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07/07/2003 | LUXEMBOURG | N°s14920a,15704

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 07 juillet 2003, s14920a,15704


Tribunal administratif N°s 14920a et 15704 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits respectivement les 16 mai et 6 décembre 2002 Audience publique du 7 juillet 2003

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Recours formés par Madame …, … et consorts contre une décision du ministre de l’Environnement et une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en présence des sociétés anonymes CLT-UFA S.A, Luxembourg et BROADCASTING CENTER EUROPE S.A., Luxembourg en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Revu la requête inscrite sous le ...

Tribunal administratif N°s 14920a et 15704 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits respectivement les 16 mai et 6 décembre 2002 Audience publique du 7 juillet 2003

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Recours formés par Madame …, … et consorts contre une décision du ministre de l’Environnement et une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en présence des sociétés anonymes CLT-UFA S.A, Luxembourg et BROADCASTING CENTER EUROPE S.A., Luxembourg en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Revu la requête inscrite sous le numéro 14920 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 16 mai 2002 par Maître Alain BINGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de 1. Madame …, et 80 consorts désignés ci-après par « Madame … et consorts », tendant à l’annulation, sinon à la réformation d’un arrêté du ministre de l’Environnement du 8 avril 2002, référencé sous le numéro 1/01/0227, portant autorisation d’installation et d’exploitation d’un centre d’émission radio comprenant les éléments y plus amplement spécifiés sur les terrains inscrits au cadastre de la commune de Munshausen, section D de Roder sous les numéros 159/179, 163/1353 et 163/1451, ainsi que de la commune de Hosingen, section H du chef-lieu, sous les numéros 417/1157 et 432/1249 ;

Vu le jugement du 16 décembre 2002 ayant reçu le recours en réformation en la forme et au fond ayant écarté le moyen tiré de la violation de l’article 17.2 de la loi du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, tout en prononçant pour le surplus la rupture du délibéré afin de permettre aux parties de se prononcer sur la jonction du recours inscrit sous le numéro 14920 du rôle avec celui portant le numéro 15704 du rôle ;

II.

Vu la requête inscrite sous le numéro 15704 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 6 décembre 2002 par Maître Alain BINGEN, au nom de Madame … et consorts, tous préqualifiés, tendant à la réformation d’un arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi du 4 octobre 2002 référencé sous le numéro 1/2001/0227/55001/106, portant autorisation d’installation et d’exploitation d’un centre d’émission radio comprenant les éléments y plus amplement spécifiés sur les terrains prédécrits des communes de Munshausen et de Hosingen sous réserve des conditions d’exploitation y plus amplement émargées ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 11 décembre 2002 portant signification de ce recours à la société anonyme CLT-UFA S.A., établie et ayant son siège social à L-1543 Luxembourg, 45, boulevard Pierre Frieden, ainsi qu’à la société anonyme BROADCASTING CENTER EUROPE S.A., établie à la même adresse ;

I. et II.

Vu le mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 6 janvier 2003 par Maître Jacques LOESCH au nom des sociétés CLT-UFA S.A. et BROADCASTING CENTER EUROPE S.A. ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire complémentaire à Maître Alain BINGEN ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 février 2003 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 mars 2003 par Maître Jacques LOESCH au nom des sociétés CLT-UFA S.A. et BROADCASTING CENTER EUROPE S.A. ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réponse à Maître Alain BINGEN ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 avril 2003 par Maître Alain BINGEN au nom des demandeurs ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réplique à Maître Jacques LOESCH ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 9 mai 2003 par Maître Jacques LOESCH au nom des sociétés CLT-UFA S.A. et BROADCASTING CENTER EUROPE S.A. ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en duplique à Maître Alain BINGEN ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maîtres Alain BINGEN, Guy LOESCH et Claudine ELCHEROTH, de même que Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 21 mai 2003.

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Considérant que le centre d’émission radio situé sur les hauteurs du Schwarzenhiwel à proximité de la localité de Marnach, y fonctionnant depuis 1955, a été successivement soumis aux arrêtés d’autorisation du ministre de la Justice des 30 août 1957, 21 décembre 1962 et 6 novembre 1969, lequel dernier a eu une durée de validité de 30 ans, de sorte à expirer le 6 novembre 1999 ;

Que suite à la demande du 15 mai 2001, présentée par le bureau d’ingénieur-

conseil … pour compte des sociétés BROADCASTING CENTER EUROPE S.A., désignée ci-après par « BCE », et CLT-UFA, le ministre de l’Environnement, en date du 8 avril 2002, a accordé l’autorisation d’installer et d’exploiter sur les terrains inscrits au cadastre de la commune de Munshausen, section D de Roder sous les numéros 159/1379, 163/1353 et 163/1451 ainsi que de la commune de Hosingen, section H du chef-lieu, sous les numéros 417/1157 et 432/1249, les éléments suivants :

Désignation de l’activité Numéro de classe Volume / Capacité de l’équipement / l’installation nomenclature Un centre d’émission comprenant entre autres les éléments suivants :

- un émetteur d’ondes électromagnétiques (1440 302.2 1 kHz) d’une puissance isotrope rayonnée équivalente maximale unitaire de 1070 kW (60,3 dBW), se composant de trois pylônes d’une hauteur de 105 mètres, direction de rayonnement 44° ;

302.2 1 - un émetteur d’ondes électromagnétiques (1440 kHz) d’une puissance isotrope rayonnée équivalente maximale unitaire de 1070 kW (60,3 dBW), se composant de deux pylônes d’une hauteur de 60 mètres, direction de rayonnement 324° ;

143.2.b 1 - deux transformateurs refroidis à l’huile d’une 143.1.eb 1 puissance électrique nominale unitaire de 2 MVA ;

- deux groupes électrogènes de secours d’une 224.4.b 1 puissance électrique nominale unitaire de 1150 kVA ;

- un dépôt de gasoil d’une capacité de 52.400 litres ;

* un réservoir aérien à simple paroi d’une capacité de 50.000 litres ;

224.3.a 3 * deux réservoirs d’une capacité unitaire de 1200 litres ;

- un dépôt d’huile neuve de 3000 litres dans quinze 224.3.a 3 fûts de 200 litres ;

-un dépôt d’huile usée de 1000 litres dans cinq fûts C de 200 litres ;

- une installation de chauffage d’une puissance 11.1 3 thermique de 140 kW ;

- cinq compresseurs d’air d’une puissance électrique 305.2.a 3 totale de 14,1 kW ;

- une installation de climatisation d’une puissance 23 3A frigorifique de 10 kW, fonctionnant avec le réfrigérant R134a ;

