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04/06/2003 | LUXEMBOURG | N°15853

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 04 juin 2003, 15853


Tribunal administratif N° 15853 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 janvier 2003 Audience publique du 4 juin 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15853 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 janvier 2003 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … , de n

ationalité camerounaise, demeurant actuellement à L-… , tendant à l’annulation d’une décision du mi...

Tribunal administratif N° 15853 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 janvier 2003 Audience publique du 4 juin 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15853 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 janvier 2003 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … , de nationalité camerounaise, demeurant actuellement à L-… , tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 23 octobre 2002 refusant de faire droit à sa demande en obtention d’une autorisation de séjour provisoire pour étudiants et l’invitant à quitter le pays sans délai ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 28 mars 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 21 mai 2003.

Par décision datant du 4 septembre 2002, le ministre de la Justice accorda à Monsieur …, de nationalité camerounaise, une autorisation de séjour provisoire pour étudiants valable jusqu’au 31 octobre 2002 sous les précisons suivantes :

« La présente autorisation n’est prorogeable que sur base d’un dossier complet à déposer avant le 31 octobre 2002 comprenant :

- copie certifiée conforme du passeport intégral ;

- original ou copie certifiée conforme de l’inscription définitive pour l’année académique 2002/2003 ;

- preuve attestant un logement au pays ;

- certificat de droit aux prestations d’une assurance-maladie ;

- déclaration de prise en charge dûment légalisée ou preuve de moyens d’existence personnels ;

- garantie bancaire d’un montant de 2.200.- EUR en faveur du ministère de la Justice pour la durée d’un an, déposée auprès d’un institut financier agréé au Luxembourg.

Muni d’un passeport national valable, l’intéressé est invité à se présenter, soit dans son pays d’origine, soit dans le pays où il est autorisé à résider, auprès d’une représentation diplomatique ou consulaire du Luxembourg pour y solliciter une autorisation de séjour provisoire ».

La même décision ministérielle est pourvu en outre des indications suivantes :

« 1. L’autorisation de séjour est délivrée jusqu’au 30 septembre qui suit la fin de l’année académique.

2. Elle est reconduite pour une nouvelle durée de 12 mois, sur base d’un dossier complet, si l’étudiant a accompli avec succès son année académique.

3. Exceptionnellement, elle peut être reconduite pour une durée de 12 mois, toujours sur base d’un dossier complet, si l’année académique s’est soldée par un échec. Pour le surplus, une « reconversion » de l’étudiant est possible une seule fois.

4. L’autorisation de séjour perd sa validité si les études sont interrompues ou abandonnées.

5. L’autorisation de séjour ne donne pas droit à l’exercice d’une activité salariale. Elle perd sa validité si le ministère de la Justice devait apprendre que l’octroi d’un permis de travail a été sollicité.

6. Le travail de vacances ne doit pas dépasser 2 mois par an.

7. L’étudiant bénéficiant d’une autorisation de séjour au Luxembourg n’a pas droit au regroupement familial.

8. A la fin de ses études, l’étudiant doit retourner, soit dans son pays d’origine, soit dans le pays où il est légalement établi.

9. L’étudiant qui désire poursuivre des études au Luxembourg et qui se trouve déjà sur le territoire d’un autre Etat membre de l’UE, doit être, à la date à laquelle il introduit sa demande, en possession d’une autorisation de séjour valable dans ce pays ».

Par courrier datant du 23 octobre 2002, le ministre s’adressa à l’Institut Supérieur de Technologie au sujet de la nouvelle demande en obtention d’une autorisation de séjour provisoire pour étudiants en faveur de Monsieur … dans les termes suivants :

« Monsieur, En réponse à votre courrier du 14 octobre 2002, par lequel vous m’informez que Monsieur …, n’a pas réussi son test d’aptitude aux études d’ingénieur industriel pour l’année académique 2002/2003, j’ai le regret de vous informer qu’une autorisation de séjour ne saurait lui être délivrée.

Par conséquent, l’intéressé est invité à quitter le pays avant le 31 octobre 2002.

Je regrette de ne pouvoir réserver d’autres suites à cette affaire.

Je vous prie de bien vouloir en aviser l’intéressé ».

Par requête déposée en date du 10 janvier 2003, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 23 octobre 2002.

A l’appui de son recours, il fait valoir que le ministre de la Justice aurait établi dans le strict respect de la légalité des lignes de conduite en exécution de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3. l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, et que celles-ci, par ailleurs renseignées dans un formulaire intitulé « autorisation de séjour provisoire pour étudiants », seraient d’application depuis le 1er septembre 1988.

Estimant remplir toutes les conditions ainsi posées par l’autorité compétente, le demandeur fait valoir que le refus lui opposé traduirait une violation du principe de la confiance légitime, voire une violation du principe de l’égalité de tous devant la loi, étant donné que d’autres étudiants se trouvant dans la même situation qui lui-même auraient bénéficié d’une autorisation de séjour provisoire pour étudiants. Le demandeur conclut en outre au caractère disproportionné de la décision prise par rapport au but poursuivi en faisant valoir que le fait pour lui de devoir abandonner ses études poursuivies désormais au Centre Universitaire de Luxembourg le placerait dans une situation difficilement supportable d’un point de vue humain.

Le délégué du Gouvernement rétorque que conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée, une autorisation de séjour peut être refusée notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers. Il estime que dans la mesure où force serait de constater que Monsieur … n’a pas établi disposer de moyens personnels propres suffisants au sens de la disposition légale prévisée au moment où la décision attaquée fut prise, celle-ci serait justifiée. Il rappelle en outre à ce sujet que la preuve des moyens d’existence devrait être rapportée par la production d’un permis de travail certifiant que l’intéressé peut légalement s’adonner à un travail au pays.

