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02/10/2003 | LUXEMBOURG | N°16043

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 02 octobre 2003, 16043


Tribunal administratif N° 16043 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 février 2003 Audience publique du 2 octobre 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 16043 du rôle et déposée le 24 février 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Lex THIELEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom

de M. …, né le …, de nationalité yougoslave, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annula...

Tribunal administratif N° 16043 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 février 2003 Audience publique du 2 octobre 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 16043 du rôle et déposée le 24 février 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Lex THIELEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, né le …, de nationalité yougoslave, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre du Travail et de l’Emploi du 18 novembre 2002 portant refus dans son chef d’un permis de travail par lui sollicité en tant que jardinier auprès de la société à responsabilité limitée G., établie à L… ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 22 mai 2003 par le délégué du gouvernement ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 juin 2003 en nom et pour compte du demandeur ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 août 2003 par le délégué du gouvernement ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Cyril CHAPON, en remplacement de Maître Lex THIELEN, et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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Par déclaration datée au 16 juillet 2002, la société à responsabilité limitée G. informa l’administration de l’emploi (« ADEM ») d’une vacance de poste d’un « paysagiste diplômé » pour son site à E. Ladite déclaration précisa qu’un contrat à durée indéterminée à temps complet (40 heures) était proposé avec une rémunération mensuelle brute de 1.700.- euros et, concernant la qualification et la formation requise, elle insiste sur ce que « la personne doit être en possession d’un diplôme de paysagiste (…) [avoir des] connaissances dans la pose de clôtures (…) [et] savoir travailler de façon indépendante ».

Le 2 août 2002, la société à responsabilité limitée G. et M. … introduisirent auprès de l’ADEM une déclaration tenant lieu de demande en obtention d’un permis de travail en faveur de M. … pour un poste de « jardinier » avec une rémunération brute de 8,70 euros par heure et un nombre d’heures de travail de 30 par semaine.

Par arrêté du 18 novembre 2002, le ministre du Travail et de l’Emploi, ci-après dénommé le « ministre », refusa la délivrance d’un tel permis de travail «pour les raisons inhérentes à la situation et à l’organisation du marché de l’emploi suivantes:

- des demandeurs d’emploi appropriés sont disponibles sur place: 1710 ouvriers non-

qualifiés inscrits comme demandeurs d’emploi aux bureaux de placement de l’Administration de l’Emploi (le salaire offert n’est pas celui revenant à un travailleur qualifié) - priorité à l’emploi des ressortissants de l’Espace Economique Européen (E.E.E.) - poste de travail non déclaré vacant par l’employeur ».

Suite à un recours gracieux introduit par le mandataire de M. …, par lettre du 9 décembre 2002, le ministre confirma son refus antérieur par lettre du 5 février 2003.

Le 24 février 2003, M. … a introduit un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de l’arrêté ministériel prévisé du 18 novembre 2002.

Le délégué du gouvernement conclut en premier lieu à l’irrecevabilité du recours en réformation au motif qu’un tel recours ne serait pas prévu en la matière.

Si le juge administratif est saisi d’un recours en réformation dans une matière dans laquelle la loi ne prévoit pas un tel recours, il doit se déclarer incompétent pour connaître du recours (trib. adm. 28 mai 1997, Pas. adm. 2002, V° Recours en réformation, n° 4, et autres références y citées).

En l’espèce, aucune disposition légale ne prévoyant un recours de pleine juridiction contre une décision de refus d’un permis de travail, le tribunal administratif est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal.

Le recours en annulation, introduit en ordre subsidiaire, est cependant recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Au fond, le demandeur reproche en premier lieu au ministre de ne pas avoir précisé de façon circonstanciée, en droit et en fait, les motifs de refus tirés de la prétendue disponibilité concrète de main d’œuvre apte à occuper le poste vacant auprès de la société G.. Dans ce contexte, il relève que le ministre se serait basé sur une disponibilité de 1710 ouvriers non-

qualifiés qui pourraient utilement occuper le poste proposé, alors que ce poste ne serait pas destiné à un ouvrier non qualifié, mais requerrait un travailleur qualifié, en l’occurrence un paysagiste diplômé.

