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29/09/2003 | LUXEMBOURG | N°16029

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 septembre 2003, 16029


Tribunal administratif N° 16029 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 février 2003 Audience publique du 29 septembre 2003 Recours formé par Madame …, veuve …, … contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt commercial communal

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16029 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 20 février 2003 par Maître Marc

MODERT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Mada...

Tribunal administratif N° 16029 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 février 2003 Audience publique du 29 septembre 2003 Recours formé par Madame …, veuve …, … contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt commercial communal

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16029 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 20 février 2003 par Maître Marc MODERT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, veuve de Monsieur …, …, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 21 novembre 2002 déclarant irrecevable la réclamation introduite par feu son mari relativement aux impositions des années 1992 et 1993 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 20 mai 2003 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 19 juin 2003 par Maître Marc MODERT au nom de Madame … ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment la décision directoriale déférée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Marc MODERT en ses plaidoiries à l’audience publique du 17 septembre 2003.

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Considérant que s’étant vu notifier à la date du 26 janvier 1995 les bulletins de l’impôt sur le revenu et de l’impôt commercial communal des années 1992 et 1993, Monsieur … s’est adressé par courrier recommandé du 13 février 1995 à la direction de l’administration des Contributions en ces termes :

« Messieurs, Par la présente, je me prends la respectueuse liberté de vous demander de m’accorder un délai d’un mois pour rectifier les deux bilans en question, car il y a des écritures à corriger et à ajouter.

Suivant les bulletins d’imposition je vous dois 6.075.930.- frs pour les deux exercices, pour la construction et la vente de deux maisons d’appartements sur mes terrains.

L’acquisition des terrains était en 1978, et dans les bilans 92 et 93 il y a des valeurs de l’infrastructure qui manquent.

De même je vous prie d’annuler les avances à payer pour 95, comme il n’y a plus d’exploitation commerciale cette année.

Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Messieurs, l’assurance de ma parfaite considération » ;

Que cette lettre a été rencontrée par un courrier du directeur de l’administration des Contributions directes, désigné ci-après par « le directeur », du 28 février 1995, libellé comme suit :

« Monsieur, Par lettre du 13 février 1995 vous demandez à la Direction de l’Administration des Contributions de vous accorder un délai pour rectifier vos déclarations d’impôt pour 1992 et 1993 et d’annuler les avances pour 1995.

Tant le retrait d’un bulletin d’impôt endéans le délai contentieux (§ 94 AO) que l’adaptation des avances aux perspectives de l’année en cours (art. 135 LIR) relèvent de la compétence des bureaux d’imposition.

Depuis l’arrêté grand-ducal du 26 octobre 1944 le directeur des contributions assume la juridiction de première instance à l’égard des réclamations contre les bulletins d’impôt comme à l’égard des demandeurs en remise d’impôt ou d’intérêt et vide le contentieux des actes qui sont détachables de la procédure d’imposition, mais ne saurait s’immiscer dans l’administration active.

Quant à la direction, ses divisions et ses membres, il est acquis en jurisprudence (déc.

24.2.1994 C8317) qu’ils n’ont en l’état de la législation aucune attribution ni collégiale ni individuelle qui permette de leur adresser des requêtes ou suppliques.

Vous voudrez donc vous reporter sans tarder devant votre bureau d’imposition, sachant que les cotes et avances fixées resteront exécutoires jusqu’à décision contraire et que ni l’une ni l’autre de vos demandes n’affecteront le cours des délais contentieux.

Veuillez recevoir, Monsieur, l’expression de mes sentiments distingués » ;

Que par courrier du 24 mai 1995 la fiduciaire d’organisation et de révision …. sous la signature de Monsieur … s’est adressée pour compte de Monsieur … au préposé du bureau d’imposition Luxembourg 9 en y déclarant avoir « vérifié certaines écritures comptables relevées dans les livres comptables des années 1992 et 1993 de l’exploitation de M. …, afin de redresser – si nécessaire – le compte d’exploitation et le bilan du 31/12/1992 et au 31/12/1993 », la vérification ayant porté exclusivement sur les comptes y limitativement énumérés ;

Que par décision datée du 21 novembre 2002, le directeur a déclaré la réclamation introduite pour compte de Monsieur … irrecevable ;

Considérant que c’est contre cette décision directoriale que Madame …, veuve …, a fait introduire en date du 20 février 2003 un recours tendant à sa réformation, sinon à son annulation ;