- un appareil de levage ;

suivant les modalités et conditions y plus amplement mentionnées ;

Considérant que par requête déposée en date du 16 mai 2002 et inscrite sous le numéro 14920 du rôle, 1) Madame …, …..…., 81) Monsieur … , tous préqualifiés, désignés ci-après par « Madame … et consorts » ont fait introduire à l’encontre de la décision ministérielle prédésignée du 8 avril 2002 un recours en annulation, sinon en réformation ;

Considérant que par jugement du 16 décembre 2002, le tribunal a reçu le recours en réformation en la forme pour, au fond, écarter le moyen tiré de la violation de l’article 17.2 de la loi du 10 juin 1999 relative aux établissements classés et pour le surplus prononcer la rupture du délibéré afin de permettre aux parties de se prononcer sur la jonction du rôle inscrit sous le numéro 14920 avec celui introduit le 6 décembre 2002 sous le numéro 15704 ;

Considérant que, parallèlement, par arrêté du 4 octobre 2002, le ministre du Travail et de l’Emploi avait conféré l’autorisation d’installation et d’exploitation du centre d’émission prévisé suivant les mêmes désignations d’activités que celles reprises au tableau émargé dans la décision également déférée du ministre de l’Environnement précité, sauf à désigner les émetteurs d’ondes électromagnétiques comme suit :

« trois émetteurs d’ondes électromagnétiques à 600 kW fonctionnant à une fréquence de 1440 kHz (onde moyenne) dont deux émetteurs sont couplés et dont le troisième est en réserve pouvant alimenter des antennes différentes, à savoir :

- une antenne directive à 3 pylônes verticaux d’une hauteur d’installation par rapport au sol de 105 m, ayant un gain de 6 dBi, produisant une puissance maximale rayonnée de 1070 kW (p.i.r.e. de 66,3 dBW) et rayonnant à 44° ou - une antenne directive à 2 pylônes verticaux d’une hauteur d’installation par rapport au sol de 60 m, ayant un gain de 4 dBi, produisant une puissance maximale rayonnée de 1070 kW (p.i.r.e. de 64,3 dBW et rayonnant 324° » et à ajouter in fine « un pont de grue manuel d’une capacité d’environ 1500 kg » ;

Considérant que par requête déposée en date du 6 décembre 2002, Madame … et les 80 consorts préqualifiés, ont fait introduire un recours en réformation dirigé contre l’arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi précité du 4 octobre 2002 ;

Quant à la jonction des deux recours Considérant qu’à titre préliminaire, il convient de toiser la question déjà soulevée à travers le jugement précité du 16 décembre 2002 concernant la jonction des deux recours inscrits sous les numéros du rôle respectifs 14920 et 15704 ;

Considérant qu’aucune des parties ne s’étant opposée à la jonction des deux rôles en question, l’objet des deux demandes étant sensiblement identique, de même que celui des décisions déférées, il convient, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de joindre les deux recours pour les toiser par un seul et même jugement ;

Considérant que si les questions de compétence du tribunal et de recevabilité du recours ont été toisées concernant le recours inscrit sous le numéro 14920 du rôle à travers le jugement précité du 16 décembre 2002, ces mêmes questions restent à être toisées par le tribunal concernant le recours inscrit sous le numéro 15704 du rôle ;

Quant à la compétence du tribunal Considérant que dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 15704 du rôle, le délégué du Gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours en annulation introduit, tandis que le mandataire des parties tierces intéressées se rapporte à prudence de justice ;

Considérant que l’article 19 de la loi du 10 juin 1999 précitée prévoit un recours de pleine juridiction en la matière ;

Qu’il s’ensuit que le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit ;

Que les demandeurs se limitant à introduire un recours en réformation, même si dans le cadre de celui-ci ils concluent ponctuellement à l’annulation de l’arrêté ministériel déféré, le moyen d’irrecevabilité du recours en annulation mis en avant par le délégué du Gouvernement est sans objet ;

Quant à la recevabilité Considérant que relativement au recours inscrit sous le numéro 15704 du rôle, le délégué du Gouvernement se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne l’intérêt à agir des 81 demandeurs, compte tenu de la distance géographique des habitations de certains requérants par rapport au centre d’émission qui fait l’objet du recours ;

Que les deux sociétés CLT-UFA et BCE se rapportent à prudence de justice quant à la recevabilité en la pure forme du recours inscrit sous le même numéro 15704 du rôle, ainsi que concernant la question de l’intérêt à agir des demandeurs, tout en reprenant mutatis mutandis leur argumentaire déjà déployé à l’encontre du recours inscrit sous le numéro 14920 du rôle en relation avec la situation des habitations des demandeurs quant à leur distance par rapport au centre d’émission dont s’agit, dont certains aspects ont encore été repris oralement à l’audience ;

Que les parties tierces intéressées d’insister sur le fait que dans le cadre de la procédure de commodo et incommodo, la demande d’autorisation avait été dûment affichée, sans qu’aucun des demandeurs actuels n’ait introduit à l’époque la moindre réclamation écrite ou orale à l’encontre du projet en question ;

Qu’elles insistent encore sur la politique urbanistique de la commune de Munshausen ayant consisté à étendre son périmètre d’agglomération concernant plus particulièrement la localité de Marnach de manière à se rapprocher de plus en plus du centre d’émission ;

Considérant qu’en matière d’établissements classés l’intérêt à agir personnel et direct de propriétaires ou habitants – personnes physiques ou morales – d’immeubles situés dans les environnements d’une exploitation litigieuse est conditionné par le caractère suffisant de la proximité géographique de leur lieu d’habitation par rapport au lieu d’implantation de l’établissement classé dont s’agit, lequel caractère suffisant est lui-

même fonction de l’envergure de l’installation en cause, ainsi que de la nature et de l’importance des risques de nuisances mis en avant par les demandeurs ;

Que plus particulièrement le fait de ne pas avoir introduit de réclamation dans le cadre de la procédure de commodo et incommmodo n’est pas de nature à mettre à néant l’intérêt à agir des demandeurs concernés ;

Considérant qu’eu égard à l’ampleur et à la puissance des éléments émetteurs du centre d’émission radio faisant l’objet de l’arrêté ministériel d’autorisation déféré, ainsi qu’à l’incidence et à l’ampleur des ondes électromagnétiques dégagées et des champs afférents déployés, l’ensemble des demandeurs, en ce qu’ils habitent dans un rayon allant jusqu’à 1600 mètres, mesuré à partir dudit centre d’émission, justifient d’un intérêt personnel et direct suffisant à agir en l’espèce, sous réserve des précisions spécifiques à relever à l’encontre de certains d’entre eux ;

