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16/07/2003 | LUXEMBOURG | N°16053

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 juillet 2003, 16053


Tribunal administratif N° 16053 rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 février 2003 Audience publique du 16 juillet 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre 1. une décision du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines et 2. une décision du ministre des Finances en matière de discipline

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16053 rôle et déposée au greffe du tribunal adminis

tratif le 27 février 2003 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ord...

Tribunal administratif N° 16053 rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 février 2003 Audience publique du 16 juillet 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre 1. une décision du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines et 2. une décision du ministre des Finances en matière de discipline

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16053 rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 27 février 2003 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines du 14 août 2002, notifiée en date du 19 août 2002, lui infligeant la sanction disciplinaire de l’amende d’un montant de 700 €, ainsi que d’une décision implicite de refus du ministre des Finances du 29 novembre 2002 suite à sa réclamation du 29 août 2002 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision directoriale critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Nadia JANAKOVIC, en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER, en sa plaidoirie à l’audience publique du 30 juin 2003.

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Par décision du 14 août 2002, le directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, ci-après appelé « le directeur », a infligé à Monsieur … la sanction disciplinaire de l’amende fixée au montant de 700 € sur base des considérations suivantes :

« Vu le dossier disciplinaire constitué à charge de Monsieur … ;

Attendu qu’il résulte de ce dossier et de l’instruction disciplinaire que Monsieur … a enfreint les dispositions des articles 9 (1) et 10.1 du Statut des Fonctionnaires de l’Etat ;

Attendu qu’il n’est pas contesté -

que Monsieur …, conseiller de direction adjoint, a déménagé sans autorisation en dates des 12 et 13 mai 2001 une partie du mobilier qui a équipé son ancien bureau au 1-3, avenue Guillaume en son nouveau bureau au 5e étage de l’immeuble Bourbon, 7, rue du Plébiscite ;

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qu’il a démonté respectivement fait démonter sans autorisation le mobilier dont son nouveau bureau était équipé et qu’il a transporté- respectivement fait transporter ledit mobilier dans la cave dudit immeuble ;

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que la plaque formant le coin du bureau démonté a été fortement endommagée lors de ce démontage ;

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que le mobilier appartient à l’administration et qu’il ne pouvait pas en disposer librement ;

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que Monsieur …, malgré sommation du 15 mai 2001 n’a pas procédé au rétablissement des lieux dans leur pristin état ;

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qu’à l’instar de ce qu’il avait entrepris sans autorisation en son bureau au 1-

3, avenue Guillaume, Monsieur … a monté respectivement fait monter, également sans autorisation, une nouvelle serrure à la porte de son nouveau bureau et que le bureau n’est plus librement accessible ;

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que l’immeuble appartient à l’administration et qu’il ne pouvait procéder ou faire procéder à l’installation d’équipements interdisant le libre accès du bureau.

Attendu que les explications fournies par Monsieur … ne sauraient justifier les voies de fait et les refus d’ordre utilisées par celui-ci ;

Vu les articles 44 et 47 de la loi du 16 août 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat ; » Par courrier datant du 29 août 2002 Monsieur … a fait introduire une réclamation auprès du ministre des Finances à l’encontre de la décision directoriale prévisée du 14 août 2002.

Celle-ci n’ayant pas fait l’objet d’une décision de la part du ministre dans les trois mois, Monsieur … a fait introduire, par requête déposée en date du 27 février 2003, un recours contentieux tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision du directeur du 14 août 2002 ainsi que de la décision implicite se dégageant du silence observé par le ministre des Finances pendant plus de trois mois par rapport à sa réclamation introduite en date du 29 août 2002.

Encore que ledit recours fut notifié à l’Etat par la voie du greffe en date du 27 février 2003, la partie défenderesse n’a pas fourni de mémoire en réponse dans le délai de trois mois inscrit à l’article 5 (1) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives. Conformément aux dispositions de l’article 6 de la même loi, le tribunal statue néanmoins à l’égard de toutes les parties suivant un jugement ayant les effets d’une décision juridictionnelle contradictoire.

A partir des indications de la décision litigieuse relatives aux voies de recours ouvertes à son encontre, il y a lieu d’admettre, à défaut de contestations afférentes du demandeur, que l’amende litigieuse ne dépasse pas le cinquième d’une mensualité brute de son traitement de base, de sorte que conformément aux dispositions de l’article 54, b) de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après désigné par le « statut général », seul un recours en annulation a pu être introduit en l’espèce.