Le ministre a encore motivé sa décision de refus du 13 octobre 2002 par le fait que Monsieur … n’a pas réussi son test d’aptitude aux études d’ingénieur industriel pour l’année académique 2002/2003.

La légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération de la situation de droit et de fait existant au jour où elle a été prise, de même qu’il appartient au juge de vérifier, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, si les faits sur lesquels se fonde l’administration, sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute, sans qu’il ne puisse se livrer, dans le cadre d’un recours en annulation, à une appréciation de l’opportunité de la décision litigieuse.

S’il est certes vrai que l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée, en disposant que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : – qui est dépourvu de papiers de légitimation prescrits, et de visa si celui-

ci est requis, – qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour », accorde au ministre la possibilité de refuser l’entrée et le séjour à un étranger rentrant dans les prévisions dudit article, il n’en reste cependant pas moins que les possibilités de refus ainsi énoncées constituent une faculté de refus par le ministre (cf. Cour adm. 20 mai 2003, n° 16092C du rôle, non encore publié).

Il est constant à partir des pièces versées au dossier que le ministre a élaboré des lignes de conduite internes en matière d’octroi d’une autorisation de séjour à des étudiants étrangers en déterminant notamment les garanties requises dans leur chef en vue d’assurer qu’ils puissent supporter les frais de voyage et de séjour au pays pendant la période concernée, étant entendu que par essence, des étudiants ne sont en principe pas censés se livrer à des activités rémunérées.

Au vu de la publicité conférée par le ministre de la Justice aux lignes de conduite applicables en matière d’autorisation de séjour provisoire pour étudiants à travers l’établissement d’un formulaire afférent destiné aux personnes intéressées, ainsi que, tel le cas en l’espèce, par une information concrète et détaillée directement adressée au demandeur comportant l’énoncé des pièces à déposer dans le cadre de la demande d’autorisation, il y a lieu de retenir que le ministre ne peut pas valablement justifier la décision litigieuse dans son résultat par référence à la faculté de refus lui accordée par les dispositions de l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée en exigeant dans le chef de l’étudiant concerné la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, sous peine de méconnaître les lignes de conduite qu’il s’est lui-même fixées en la matière et de ne pas respecter le principe de l’égalité de traitement de l’ensemble des étudiants étrangers concernés.

Il se dégage des considérations qui précèdent que la motivation complémentaire fournie en cause à travers le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement ne constitue pas une base légale appropriée en l’espèce pour justifier la décision litigieuse.

En l’espèce, il est constant que le demandeur, par courrier du 28 août 2002, a sollicité une autorisation de séjour provisoire pour étudiants en vue de poursuivre pendant l’année académique 2002/2003 des études à l’Institut Supérieur de Technologie, ceci sous la réserve expressément énoncée de sa réussite au concours du 16 septembre 2002 dans ledit Institut.

Il se dégage par ailleurs de la décision du ministre du 4 septembre 2002 que l’autorisation de séjour provisoire pour étudiants dont a bénéficié le demandeur jusqu’au 31 octobre 2002 fut accordée avec la précision qu’elle était prorogeable notamment à condition que le dossier soumis comprenne l’original ou la copie certifiée conforme de l’inscription définitive pour l’année académique 2002/2003, étant entendu qu’il relève de la finalité même d’une autorisation de séjour provisoire pour étudiants que l’objet du séjour est la poursuite effective d’études au pays.

En l’espèce, il n’est pas contesté que le demandeur n’a pas réussi le test d’aptitude aux études d’ingénieur industriel pour l’année académique 2002/2003 et qu’il n’était dès lors pas définitivement inscrit auprès de l’établissement scolaire qu’il avait indiqué dans sa demande d’autorisation, en l’occurrence l’Institut Supérieur de Technologie, de sorte que le ministre a valablement pu considérer qu’il ne remplissait plus les conditions énoncées pour se voir délivrer une autorisation de séjour provisoire afin de pouvoir effecteur des études auprès de l’IST pendant l’année académique 2002/2003.

Force est encore de constater que si le dossier soumis au tribunal contient certes un certificat établi par le Centre Universitaire de Luxembourg en date du 8 octobre 2002 aux termes duquel Monsieur … est inscrit en section Mathématiques/Physique (ING 1) du département des Sciences du Centre Universitaire de Luxembourg pour l’année 2002/2003, ni les pièces versées au dossier, ni encore les précisions apportées en cours d’instance ne permettent de dégager que le demandeur, sur base de cette nouvelle inscription, ait signalé au ministre de la Justice que la demande d’autorisation de séjour provisoire pour étudiants par lui introduite en date du 28 août 2002 serait désormais sollicitée en vue de la poursuite d’études en section Mathématique/Physique au Centre Universitaire de Luxembourg.

Or, le tribunal étant amené à apprécier la légalité de la décision litigieuse au jour où elle a été prise, il y a dès lors lieu de retenir au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent que le ministre a valablement pu refuser de faire droit à la demande de Monsieur … telle qu’introduite en date du 28 août 2002, au motif qu’il n’a pas réussi son test d’aptitude aux études d’ingénieur industriel pour l’année académique 2002/2003.

Il s’ensuit que le recours laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 4 juin 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15853
Date de la décision : 04/06/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-06-04;15853 ?

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