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12/06/2003 | LUXEMBOURG | N°15385,15688

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 12 juin 2003, 15385,15688


Tribunal administratif N° 15385 et 15688 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits respectivement les 24 septembre et 3 décembre 2002 Audience publique du 12 juin 2003

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Recours formé par Monsieur … contre une décision de la commission prévue par l’article 12 de la loi du 26 juillet 1986 en matière d’exécution des peines

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JUGEMENT

I.

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15385 du rôle, déposée le 24 septembre

2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Olivier LANG, avocat à la Cour, inscrit au tableau de ...

Tribunal administratif N° 15385 et 15688 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits respectivement les 24 septembre et 3 décembre 2002 Audience publique du 12 juin 2003

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Recours formé par Monsieur … contre une décision de la commission prévue par l’article 12 de la loi du 26 juillet 1986 en matière d’exécution des peines

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JUGEMENT

I.

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15385 du rôle, déposée le 24 septembre 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Olivier LANG, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Differdange, actuellement détenu au Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, tendant à l’annulation d’une « décision du 12 juillet 2002 », qui aurait été prise par la commission prévue par l’article 12 de la loi modifiée du 26 juillet 1986 relative à certains modes d’exécution des peines privatives de liberté, par laquelle aurait été ordonné le placement de Monsieur … en régime cellulaire strict pour une durée de 28 jours ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 octobre 2002 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom du demandeur au greffe du tribunal administratif le 28 novembre 2002 ;

II.

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15688 du rôle, déposée le 3 décembre 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Olivier LANG, préqualifié, au nom de Monsieur …, préqualifié, tendant à l’annulation d’une décision du 10 juillet 2002 prise par la commission prévue par l’article 12 de la loi précitée du 26 juillet 1986, par laquelle a été confirmée une décision du délégué du procureur général d’Etat du 11 juin 2002 ayant ordonné le placement de Monsieur … en régime cellulaire strict pour une durée de 28 jours ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 9 décembre 2002 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom du demandeur au greffe du tribunal administratif le 19 décembre 2002 ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 janvier 2003 ;

I. et II.

Vu les pièces versées en cause et notamment les actes attaqués ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Olivier LANG, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives.

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Par décision du délégué du procureur général d’Etat du 11 juin 2002, Monsieur … fut placé en régime cellulaire strict pour une durée de 28 jours, au motif qu’il aurait accumulé des médicaments non prescrits avec circonstances aggravantes. Un recours dirigé contre cette décision du 11 juin 2002 fut rejeté par décision rendue le 10 juillet 2002 par la commission prévue par l’article 12 de la loi modifiée du 26 juillet 1986 relative à certains modes d’exécution des peines privatives de liberté, ci-après dénommée la « commission ».

Par un transmis daté du 12 juillet 2002, le délégué du procureur général d’Etat transmit au directeur du Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig le contenu de la décision précitée de la commission du 10 juillet 2002 avec prière d’en informer Monsieur ….

Par une première requête, inscrite sous le numéro 15385 du rôle, déposée au greffe du tribunal administratif en date du 24 septembre 2002, Monsieur … a introduit un recours tendant à l’annulation d’une « décision du 12 juillet 2002 » de la commission, par laquelle aurait été confirmée la décision du délégué du procureur général d’Etat du 11 juin 2002 ordonnant son placement en régime cellulaire strict pour une durée de 28 jours.

Par une deuxième requête, inscrite sous le numéro 15688 du rôle, déposée le 3 décembre 2002 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision de la commission du 10 juillet 2002, par laquelle a été rejeté son recours introduit contre la décision précitée du délégué du procureur général d’Etat du 11 juin 2002.

Dans le cadre d’une bonne administration de la justice, il y a lieu de faire droit à la demande présentée par Monsieur … tendant à la jonction des affaires inscrites sous les numéros 15385 et 15688 du rôle, à laquelle le délégué du gouvernement ne s’est pas opposé, afin d’y statuer par un seul et même jugement, dans la mesure où elles concernent les mêmes parties et qu’elles tendent au même objet.

