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16/07/2003 | LUXEMBOURG | N°16659

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 juillet 2003, 16659


Numéro 16659 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 juillet 2003 Audience publique du 16 juillet 2003 Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16659 du rôle et déposée le 2 juillet 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Michel KARP, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordr

e des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le… , agissant tant en son non person...

Numéro 16659 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 juillet 2003 Audience publique du 16 juillet 2003 Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16659 du rôle et déposée le 2 juillet 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Michel KARP, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le… , agissant tant en son non personnel qu’en nom et pour compte de ses enfants mineurs … et… , tous de nationalité yougoslave, demeurant actuellement ensemble à L-… , tendant à l’annulation, sinon à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 17 juin 2003 rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme étant manifestement infondée;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 7 juillet 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Yvette NGONO YAH, en remplacement de Maître Michel KARP, et Monsieur le délégué du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 14 juillet 2003.

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En date du 5 mai 2003, Madame …, agissant tant en son nom personnel qu’en nom et pour compte de ses deux enfants mineurs … et… , introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Elle fut entendue en date du même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg, ainsi que sur son identité.

En date du 3 juin 2003, elle fut entendue par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre de la Justice informa Madame … par décision du 17 juin 2003, lui notifiée en date du 18 juin 2003, que sa demande d’asile avait été rejetée comme étant manifestement infondée au motif que le récit par elle présenté ne correspondrait à aucun des critères définis par la Convention de Genève et que, même à la supposer persécutée dans la partie nord de la Ville de Mitrovica, elle aurait su profiter d’une possibilité de fuite interne en s’étant installée depuis la fin de la guerre du côté sud de cette même ville.

Par requête déposée en date du 2 juillet 2003, Madame … fit introduire un recours contentieux tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation de la décision ministérielle prévisée du 17 juin 2003.

L’article 10 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2. d’un régime de protection temporaire, dispose expressément qu’en matière de demandes d’asile déclarées manifestement infondées au sens de l’article 9 de la loi précitée de 1996, le tribunal n’est pas compétent pour statuer en tant que juge du fond en la matière. Le recours en annulation introduit à titre principal l’ayant été dans les formes et délai prévus par la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, la demanderesse expose être originaire du Kosovo et de confession musulmane. Elle conclut à l’annulation de la décision litigieuse pour erreur manifeste d’appréciation des faits en faisant valoir que la situation générale à Mitrovica ne se serait pas encore stabilisée et serait toujours dangereuse pour les Albanais, de sorte que son retour à son ancien domicile serait impossible pour des raisons de sécurité au nord de Mitrovica où ne résident plus que des Serbes, étant donné que les Albanais habitant le nord de la ville auraient été chassés par ces derniers. Elle expose en outre ne disposer ni d’un emploi, ni d’un logement dans son pays d’origine, de manière à se trouver dépourvue de moyens d’existence en cas de retour.

Le délégué du Gouvernement rétorque que la décision en cause serait fondée notamment sur base de la considération que les allégations de la demanderesse ne relèveraient d’aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et que force serait encore de constater qu’elle a clairement pu bénéficier d’une possibilité de fuite interne.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de fondement (…) ».

Au vœu de l’article 4 du règlement grand-ducal précité du 22 avril 1996, « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsque le demandeur d’asile, invoquant des persécutions qui sont limitées à une zone géographique déterminée, aurait pu trouver une protection efficace dans une autre partie de son propre pays, qui lui était accessible ».

En l’espèce, la demanderesse fait essentiellement état de craintes de persécution émanant de Serbes habitant le côté nord de la ville de Mitrovica, ainsi que de considérations d’ordre purement économique ne rentrant pas en tant que telles sous les prévisions de la Convention de Genève. En effet, la demanderesse a déclaré que c’est en raison de la mauvaise situation économique dans son pays d’origine qu’elle a décidé de prendre la fuite, de même qu’il se dégage clairement de ses déclarations que lors de ses séjours dans la partie Sud de Mitrovica elle n’a pas fait l’objet de persécutions au sens de la Convention de Genève.

A partir des éléments ainsi dégagés, il y a lieu de conclure que la situation de la demanderesse s’inscrit à la fois dans les prévisions de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 pour ne répondre à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève, et dans le cadre de l’article 4 du règlement grand-ducal précité du 22 avril 1996, les éléments fournis en cause permettant en effet de dégager que la demanderesse disposait effectivement d’un accès raisonnable à une autre partie du territoire de son pays d’origine au moment de la prise de la décision litigieuse et qu’elle pouvait y bénéficier d’une protection efficace.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le ministre a valablement pu refuser de faire droit à la demande présentée par Madame … au motif qu’elle est manifestement infondée. Le recours sous analyse est partant à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, Le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation, reçoit le recours en annulation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 16 juillet 2003 par:

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 3


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16659
Date de la décision : 16/07/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-07-16;16659 ?

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