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23/05/2003 | LUXEMBOURG | N°15912

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 mai 2003, 15912


Tribunal administratif N° 15912 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 janvier 2003 Audience publique du 23 mai 2003 Recours formé par Monsieur …, … en présence du ministre de la Justice en matière de relevé de déchéance

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15912 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 27 janvier 2003 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au

nom de Monsieur …, demeurant à L- …, tendant au relevé de la déchéance résultant de l’expi...

Tribunal administratif N° 15912 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 janvier 2003 Audience publique du 23 mai 2003 Recours formé par Monsieur …, … en présence du ministre de la Justice en matière de relevé de déchéance

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15912 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 27 janvier 2003 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L- …, tendant au relevé de la déchéance résultant de l’expiration du délai d’un mois imparti pour l’introduction d’un recours contentieux à l’encontre de la décision du ministre de la Justice du 23 septembre 2002, lui notifiée le 23 octobre suivant et portant refus du statut de réfugié politique ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 28 mars 2003 ;

Vu les pièces versées en cause ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives en la chambre du conseil en date du 21 mai 2003.

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Considérant que suivant décision du ministre de la Justice du 23 septembre 2002, lui notifiée le 23 octobre 2002, Monsieur … s’est vu refuser le statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, refus prononcé sur base de l’article 11 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2. d’un régime de protection temporaire ;

Que suivant courrier de son mandataire de l’époque, Monsieur … a fait introduire en date du 18 novembre 2002 un recours gracieux contre la décision prévisée notifiée le 23 octobre 2002 ;

Que suivant courrier recommandé du 4 décembre 2002, le ministre de la Justice, après avoir procédé au réexamen du dossier, a confirmé sa décision de refus initiale ;

Que la lettre recommandée du 4 décembre 2002 a été adressée au mandataire de l’époque de Monsieur … et contient la mention « copie pour information à Monsieur … » ;

Considérant que par requête déposée en date du 27 janvier 2003, Monsieur … sollicite le relevé de la déchéance résultant de l’expiration du délai d’un mois imparti pour l’introduction d’un recours contentieux à l’encontre de la décision ministérielle précitée du 23 septembre 2002 ;

Qu’il se rapporte plus particulièrement à un courrier de son mandataire de l’époque du 20 janvier 2003 admettant qu’en raison d’un « dysfonctionnement malencontreux », interne à son étude, la requête à déposer devant le tribunal administratif n’avait pas pu être fournie en temps utile ;

Que le demandeur affirme avoir fait toutes les démarches et diligences nécessaires pour que son avocat soit en mesure d’introduire un recours à l’encontre de la décision précitée du 23 septembre 2002, et ce dans les délais légaux ;

Que dès lors on ne saurait lui opposer la moindre faute voire négligence ayant conduit à la situation préjudiciable qui serait la sienne actuellement, compte tenu de la forclusion des délais encourue ;

Que le délégué du Gouvernement conclut au caractère non fondé de la requête en relevé de déchéance, les conditions légales en la matière n’étant point remplies ;

Considérant que la requête en relevé de déchéance ayant été présentée suivant les formes et délai prévus par la loi, elle est recevable ;

Considérant que la loi modifiée du 22 décembre 1986 précitée dispose en son article 1er que « si une personne n’a pas agi en justice dans le délai imparti, elle peut, en toutes matières, être relevée de la forclusion résultant de l’expiration du délai si, sans qu’il y ait eu faute de sa part, elle n’a pas eu, en temps utile, connaissance de l’acte qui a fait courir le délai ou si elle s’est trouvée dans l’impossibilité d’agir » ;

Considérant qu’il est constant en cause qu’à partir de la notification de la décision ministérielle du 23 septembre 2002, Monsieur … a eu connaissance de l’acte qui a fait courir le délai, qu’il en est de même de la notification lui faite de la décision sur recours gracieux du 4 décembre 2002 ;

Que dès lors le demandeur ne rentre pas sous les prévisions de ce premier cas d’ouverture d’un relevé de déchéance prévu par la loi ;