Il échet tout d’abord de relever qu’en ce qui concerne l’instance introduite sous le numéro 15385 du rôle, qu’au cours de l’audience à laquelle l’affaire a été plaidée, le délégué du gouvernement a demandé acte de ce qu’il renonce à ses moyens tirés de l’incompétence tant des juridictions administratives que du tribunal administratif pour connaître de ce recours, de sorte qu’il échet de lui en donner acte.

A l’appui de ce recours, le demandeur soutient que dans la mesure où le délégué du procureur général d’Etat aurait collaboré à la décision de la commission, ce qui ressortirait de la signature de la « décision » de la commission en date du 12 juillet 2002, celle-ci devrait être annulée, en ce qu’elle aurait été prise en violation de l’article 11-1 alinéa 2 de la loi précitée du 26 juillet 1986 suivant lequel le procureur général d’Etat ou son délégué qui a pris la décision attaquée ne fait pas partie de la commission.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement attire l’attention du demandeur sur le fait que le délégué du procureur général d’Etat ayant pris la décision du 11 juin 2002 n’aurait pas siégé dans la commission ayant pris la décision du 10 juillet 2002 (et non pas le 12 juillet 2002 comme indiqué par le demandeur), qui aurait été composée par trois autres magistrats, en relevant que ledit délégué n’aurait signé que le transmis du 12 juillet 2002 par lequel le directeur du Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig a été informé de la décision prise par la commission le 10 juillet 2002.

Il suit de ces éléments ainsi que des autres pièces et éléments du dossier ensemble les renseignements fournis oralement au cours des plaidoiries par les parties à l’instance, que ce premier recours introduit par le demandeur est dirigé contre un simple transmis, par lequel le directeur du Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig a été informé du contenu d’une décision prise antérieurement, à savoir le 10 juillet 2002, par la commission sur recours dirigé par le demandeur contre la décision du délégué du procureur général d’Etat du 11 juin 2002 et non pas contre la décision elle-même, rendue par la commission le 10 juillet 2002, de sorte que ce premier recours est à déclarer irrecevable pour être dirigé contre une simple lettre d’information et non pas une décision de nature à faire grief au demandeur.

Le recours en annulation, introduit sous le numéro 15688 du rôle, est quant à lui recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi, aucun moyen d’incompétence n’ayant été soulevé par le délégué du gouvernement dans le cadre de ce recours.

A l’appui de ce deuxième recours, le demandeur fait exposer que la sanction prononcée à son encontre par le délégué du procureur général d’Etat en date du 11 juin 2002, telle que confirmée par la commission dans sa décision du 10 juillet 2002, lui aurait été infligée en raison du fait que dans l’armoire de rangement qui lui aurait été affectée en sa qualité d’apprenti-cuisinier travaillant dans les cuisines du Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, des agents de sécurité auraient trouvé lors d’un contrôle un sachet provenant de l’infirmerie du Centre contenant une cinquantaine de pilules qui « sembleraient pouvoir être qualifiées de stupéfiants ». Il conteste toutefois avoir déposé ledit sachet dans son armoire personnelle qui, alors même qu’elle aurait pu être fermée à clef, n’aurait plus « réellement ni efficacement [pu être fermée] à clef », étant donné qu’elle aurait été « forcée » par « certains détenus », comme cela aurait été le cas pour « plus de la moitié des armoires de la cuisine ». Ainsi, il soutient qu’il aurait été très facile d’ouvrir son armoire, non seulement avec la clef qui était en sa possession, mais également par n’importe quel autre instrument, comme par exemple un couvert à table.