Considérant que la qualité de membres du conseil communal de Munshausen vérifiée dans le chef des demandeurs … et … n’est pas de nature à constituer un obstacle à agir dans leur chef, étant donné que ledit conseil n’a pas été amené à statuer autrement dans le cadre de la procédure d’autorisation sous rubrique, leur intérêt à agir découlant à suffisance de droit de leur qualité d’habitants proches, compte tenu des développements qui précèdent ;

Considérant que s’il est vrai que Monsieur … est échevin de la commune de Munshausen, cette qualité ne constitue, pas plus que celle de conseiller communal, un empêchement à agir en l’espèce, même si ledit collège a été appelé à émettre son avis dans le cadre de la procédure d’autorisation ayant abouti à l’arrêté ministériel déféré, le mandataire politique en question restant libre d’agir en tant que personne privée, quels qu’aient été ses avis exprimés en sa fonction élue, étant donné qu’il n’appartient pas au tribunal de juger dans quelle mesure l’intéressé arrive à mettre au diapason ses opinions personnelles privées et celles exprimées à titre officiel en tant qu’élu communal, ni à apprécier la crédibilité s’en dégageant, étant entendu en l’espèce que l’avis du collège échevinal de Munshausen ne saurait s’évaluer comme étant entièrement favorable au centre d’émission radio dont s’agit, pour avoir été émis de façon conditionnelle ;

Considérant que relativement aux cas de Messieurs… , demeurant à S…, et… , demeurant à B…, leur mandataire a expliqué à l’audience et précisé par écrit à la demande du tribunal qu’au moment de l’introduction du recours, date à laquelle s’apprécie l’intérêt à agir, les deux intéressés avaient entamé la construction de maisons unifamiliales dans le rayon prédit de 1600 mètres mesuré à partir du centre d’émission, le premier en la Munzerstrooss à 1200 mètres du centre d’émission et le second en la Schwarzenhiwwelstrooss à 300 mètres dudit centre d’émission ;

Considérant que dans l’appréciation de l’intérêt à agir peu importe le fait que hormis les consorts … , tous sont venus s’installer dans les localités de Marnach, Roder et Dorscheid après la mise en place du centre d’émission en 1955, dont plus particulièrement et en dernier lieu Messieurs … et… , en train d’ériger leurs habitations privées aux adresses prédites, étant donné que l’acceptation des risques pouvant leur être imputée au niveau civil dans le cadre d’une éventuelle demande en dommages et intérêts par eux introduite est sans incidence directe concernant l’appréciation de leur intérêt à agir devant les juridictions de l’ordre administratif apprécié suivant les critères prédits ;

Que de même, la politique d’aménagement du territoire poursuivie par les administrations communales compétentes est sans incidence directe sur l’intérêt à agir des demandeurs actuels ;

Que l’existence d’une ligne de haute tension au-dessus de la rue Op der Heed, ainsi que celle d’un émetteur GSM au niveau de la Dosberstrooss, autant qu’elles sont susceptibles d’entrer en ligne de compte concernant l’évaluation des risques mis en avant par les demandeurs au fond, n’en diminuent cependant pas l’intérêt à agir, même compte tenu de la puissance et de l’ampleur du centre d’émission dont s’agit ;

Que le moyen d’irrecevabilité tiré du défaut d’intérêt à agir soulevé est dès lors à écarter au vu de l’ensemble des développements qui précèdent ;

Considérant que la décision du ministre du Travail et de l’Emploi déférée ayant été affichée dans les maisons communales de Hosingen et de Munshausen respectivement à partir des 29 octobre 2002 et 4 décembre 2002, le recours introduit le 6 décembre 2002 répond au délai pour agir de 40 jours prévu par l’article 19 de la loi du 10 juin 1999 précitée ;

Considérant que le recours inscrit sous le numéro 15704 du rôle ayant pour le surplus été introduit suivant les formes prévues par la loi, il est à son tour recevable ;

Quant au fond Considérant que dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 15704 du rôle, les demandeurs invoquent en ordre principal les dispositions de l’article 17 de la loi du 10 juin 1999 précitée pour soutenir, pareillement à leur argumentaire déployé dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 14920 du rôle, que le centre d’émission faisant l’objet de l’autorisation déférée ne se situerait pas dans une zone prévue à ces fins par les parties graphique et écrite du plan d’aménagement général de la commune de Munshausen aux termes desquels les terrains l’accueillant pour partie sont situés en zone agricole ;

Considérant que pareillement à la prise de position dans le premier recours sous analyse, le représentant étatique et le mandataire des parties tierces intéressées concluent, suivant un argumentaire sensiblement apparenté à celui proposé auparavant, au caractère non fondé du moyen ;

Considérant qu’il convient de souligner à titre liminaire que pas plus que dans le recours parallèle introduit, les demandeurs ne critiquent l’arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi déféré, en ce que le centre d’émission radio faisant l’objet des autorisations déférées ne se situerait pas dans une zone prévue à ces fins par les parties graphique et écrite du plan d’aménagement général de la commune de Hosingen, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’analyser la question sous cet aspect, comme ne faisant pas partie de l’assiette du moyen proposé ;

Quant à l’article 17 de la loi du 10 juin 1999 Considérant que l’article 17.2 de la loi du 10 juin 1999 précitée dispose que « dans le cas où l’établissement est projeté dans des immeubles existants et dont la construction a été dûment autorisée, les autorisations requises en vertu de la présente loi ne pourront être délivrées que lorsque l’établissement projeté se situe dans une zone prévue à ces fins en conformité avec la loi du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes ou avec un plan d’aménagement établi en exécution de la loi du 20 mars 1974 concernant l’aménagement général du territoire ou avec la loi modifiée du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles. Il en est de même lorsque l’établissement est projeté dans un immeuble à construire » ;

Considérant que même si le centre d’émission radio dont s’agit a été installé en 1955, il est vrai dans des proportions plus réduites, à une époque où les communes de situation ne disposaient pas encore d’un plan d’aménagement général, il n’en reste pas moins que dans l’hypothèse d’un établissement classé projeté dans des immeubles existants et dont la construction a été dûment autorisée, cas de figure vérifié en l’espèce, les dispositions de l’article 17.2 de la loi du 10 juin 1999 prérelatées sont appelées à trouver application ;