Il s’ensuit que le tribunal n’est pas compétent pour connaître du recours principal en réformation. Le recours subsidiaire en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi à l’encontre des deux décisions déférées.

A l’appui de son recours le demandeur fait valoir que la procédure d’instruction ayant précédé la décision litigieuse serait viciée du fait que la qualification juridique des faits à l’origine de la procédure disciplinaire aurait été modifiée après l’exercice de son droit de réponse, de sorte qu’il n’aurait pas pu connaître avec toute la précision requise les reproches qui lui ont été adressés, ainsi que leur qualification juridique et qu’il n’aurait dès lors pas pu présenter utilement des observations adéquates. Le demandeur met en outre en cause l’impartialité et la neutralité de l’agent enquêteur en faisant valoir que le directeur serait intervenu personnellement auprès du fonctionnaire chargé de l’instruction et aurait exercé des pressions sur ce dernier en vue d’obtenir le plus tôt possible la clôture de l’instruction disciplinaire. Il soutient en outre que du fait des pressions ainsi alléguées, le rapport d’instruction se limiterait à résumer la prise de position de son mandataire du 4 février 2002 sans comporter ni une analyse juridique, ni une vérification du bien-fondé des accusations portées par le directeur contre Monsieur …. Le demandeur en déduit que l’instruction disciplinaire aurait été menée en violation des dispositions de l’article 56, paragraphe 2, alinéa 2 du statut général, faute pour l’agent enquêteur d’avoir rassemblé tous les éléments à charge et à décharge du fonctionnaire susceptibles d’avoir une influence sur les mesures à prendre. Il reproche en outre à l’auteur de la décision litigieuse d’avoir manqué à son devoir d’impartialité tel qu’inscrit à l’article 110 de la Constitution en ce qu’il n’aurait pas attendu les conclusions de l’enquête disciplinaire avant de se prononcer sur les faits lui reprochés et qu’il aurait par ailleurs témoigné d’une hostilité à son égard ayant pris des proportions telles que le résultat de la procédure disciplinaire s’en serait trouvé préjugé.

Il incombe au juge administratif saisi d’un recours en annulation d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée et de vérifier si les motifs dûment établis sont de nature à motiver légalement la décision attaquée.

(cf. Cour adm. 17 juin 1997, n° 9481C du rôle, Pas. adm. 2002, V° Recours en annulation, n° 8 et autres références y citées, p. 511).

En l’espèce, force est de constater que le dossier tel que soumis au tribunal ne permet pas de vérifier utilement si les faits retenus à la base de la décision litigieuse sont établis, étant donné que l’élément-clé en la matière, en l’occurrence le dossier disciplinaire constitué à charge de Monsieur …, n’a pas été versé en cause. En effet, ni l’autorité ayant posé l’acte déféré, ni le délégué du Gouvernement, voire un autre mandataire agissant pour compte de l’Etat n’ayant déposé au greffe, dans le délai de trois mois à partir de la communication du recours, le dossier de Monsieur …, le tribunal, face aux contestations avancées en cause et aux moyens présentés, ne dispose d’aucun élément permettant de dégager le caractère régulier et légal de l’acte lui déféré.

Il s’ensuit que la décision litigieuse du directeur, en l’état actuel du dossier tel que soumis au tribunal, encourt l’annulation faute de reposer sur des faits dûment établis en cause.

Concernant le recours dirigé contre la décision implicite de refus du ministre des Finances se dégageant du silence de ce dernier pendant plus de trois à partir de la réclamation introduite par Monsieur … en date du 29 août 2002, force est encore de constater que dans la mesure où la décision directoriale prévisée du 14 août 2002 encourt l’annulation, elle est susceptible de traduire pour le moins une lésion des droits statutaires du demandeur au sens de l’article 33, 1. du statut général, de sorte que la décision implicite de rejet de la réclamation de Monsieur … formulée sur base dudit article 33, 1. du statut général encourt également l’annulation sur base des mêmes motifs ayant conduit à l’annulation de la décision directoriale déférée.

Par ces motifs le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit justifié en l’état ;

partant annule les décisions directoriale et ministérielle implicite de refus déférées ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 16 juillet 2003 :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16053
Date de la décision : 16/07/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-07-16;16053 ?

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