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13/06/2003 | LUXEMBOURG | N°16089

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 juin 2003, 16089


Numéro 16089 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 mars 2003 Audience publique extraordinaire du 13 juin 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16089 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 mars 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom d

e Monsieur …, né le … , de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à...

Numéro 16089 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 mars 2003 Audience publique extraordinaire du 13 juin 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16089 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 mars 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … , de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 18 décembre 2002, notifiée le 20 décembre 2002, par laquelle ledit ministre a déclaré manifestement infondée sa demande en obtention du statut de réfugié, ainsi que d’une décision confirmative prise par ledit ministre le 4 février 2003, suite à un recours gracieux du demandeur ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 mai 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Ouï le juge rapporteur en son rapport ainsi que Maître Ardavan FATHOLAZADEH, en remplacement de Maître Louis TINTI, et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-

Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 11 juin 2003.

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Le 4 novembre 2002, Monsieur … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Il fut entendu le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Ils fut en outre entendu le 12 décembre 2002 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Par décision du 18 décembre 2002, notifiée le 20 décembre 2002, le ministre de la Justice informa Monsieur … que sa demande avait été rejetée comme manifestement infondée au motif que les craintes de persécutions par lui invoquées se limiteraient au seul quartier de Mitrovica-Nord, qu’à aucun moment il n’aurait apporté un élément de preuve permettant d’établir des raisons pour lesquelles il ne serait pas en mesure de s’installer du côté albanais de Mitrovica, voire dans une autre partie du Kosovo et de profiter ainsi d’une possibilité de fuite interne, de même que les faits qu’il n’aurait de terres nulle part et qu’il n’aurait pas de travail ne sauraient être pris en considération pour conclure à une impossibilité dans son chef de trouver une protection efficace au Kosovo dans une partie autre que Mitrovica-Nord.

Suite à un recours gracieux formulé par lettre du 20 janvier 2003 à l’encontre de cette décision ministérielle, le ministre de la Justice confirma sa décision initiale par courrier datant du 4 février 2003.

Monsieur … a fait introduire un recours tendant à l’annulation des décisions ministérielles prévisées des 18 décembre 2002 et 4 février 2003 par requête déposée le 5 mars 2003.

L’article 10 de la loi précitée du 3 avril 1996 prévoyant expressément qu’en matière de demandes d’asile déclarées manifestement infondées au sens de l’article 9 de la loi précitée de 1996, seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives, le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit par ailleurs dans les formes et délai prévus par la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur soutient en substance que les décisions ministérielles attaquées seraient basées sur une erreur manifeste d’appréciation des circonstances de droit et de fait.

Dans cet ordre d’idées, il expose qu’en tant que Musulman il aurait été confronté à de graves problèmes émanant de Serbes habitant sa région de résidence, en l’occurrence Mitrovica-Nord, sans que les autorités policières sur place n’aient été en mesure de le protéger à suffisance. Quant au reproche lui adressé de ne pas avoir cherché à profiter d’une possibilité de fuite interne, le demandeur rappelle que pendant les troubles de février 2001, les forces de la KFOR l’auraient convoyé de force au côté sud de Mitrovica où il serait resté deux semaines sous une tente dans le quartier de Travnic et que, lors de ce séjour dans ce quartier, un groupe de personnes masquées serait arrivé et lui aurait demandé de l’argent sous la menace de mettre le feu, de sorte qu’il aurait été obligé de retourner du côté nord de Mitrovica. Le demandeur estime que dans ces conditions la preuve serait rapportée qu’il n’existerait pas de possibilité pour lui de s’installer en toute sécurité dans une autre partie du Kosovo.

Le délégué du Gouvernement estime que le ministre de la Justice a fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que celui-ci resterait toujours en défaut d’établir une impossibilité dans son chef de s’installer dans la zone albanaise de Mitrovica ou encore dans une autre partie du Kosovo globalement considéré.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement ou si la demande repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures en matière d’asile».

En vertu de l’article 4 du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsque le demandeur d’asile, invoquant des persécutions qui sont limitées à une zone géographique déterminée, aurait pu trouver une protection efficace dans une autre partie de son propre pays, qui lui était accessible ».

En l’espèce, le demandeur conteste que les conditions justifiant une décision de rejet de sa demande d’asile dans le cadre de l’article 4 du règlement grand-ducal précité du 22 avril 1996 soient remplies et, dans ce contexte, il fait essentiellement état de persécutions ou de risques de persécutions émanant de Serbes résidant également à Mitrovica-Nord, sans que le demandeur ne se prévale d’une crainte de persécution s’étendant sur tout le territoire du Kosovo.

A partir des éléments ainsi dégagés, il y a lieu de conclure que la situation du demandeur est susceptible de s’inscrire dans le cas d’ouverture de l’article 4 du règlement grand-ducal précité du 22 avril 1996.

Dans la mesure où aucun élément du dossier ne permet d’établir que les Albanais du Kosovo, majoritaires dans cette province, ne disposeraient pas d’un accès effectif et raisonnable à l’ensemble de son territoire, la décision ministérielle déférée est motivée à suffisance par référence aux dispositions de l’article 4 du règlement grand-ducal précité du 22 avril 1996, de manière que le recours sous analyse est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 13 juin 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 3


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16089
Date de la décision : 13/06/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-06-13;16089 ?

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