Considérant que bien que le centre d’émission radio en question soit situé sur des terrains se trouvant à cheval entre les communes de Munshausen (section D de Roder) et Hosingen (section H du chef-lieu), les demandeurs ne concluent à son incompatibilité par rapport audit article 17.2 qu’en relation avec les dispositions du plan d’aménagement de la commune de Munshausen, sans se référer à celles de la commune voisine de Hosingen ;

Que le tribunal n’étant saisi que dans les limites des moyens présentés, il convient d’analyser la question soulevée par rapport aux dispositions du plan d’aménagement général de Munshausen, ci-après désigné par « PAG », adopté provisoirement par le conseil communal de Munshausen le 5 mars 2001 et approuvé par le ministre de l’Intérieur en date du 16 octobre 2002 sur adoption définitive par ledit conseil communal, d’après les indications non contestées fournies par les parties au dossier ;

Considérant que l’article 16 de la partie écrite dudit PAG, intitulé « zone agricole » dispose en ses alinéas premier et second que : « la zone agricole comprend les parties du territoire de la commune qui se situent à l’extérieur du périmètre d’agglomération et qui sont destinées à l’exploitation agricole.

Elle ne peut comporter que des constructions en rapport avec la destination du secteur, ainsi que des constructions d’utilité publique » ;

Considérant que le centre d’émission radio autorisé à travers la décision déférée n’étant manifestement pas en rapport avec la destination à l’exploitation agricole, il convient d’analyser s’il peut être appelé à figurer utilement parmi les constructions d’utilité publique visées in fine de l’alinéa second de l’article 16 prérelaté ;

Considérant que le fait qu’un centre d’émission radio soit construit et exploité par une personne de droit privé n’est pas de nature à lui enlever son caractère d’utilité publique, étant donné que seul l’objet de l’entreprise doit être pris en considération pour déterminer si elle poursuit un objectif d’intérêt général ;

Considérant qu’un centre d’émission radio de l’envergure de celui sous analyse, implanté depuis longue date en un lieu privilégié, - un des points culminants du pays – dans le cadre d’une concession liant l’Etat à la société exploitatrice fût-elle de droit privé suivant un cahier des charges renouvelé périodiquement, déployant une activité de médiatisation de longue portée à une échelle internationale suivant une priorité politique et économique affichée est de nature à revêtir globalement et en principe un caractère d’utilité publique ;

Que partant l’établissement classé sous rubrique rentre sous les prévisions de l’article 16 alinéa 2 du PAG de la commune de Munshausen, entraînant qu’à son tour le ministre du Travail et de l’Emploi a pu valablement conférer l’autorisation actuellement critiquée sur base de l’article 17.2 de la loi du 10 juin 1999 ;

Que dès lors le moyen laisse d’être fondé ;

Quant à l’article 7 de la loi du 10 juin 1999 Considérant que dans le cadre des deux recours en réformation les demandeurs concluent en ordre subsidiaire à l’annulation des arrêtés ministériels respectivement déférés pour violation des dispositions de l’article 7 alinéa 7 de la loi du 10 juin 1999 précitée, en ce que la demande d’autorisation serait incomplète concernant plus particulièrement les émissions d’ondes électromagnétiques provenant de l’établissement (point e), ainsi que les mesures prévues pour la surveillance des émissions en question dans l’environnement (point f) ;

Que dans un ordre d’idées subsidiaire, les demandeurs concluent encore à la réformation des arrêtés ministériels respectivement déférés en ce sens que la demande d’autorisation serait à compléter par l’indication de mesures envisagées pour prévenir, atténuer ou réduire les émissions électromagnétiques et de mesures projetées en vue de les surveiller, cette demande commune aux deux recours étant précisée à travers le deuxième en date en ce sens qu’il y aurait lieu à l’établissement d’un rapport d’analyse des risques concernant les radiations électromagnétiques par rapport au public ;

Que les demandeurs de faire valoir en fait que si dans un premier temps le dossier déposé n’avait pas contenu de renseignements quant aux émissions électromagnétiques dégagées en l’espèce par l’établissement projeté, il y aurait eu à la fin de l’année 2001, à la demande de l’Inspection du travail et des mines, versement par la société BCE d’un relevé des valeurs des mesures concernant les émetteurs à grande puissance de Dudelange, Beidweiler, Luxembourg, Marnach et Junglinster, établi conjointement par l’Institut luxembourgeois de télécommunications, l’Institut luxembourgeois de régulation et la société BCE au départ de points de mesures arrêtés par les trois intervenants ;

Que contrairement aux indications fournies par BCE dans son mémoire en réponse, concernant le site de Marnach, les mesures y réalisées le 3 octobre 2000 n’auraient pas été effectuées à proximité du centre d’émission, mais près de l’église de Hosingen, située à plus de 4,5 km dudit centre ;

Que le mesurage en question aurait seulement porté sur le champ électrique et non pas sur le champ électromagnétique ;

Que dans le cadre du recours contentieux, il est encore fait état de deux études versées au dossier administratif, sans avoir figuré comme telles au dossier de la demande d’autorisation ayant abouti aux arrêtés ministériels déférés, à savoir les rapports de mesurage relatifs aux ondes électromagnétiques émises par la station d’émission radio de Marnach établis pendant le 1er semestre de l’année 2002 par l’ EMV (Elektro-

Magnetische-Verträglichkeit)-Labor TÜV Hamburg, dont l’un établi à la demande du bureau Architekture & Design Elvis VALSECCHI, dans le cadre de la procédure d’autorisation et d’approbation d’un plan d’aménagement particulier aux confins de la localité de Dorscheid à proximité du centre d’émission et l’autre à la demande de la société BCE ;

Considérant que ces deux derniers rapports ayant été versés en cause, la demande en injonction tendant à leur dépôt, formulée dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 15704 du rôle est devenue sans objet ;

Considérant que l’article 7 de la loi du 10 juin 1999 précitée dispose en son alinéa 7 que « les demandes d’autorisation indiquent : …. e) d’une façon générale les mesures projetées en vue de prévenir ou d’atténuer les inconvénients et les risques auxquels l’établissement pourrait donner lieu, tant pour les personnes attachées à l’exploitation que pour les voisins, le public et l’environnement, et tout particulièrement la technologie prévue et les autres techniques visant à prévenir les émissions provenant de l’établissement ou, si cela n’est pas possible, à les réduire, ainsi que, en tant que de besoin, les mesures concernant la prévention et la valorisation des déchets générés par l’établissement ; f) les mesures prévues pour la surveillance des émissions dans l’environnement » ;

