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16/10/2003 | LUXEMBOURG | N°16271

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 octobre 2003, 16271


Numéro 16271 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 avril 2003 Audience publique du 16 octobre 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16271 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 avril 2003 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau

de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, de nationalité youg...

Numéro 16271 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 avril 2003 Audience publique du 16 octobre 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16271 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 avril 2003 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 13 janvier 2003, par laquelle il n’a pas été fait droit à sa demande en obtention du statut de tolérance, voire d’une autorisation de séjour pour raisons humanitaires introduite en date du 12 décembre 2001 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 3 juillet 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

Par courrier du 12 décembre 2001, Monsieur … s’adressa au ministre de la Justice par l’intermédiaire de son mandataire pour solliciter l’octroi d’une autorisation de séjour pour des raisons humanitaires sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg, sinon l’octroi du statut de tolérance prévu par la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, ceci au motif qu’il nécessiterait des soins médicaux sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg, étant donné qu’il souffrirait d’une sclérose en plaques, la demande afférente ayant été accompagnée d’un certificat médical établi par le Dr. C. B. en date du 25 septembre 2001 aux termes duquel « cette maladie chronique dégénérative nécessite une prise en charge spécialisée, ainsi qu’un traitement médicamenteux afin d’éviter un handicap rapide et irréversible. Le traitement ne peut évidemment pas être suivi ou prescrit dans des pays de l’ancienne Yougoslavie, notamment le Monténégro, et il est donc fortement conseillé de ne pas renvoyer le patient dans son pays d’origine pour cause médicale, pour lui permettre un traitement adapté à sa maladie chronique. » Cette demande n’ayant pas fait l’objet d’une décision de la part du ministre, Monsieur … a fait introduire, par requête déposée en date du 30 avril 2002, un recours contentieux tendant à l’annulation de la décision implicite de rejet de sa demande se dégageant du silence observé par le ministre pendant un délai de plus de trois mois suite à l’introduction de sa demande en date du 12 décembre 2001.

Suivant jugement du tribunal administratif du 6 novembre 2002, la décision implicite de rejet a été annulée pour défaut de motivation et le dossier fut renvoyé devant le ministre de la Justice.

Le ministre de la Justice informa le mandataire de Monsieur …, par lettre du 13 janvier 2003, que la demande avait été rejetée. Ladite décision de rejet est motivée comme suit :

« Je suis cependant amené à constater que votre mandant ne dispose pas de moyens d’existence personnels suffisants conformément à l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers.

Par ailleurs, je suis amené à constater que votre mandant ne fait pas état de raisons humanitaires justifiant une autorisation de séjour au Luxembourg.

Par conséquent, je ne suis pas en mesure de réserver une suite favorable à votre demande ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 avril 2003, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 13 janvier 2003.

Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur estime que la décision attaquée doit encourir l’annulation, étant donné qu’il lui serait impossible de retourner dans son pays d’origine en raison de son état de santé tel que ressortant du certificat du Dr. C. B. du 25 septembre 2001, diagnostiquant une sclérose en plaques. En effet, le demandeur estime remplir les conditions posées par l’article 13 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, étant donné que son éloignement aurait des conséquences « d’une portée disproportionnée par rapport au but qui pourrait être légitimement poursuivi par l’autorité administrative ». Le demandeur estime encore que le refus d’octroi d’une autorisation de séjour respectivement d’un statut de tolérance serait contraire à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme et à l’article 14 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, étant donné qu’un éloignement vers son pays d’origine mettrait sa vie en danger. Finalement, le demandeur conclut à la violation du principe de l’égalité des administrés devant la loi, étant donné qu’un certain nombre de personnes, qui se seraient trouvées dans la même situation, auraient été régularisées dans le cadre de la procédure de régularisation lancée par le gouvernement au courant de l’année 2001.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de recours. A l’appui de sa conclusion, il soutient qu’il ne serait pas établi que le demandeur serait effectivement atteint d’une sclérose en plaques et, dans l’affirmative, que celle-ci ne pourrait pas être soignée dans le pays d’origine de Monsieur …. Pour le surplus, il ressortirait de l’avis du contrôle médical de la Sécurité sociale, établi dans le cadre d’une procédure de rapatriement, du 19 août 2002 que Monsieur … ne présenterait pas de pathologie médicale empêchant le rapatriement dans son pays d’origine.

