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28/05/2003 | LUXEMBOURG | N°16457

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 mai 2003, 16457


Tribunal administratif Numéro 16457 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 mai 2003 Audience publique du 28 mai 2003

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Recours formé par Monsieur … contre un arrêté du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du gouvernement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 16457 du rôle, déposée le 23 mai 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de

l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, d'origine kurde et de nationali...

Tribunal administratif Numéro 16457 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 mai 2003 Audience publique du 28 mai 2003

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Recours formé par Monsieur … contre un arrêté du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du gouvernement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 16457 du rôle, déposée le 23 mai 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, d'origine kurde et de nationalité irakienne, actuellement placé au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière, tendant à la réformation d’un arrêté du ministre de la Justice du 8 mai 2003 prorogeant à son encontre une mesure de placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification de l'arrêté en question;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 27 mai 2003;

Vu les pièces versées en cause et notamment l’arrêté entrepris;

Le juge rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER entendus en leurs plaidoiries respectives.

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Il ressort d’un procès-verbal référencé sous le numéro 379170 du service de police judiciaire de la police grand-ducale du 11 avril 2003 que Monsieur …, fit l’objet, en date du 8 avril 2003, d’un contrôle d’identité et qu’il fit alors l’objet d’une mesure de rétention ordonnée en date du même jour par le substitut du procureur d’Etat près du tribunal d’arrondissement de Luxembourg.

Monsieur … fut ensuite placé, par arrêté du ministre de la Justice du 10 avril 2003, notifié le même jour à l’intéressé, au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification dudit arrêté dans l’attente de son éloignement du territoire luxembourgeois. Par arrêté ministériel du 8 mai 2003, notifié le lendemain à l'intéressé, la mesure de placement fut prorogée pour la durée d'un mois.

Cette décision de prorogation est fondée sur les considérations et motifs suivants :

« Vu l'article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l'entrée et le séjour des étrangers;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière;

Vu mon arrêté pris en date du 10 avril 2003 décidant du placement temporaire de l'intéressé;

Considérant que l’intéressé est démuni de toute pièce d'identité et de voyage valable;

- qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays;

Considérant qu’une demande de prise en charge en vertu de la Convention de Dublin du 15 juin 1990 a été demandée auprès des autorités italiennes;

- qu’en attendant l'accord de reprise, l’éloignement immédiat de l’intéressé n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ».

Par requête déposée le 23 mai 2003, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation à l’encontre de l’arrêté ministériel de prorogation du placement du 8 mai 2003.

Etant donné que l’article 15, paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3.

l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre l’arrêté ministériel du 8 mai 2003. Ledit recours ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Monsieur … estime que la décision ministérielle du 8 mai 2003, notifiée le lendemain, est illégale étant donné qu'elle lui aurait été notifiée en dehors du délai légal.

Cette notification aurait dû intervenir, à son avis, au plus tard le 8 mai 2003, et non le 9 mai 2003.

Ce moyen laisse d'être fondé, dès lors que la décision de reconduction a été prise dans le mois de la décision initiale. Il est indifférent, à ce sujet, que la décision lui ait été notifiée le lendemain. En effet, s’il est vrai que l’article 15, paragraphe 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l'entrée et le séjour des étrangers, 2. le contrôle médical des étrangers, 3. l'emploi de la main-d'œuvre étrangère implique nécessairement que la reconduction de la mesure de placement soit décidée avant son expiration, aucune disposition n’impose, au-delà des exigences prévues aux paragraphes (3) et (8), expressément la notification de la décision de reconduction dans le même délai. La notification ne constitue ainsi pas une condition d’existence d’une telle décision, mais un préalable nécessaire pour faire courir le délai de recours. La notification intervenue le lendemain de la prise d’effet de la décision de reconduction critiquée ne saurait partant constituer une cause d’annulation de cette dernière.

Monsieur … fait encore plaider que la décision entreprise ne ferait pas état du danger qu'il risque de se soustraire à une mesure de rapatriement ultérieure, ce qui l'entacherait d'illégalité.

Ce moyen manque en fait, étant donné que l'arrêté ministériel du 8 mai 2003 mentionne le danger de fuite dans le chef de Monsieur ….

Il reproche encore aux autorités de ne pas avoir entrepris toutes les démarches nécessaires en vue de l'exécution, sans retard, de la mesure d'éloignement. Il aurait indiqué de manière claire être arrivé sur le territoire luxembourgeois en provenance de la France, de sorte qu'il aurait été possible aux autorités luxembourgeoises de le refouler vers la France sans autres formalités, en vertu des dispositions de la Convention relative à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres des Communautés européennes, signée à Dublin le 15 juin 1990.

Le délégué du gouvernement explique que l'Italie est compétente pour connaître de la demande d'asile de Monsieur … en vertu des dispositions de la Convention de Dublin, et que celui-ci pourrait y être envoyé sans autre forme de procédure, les autorités italiennes ayant implicitement accepté sa reprise en charge par application de l'article 11, paragraphe 4 de la Convention. Il expose qu'après avoir contacté les autorités italiennes les 14 avril, 9 mai et 13 mai 2003, les autorités luxembourgeoises les ont informées le 22 mai 2003 qu'elles considéraient que l'Italie avait définitivement et implicitement accepté la reprise en charge de Monsieur … qui serait désormais imminente.

Il s'ensuit que c'est à tort que Monsieur … reproche aux autorités luxembourgeoises de ne pas avoir entrepris, avec la diligence nécessaire, les démarches nécessaires en vue de son éloignement du territoire. Ses développements concernant une possibilité de refoulement vers la France sont à cet effet dépourvus de pertinence.

Monsieur … estime que la mesure de placement constituerait une mesure disproportionnée, l'esprit de la loi du 28 mars 1972 ainsi que les travaux parlementaires étant à interpréter dans le sens que le pouvoir exécutif devrait mettre en place une structure spécifique et appropriée pour accueillir les personnes placées par décision du pourvoir exécutif.

Ce moyen est à son tour à rejeter, étant donné que par règlement grand-ducal du 20 septembre 2002, un centre de séjour pour étrangers en situation irrégulière a été créé, répondant aux exigences de mise en place d'une infrastructure spécifique et appropriée.

Monsieur … fait finalement valoir que l'autorité administrative ne justifierait pas la nécessité absolue légalement exigée pour justifier la prorogation de la mesure de placement.

Il est vrai que le tribunal appelé à statuer sur la prorogation d'une mesure de placement doit analyser si le ministre de la Justice a pu se baser sur des circonstances permettant de justifier qu’une nécessité absolue rend la prorogation de la décision de placement inévitable.

En l'espèce, il se dégage des pièces versées et des renseignements fournis que les autorités luxembourgeoises ont fait les diligences nécessaires, même si elles n'ont pas été couronnées de succès dans le délai d'un mois. Elles font néanmoins admettre que la mesure d'éloignement pourra être exécutée dans les plus brefs délais.

Au vu de ces circonstances, la mesure de prorogation de la mesure de placement apparaît comme justifiée.

Il résulte des développements qui précèdent que le recours n’est fondé en aucun de ses moyens et doit partant être rejeté.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Ravarani, président, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, et lu à l’audience publique du 28 mai 2003 par le président, en présence de M. May, greffier en chef, assumé.

s. May s. Ravarani 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 16457
Date de la décision : 28/05/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-05-28;16457 ?

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