Considérant qu’il est constant en cause que l’établissement sous autorisations déférées relève de la classe 1 en sorte qu’une procédure de commodo et incommodo a été mise en place en l’espèce avec affichage et publication de la demande d’autorisation conformément aux dispositions de l’article 10 de ladite loi du 10 juin 1999 ;

Considérant que si la phase d’enquête publique est un élément essentiel de la procédure de commodo et incommodo devant permettre au public intéressé l’appréciation des causes de danger ou inconvénients potentiels de l’établissement à autoriser présupposant l’existence, au moment de l’ouverture de l’enquête publique, d’un dossier comportant des renseignements suffisants sur la nature et l’envergure de l’établissement projeté, ainsi que les mesures de protection envisagées par l’exploitant (cf. trib. adm. 9 décembre 1998, n° 9852 du rôle, Wilhelm, Pas. adm. 2002, V° Etablissements classés, n° 6, p. 128 et autres décisions y citées), il n’en reste pas moins que les demandeurs dans une procédure contentieuse tendant à l’annulation, sinon à la réformation de l’autorisation d’établissement délivrée sur enquête publique se trouvent forclos à critiquer le caractère incomplet du dossier, dans l’hypothèse spécifique d’une absence d’observations afférentes par eux formulées lors de l’enquête publique et en présence du fait constant que la nature et l’envergure de l’établissement projeté ainsi que les risques de danger ou d’inconvénients mis en avant à travers le recours contentieux ont été acquis en cause depuis le début de la procédure et plus particulièrement au moment de l’enquête publique ;

Considérant qu’en l’espèce, tant la nature que l’envergure du centre d’émission dont s’agit sont restés constants à travers la procédure d’autorisation et furent portés à suffisance de droit à la connaissance des intéressés, de sorte qu’en l’absence de toute observation orale ou écrite d’un quelconque concerné, dont plus particulièrement les demandeurs, ces derniers se trouvent forclos à invoquer à ce stade de la procédure contentieuse le caractère non complet du dossier à la base de la demande d’autorisation, étant entendu que la forclusion ainsi retenue laisse intact l’argumentaire – le cas échéant identique – formulé par les mêmes demandeurs à l’encontre des arrêtés d’autorisation par eux directement attaqués, notamment au niveau des conditions d’installation et d’exploitation faisant plus particulièrement l’objet des recours contentieux introduits ;

Quant à l’article 13 de la loi du 10 juin 1999 Considérant qu’en ordre plus subsidiaire, les demandeurs critiquent les arrêtés ministériels déférés, chacun en ce qui le concerne, par rapport aux dispositions de l’article 13 de la loi du 10 juin 1999 précitée, pris plus particulièrement en ses paragraphes 1, 3, 4 et 5 ;

Considérant que dans cet ordre d’idées au regard des conditions et modalités dont les arrêtés ministériels déférés seraient à assortir complémentairement, les demandeurs partent à chaque fois de la constatation que l’impact des émissions d’ondes électromagnétiques sur la santé de la population serait certain, quoiqu’inconnu à l’heure actuelle ;

Considérant que compte tenu du caractère distinct des deux décisions ministérielles déférées et des recours y relatifs, le tribunal est amené à analyser en premier lieu les éléments spécifiques mis en avant par les demandeurs concernant la décision seconde en date émanant du ministre du Travail et de l’Emploi, en raison du stade plus élaboré de l’argumentaire y relatif de son caractère actualisé ;

Considérant que les demandeurs de faire valoir que l’autorisation déférée du ministre du Travail et de l’Emploi ne serait pas conforme aux prescriptions légales en rapport avec la sécurité du public et du voisinage en général, telles que se dégageant de l’article 13, paragraphes 1 et 4 de la loi précitée du 10 juin 1999 ;

Que plus particulièrement l’arrêté ministériel en question ne répondrait pas aux exigences légales en ce qu’il ne serait pas possible de dégager si, au titre des prescriptions contenues dans la publication ITM-CL 179.3 fixant les conditions d’exploitation pour les émetteurs d’ondes électromagnétiques à haute fréquence, celles du 28 juin 2002 ou celles du 23 septembre 2002 sont d’application ;

Considérant que toute autorisation ministérielle doit à travers son contenu permettre, d’une part, son contrôle de légalité et, d’autre part, rendre possible de façon efficace son application (Cour adm. 18 mai 2000, Commune de Boevange-sur-Attert, n° 11707C du rôle, Pas. adm. 2002, V° Etablissements classés, n° 29, p. 133) ;

Considérant qu’est admissible le recours à la technique du renvoi à un document, ensemble la nécessaire précision de joindre ce document à l’autorisation délivrée pour en faire partie intégrante, emportant pour chaque personne intéressée sa mise en mesure de prendre connaissance de son contenu qu’elle est appelée à analyser suivant ses compétences et intérêts (trib. adm. 1er décembre 1999, n°s 10764 et 10765 du rôle, Majerus, non réformé sur ce point par Cour adm. 26 octobre 2000, n° 11788C du rôle, Pas. adm. 2002, V° Etablissements classés, n° 29 précité et autres décisions y citées) ;

Considérant que l’arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi déféré comporte sous le point II « Conditions particulières » l’exigence que « les installations doivent être conçues, mises en oeuvre, construites, aménagées et exploitées conformément aux prescriptions des publications : … ITM-CL179.3, conditions d’exploitation pour les émetteurs d’ondes électromagnétiques à haute fréquence dont copies sont jointes au présent arrêté pour en faire partie intégrante » ;

Considérant qu’il résulte de la copie jointe à l’arrêté du document portant l’intitulé ITM-CL179.3 que sa date d’émission est le 23 septembre 2002 ;

Considérant qu’à travers le renvoi valablement opéré et la possibilité de consultation donnée à travers le document ITM-CL179.3 joint en copie il appert que c’est la version datée du 23 septembre 2002 qui a été rendue applicable en l’espèce à travers l’arrêté ministériel déféré ;

Que le moyen est partant à écarter sous cet aspect ;

Considérant qu’à propos du renvoi opéré à travers le dossier de demande à la recommandation du Conseil du 12 juillet 1999 relative à la limitation de l’exposition du public aux champs électromagnétiques (de 0Hz à 300GH), les demandeurs de faire valoir que cette norme n’aurait pas vocation à s’appliquer au volet de la sécurité sur le lieu de travail, étant donné qu’elle préciserait qu’elle ne traite pas de la protection du travailleur quant à l’exposition professionnelle aux champs électromagnétiques ;

