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16/07/2003 | LUXEMBOURG | N°15058

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 juillet 2003, 15058


Numéro 15058 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 21 juin 2002 Audience publique du 16 juillet 2003 Recours formé par la société anonyme ARAL Luxembourg SA, Senningerberg contre un arrêté du ministre de l’Environnement en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15058 du rôle, déposée le 21 juin 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc ELVINGER, av

ocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la soci...

Numéro 15058 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 21 juin 2002 Audience publique du 16 juillet 2003 Recours formé par la société anonyme ARAL Luxembourg SA, Senningerberg contre un arrêté du ministre de l’Environnement en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15058 du rôle, déposée le 21 juin 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc ELVINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme ARAL Luxembourg SA, établie et ayant son siège social à L-2633 Senningerberg, 2, rue de Trèves, tendant à la réformation d’un arrêté n° 1/99/3153 du ministre de l’Environnement du 8 janvier 2002 portant refus de l’autorisation, concernant la station-service par elle exploitée à Schifflange, 26, rue Denis Netgen, pour une extension de l’ouverture pendant la période nocturne s’étendant de 22.00 jusqu’à 7.00 heures, ainsi que pour une modification des niveaux d’émission de bruit admissibles sur cette station-service;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 22 novembre 2002;

Vu les pièces versées en cause et notamment l’arrêté entrepris;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Marc ELVINGER et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 mars 2003;

Vu la visite des lieux effectuée en date du 28 mars 2003;

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Par arrêté d’autorisation n° 1/97/0412 du ministre de l’Environnement du 16 octobre 1998, la société anonyme ARAL LUXEMBOURG SA, préqualifiée, fut autorisée à exploiter à Schifflange, 26, rue Denis Netgen, une station-service de distribution d’essence et de gasoil.

Cette autorisation ne couvrait, conformément à son article 1er, pas l’ouverture au public de la station-service pendant la période nocturne se situant entre 22.00 et 7.00 heures, conformément à la demande formulée à l’époque, et comporta sous son point 53 les conditions suivantes en matière de lutte contre le bruit :

« a) A la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptibles d'être couverte par une autorisation de bâtir en vertu de la réglementation communale existante, les niveaux de bruit équivalents en provenance de l’établissement ne doivent pas dépasser entre 7.00 h et 21.00 h, la valeur de 55 dB(A)Leq.

c) Les niveaux de bruit provenant des installations fixes, notamment de la station de lavage, ne doivent pas dépasser la valeur de 35 dB(A)Leq.

Les mesures du bruit sont à exécuter conformément à l'annexe du règlement grand-

ducal modifié du 13 février 1979 concernant le niveau de bruit dans les alentours immédiats des établissements et des chantiers.

d) Dans le cas où le spectre des émissions de bruit est dominé par une tonalité précise, le niveau de bruit déterminé est à majorer de 5 dB(A).

e) Dans le cas où des bruits impulsifs répétés se superposent au niveau sonore de base et dépassent ce niveau de 10 dB(A), le Leq déterminé est à majorer de 5 dB(A) f) L’installation de lavage doit être installée dans un local fermé. Elle ne peut être exploitée que lorsque toutes les portes sont fermées ».

Par dossier déposé le 27 octobre 1999 à l’administration de l’Environnement, la société ARAL Luxembourg SA fit introduire, par le biais du bureau d’études E & H CONSULT, une demande en modification de l’arrêté d’autorisation prévisé du 16 octobre 1998 tendant à la double fin de l’extension de la période journalière d’ouverture de l’établissement à la plage de 0.00 à 24.00 heures et du reclassement du site de l’établissement en zone de niveau de bruit IV afin de voir le niveau de bruit équivalent nocturne à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d’être bâtie porté à 45 dB(A)Leq correspondant à la zone de niveau de bruit IV.

