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21/08/2003 | LUXEMBOURG | N°16889

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 août 2003, 16889


Tribunal administratif Numéro 16889 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 août 2003 Audience publique du 21 août 2003

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Recours formé par Monsieur … … contre une décision du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du gouvernement

JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 16889 du rôle, déposée le 12 août 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … …, déclaran

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Tribunal administratif Numéro 16889 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 août 2003 Audience publique du 21 août 2003

============================

Recours formé par Monsieur … … contre une décision du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du gouvernement

JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 16889 du rôle, déposée le 12 août 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … …, déclarant être né en …, de nationalité somalienne, actuellement placé au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 24 juillet 2003 instituant à son égard une mesure de placement pour la durée maximum d’un mois audit Centre de séjour provisoire ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 août 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Frank WIES, en remplacement de Maître Louis TINTI et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 août 2003.

Il ressort d’un procès-verbal de la police grand-ducale, service de contrôle à l’aéroport, du 24 juillet 2003, que Monsieur … …, au moment où il s’apprêtait à embarquer sur un vol en direction de Dublin, a été intercepté par les agents de police en possession d’un passeport émis sur base de la Convention de Genève, au nom de « … … » et qu’interrogé sur la question de savoir si, au vu du fait que la photo figurant sur ledit passeport ne correspondait pas au porteur dudit document, à savoir Monsieur …, ce dernier a admis qu’il était en possession et utilisait un document qui ne lui appartenait pas.

Le même jour, le ministre de la Justice ordonna à l’encontre de Monsieur … une mesure de placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification de la décision en question, en attendant son éloignement du territoire luxembourgeois.

La décision de placement est fondée sur les considérations et motifs suivants :

1 « Vu le procès-verbal no 108/03 du 24 juillet 2003 établi par la Police grand-ducale, Service de contrôle à l’aéroport ;

Considérant que l’intéressé a été intercepté en date du 24 juillet 2003 par le service de contrôle à l’aéroport faisant usage d’un titre de voyage délivré par les autorités néerlandaises en application de la Convention de Genève de 1951, ne lui appartenant pas alors qu’il voulait se rendre à Dublin ;

Considérant que l’intéressé est susceptible de compromettre la sécurité et l’ordre publics ;

Considérant que l’intéressé est démuni de toute pièce d’identité et de voyage valable ;

- qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels légalement acquis ;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays ;

Considérant qu’un laissez-passer sera demandé dans les meilleurs délais auprès des autorités somaliennes ;

- qu’en attendant l’émission de ce document de voyage, l’éloignement immédiat de l’intéressé n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ».

Par lettre datée du 1er août 2003, parvenue au secrétariat du ministère de la Justice le 4 août 2003, Monsieur … formula une demande d’asile, au motif qu’il aurait fui son pays « à cause de problèmes avec le régime politique ».

Par requête déposée le 12 août 2003 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation à l’encontre de la décision préindiquée du 24 juillet 2003.

Etant donné que l’article 15, paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3.

l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre la décision litigieuse. Ledit recours ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Le demandeur reproche au ministre de la Justice d’avoir violé l’article 33 de la Convention de Genève, en soutenant que dans la mesure où il aurait présenté une demande d’asile, la décision de placement se heurterait au principe de non refoulement tel que prévu par l’article en question.

Même s’il est admis en l’espèce que Monsieur … a posé une demande d’asile par lettre du 1er août 2003, réceptionnée au ministère de la Justice le 4 août 2003, il n’est cependant pas moins constant en cause que le demandeur n’a pas soumis sa demande d’asile spontanément en se présentant aux autorités luxembourgeoises, mais seulement plusieurs jours après avoir été intercepté en possession de documents d’identité qui ne lui appartenaient pas et placé au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière. Dans ce contexte, il échet de constater qu’il tentait de quitter le territoire luxembourgeois sous le couvert d’un document d’identité émis en faveur d’une tierce personne et qu’il est arrivé au Luxembourg après avoir traversé, d’après ses propres dires, au moins un autre Etat membre de l’Union européenne, non pas avec l’intention d’y demander asile, mais bien en vue de poursuivre sa route de manière illégale vers l’Irlande. Dans la mesure où l’irrégularité du séjour du demandeur était 2dès lors patente préalablement à l’introduction de sa demande d’asile et que ce dernier n’avait manifestement pas l’intention de s’adresser directement à cette fin aux autorités luxembourgeoises, le ministre pouvait valablement ordonner en date du 24 juillet 2003 une décision de placement à l’encontre de la personne concernée afin de mettre ses services en mesure de vérifier l’identité du demandeur et pour assurer le rapatriement de l’intéressé. En ce qui concerne la situation suite au dépôt de la demande d’asile, le placement a pu être maintenu, en attendant la clarification de la question de la compétence de l’Etat luxembourgeois pour connaître de sa demande d’asile à la lumière notamment de la Convention de Dublin du 15 juin 1990 relative à la détermination de l’Etat responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des Etats membres des Communautés européennes, en vertu de laquelle un seul Etat membre conformément aux critères retenus par cette convention, est en principe compétent pour examiner une demande d’asile présentée à la frontière ou sur le territoire d’un des Etats membres. Dans ce contexte, il échet de relever que suivant les informations fournies par le délégué du gouvernement dans son mémoire en réponse le demandeur sera entendu par un agent du ministère de la Justice le 20 août 2003 et il se dégage encore dudit mémoire qu’à la suite de cette audition une décision sera prise quant à son maintien au Centre de séjour provisoire, de sorte qu’on ne saurait reprocher aux autorités luxembourgeoises de ne pas entreprendre des démarches suffisantes en vue d’un éloignement rapide du demandeur, en vue d’écourter au maximum sa privation de liberté.

Comme aucun autre moyen n’a été invoqué à l’encontre de la décision ministérielle litigieuse, il échet de constater qu’il suit des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé et que le demandeur doit en être débouté.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant le rejette ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Thomé, juge, et lu à l’audience publique extraordinaire du 21 août 2003, par le vice-président, en présence de M. May, greffier en chef de la Cour administrative, greffier assumé.

May Schockweiler 3


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 16889
Date de la décision : 21/08/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-08-21;16889 ?

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