Il estime qu’en raison de graves tensions qui auraient existé entre certains détenus peu avant la découverte des pilules, ainsi qu’en raison de jalousies que certains détenus auraient montré à son encontre du fait qu’il aurait réussi à constituer une petite équipe motivée accomplissant du « bon travail » dans les cuisines, un détenu « mal intentionné » appartenant à un groupe de personnes « réfractaires au travail » aurait intentionnellement déposé lesdites pilules dans son armoire afin de lui nuire. Ce geste serait d’ailleurs à placer dans le contexte de menaces de mort, d’actes de sabotage en cuisine et de déclarations mensongères à son encontre qui auraient eu lieu « peu avant la découverte des pilules » de la part d’une des personnes appartenant à ce groupe adverse de détenus.

Il rappelle encore que déjà dans son recours introduit devant la commission à l’encontre de la décision du délégué du procureur général d’Etat du 11 juin 2002, il a formulé une requête tendant à l’institution d’une mesure d’expertise ayant pour objet d’établir les conditions dans lesquelles il a été possible « d’ouvrir et de refermer [son] armoire (…) sans l’aide de clef », mais que ladite demande d’expertise a été rejetée par la commission dans sa décision précitée du 10 juillet 2002.

Il reproche tout d’abord à la commission de ne pas avoir fait droit à sa demande tendant à voir ordonner l’expertise dont question ci-avant, en ce que ladite commission a retenu « ne pas devoir faire droit à la demande d’expertise au motif qu’indépendamment des résultats d’une telle mesure, il n’en reste pas moins, que les médicaments ont été trouvés dans l’armoire utilisée par le détenu [à savoir Monsieur …] qui était en possession de la clef et qui donc en avait l’accès et que l’expertise ne permettrait pas de disculper … des faits à sa charge », en estimant qu’une telle conclusion violerait le principe général de la présomption d’innocence, étant donné que justement ladite expertise aurait eu pour objet d’établir que toute personne, même celles qui n’étaient pas en possession de la clef de son armoire, aurait pu avoir accès à son armoire en forçant la serrure notamment au moyen d’« un outil de type couvert à table ».

Ainsi, la commission aurait violé le principe de la présomption d’innocence en ce qu’avant de prendre sa décision, elle ne se serait pas assurée du fait que seul lui-même pouvait être en mesure d’ouvrir son armoire avec la clef qui était en sa possession.

Il soutient enfin que dans la mesure où la sanction qui lui a été infligée par le délégué du procureur général d’Etat, telle que confirmée par la commission, s’apparenterait à une peine privative de liberté, en ce qu’il a été placé en régime cellulaire strict pour une durée de 28 jours, la Convention européenne des droits de l’homme, et plus particulièrement le principe général de la présomption d’innocence y visé, devraient s’appliquer en l’espèce.

Le délégué du gouvernement estime que la décision de la commission du 10 juillet 2002 serait justifiée à suffisance de droit au vu de la gravité des faits commis par le demandeur, en ce que ce dernier aurait stocké dans son armoire « une quantité considérable de médicaments (neuroleptiques) dont pour 4 d’entre eux la prescription et la remise n’ont jamais été effectuées par l’infirmerie du CPL ». Il se réfère dans ce contexte non seulement au « compte rendu d’incidents » du 29 mai 2002 mais également au rapport établi le 2 juin 2002 par le contrôleur A. Th.

Il soutient encore, sans autrement entrer dans le détail du moyen afférent présenté par le demandeur, que la commission aurait à bon droit refusé de faire droit à la demande de Monsieur … tendant à voir ordonner une mesure d’expertise, en soutenant que celle-ci n’aurait pas permis de le disculper.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur conteste « avec la plus grande énergie » être à l’origine de la présence des pilules dans son armoire et il soutient que les pièces versées par l’Etat, à savoir les rapports précités du 29 mai et 2 juin 2002, ne sauraient constituer une preuve suivant laquelle il aurait lui-même déposé les substances incriminées dans son armoire, le seul fait constant étant celui qu’une certaine quantité de médicaments s’y trouvait au moment du contrôle. Il reproche encore dans ce contexte aux procès-verbaux de ne pas mentionner que dans un premier temps, un adjudant-chef, co-signataire des rapports en question, aurait, devant témoins, ouvert, sans l’aide d’une clef, son armoire, pour ensuite la refermer de la même manière, avant d’aller récupérer les clefs de son armoire qui se trouvaient en sa possession. Il reproche enfin audit adjudant-chef de nourrir à son égard une certaine animosité qui ressortirait d’ailleurs du rapport complémentaire du 2 juin 2002, en contestant en outre le caractère véridique dudit rapport.