Cette demande de la société ARAL LUXEMBOURG SA fit l’objet d’une enquête de commodo et incommodo dans la commune de Schifflange dans le cadre de laquelle 5 personnes présentèrent des observations. Le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Schifflange, en sa séance du 12 septembre 2001, avisa négativement cette demande.

Par arrêté n° 1/99/3042 du 8 janvier 2002, le ministre de l’Environnement refusa l’autorisation sollicitée à travers la demande du 27 octobre 1999 aux motifs suivants :

« Considérant d’une part que la réalisation du projet présente une gêne et une cause de danger et d'inconvénients supplémentaires, notamment par rapport au public et au voisinage de l'établissement et pour l'environnement humain ;

Considérant que, dans le cadre de la loi du 10 juin 1999 sur les établissements classés, cette gêne intolérable consiste dans l'accroissement de la pollution de l'air ambiant, dans les nuisances de bruit et dans la dégradation de la qualité de vie ;

Considérant que l'arrêté n° 1/97/0412 précité dispose que les niveaux de bruit équivalents en provenance de l'établissement ne doivent pas dépasser, entre 7.00 h et 22.00 h, la valeur de 55 dB(A)Leq à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d'être couverte par une autorisation de bâtir en vertu de la réglementation communale existante ;

Considérant que cette valeur de 55 dB(A)Leq correspond à un classement en zone de niveau de bruit III selon les dispositions du règlement grand-ducal du 13 février 1979 concernant le niveau de bruit dans les alentours immédiats des établissements et des chantiers, modifié par le règlement grand-ducal du 4 mars 1981 ;

Considérant qu’en zone III la valeur de 40 dB(A)Leq ne doit pas être dépassée, à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d’être couverte par une autorisation de bâtir, pendant la période de nuit entre 22.00 heures et 7.00 heures ;

Considérant que le requérant sollicite un reclassement en zone de niveau de bruit IV;

Considérant que suivant le règlement grand-ducal du 13 février 1979 précité la nature du milieu d'habitat visée par la zone III est définie comme suit: « quartier urbain, majorité d’habitat, circulation faible » ;

Considérant que suivant le même règlement grand-ducal la nature du milieu d'habitat visée par la zone IV est définie comme suit: « quartier urbain avec quelques entreprises, circulation moyenne » ;

Considérant qu'il ne ressort pas du dossier que la nature du milieu d'habitat abritant l'établissement autorisé en date du 18 octobre 1998 (arrêté n° 1/97/0412) ait changé en cours du temps et qu'ainsi le prédit établissement est toujours situé en zone III au regard du règlement grand-ducal du 13 février 1979 précité ;

Considérant que la demande en reclassement du 25 octobre 1999 précitée n’est par conséquent pas fondée ;

Considérant que, pour autant que de besoin, les valeurs de bruit avancées dans le dossier de demande ne sauraient être autorisables même en zone IV au motif de dépasser les seuils maxima ».

Le recours gracieux formé par la société ARAL LUXEMBOURG SA à travers un courrier de son mandataire du 18 février 2002 étant resté sans réponse de la part du ministre de l’Environnement, elle a fait introduire un recours en réformation à l’encontre de l’arrêté ministériel prévisé du 8 janvier 2002 par requête déposée le 21 juin 2002.

La loi du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, ci-après désignée par « la loi du 10 juin 1999 », instaurant dans son article 19 un recours de pleine juridiction en la matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit. Le recours est également recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

La société demanderesse estime que ce serait à tort que le ministre a maintenu le site de sa station-service de Schifflange dans la zone III prévue par le règlement grand-ducal du 13 février 1979 concernant le bruit dans les alentours immédiats des établissements et des chantiers, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 13 février 1979 », alors même qu’il serait en réalité localisé dans une zone industrielle, de sorte qu’il pourrait même être considéré comme relevant de la zone de bruit V, mais devrait du moins être qualifié de zone IV, étant donné que les caractéristiques telles qu’énoncées dans l’article 3 du règlement grand-ducal du 13 février 1979 seraient à considérer alternativement et non pas cumulativement. La société demanderesse ajoute que l’administration communale aurait exprimé, dans le cadre de la délivrance de l’autorisation originaire, elle-même l’avis que la station-service litigieuse était située à proximité d’un quartier d’habitation classé en zone IV suivant les dispositions du règlement grand-ducal du 13 février 1979. D’après la société demanderesse, l’affirmation du ministre d’une absence de changement du milieu d’habitat abritant l’établissement en cause serait sans pertinence alors que l’administration, saisie d’une demande de modification de l’arrêté d’autorisation originaire, serait tenue de statuer sur base de la situation factuelle au moment de la prise de décision.

