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09/07/2003 | LUXEMBOURG | N°15873

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 juillet 2003, 15873


Tribunal administratif N° 15873 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 15 janvier 2003 Audience publique du 9 juillet 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15873 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 15 janvier 2003 par Maître Sandrine LENERT-KINN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg,

au nom de Monsieur …, né le 17 février 1968, de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, ...

Tribunal administratif N° 15873 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 15 janvier 2003 Audience publique du 9 juillet 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15873 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 15 janvier 2003 par Maître Sandrine LENERT-KINN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le 17 février 1968, de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation, sinon à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 30 décembre 2002, refusant de faire droit à sa demande en obtention d’une autorisation de séjour ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 7 mars 2003 ;

Vu le courrier de Maître LENERT-KINN du 2 mai 2003 informant le tribunal du dépôt de son mandat dans l’affaire inscrite sous le numéro 15873 du rôle ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en sa plaidoirie à l’audience publique du 30 juin 2003.

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En date du 25 mai 2001, Monsieur …, de nationalité yougoslave, introduisit une demande en obtention d’une autorisation de séjour au Grand-Duché de Luxembourg.

Par décision du 30 décembre 2002, le ministre de la Justice a refusé de faire droit à cette demande aux motifs suivants :

« En effet, selon l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-

d’œuvre étrangère, la délivrance d’une autorisation de séjour peut être refusée à l’étranger qui est susceptible de compromettre la sécurité, la tranquillité, l’ordre ou la santé publics.

Comme il a été constaté sur base de votre dossier administratif que cette disposition est applicable dans votre cas, une autorisation de séjour ne saurait vous être délivrée.

Vous êtes invité à quitter le Luxembourg endéans un délai d’un mois. A défaut de départ volontaire, la police sera chargée de vous éloigner du territoire luxembourgeois. » Par requête déposée en date du 15 janvier 2003, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation de la décision ministérielle prévisée du 30 décembre 2002.

Le demandeur conclut d’abord à l’annulation de la décision litigieuse au motif que l’auteur en serait inconnu, étant donné que la mention « conseiller de direction première classe » serait suivie d’une signature illisible, rendant impossible à la personne concernée de vérifier si la personne signataire de la décision a effectivement la fonction indiquée.

Un administré peut avoir intérêt à vérifier l’identité de la personne ayant signé la décision lui adressée, notamment afin d’être en mesure d’examiner si la personne en question avait pouvoir de ce faire, et en tant que personne justifiant d’un intérêt légitime pour prendre connaissance d’une éventuelle délégation de signature émise en faveur du signataire de la décision en question, il est autorisé, sur base de l’article 3, alinéa 3 de l’arrêté grand-ducal du 22 décembre 2000 concernant les délégations de signatures par le Gouvernement, à prendre inspection de l’éventuelle délégation de signature auprès des services du ministère d’Etat.

D’un autre côté, un administré qui conteste la qualité du signataire d’un acte administratif doit spécifier en quoi les dispositions de l’arrêté grand-ducal précité du 22 décembre 2000 n’ont pas été respectées. Il lui appartient, le cas échéant, de s’enquérir au ministère d’Etat sur la conformité de la signature apposée sur la décision attaquée au spécimen de la signature du fonctionnaire délégué, conformément à l’article 3 de l’arrêté précité.

En l’espèce, force est de constater qu’alors même que l’indication du nom du signataire ne figure pas sur l’expédition de la décision critiquée, la mention « conseiller de direction première classe » y apposée, entraînant nécessairement que seul un fonctionnaire auprès du ministère de la Justice revêtant le grade ainsi défini peut être l’auteur de la signature, restreint le cercle des signataires possibles dans une mesure suffisante pour permettre au demandeur ou à son mandataire de s’enquérir au ministère d’Etat sur l’identité du fonctionnaire signataire, sur l’existence d’une délégation en sa faveur et sur la conformité de sa signature au spécimen.