Considérant que l’article 1er de la loi du 22 décembre 1986 prévoit deux cas d’ouverture pouvant donner lieu au relevé de déchéance introduits chacun par le mot « si » ;

Considérant que force est de constater que seulement pour le premier cas d’ouverture, celui où la personne concernée n’a pas eu, en temps utile, connaissance de l’acte qui a fait courir le délai, le texte légal prérelaté exige que cette hypothèse soit vérifiée « sans qu’il y ait eu faute de sa part », alors que pour le deuxième cas d’ouverture, relatif à l’impossibilité d’agir, pareille condition n’est point prévue ;

Considérant que les auteurs du texte avaient à l’esprit que cette seconde hypothèse pouvait être celle « où une personne s’est trouvée dans l’impossibilité d’agir pendant le délai imparti à la suite d’une signification ou notification régulière ayant fait courir le délai. Cette impossibilité d’agir pourra être due à un empêchement physique, résultant d’une maladie grave, d’un accident privant l’intéressé de l’usage de ses facultés mentales ou le mettant autrement hors d’état de pourvoir à ses intérêts » (doc. parl. n° 2879, commentaire des articles, p. 3, ad. art. 1er in fine) ;

Considérant que dans la mesure où Monsieur … avait donné mandat à un professionnel de la postulation de déposer un recours au fond pour son compte il ne s’est point trouvé dans le cas d’ouverture classique de l’impossibilité d’agir ;

Considérant que les articles 540 et 541 du nouveau code de procédure civile français ont servi d’exemple au législateur ayant instauré la loi précitée du 22 décembre 1986 ;

Considérant qu’intervenant par rapport à des délais de recours ayant un caractère d’ordre public et un effet en principe automatique, le relevé de forclusion a été jugé en France constituer un incident toujours grave (cf. Vincent et Guinchard, Précis Dalloz, Procédure civile, 21ième édition, n° 845), partant exceptionnel ;

Considérant que traditionnellement la jurisprudence française interprète restrictivement la notion d’impossibilité d’agir (cf. Cour d’appel lux. 20 décembre 1991, Pasicrisie 28, p. 250) ;

Considérant que dans l’hypothèse où un mandataire a été chargé par une personne en vue de l’introduction d’un recours et plus particulièrement pour les catégories d’affaires où le droit de postulation d’un professionnel est la règle, comme celle sous rubrique réservant aux avocats à la Cour le monopole des recours à intenter au fond contre des décisions administratives individuelles, l’impossibilité d’agir n’est en principe pas donnée, lorsque le mandat pour agir a été conféré en temps utile au professionnel par le justiciable concerné ;

Considérant qu’en règle générale la négligence de l’intermédiaire chargé d’agir ne justifie pas un relevé de forclusion (cf. Encyclopédie Dalloz, Procédure Civile, V° Délais n° 45) ;

Considérant qu’admettre avec la partie demanderesse qu’une fois son mandat conféré et toute diligence de rappel faite auprès de son mandataire le relevé de déchéance devrait lui être conféré, quelle que soit la cause justificative de l’inaction du professionnel concerné, et plus particulièrement en cas de dysfonctionnement interne de l’étude de ce dernier, reviendrait à outrepasser sans cause légitime des délais par ailleurs fixés à titre obligatoire par le législateur, le relevé de déchéance étant à interpréter de façon restrictive, vu son caractère exceptionnel, également suivant la loi modifiée du 22 décembre 1986 (cf. trib. adm. 2 octobre 2000, Mujkovic, n° 12174 du rôle, Pas. adm. 2002, V° Procédure contentieuse, N° 91, p. 462 et autres décisions y citées) ;

Considérant que par voie de conséquence la requête en relevé de forclusion n’est point fondée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare la demande en relevé de forclusion recevable ;

au fond la dit non justifiée et en déboute ;

condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 23 mai 2003 à laquelle le prononcé avait été fixé par :

M. Delaporte, premier vice-président, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15912
Date de la décision : 23/05/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-05-23;15912 ?

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