La société demanderesse critique encore l’argumentation ministérielle que l’extension sollicitée des heures d’ouverture entraînerait un accroissement de la pollution de l’air ambiant, des nuisances de bruit et une dégradation de la qualité de vie en faisant valoir que ces gênes, outre le fait de ne pas être quantifiées et détaillées dans la décision entreprise, ne pourraient pas justifier le maintien de la station-service dans une zone non conforme à ses caractéristiques effectives.

Le délégué du Gouvernement renvoie pour l’essentiel à la motivation de l’arrêté ministériel entrepris du 5 décembre 2001. Il rétorque en outre qu’une étude sonore annexée à la demande aurait démontré que les niveaux de bruit en période de nuit dépasseraient les seuils recommandés de la zone IV à la limite de la zone habitée la plus proche, malgré des prémisses quant à la fréquentation nocturne de la clientèle très favorables. Le représentant étatique ajoute que le ministre aurait clairement indiqué que les niveaux de bruit admissibles ne sauraient être augmentés notamment pour des raisons de commodité pour le voisinage et qu’un reclassement de zone ne pourrait être opéré notamment du fait du défaut de preuve quant au changement du milieu d’habitat.

Il ressort du libellé de l’arrêté entrepris du 8 janvier 2002 que le ministre a d’abord retenu, par rapport à la demande lui soumise dans ses deux volets d’augmentation de la plage horaire d’ouverture journalière de la station-service en cause et d’augmentation du niveau de bruit admissible durant la période nocturne, que sa réalisation présenterait une gêne et une cause de danger et d’inconvénients supplémentaires et que la gêne consisterait dans l’accroissement de la pollution de l’air ambiant, dans les nuisances de bruit et dans la dégradation de la qualité de vie. Au-delà de cette motivation plus générale non limitée au volet de la lutte contre le bruit, le ministre a ensuite motivé son refus plus spécifiquement par rapport aux plafonds de niveaux de bruit actuellement fixés et à la demande d’augmentation de ces mêmes plafonds telle que soumise par la société demanderesse.

Il échet d’analyser d’abord la motivation spécifique du refus ministériel en ce qui concerne le niveau de bruit admissible au vu de l’incidence de la solution dégagée à cet égard sur les gênes et nuisances avancés d’une manière générale.

Au vœu de l’article 13, 3. de la loi du 10 juin 1999, « l’autorisation du ministre ayant dans ses attributions l’environnement détermine les conditions d’aménagement et d’exploitation visant l’environnement humain et naturel, telles que la protection de l’air, de l’eau, du sol, de la faune et de la flore, la lutte contre le bruit et les vibrations, l’utilisation rationnelle de l’énergie, la prévention et la gestion des déchets ».

Cette disposition légale attribue une compétence générale au ministre de l’Environnement pour déterminer, en tenant compte des particularités de chaque cas d’espèce, les réserves et conditions d’exploitation visant notamment la protection de l’air et elle lui réserve nécessairement, sous peine de vider la notion d’autorisation de tout sens, un pouvoir d’appréciation quant aux conditions à fixer. Cette compétence générale dans le domaine en question doit nécessairement s’exercer dans le cadre tracé par la législation spécifique, à savoir celle relative à la lutte contre le bruit, laquelle, à supposer qu’elle existe, définit et délimite le pouvoir d’appréciation du ministre (cf. C.E. 2 décembre 1991, n° 8562 du rôle ;

trib. adm. 15 mars 1999, Messerig-Bissen, n° 10390, 10521, 10597, confirmé par Cour adm.