Il est constant en cause que la demande de Monsieur … a été analysée tout d’abord au regard des dispositions de la loi modifiée du 28 mars 1972, précitée.

L’article 2 de ladite loi du 28 mars 1972 dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : - qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Au vœu de l’article 2 précité, une autorisation de séjour peut dès lors être refusée notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers.

En l’espèce, force est de constater qu’il ne se dégage ni des éléments du dossier ni des renseignements qui ont été fournis au tribunal, que le demandeur était, à la date de la décision ministérielle attaquée, autorisé à travers un permis de travail à occuper un poste de travail au Grand-Duché, voire à s’adonner à une activité indépendante, et qu’il pouvait partant disposer de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour.

A défaut par le demandeur d’avoir rapporté la preuve de l’existence de moyens personnels, le ministre de la Justice a dès lors valablement pu refuser l’autorisation de séjour sollicitée sur base de ce motif.

Il convient ensuite d’analyser les motifs ayant amené le ministre à ne pas reconnaître l’existence de raisons humanitaires de nature à justifier la délivrance d’une autorisation de séjour respectivement la reconnaissance d’un statut de tolérance au profit de Monsieur ….

Il ressort plus particulièrement du certificat médical du docteur C. B. du 25 septembre 2001 que le demandeur souffre d’une première manifestation de la sclérose en plaques et qu’il est « donc fortement conseillé de ne pas renvoyer le patient dans son pays d’origine pour cause médicale ». Il ressort encore d’un certificat médical du 10 décembre 2001 du docteur C.B. qu’un renvoi du demandeur dans son pays d’origine « semble au vu des données cliniques une condamnation à une invalidité précoce et grave ».

Lorsque le juge administratif est saisi d’un recours en annulation, il a le droit et l’obligation d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, ainsi que de vérifier si les éléments de fait dûment établis sont de nature à motiver légalement la décision attaquée.

En l’espèce, il échet de constater que les certificats préindiqués du docteur C. B.

sont de nature à diagnostiquer une sclérose en plaques chez le demandeur, qui n’a cependant pas connu d’évolution dans le sens d’une aggravation pendant deux ans, tel que confirmé par le mandataire du demandeur, de sorte qu’il n’est pas établi à suffisance de droit à partir des éléments fournis en cause que l’état de santé de Monsieur … serait compromis en cas de retour au Monténégro, fait d’ailleurs confirmé par l’avis du contrôle médical du 19 août 2002, certifiant que le demandeur ne présente pas de pathologie médicale empêchant le rapatriement dans son pays d’origine.

Dans ce contexte, le reproche tiré de la violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme et de l’article 14 de la loi modifiée du 28 mars 1972 manque en fait, étant donné qu’il ne ressort d’aucun élément du dossier que le rapatriement du demandeur vers le Monténégro mettrait la vie du demandeur en danger. Il en est de même de la prétendue violation du principe de l’égalité des administrés devant la loi, étant donné que le demandeur est resté en défaut d’établir que des personnes qui se seraient trouvées dans la même situation auraient été régularisées dans le cadre de la procédure dite de régularisation lancée par le gouvernement au courant de l’année 2001.

Il suit des considérations qui précèdent que la décision ministérielle du 13 janvier 2003 refusant au demandeur la délivrance d’une autorisation de séjour est légalement fondée et que le demandeur est à débouter de son recours introduit contre ladite décision.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit non justifié ;

partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 16 octobre 2003 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 16271
Date de la décision : 16/10/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-10-16;16271 ?

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