Il soumet une offre de preuve au tribunal afin d’établir, par tous moyens de droit, notamment par l’audition des témoins énumérés au dispositif de son mémoire en réplique, certains faits plus particulièrement énumérés audit dispositif, ladite offre de preuve ayant en substance pour objet d’établir que depuis un an avant la date du 29 mai 2002 et que plus particulièrement à la date en question, plusieurs armoires des détenus situées dans les cuisines et plus particulièrement la sienne, ne pouvaient plus être fermées efficacement à clef et que notamment l’adjudant-chef Th. aurait pu l’ouvrir sans l’aide d’aucune clef.

Il se plaint par ailleurs de ce qu’en raison de l’article 49, paragraphe 3 du règlement grand-ducal du 24 mars 1989 concernant l’administration et le régime interne des établissements pénitentiaires « aucun membre du personnel de l’administration pénitentiaire ne peut, sous peine des sanctions disciplinaires prévues par la législation afférente fournir, sans l’autorisation expresse de la direction générale, à d’autres qu’à des autorités publiques, des renseignements ou attestations, de quelque nature que ce soit, relatifs aux détenus ou aux divers services ». Il aurait ainsi été dans l’impossibilité de verser au tribunal des attestations testimoniales afin d’établir la véracité des faits qu’il allègue.

Afin d’établir que quelques jours avant la découverte des médicaments dans son armoire, une « ambiance malsaine » aurait régné en cuisine, le demandeur entend voir ordonner « au Centre pénitentiaire de Luxembourg, respectivement au Gouvernement » de communiquer certains comptes rendus qui devraient se trouver dans son dossier administratif, afin qu’il soit mis en mesure d’établir le contexte dans lequel les médicaments ont été trouvés dans son armoire, étant donné qu’il est d’avis qu’il s’agirait « d’un coup monté contre lui par certains membres du groupe réfractaire au travail en cuisine ».

En se basant sur des attestations émises par des agents de sécurité du Centre pénitentiaire, le délégué du gouvernement conteste dans son mémoire en duplique la défectuosité de l’armoire du demandeur, ainsi que le fait que ladite armoire aurait été ouverte par l’adjudant-chef Th. sans l’aide d’aucune clef. Il s’oppose également à toute mesure d’instruction, telle que sollicitée par le demandeur.

Au cours des plaidoiries, le demandeur fait ajouter que les principes du procès équitable et de l’égalité des armes n’auraient pas été respectés en l’espèce du fait qu’il aurait été dans l’impossibilité de faire dresser des attestations par des membres du personnel du Centre pénitentiaire, au vu de l’article 49, alinéa 3 du règlement grand-ducal précité du 24 mars 1989, en concluant de ce fait à une violation des droits de l’homme, ainsi qu’à une violation de ses droits de la défense.

Le rôle du juge administratif, en présence d’un recours en annulation, se limite à la vérification de la légalité et de la régularité formelle de l’acte administratif attaqué.

L’appréciation des faits échappe au juge de la légalité, qui n’a qu’à vérifier l’exactitude matérielle des faits pris en considération par la décision. Le juge ne peut que vérifier, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, si les faits sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute (trib. adm. 27 janvier 1997, Pas. adm. 2002, V° Recours en annulation, II. Pouvoirs du juge, n° 9 et autres références y citées, p. 512).