30 mars 2000, n° 11258C, Pas. adm. 2002, v° Etablissements classés, n° 12).

Le règlement grand-ducal du 13 février 1979 a été pris sur pied de la base habilitante de l’article 2 de la loi du 21 juin 1976 relative à la lutte contre le bruit, de manière qu’il circonscrit valablement le pouvoir d’appréciation du ministre de l’Environnement dans le domaine de la lutte contre le bruit et doit en outre trouver application en l’espèce, vu qu’il vise, d’après ses articles 1er et 2, toute entreprise industrielle, artisanale, commerciale, agricole ou viticole.

Aux termes de l’article 3 du même règlement grand-ducal du 13 février 1979, « à l’intérieur des agglomérations, il est recommandé aux responsables des établissements et chantiers visés à l’article premier de ne pas dépasser dans les alentours immédiats les niveaux de bruit indiqués ci-après, suivant les distinctions établies en fonction de la nature du milieu d’habitat.

Zone Niveau de bruit (dB(A)) Nature du milieu d’habitat Jour nuit I 45 35 Hôpitaux, quartier de récréation II 50 35 Milieu rural, habitat calme, circulation faible III 55 40 Quartier urbain, majorité d’habitat, circulation faible IV 60 45 Quartier urbain avec quelques usines ou entreprises, circulation moyenne V 65 50 Centre ville (entreprises, commerces, bureaux, divertissements), circulation dense VI 70 60 Prédominance industrie lourde Pour l’application du présent article aux établissements, à l’exclusion des chantiers, une propriété qui, quoique non bâtie actuellement, est susceptible d’être couverte par une autorisation de bâtir en vertu de la réglementation communale existante, est considérée comme propriété dans laquelle séjournent des personnes au sens de l’article 2 ci-dessus ».

Il se dégage de cette disposition réglementaire que l’application des plafonds de niveaux de bruit à un site particulier doit être fonction des caractéristiques réelles et concrètes du milieu d’habitat autour du site en question au moment où l’autorité compétente statue sur une demande d’autorisation.

En l’espèce, le tribunal a pu constater lors de la visite des lieux par lui effectuée que la station-service en cause donne directement sur le rond-point à l’entrée de la localité de Schifflange à partir de la sortie « Schifflange-Pontpierre » de la Collectrice du Sud en venant de la localité de Pontpierre et qu’il est situé entre la rue Denis Netgen et la route en direction de Pontpierre partant de ce rond-point. Un immeuble d’habitation est situé de l’autre côté de la rue Denis Netgen à une distance d’une quarantaine de mètres de la station-service en cause, tandis que les autres immeubles avoisinants aux abords de la route en direction de Pontpierre et de la rue Denis Netgen ont un caractère administratif ou commercial.

Il résulte de ce descriptif que la station-service visée en l’espèce est située à la sortie de la localité de Schifflange à la limite entre les habitations et les immeubles de la zone industrielle dans les rues environnantes. Au vu de la localisation du rond-point entre la Collectrice du sud et le centre de Schifflange et son caractère d’axe distributif de la circulation automobile vers les différents quartiers de Schifflange, la circulation automobile y existante ne peut pas être qualifiée de faible, mais doit être du moins considérée comme étant moyenne.

Par rapport aux critères énoncés à l’article 3 du règlement grand-ducal du 13 février 1979, il y a lieu de retenir qu’en présence dans les alentours rapprochés de la station-service d’un seul immeuble d’habitation de l’autre côté de la station-service, le site ne peut pas être qualifié de quartier à faible circulation comprenant une majorité d’habitations, de manière qu’il ne peut à l’heure actuelle pas rentrer dans la zone III, contrairement à la conclusion retenue par le ministre dans l’arrêté entrepris. Le même caractère mixte et parsemé du milieu d’habitat environnant, sans que les habitations ne puissent être considérées comme prédominantes dans les alentours de la station-service, doit emporter l’application des niveaux de bruit prévus pour la zone IV.