Il soutient encore qu’il serait faux de soutenir que le poste n’aurait pas été déclaré vacant, pareille déclaration ayant été faite en date du 19 juillet 2002 et que faute d’assignation d’un quelconque candidat par l’ADEM, la priorité à l’emploi des ressortissants de l’Espace économique européen ne saurait jouer et il serait en droit d’obtenir le poste vacant.

Il estime en outre que le défaut d’une autorisation de séjour ne constituerait pas un motif de refus d’un permis de travail.

Concernant le motif d’annulation basé sur un défaut d’indication suffisante des motifs, qui est préalable, il y a lieu de relever qu’une obligation de motivation expresse et exhaustive d’un arrêté ministériel de refus d’une autorisation de travail n’est imposée ni par la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main d’œuvre étrangère, ni par le règlement grand-

ducal modifié d’exécution du 12 mai 1972 déterminant les mesures applicables pour l’emploi des travailleurs étrangers sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg, tandis que l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, dispose que toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux et qu’une décision refusant de faire droit à la demande de l’intéressé doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base.

Or, en l’espèce, l’arrêté ministériel déféré du 18 novembre 2002 énonce 3 motifs tirés de la législation sur l’emploi de la main-d’œuvre étrangère et suffit ainsi aux exigences de l’article 6 précité, cette motivation ayant utilement été complétée et explicitée par les mémoires en réponse et en duplique du délégué du gouvernement, de sorte que le demandeur n’a pas pu se méprendre sur la portée à attribuer à la décision litigieuse.

L’existence et l’indication des motifs ayant été vérifiées, il y a lieu d’examiner si lesdits motifs sont de nature à justifier la décision ministérielle déférée, étant relevé qu’une décision administrative individuelle est légalement motivée du moment qu’un des motifs invoqués à sa base la sous-tend entièrement.

En l’espèce, parmi les trois motifs invoqués à la base du refus ministériel déféré figure celui du défaut de déclaration de la vacance de poste.

Dans ce contexte, force est de constater qu’il se dégage des éléments d’appréciation soumis au tribunal que s’il est constant en cause qu’un poste de « paysagiste diplômé » a été déclaré vacant, il appert cependant à l’examen de la déclaration d’engagement de M. … que la société G. a projeté de l’engager comme simple jardinier. C’est-à-dire que le poste déclaré vacant ne semble pas correspondre avec le poste que le demandeur devait occuper. Dans ce contexte, les explications du demandeur tendant notamment à dire que les termes de jardinier et de paysagiste diplômé seraient équivalents pour l’employeur ne sont pas de nature à invalider la conclusion tirée par le ministre sur base de la terminologie employée et la rémunération offerte. Pour soutenir utilement son argumentation, il aurait au contraire appartenu au demandeur de produire la preuve qu’il est effectivement titulaire d’un diplôme de paysagiste. Or, sur question afférente posée au mandataire du demandeur lors des plaidoiries, celui-ci a déclaré ne pas être en mesure de produire pareil document. Dans ces circonstances, on ne saurait reprocher à l’administration d’avoir considéré que le poste réellement à pourvoir n’était pas un poste pour un travailleur qualifié, mais bien pour un travailleur non-qualifié et le motif de refus basé sur un défaut de déclaration du poste vacant est légalement justifié.

Par voie de conséquence, l’arrêté ministériel déféré est légalement justifié par ce seul motif de refus, abstraction faite du caractère pertinent ou non des autres motifs invoqués à sa base, entraînant que l’analyse des moyens proposés y relativement devient surabondante.

Le recours en annulation est partant à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit cependant non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 2 octobre 2003, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 16043
Date de la décision : 02/10/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-10-02;16043 ?

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