Considérant que dans la mesure où aucun des demandeurs ne fait valoir qu’il aurait la qualité de travailleur dans le cadre du centre d’émission sous autorisation déférée, tous ayant justifié leur intérêt à agir à travers la proximité indiquée de leurs habitations respectives par rapport audit centre, force est au tribunal de retenir qu’aucune satisfaction personnelle et directe ne saurait être obtenue par les demandeurs à travers l’aspect relevé du moyen, quel qu’en soit le mérite, de sorte que celui-ci est à écarter à son tour ;

Considérant que les demandeurs de continuer leur inventaire des critiques à l’encontre de l’arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi déféré, en ce que sur base des données techniques figurant au dossier de demande à sa base, il serait impossible de calculer les champ de proximité et champ éloigné définis à l’article 2.10 de la prescription ITM-CL179.3 du 23 septembre 2002 précitée, étant donné que la valeur D des antennes ne serait point indiquée au niveau des données techniques figurant au dossier de demande d’autorisation ;

Considérant que d’après l’article 2.10 en question, la valeur D « est la plus grande dimension de l’antenne [m] » ;

Considérant que bien que la formule comportant la variable D serve à calculer la limite entre le champ de proximité (Nahfeld) et le champ éloigné (Fernfeld) où l’onde électromagnétique est plane et que les rayonnements du champ de proximité concernent d’abord les travailleurs du centre d’émission, suivant l’article 5.1 dudit document ITM-

CLM179.3, force est au tribunal de retenir que sur base des éléments contenus audit article 2.10, à savoir la plus grande dimension de l’antenne [m], la grandeur D y définie se trouve être pour le moins déterminable au regard des données fournies au dossier y compris les études versées ;

Que le moyen est dès lors à écarter également sous cet aspect, abstraction même faite de la satisfaction personnelle et directe que les demandeurs peuvent en tirer plus en avant ;

Considérant que relativement à l’article 11 de la publication ITM-CL179.3 précitée prévoyant la création d’un registre de sécurité pour les stations émettrices, les demandeurs font valoir que l’exigence des rapports de mesure de rayonnements électromagnétiques y prévus ne seraient pas suffisamment coercitifs d’après le texte arrêté ;

Qu’ils estiment qu’une protection du public passe avant tout par une information transparente et que l’arrêté déféré du ministre du Travail et de l’Emploi pêcherait en ce qu’il ne prévoirait pas la diffusion d’informations au public habitant les localités de Marnach, Hosingen et Dorscheid au sujet des effets prévisibles des ondes électromagnétiques dégagées par le centre d’émission ;

Que dans un souci de contrôle effectif et efficace, l’autorisation d’établissement devrait fixer impérativement un nombre déterminé de mesurages du rayonnement électromagnétique à réaliser par an, à intervalles irréguliers par un organisme de contrôle autonome à partir de points de mesurages à proximité du site, sans avertissement préalable de l’exploitant de la station d’émission radio concernant la date des mesurages ;

Que les rapports des mesures devraient être tenus à disposition du public aux maisons communales de Munshausen et de Hosingen, Qu’il convient de relever encore qu’au titre de la violation alléguée de l’article 13 de la loi du 10 juin 1999 précitée, les demandeurs d’exiger la mise en place d’une expertise technique ayant pour objet la définition concrète des conditions d’aménagement et d’exploitation relatives à la sécurité du public et du voisinage en général et tendant à imposer à l’exploitant du centre d’émission à Marnach des conditions détaillées en rapport avec les mesures destinées à prévenir, à atténuer ou à réduire les inconvénients et les risques liés aux émissions d’ondes électromagnétiques ;

Considérant qu’à travers leur mémoire en réplique, les demandeurs de prendre position par rapport aux deux rapports de mesurage établis par la société EMV-Labor TÜV Hamburg précités des 29 janvier et 16 avril 2002 ;

Qu’ils se rapportent plus particulièrement aux conclusions du premier rapport en date ayant trait à un terrain situé dans la localité de Dorscheid à une distance par eux évaluée à 100 mètres du centre d’émission, devant être soumis à un plan d’aménagement particulier, conclusions suivant lesquelles, dans certaines hypothèses, y plus amplement spécifiées, les valeurs de référence concernant les émissions électromagnétiques pouvaient être dépassées tantôt pour les seuls porteurs d’implants, tantôt pour la population en général ;

Que d’après les demandeurs ces conclusions seraient pour le moins en contradiction avec celles se dégageant du rapport précité du 16 avril 2002, confectionné à la demande de la société BCE, de sorte qu’en toute hypothèse l’argument avancé par la partie publique en ce qu’une vérification supplémentaire n’aurait pas été jugée nécessaire, au motif que l’autorité compétente est en possession des deux rapports susvisés et partant au courant des résultats, serait insuffisant en l’espèce ;

Que les demandeurs de conclure ainsi au niveau du mémoire en réplique qu’au regard des résultats dégagés jusque lors une définition supplémentaire des conditions d’aménagement et d’exploitation s’avérerait indispensable ;

Que le dossier administratif n’étant pas en état de recevoir une décision, selon eux, en ce qu’il aurait dû être complété par l’établissement d’un rapport d’analyse des risques concernant la radiation électromagnétique par rapport au public, par l’indication de mesures envisagées pour prévenir, atténuer ou réduire les émissions électromagnétiques et de mesures projetées en vue de les surveiller et par la spécification concrète des conditions détaillées d’aménagement et d’exploitation relatives à la sécurité publique et du voisinage en général ;

Considérant qu’il convient de relever à ce stade qu’également à l’encontre de l’arrêté déféré du ministre de l’Environnement, les demandeurs ont conclu dès leur requête d’introductive d’instance que l’autorisation afférente ne pourrait être délivrée que sous les réserves suivantes :

« - les autorités compétentes en matière de contrôle devraient établir avant le déclenchement de la phase d’exploitation que les installations d’ondes moyennes n’engendrent aucune nuisance pour la population des localités de Marnach et Roder, - les exploitants du centre d’émission devraient s’engager à couvrir tous les frais résultant de dégâts causés à des installations électriques et électroniques, privées ou publiques, engendrés par les ondes électromagnétiques émises » ;

Que très subsidiairement concernant le volet relatif à la protection de l’air ils estiment qu’il y avait lieu à spécifier concrètement les conditions d’aménagement et d’exploitation en imposant à l’exploitant du centre d’émission à Marnach des conditions détaillées en rapport avec les restrictions de base et les niveaux de référence en vue de fournir un niveau élevé de protection par rapport aux effets avérés sur la santé qui peuvent résulter de l’exposition à des champs électromagnétiques, les mesures destinées à prévenir, à atténuer ou à réduire les inconvénients et les risques liés aux émissions d’ondes électromagnétiques, les mesures pour la surveillance de ces émissions et les mesures en vue de fournir sous une forme appropriée des informations au public habitant les localités de Marnach, Roder et Dorscheid concernant l’impact des champs électromagnétiques sur la santé ;

