avril 2003 par Maître François DELVAUX, avocat à la Cour, assisté de Maître Lionel SPET, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … (Ré

publique Démocratique du Congo), de nationalité congolaise, demeurant à L-…, tendant à la ...

Tribunal administratif Numéro 16227 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 avril 2003 Audience publique du 20 octobre 2003 Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16227 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 4 avril 2003 par Maître François DELVAUX, avocat à la Cour, assisté de Maître Lionel SPET, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … (République Démocratique du Congo), de nationalité congolaise, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 6 mars 2003 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 juin 2003 ;

Vu le mémoire en réplique de Maître François DELVAUX déposé au greffe du tribunal administratif le 16 juillet 2003 au nom de Madame … ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en sa plaidoirie à l’audience publique du 13 octobre 2003.

Le 19 septembre 2001, Madame … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour elle fut entendue par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 12 mars 2002, elle fut entendue par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 6 mars 2003, envoyée par lettre recommandée le 12 mars 2003, le ministre de la Justice confirma, suite au recours gracieux du 9 janvier 2003, sa décision de refus du 10 décembre 2002 informant Madame … de ce que sa demande était refusée comme non fondée au motif qu’elle n'invoquerait aucune crainte raisonnable de persécution du fait de ses opinions politiques, de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de son appartenance à un groupe social.

Le 4 avril 2003, Madame … a fait déposer au greffe du tribunal administratif un recours en réformation, sinon en annulation contre la décision ministérielle du 6 mars 2003.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le recours en réformation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi est recevable. Le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est par conséquent irrecevable.

Quant au fond, Madame … fait valoir qu’elle aurait été la compagne d’un dénommé … depuis juillet 1997 et qu’en date du 2 au 3 janvier 2001, elle-même et sa sœur se seraient trouvées au domicile de son compagnon, lorsque soudainement une troupe de militaires armés serait venue et qu’elles auraient été arrêtées. Elle fait valoir qu’à l’appui de cette arrestation, les autorités congolaises auraient excipé du fait que … serait soupçonné d’être complice de l’attentat à l’encontre du président … et qu’elle-même et sa sœur seraient considérées comme complices dudit attentat. Elle expose qu’elle-même et sa sœur auraient été incarcérées pendant 10 jours puis relâchées pour être de nouveau arrêtées au domicile de … par des militaires en date du 7 janvier 2001. Elle ajoute qu’au cours de cette deuxième arrestation les autorités congolaises auraient retrouvé des armes au domicile de … les confortant dans leur idée que ce dernier serait complice de l’attentat préparé à l’encontre du président …. Elle précise que lors de cette deuxième arrestation elle même et sa sœur auraient été emmenées dans un camp militaire à Ngaliema, qu’elles auraient été incarcérées dans une cellule sans fenêtre et nourries seulement tous les trois jours, qu’elles auraient subi de nombreux interrogatoires violents et des maltraitances tant physiques que sexuelles. Elle termine qu’après plusieurs mois d’incarcération une personne inconnue aurait réussi à les faire sortir de ce camp militaire début avril 2001 et qu’elles auraient été conduites dans une maison entre Kinshasa et le Bas-

Congo et qu’après y avoir séjourné pendant un mois elles auraient quitté le pays pour venir au Luxembourg.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation de la demanderesse et que le recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne. Dans ce contexte, il convient encore de préciser que le tribunal est appelé, dans le cadre d'un recours en réformation, à apprécier le bien-fondé et l'opportunité d'une décision entreprise en tenant compte de la situation existant au moment où il statue.

L’examen des déclarations faites par Madame … lors de son audition ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que la demanderesse reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet les seuls éléments dont la demanderesse fait état sont les deux arrestations ayant eu lieu en janvier 2001. En ce qui concerne ces deux arrestations, même à les supposer établies, force est de constater que la demanderesse reste en défaut d’établir, voire d’alléguer qu’elles auraient été motivées par des considérations tenant à sa race, sa religion, sa nationalité, son appartenance à un certain groupe social ou ses opinions politiques.

En plus la demanderesse reste en défaut de soumettre au tribunal un élément concret lui permettant de retenir qu’un retour dans son pays lui serait encore à l’heure actuelle impossible, étant donné que les arrestations ont eu lieu en 2001. A cela s’ajoute que le récit de la demanderesse est vague et non autrement circonstancié, de sorte que le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, déclare le recours en annulation irrecevable, condamne la demanderesse au frais.

Ainsi jugé par et prononcé à l’audience publique du 20 octobre 2003 :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 3


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16227
Date de la décision : 20/10/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-10-20;16227 ?

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