Considérant que la procédure devant les juridictions administratives étant essentiellement écrite, le tribunal est amené à statuer contradictoirement à l’encontre de toutes les parties, y compris l’Etat, même si ce dernier n’était point représenté à l’audience du 17 septembre 2003 à laquelle l’affaire avait été fixée pour plaidoiries et où elle a été plaidée et prise en délibéré ;

Considérant que sur base des dispositions combinées de l’article 8 (3) 1 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et du paragraphe 228 de la loi générale des impôts, dite Abgabenordnung « AO », le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal ;

Considérant que le délégué du Gouvernement se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours dans les formes et dans les délais ;

Considérant que le recours en réformation est recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi ;

Considérant que le recours en annulation formé en ordre subsidiaire est en toute occurrence irrecevable ;

Considérant qu’au fond la demanderesse de critiquer la décision directoriale déférée dans la mesure où elle qualifie la première lettre de feu son mari du 13 février 1995 de requête et non de réclamation et que relativement à l’intervention de la fiduciaire … elle admet « à la rigueur » une réclamation « mais alors uniquement pour constater sa tardiveté » ;

Que la demanderesse d’avancer qu’il n’appartiendrait pas à l’administration de retenir la qualification qui l’arrangerait post festum, mais qu’il s’agirait plutôt, à partir du contenu même des écrits en question, au-delà des mots employés, de dégager la nature juridique s’y rattachant suivant la manifestation de volonté exprimée par le contribuable concerné ;

Que suivant la demanderesse la démarche intentée à l’époque par son mari aurait été constitutive d’un désaccord se basant sur un grief exprimé et comportant une doléance précisée, de sorte à valoir réclamation introduite dans les délais ;

Qu’elle en veut pour preuve supplémentaire le sursis à exécution accordé par rapport aux bulletins notifiés le 26 janvier 1995, précités, pour la durée de l’instance engagée devant le directeur ;

Considérant que suivant le paragraphe 249 (2) AO « ein Rechtsmittel gilt als eingelegt, wenn aus dem Schriftstück …. hervorgeht, dass sich der Erklärende durch die Entscheidung beschwert fühlt und Nachprüfung begehrt“;

Considérant qu’il résulte de l’écrit de Monsieur … du 13 février 1995 que ce dernier n’y porte point ses revendications par rapport aux bulletins d’imposition lui notifiés, mais demande de lui voir « accorder un délai d’un mois pour rectifier les deux bilans en question, car il y a des écritures à corriger et à ajouter » ;

Considérant qui suivant son libellé même, le directeur a pu qualifier l’écrit de Monsieur … du 13 février 1995, tant à travers son courrier du 28 février 1995 que suivant la décision déférée, de requête en vue de lui accorder un délai pour rectifier ses déclarations d’impôt pour 1992 et 1993 en prévision d’une procédure de retrait d’un bulletin d’impôt à intenter devant le bureau d’imposition compétent sur base du paragraphe 94 AO endéans les délais contentieux en cours ;

Que les informations et indications fournies par le directeur à travers son courrier du 28 février 1995 devaient permettre tant à Monsieur … qu’aux professionnels du chiffre par lui mandatés d’engager utilement la voie ainsi mise en avant ;

Considérant que l’écrit de Monsieur … du 13 février 1995 n’étant point à qualifier de réclamation au sens du paragraphe 249 (2) AO, le délai de recours contentieux de trois mois en cours à l’encontre des bulletins de l’impôt sur le revenu et de l’impôt commercial communal des années 1992 et 1993 notifiés le 26 janvier 1995, n’a pas été utilement tenu en échec à travers lui ;

Considérant qu’au-delà de toute question de qualification du courrier de la Fiduciaire … du 24 mai 1995, force est au tribunal de constater que ce dernier, adressé au préposé du bureau d’imposition Luxembourg 9, encourt l’irrecevabilité à la fois sous son aspect premier de demande de retrait de bulletin à introduire endéans le délai contentieux suivant les prévisions du paragraphe 94 AO et si une qualification de réclamation devait lui être prêtée, sa tardiveté étant patente pour avoir été introduit près de quatre mois après la notification des bulletins en question ;

Que l’irrecevabilité retenue à travers la décision directoriale déférée est dès lors à confirmer ;

Que partant le recours est non justifié au fond ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours en réformation recevable ;

au fond le dit non justifié ;

partant en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 29 septembre 2003 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16029
Date de la décision : 29/09/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-09-29;16029 ?

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