Que dans cet ordre d’idées, ils concluent à voir ordonner une expertise technique ayant pour objet la définition concrète des conditions prévisées avant tout autre progrès en cause ;

Que de même l’arrêté du ministre de l’Environnement serait déficient en ce qu’il ne prescrirait aucune diffusion d’informations au public habitant les localités de Marnach, Roder et Dorscheid au sujet des effets des ondes électromagnétiques ;

Considérant que la loi du 10 juin 1999 prévoit en son article 13.1 que « les autorisations fixent les conditions d’aménagement et d’exploitation qui sont jugées nécessaires pour la protection des intérêts visés à l’article 1er de la présente loi, en tenant compte des meilleures techniques disponibles, dont l’applicabilité et la disponibilité n’entraînent pas de coûts excessifs.

L’appréciation de la notion des coûts excessifs se fait par référence à des établissements de la même branche ou d’une branche similaire, de taille moyenne et économiquement saine.

Ces autorisations peuvent être limitées dans le temps et peuvent fixer le délai dans lequel l’établissement devra être mis en exploitation » ;

Considérant qu’au titre des autorisations relevant du ministre ayant dans ses attributions l’environnement le même article prévoit en son paragraphe 3 que l’autorisation « détermine les conditions d’aménagement et d’exploitation visant l’environnement humain et naturel, telles que la protection de l’air, de l’eau, du sol, de la faune et de la flore, la lutte contre le bruit et les vibrations, l’utilisation rationnelle de l’énergie, la prévention et la gestion des déchets.

L’autorisation délivrée peut être modifiée ou complétée en cas de nécessité dûment motivée » ;

Qu’au titre des attributions du ministre du Travail et de l’Emploi, le paragraphe 4 dudit article 13 prévoit que l’autorisation détermine « les conditions d’aménagement et d’exploitation relatives à la sécurité du public et du voisinage en général ainsi qu’à la sécurité, l’hygiène et la santé sur le lieu de travail, la salubrité et l’ergonomie.

L’autorisation délivrée peut être modifiée ou complétée en cas de nécessité dûment motivée.

Le ministre peut, le cas échéant, prescrire l’établissement d’un plan d’urgence interne et d’un plan d’urgence externe » ;

Considérant que dans la mesure où le document ITM-CL179.3, à travers son article 11, prévoit un registre de sécurité faisant lui-même référence à des rapports de mesures du rayonnement d’ondes électromagnétiques, il convient, dans le cadre du recours en réformation, d’analyser le bien-fondé du moyen par rapport à la condition ainsi plus particulièrement posée à travers l’arrêté déféré du ministre du Travail et de l’Emploi ;

Considérant que l’article 11 dudit document ITM-CL179.3 dispose qu’« un registre de sécurité doit être créé pour les stations émettrices. Il est à gérer par le travailleur désigné et être déposé en un lieu défini par l’exploitant. L’exploitant est tenu de communiquer les coordonnées de ce lieu à l’inspection du Travail et des Mines.

Le registre de sécurité doit être présenté sur demande aux agents de l’Inspection du travail et des mines. Il doit contenir toutes les caractéristiques et données techniques de la station, l’autorisation d’exploitation, les modes d’emploi et d’entretien, les plans et schémas, les diagrammes de l’antenne, les rapports et certificats de réception et, le cas échéant, les rapports de mesure du rayonnement électromagnétique effectués ainsi que les rapports de contrôle périodiques de même que les fiches et notes relatives aux interventions d’entretien courant et de dépannage » ;

Considérant qu’il appert que le principe des rapports de mesure du rayonnement électromagnétique se trouve d’ores et déjà arrêté, plus particulièrement à travers les dispositions de l’article 11 précité ;

Considérant que les mesures en question s’inscrivent dans le cadre des dispositions de l’article 13.5 de ladite loi du 10 juin 1999 prévoyant que « les autorisations peuvent prescrire dès réception des établissements avant leur mise en service et leur contrôle périodique qui peuvent être effectués en tout ou en partie et en cas de besoin, par des sociétés ou organismes agréés à cet effet par le ministre ayant sans ses attributions le travail et le ministre ayant dans ses attributions l’environnement.

Le rapport concernant ces réceptions et contrôles devrait être communiqué à l’autorité qui a délivré l’autorisation » ;

Considérant que compte tenu des données spécifiques fournies au dossier concernant le centre d’émission de Marnach, il convient de vérifier si la mise en place de contrôles tels ceux visés par l’article 11 dudit document ITM-CL179.3 est de nature à répondre valablement à l’argumentaire actuellement déployé par les demandeurs dans le cadre des paragraphes 3 et 4 dudit article 13 de la loi du 10 juin 1999 et dans l’affirmative quelles sont les modalités de mise en œuvre afférentes ;

Considérant qu’eu égard à la proximité de certaines habitations, dont celles de demandeurs aux présentes instances, à l’incidence non contestée d’ondes électromagnétiques dégagées par le centre d’émission sur des objets matériels, à la constatation constante d’incidences par rapport à des porteurs d’implants, à la question largement ouverte d’une incidence plus en avant pour le reste de la population – la santé humaine devant faire l’objet d’une attention toute particulière des deux ministres compétents en la matière au regard notamment de l’article 1er de la loi du 10 juin 1999 en question – et face aux conclusions pour le moins contradictoires suivant leurs libellés respectifs résultant des deux rapports versés au dossier et émanant du bureau EMV-Labor TUV Hamburg, dont le premier daté au 29 janvier 2002 comporte, suivant les hypothèses y indiquées, des dépassements des valeurs de référence arrêtées, tantôt dans le chef des seuls porteurs d’implants, tantôt dans celui de la population en général et compte tenu du fait constant que le centre d’émission, certes sous des modalités variables, fonctionne sur place depuis bientôt un demi siècle, la plupart des demandeurs étant venus s’installer à proximité durant ce laps de temps, le tribunal vient à la conclusion que l’instauration de contrôles périodiques en cours de fonctionnement de l’établissement répond à suffisance de droit et de fait aux moyens formulés par les demandeurs, lesquels se posent des questions légitimes au regard de l’incidence des rayonnements électromagnétiques constatés sur la santé humaine sans qu’actuellement cependant un impact précis d’une nature négative certaine n’ait pu être concrètement déterminé sur place à partir de l’établissement litigieux en fonctionnement constant ;