En outre, dans le cadre d’un recours en annulation, le tribunal ne vérifie la légalité de la décision attaquée qu’au vu des pièces du dossier, de sorte que ce n’est qu’au cas où il existe des éléments concordants résultant du dossier qui font croire aux faits dont le demandeur offre de rapporter la preuve, que le tribunal fait droit à une demande tendant à faire procéder à une mesure d’instruction, notamment par l’audition de témoins, comme c’est le cas en l’espèce (cf. trib. adm. 3 juillet 1997, n°s 9839 et 9840 du rôle, Pas. adm. 2002, V° Recours en annulation, II. Pouvoirs du juge, n° 17, p. 514).

En l’espèce, le demandeur conteste la véracité des faits se trouvant à la base de la mesure disciplinaire prise à son encontre, en soutenant qu’alors même qu’une certaine quantité de médicaments avait été trouvée dans son armoire située dans la cuisine centrale, lors d’un contrôle effectué par les agents de sécurité en date du 29 mai 2002, lesdits médicaments n’y auraient pas été déposés par lui-même, mais qu’ils auraient pu y être déposé par n’importe quelle autre personne, en ce que son armoire aurait non seulement pu être ouverte par la clef qui était en sa possession, mais également par tout autre moyen, au vu de la défectuosité de la serrure de celle-ci.

Au vu de ces contestations quant à la matérialité des faits se trouvant à la base de la décision attaquée, il appartient au tribunal de vérifier, sur base des pièces versées par les deux parties à l’instance, la réalité des faits ainsi que le cas échéant l’existence d’éléments concordants de nature à établir la version des faits telle que présentée par le demandeur voire des indices en ce sens, de manière à justifier, au cas où la version des faits présentée par le demandeur ne ressortirait pas d’ores et déjà du contenu du dossier versé au tribunal, une mesure d’instruction notamment par l’audition de témoins, telle que sollicitée par le demandeur.

Il échet tout d’abord de relever qu’il ressort d’un compte rendu d’incident du 29 mai 2002, signé par les agents Cl.P. et L.T., ainsi que d’un rapport signé par l’adjudant chef-

contrôleur A.Th. en date du 2 juin 2002, que lors d’un contrôle de la salle de séjour des détenus située dans la cuisine, notamment l’armoire du demandeur avait été ouverte en présence de trois témoins moyennant la clef qui leur a été délivrée par le demandeur lui-même et que ladite armoire renfermait six types différents de médicaments dont quatre n’avaient pas été prescrits par l’infirmerie de la prison. Il ressort encore plus particulièrement du rapport du 2 juin 2002 qu’à la suite des contestations du demandeur suivant lesquelles la serrure de son armoire aurait été défectueuse et qu’elle aurait pu être ouverte par n’importe quel outil, le signataire dudit rapport précisa que cette version des faits ne correspondait pas à la vérité, étant donné qu’en date du 29 mai 2002, lors du contrôle précité de l’armoire du demandeur, celle-ci pouvait seulement être ouverte au moyen de la clef qui se trouvait en possession du demandeur. Il ressort enfin dudit rapport qu’en date du 29 mai 2002, la serrure de l’armoire du demandeur n’a pas été défectueuse.

Il ressort par ailleurs d’un rapport daté du 2 janvier 2003 transmis par les adjudants chefs G.Sch et A.Th, ainsi que des attestations figurant en annexe à ce dernier, portant la même date et signé par P.St., en sa qualité de chef du service « dispatching », M.H., en sa qualité de cuisinier en chef, et A.K. du service « dispatching », qu’avant le contrôle des trois seules armoires fermées à clef, situées dans la cuisine centrale, les agents contrôleurs ne connaissaient pas les identités des détenus qui en avait la jouissance, qu’à aucun moment, il n’était question d’une défectuosité des serrures desdites armoires, que notamment celle du demandeur a été ouverte moyennant la clef qui avait été remise par celui-ci aux agents contrôleurs et que le demandeur n’a déclaré que le lendemain dudit contrôle, après la découverte des médicaments litigieux, que la serrure de son armoire aurait été défectueuse déjà avant ledit contrôle. Il ressort en outre dudit rapport du 2 janvier 2003 que l’adjudant chef A.Th. conteste formellement avoir procédé à l’ouverture de l’armoire du demandeur avant la remise de la clef se trouvant en possession de celui-ci pour la refermer ensuite de la même manière, avant de solliciter la remise de ladite clef auprès du demandeur lui-même. Cette version des faits est d’ailleurs confirmée par les déclarations effectuées par les prénommés P.St., M.H. et A.K.. Enfin, l’adjudant chef A.Th. conteste nourrir un quelconque préjugé à l’encontre du demandeur et ne faire aucune discrimination à son encontre.