Conformément à l’article 3 du règlement grand-ducal du 13 février 1979, les niveaux de bruit y retenus ne constituent que des plafonds recommandés et l’article 8 du même règlement grand-ducal ne prohibe que les dépassements permanents ou à intervalles réguliers supérieurs à 10 dB(A) par rapport aux niveaux recommandés. En considération de la localisation du site de la station-service litigieuse en périphérie de Schifflange et son orientation vers le rond-point prévisé où la circulation est du moins moyenne, sinon dense, le tribunal estime que les niveaux recommandés de 60 dB(A)Leq entre 7.00 et 22.00 heures et à 45 dB(A)Leq entre 22.00 et 7.00 heures peuvent être augmentés respectivement de 5 dB(A)Leq.

Il s’ensuit que c’est à tort que l’arrêté ministériel entrepris a retenu que la station-

service litigieuse serait toujours située en zone III au regard du règlement grand-ducal du 13 février 1979 et qu’il a par voie de conséquence également maintenu les niveaux de bruit afférents à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d’être construite. Il y a ainsi lieu de réformer l’arrêté ministériel du 5 décembre 2001 en remplaçant le niveau de bruit à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d’être construite de 55 dB(A)Leq entre 7.00 et 22.00 heures par celui de 65 dB(A)Leq et celui de 40 dB(A)Leq entre 22.00 et 7.00 heures par celui de 50 dB(A)Leq.

Il n’en reste pas moins que la demande de modification soumise le 27 octobre 1999 par la société demanderesse tend essentiellement à l’autorisation d’ouvrir la station-service 24 heures sur 24 et que l'augmentation sollicitée du niveau admissible de bruit à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d’être construite tend en substance à voir rendre les bruits engendrés par l’exploitation de la station-service durant ces périodes conforme aux plafonds légalement prévus.

Etant donné que les plages horaires supplémentaires ainsi sollicitées rentrent dans la période nocturne telle que définie par l’article 2 du règlement grand-ducal du 13 février 1979, le plafond de niveau de bruit à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d’être construite devant être respecté est de 50 dB(A)Leq.

Or, il ressort de l’étude acoustique du 28 juillet 1999 réalisée dans le cadre de la demande d’autorisation par l’organisme VOTRE s.p.r.l. que, sur base de l’hypothèse d’un fonctionnement à la fois des pompes à carburant à raison de 60% de la fréquentation de jour, du climatiseur du shop et de son compresseur et de la fréquentation de 60% du parking, le niveau de pression sonore équivalent maximum serait de l’ordre de 51 dB(A) au niveau de l’immeuble d’habitation le plus proche situé de l’autre côté de la rue Denis Netgen. La même étude retient cependant que le bruit produit par les quatre pompes à carburant s’élèverait de 44 à 45,7 dB(A) « y compris les voitures et autres sortes de bruit émis par les clients de la station » et elle comporte la précision suivante :

« La limite des 45 dB(A) est normalement respectée si l’on tient compte uniquement du bruit des pompes, ou si les clients adoptent un comportement plus civique et plus respectueux du repos d’autrui. En effet, en tenant compte uniquement du bruit des pompes et des voitures, le niveau Lw des aires des pompes serait de 78 dB(A) : le niveau Leq au point A serait de +/-

43 dB(A), comme détaillé dans le tableau 2 ».

La même étude acoustique propose encore une modification de l’auvent qui permettrait « de réduire le niveau sonore émis par la station de 2 à 3 dB(A) ».