En outre, il y a lieu de relever que la simple omission des nom et prénoms du signataire d’une décision administrative ne constitue pas l’omission d’une formalité substantielle dont pourrait découler la nullité, voire l’inexistence de la décision ainsi signée par le titulaire de la délégation, à condition que celui-ci dispose effectivement d’une délégation de signature pour prendre le type de décision en cause, cette condition étant respectée en l’espèce d’après les informations non autrement contestées fournies en cause par le délégué du Gouvernement.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le premier moyen présenté est à rejeter.

Le demandeur critique ensuite la notification à son égard de la décision déférée, laquelle aurait été accomplie en langue française, incompréhensible pour lui, et fait valoir qu’elle devrait encourir de ce fait l’annulation pour violation des droits de l’homme.

Un étranger d’asile ne saurait se plaindre de ce qu’une décision ministérielle lui adressée est rédigée en français, langue qui est incompréhensible pour lui, étant donné que le français est l’une des trois langues officielles du Grand-Duché en matière administrative, contentieuse ou non contentieuse, ainsi qu’en matière judiciaire, et qu’il n’existe aucun texte de loi spécial obligeant le ministre de la Justice à faire traduire ses décisions dans une langue compréhensible par le destinataire (cf. trib. adm. 16 avril 1997, Redzovic, n° 9635, confirmé par Cour adm. 10 juillet 1997, n° 9960C, Pas. adm. 2002, V° Etrangers, n° 17 et autres références y citées, p. 146).

Ledit moyen laisse partant encore d’être fondé.

Le demandeur fait valoir encore que ce serait à tort que le ministre a motivé la décision litigieuse par le fait qu’il serait susceptible de compromettre la sécurité, la tranquillité, l’ordre ou la santé publics, étant donné que le fait unique lui reproché, à savoir une condamnation pénale datant du 9 décembre 1999, ne serait pas de nature à révéler dans son chef un risque de porter atteinte à l’ordre public au point de justifier le refus d’une autorisation de séjour. Il signale résider au pays depuis le 22 juin 1998, y exercer une activité rémunérée et disposer de moyens personnels pour subvenir à ses besoins, de manière à justifier d’une situation stable et bien établie.

Le délégué du Gouvernement rétorque que Monsieur … aurait démontré, tout au long de son séjour au pays, qu’il constitue un risque pour l’ordre public du pays, étant donné qu’il ressortirait de son dossier administratif et notamment d’un rapport du service de police judiciaire du 1er octobre 2001 qu’au-delà de la condamnation pénale datant du 9 décembre 1999 il a fait l’objet de plusieurs procès-verbaux notamment pour vol à l’étalage, vol à l’aide de violence et coups et blessures.

Aucun recours au fond n’étant prévu en la matière, le tribunal n’est pas compétent pour statuer en tant que juge de la réformation en l’espèce. Le recours en annulation introduit à titre principal l’ayant été dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972 « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : (…) qui est susceptible de compromettre la sécurité, la tranquillité, l’ordre ou la santé publics, (…) ».

Force est de relever qu’il se dégage en l’espèce des éléments d’appréciation soumis au tribunal que le demandeur, de par son comportement, a d’ores et déjà contrevenu à l’ordre public luxembourgeois et ce en dépit du fait qu’il ne séjourne au pays que depuis le 22 juin 1998. En effet, au-delà de la condamnation pénale du 9 décembre 1999 pour vol et violence et menaces, il se dégage des pièces versées au dossier que des rapports ont été dressés aux mois de mai et de juin 1999 au sujet d’un vol à l’étalage avec violence, ainsi que d’un itératif vol à l’étalage, sans que les faits ainsi avancés n’aient été autrement contestés en cause par le demandeur.

Dans la mesure où les faits ainsi reprochés au demandeur dénotent dans son chef de manière répétée un comportement peu respectueux des lois du pays, ainsi que de la personne et des biens d’autrui, le ministre de la Justice a valablement pu retenir que le demandeur est susceptible de constituer une menace pour la sécurité, la tranquillité et l’ordre publics au sens de la disposition légale prévisée de l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée, sans pour autant commettre une erreur manifeste d’appréciation des circonstances de fait.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, et lu à l’audience publique du 9 juillet 2003 par Monsieur le juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15873
Date de la décision : 09/07/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-07-09;15873 ?

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