Face à ces faits qui ressortent clairement des procès-verbaux et rapports précités, le demandeur, à part un certain nombre d’allégations qui ne sont soutenues par aucune pièce et aucun élément du dossier se trouvant à la disposition du tribunal, n’apporte aucune preuve ou un quelconque élément permettant de faire croire à son récit, de sorte que les faits ressortant des rapports précités sont à considérer comme étant exacts et que la commission, dans sa décision du 10 juillet 2002, a valablement pu s’y baser pour prendre sa décision, sans qu’elle avait à faire droit à la demande du demandeur tendant à l’institution d’une mesure d’instruction supplémentaire.

Au vu des conclusions qui précèdent, et notamment de la vérification que les faits sur lesquels s’est basée la commission sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute, il y a lieu de rejeter le recours comme n’étant pas fondé, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner au gouvernement la remise de certaines pièces, telles que sollicitées par le demandeur, ou de procéder à une mesure d’instruction, étant entendu que le simple fait par l’article 49, alinéa 2 du règlement grand-ducal précité du 24 mars 1989 de prévoir qu’à défaut d’autorisation expresse à obtenir de la direction générale de l’administration pénitentiaire, aucun membre du personnel de celle-ci ne peut émettre notamment des attestations relatives aux détenus, n’est pas de nature à porter atteinte aux droits de la défense du demandeur ou au principe de la présomption d’innocence, étant donné que cette disposition qui a trait au statut du personnel employé par l’administration pénitentiaire n’a ni pour objet ni pour effet de porter atteinte au droit et au principe précités, puisque le demandeur, comme tout autre détenu, peut recourir à d’autres moyens de preuve afin d’établir les faits dont il allègue l’existence et qu’il est légitime de prévoir, dans le cadre du statut du personnel employé par l’administration pénitentiaire, une obligation suivant laquelle ils n’ont pas à émettre des attestations sur demande des détenus, afin d’assurer leur autorité face à ceux-ci. Il échet d’ajouter dans ce contexte qu’en l’espèce, il ne ressort d’aucune pièce et d’aucun élément du dossier qu’à un quelconque moment le demandeur ait sollicité l’émission d’une attestation par un membre du personnel de l’administration pénitentiaire, qui aurait le cas échéant pu être autorisé par la direction générale à ces fins et que pour le surplus, plusieurs membres dudit personnel, présents lors du contrôle du 29 mai 2002, ont émis des rapports et comptes rendus dont ressortent une version des faits contraire à celle présentée par le demandeur.

Le demandeur demande encore à se voir donner acte de ce qu’il bénéficie de l’assistance judiciaire, demande à laquelle il échet de faire droit.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

donne acte au demandeur de ce qu’il bénéfice de l’assistance judiciaire ;

ordonne la jonction des affaires inscrites sous les numéros 15385 et 15688 du rôle ;

donne acte à l’Etat de ce qu’il renonce à ses moyens d’incompétence soulevés dans l’affaire inscrite sous le numéro du rôle 15385 ;

déclare le recours inscrit sous le numéro 15385 du rôle irrecevable ;

reçoit le recours en annulation inscrit sous le numéro 15688 du rôle en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 12 juin 2003 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 15385,15688
Date de la décision : 12/06/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-06-12;15385.15688 ?

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