Considérant qu’au vu de l’ensemble des éléments du dossier présentés au tribunal et compte tenu des développements qui précèdent, la nécessité de plusieurs mesures du rayonnement électromagnétique s’impose par année, afin de garantir un échantillon représentatif, de sorte qu’un premier régime de mesurages est à prévoir pour une durée d’une période de trois années sous réserve de réévaluation et de fixation d’un régime de contrôle adéquat ultérieur en conséquence ;

Considérant que conformément aux conclusions des demandeurs non contestées sur ce point précis, il y a lieu d’imposer à l’exploitant de la station d’émission radio de faire effectuer par un organisme de contrôle autonome un nombre équivalant à au moins trois mesurages du rayonnement électromagnétique par an à intervalles irréguliers à partir de points de mesurage à proximité du site, dont le nombre représentatif ne peut être inférieur à six, sans avertissement préalable de l’exploitant de la station d’émission radio de la date des mesurages ;

Considérant que tant dans l’intérêt de la population concernée que dans celui des administrations communales compétentes en vue de délimiter le cas échéant les périmètres d’agglomération des localités situées à proximité du centre d’émission, il convient de communiquer les résultats des mesurages en question non seulement aux autorités de décision compétentes en la matière, mais encore aux deux administrations communales de Hosingen et de Munshausen, en vue également d’une consultation par le public ;

Considérant que les principes d’application des mesurages du rayonnement électromagnétique se trouvant fixés par réformation à travers le présent jugement, un renvoi aux ministres compétents s’impose toutefois concernant les détails afférents, notamment en relation avec la désignation des points de mesurage à proximité du site à retenir utilement et la désignation plus en avant de l’organisme de contrôle autonome devant effectuer les mesurages en question ;

Que dans la mesure où suivant l’article 11 du document 179-13 précité, l’inspection du Travail et des Mines est appelée à jouer un rôle de coordination face au registre de sécurité y visé, il convient de désigner également cette institution pour voir organiser et surveiller les mesurages requis concernant le centre d’émission de Marnach, sous l’assistance notamment des services compétents du ministre de l’Environnement ;

Considérant que dans le cadre d’un recours en réformation, le tribunal étant appelé à statuer avec effet au jour où il est amené à rendre son jugement, force est de retenir que les mesures de contrôle exigées par les demandeurs à travers le recours dirigé contre l’arrêté ministériel déféré du ministre de l’Environnement comme devant s’établir avant le déclenchement de la phase d’exploitation restent sans objet compte tenu de l’exploitation en cours du centre d’émission dont s’agit, suivant les données et informations soumises au tribunal et à défaut d’effet suspensif sollicité en l’espèce ;

Considérant que l’exigence suivant laquelle les exploitants du centre d’émission devraient s’engager à couvrir tous les frais résultant des dégâts causés par l’effet d’ondes électromagnétiques par lui émise est à écarter sous cette forme comme faisant double emploi avec les dispositions légales applicables en matière de responsabilité civile ;

Considérant que les demandeurs sollicitent enfin de voir prescrire une distance à respecter entre la station d’émission radio et les maisons d’habitation sur base des dispositions de l’article 13.5 de la loi du 10 juin 1999 ;

Considérant que la loi du 10 juin 1999 prévoit en son article 13.5 alinéa 2 que « les autorisations peuvent prescrire une distance à respecter entre l’établissement concerné et notamment d’autres établissements, maisons d’habitation et cours d’eau. En cas de contradiction entre les dispositions contenues dans l’autorisation et celles du plan d’aménagement communal, ce sont les dispositions les plus sévères qui sont applicables » ; ¨ Considérant que dans la mesure où le site même du centre d’émission n’est point sujet à discussion en l’espèce et qu’aucun des demandeurs n’entend voir fixer la distance prévue à l’article 13.5 alinéa 2 prérelaté aux dépens de sa maison d’habitation ou d’un terrain non construit lui appartenant le cas échéant, le moyen soulevé ne saurait encore apporter une satisfaction aux demandeurs actuels, lesquels, en le proposant, se mettraient pour le surplus à exercer, en dernière analyse, une attribution d’intérêt général en ce qu’ils verraient désigner de la sorte les limites du périmètre d’agglomération des communes respectives des Munshausen et de Hosingen autour du centre d’émission en question ;

Considérant que l’initiative et la compétence en vue de la délimitation du périmètre d’agglomération appartenant aux autorités communales suivant la procédure prévue à l’article 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, sous la tutelle d’approbation des ministres de l’Intérieur et de l’Environnement, il convient d’écarter le moyen ;

Quant aux frais Considérant que les recours étant partiellement fondés et dans la mesure où les parties ont succombé dans leurs moyens, il convient de faire masse des frais et de les imposer pour moitié aux demandeurs et pour l’autre moitié, à raison d’un quart à l’Etat et à raison de chaque fois un huitième à charge respectivement des sociétés CLT-UFA et BCE ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

vidant le jugement du 16 décembre 2002 ;

joint les recours inscrits respectivement sous les numéro 14920 et 15704 du rôle ;

déclare le recours en réformation inscrit sous le numéro 15704 recevable ;

déclare les deux recours partiellement fondés ;

partant, par réformation des arrêtés ministériels déférés, dit qu’il y a lieu d’adjoindre parmi les conditions particulières celle tenant à imposer à l’exploitant du centre d’émission l’obligation de faire effectuer par un organisme de contrôle agréé durant les trois premières années d’exploitation utile à venir au moins trois mesurages par année tenant au rayonnement électromagnétique des éléments d’émission du centre à tenir à des intervalles irréguliers à partir d’au moins six points de mesurage représentatifs sis à proximité du site, sans avertissement préalable dudit exploitant de la date des mesurages, le tout sous réserve de réévaluation et de fixation d’un régime de contrôle adéquat ultérieur en conséquence ;

dit que les rapports de mesures périodiques sont à déposer également aux maisons communales de Hosingen et de Munshausen en vue d’une consultation par le public ;

renvoie les dossiers aux ministres respectivement compétents, chacun en ce qui le concerne, pour exécution et détermination des modalités de détail ;

dit les recours non fondés pour le surplus ;

fait masse des frais et les impose pour moitié aux demandeurs et pour l’autre moitié, à l’Etat en raison d’un quart, ainsi qu’aux sociétés CLT-UFA et BCE chaque fois respectivement pour un huitième.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 7 juillet 2003 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Delaporte 21


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : s14920a,15704
Date de la décision : 07/07/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-07-07;s14920a.15704 ?

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