Il faut déduire de ces développements contenus dans l’étude acoustique susvisée que les bruits dégagés par la station-service en période de nuit pourraient certes dépasser le plafond admissible à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d’être construite de 50 dB(A)Leq. La même étude précise cependant aussi que ce dépassement serait dû essentiellement au comportement excessif des clients. Il ressort également de l’étude acoustique que des modifications à l’auvent, le cas échéant combinées avec d’autres modifications à la station-service, permettraient de maintenir le niveau maximal de bruit en-

deçà de la limite de 50 dB(A) et de laisser une marge pour le cas où le taux de fréquentation nocturne de la station-service dépasserait celui à la base de l’étude acoustique.

Dans la mesure où l’étude acoustique précitée fait admettre que le plafond de niveau de bruit de 50 dB(A)Leq pourrait être respecté dans l’hypothèse de certaines modifications à la station-service, le niveau de bruit dégagé par la station-service en son état existant au moment de l’exécution de l’étude acoustique ne constitue pas un motif pour refuser l’autorisation pour l’extension de la période journalière d’ouverture sur pied des nuisances acoustiques, mais plutôt un fondement valable pour imposer, conformément à l’article 13 de la loi du 10 juin 1999, à l’exploitant l’obligation d’apporter à la station-service certaines modifications pour respecter le dit plafond.

Quant au motif de refus tiré de la gêne et de la cause de danger et d'inconvénients supplémentaires, consistant dans l'accroissement de la pollution de l'air ambiant, dans les nuisances de bruit et dans la dégradation de la qualité de vie que causerait l’extension de la période d’ouverture journalière, il y a lieu de retenir que la localisation de la station-service à la sortie de Schifflange aux abords d’un rond-point accusant un trafic routier consistant n’est pas de nature à conforter per se la réalité de ces gêne et cause de dangers et d’inconvénients supplémentaires. A défaut de tout autre élément du dossier étayant la genèse de gênes ou d’inconvénients supplémentaires du fait de l’extension des temps d’ouverture de la station-

service en cause, ce motif ne peut être considéré comme justifiant un refus de l’autorisation sollicitée à travers la demande du 27 octobre 1999.

Il ressort de l’ensemble des développements qui précèdent que c’est à tort que le ministre a rejeté la demande soumise par la société demanderesse le 27 octobre 1999 et que l’arrêté ministériel déféré du 8 janvier 2002 encourt la réformation :

- quant à la fixation des niveaux de bruits en ce qu’il y a lieu de remplacer le niveau de bruit à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d’être construite de 55 dB(A)Leq entre 7.00 et 22.00 heures par celui de 65 dB(A)Leq et celui de 40 dB(A)Leq entre 22.00 et 7.00 heures par celui de 50 dB(A)Leq, - quant à la période d’ouverture journalière qui est à étendre à la plage horaire de 0.00 à 24.00 heures.

Il y a pour le surplus lieu de renvoyer le dossier devant le ministre en vue de la fixation des conditions nécessaires afin d’assurer le respect des plafonds de bruit ci-avant fixés.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le dit justifié, partant, par réformation de l’arrêté n° 1/99/3153 du ministre de l’Environnement du 8 janvier 2002, - dit qu’à la limite de la propriété la plus proche bâtie ou susceptible d’être couverte par une autorisation de bâtir en vertu de la réglementation communale existante, les niveaux de bruit équivalents en provenance de l’établissement ne doivent pas dépasser :

 entre 7.00 h et 22.00 h, la valeur de 65 dB(A)Leq et  entre 22.00 et 7.00 h ainsi que les dimanches et jours fériés, la valeur de 50 dB(A)Leq, - dit que la période d’ouverture journalière est à étendre à la plage horaire de 0.00 à 24.00 heures, renvoie l’affaire devant le ministre de l’Environnement pour exécution en vue de la fixation des conditions nécessaires au respect des plafonds de bruit ci-avant fixés, condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 16 juillet 2003 par:

M. DELAPORTE, premier vice-président, Mme LENERT, premier juge, M. SCHROEDER, juge, en présence de M. SCHMIT, greffier en chef.

SCHMIT DELAPORTE 8


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15058
Date de la décision : 16/07/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-07-16;15058 ?

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