La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/05/2003 | LUXEMBOURG | N°15801

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 mai 2003, 15801


Tribunal administratif N° 15801 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 décembre 2002 Audience publique du 22 mai 2003

===============================

Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

------------------------------------------------------


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15801 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 décembre 2002 par Maître Sylvain L’HOTE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’

Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à Louga (Sénégal), de nationalité sénégalais...

Tribunal administratif N° 15801 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 décembre 2002 Audience publique du 22 mai 2003

===============================

Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

------------------------------------------------------

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15801 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 décembre 2002 par Maître Sylvain L’HOTE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à Louga (Sénégal), de nationalité sénégalaise, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre du Travail et de l’Emploi du 3 décembre 2002, lui refusant l’octroi du permis de travail pour un emploi auprès de la société A.-L. s. à r.l., établie et ayant son siège social à L-…, en qualité d’aide-cuisinière ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2003 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 31 mars 2003 par Maître Sylvain L’HOTE au nom de la demanderesse ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 15 avril 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision ministérielle attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Sylvain L’HOTE et Monsieur le délégué du gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives.

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Par arrêté du 3 décembre 2002, le ministre du Travail et de l’Emploi, ci-après dénommé « le ministre », refusa le permis de travail à Madame … pour un emploi d’aide-

cuisinière auprès de la société A.-L. s. à r.l., « pour les raisons inhérentes à la situation et à l’organisation du marché de l’emploi suivantes - des demandeurs d’emploi appropriés sont disponibles sur place : 1885 ouvriers non-qualifiés inscrits comme demandeurs d’emploi aux bureaux de placement de l’Administration de l’Emploi - priorité à l’emploi des ressortissants de l’Espace Economique Européen (E.E.E.) - poste de travail non déclaré vacant par l’employeur - occupation irrégulière depuis le 25.06.2002 ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 24 décembre 2002, Madame … a fait introduire un recours en annulation à l’encontre de l’arrêté ministériel précité du 3 décembre 2002.

Le recours est recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi.

La demanderesse reproche tout d’abord au ministre d’avoir appliqué à tort le règlement grand-ducal modifié du 12 mai 1972 déterminant les mesures applicables pour l’emploi des travailleurs étrangers sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg au lieu et place du règlement grand-ducal modifié du 28 mars 1972 relatif aux conditions d’entrée et de séjour de certaines catégories d’étrangers faisant l’objet de conventions internationales, au motif qu’elle serait l’épouse de Monsieur A.S., de nationalité française, demeurant à Differdange, 143, rue Emile Mark, et que, conformément à l’article 11 du règlement CEE 1612/68 du Conseil relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté, en tant que conjoint d’un ressortissant d’un Etat membre de l’Union Européenne, elle aurait le droit d’accéder à toute activité salariée sur le territoire du Luxembourg, de sorte que l’argument invoqué relatif à la priorité des ressortissants de l’Espace Economique Européen serait dénué de fondement.

Ce moyen manque cependant en fait, étant donné qu’il résulte d’un certificat d’annulation établi par l’officier de l’état civil de la Ville de Pikine au Sénégal, produit par le délégué de gouvernement et par rapport auquel la demanderesse n’a plus pris position par la suite, que le mariage entre la demanderesse et Monsieur A.S. a été annulé, de sorte que la demanderesse ne peut pas se prévaloir des dispositions du règlement CEE n° 1612/68, précité, pour accéder librement à toute activité salariée au Luxembourg..

La demanderesse reproche ensuite au ministre une absence de précision des motifs à la …se de sa décision du 3 décembre 2002 en ce qu’il n’aurait pas indiqué les motifs spécifiques justifiant le refus d’accorder le permis de travail sollicité et que l’indication du nombre de 1885 ouvriers non qualifiés inscrits comme demandeurs d’emploi ne constituerait pas un motif spécifique de refus, de sorte que le tribunal serait dans l’impossibilité d’apprécier l’existence et la légalité des motifs à la …se de la décision attaquée.

En application de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, toute décision administrative doit …ser sur des motifs légaux et une décision refusant de faire droit à la demande de l’intéressé doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa …se.

Dès lors que la motivation expresse d’une décision peut se limiter, conformément à l’article 6 précité, à un énoncé sommaire de son contenu, il suffit en l’occurrence, pour que l’acte de refus soit valable, que les motifs aient existé au moment du refus, quitte à ce que l’administration concernée les fournisse a posteriori sur demande de l’administré, le cas échéant au cours d’une procédure contentieuse (cf. Cour adm. 13 janvier 1998, n° 10241C du rôle, Pas. adm. 2002, V° Travail, n° 29 et autres références y citées).

En l’espèce, l’arrêté ministériel attaqué du 3 décembre 2002 énonce quatre motifs tirés de la législation sur l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, de manière à suffire aux exigences de l’article 6 précité, cette motivation ayant par ailleurs été utilement complétée en cours d’instance contentieuse par le représentant étatique, de sorte que la demanderesse n’a pas pu se méprendre sur la portée à attribuer à la décision litigieuse.

L’existence de motifs ayant été vérifiée, il s’agit encore d’examiner si lesdits motifs, sinon certains d’entre eux, sont de nature à justifier la décision attaquée.

Quant au motif de refus de délivrance d’un permis de travail en faveur de Madame …, tiré de la non-déclaration du poste vacant par l’employeur, la demanderesse expose que la société A.-L. aurait averti l’administration de l’Emploi, dénommée ci-après l’ADEM, courant mai-juin 2002 de la vacance du poste concerné. Dans ce contexte, elle verse une attestation testimoniale établie par Monsieur C.M., gérant de la société A.-L., qui certifie avoir personnellement constaté qu’après avoir fait une demande à l’ADEM en vue de recruter un aide-cuisinier, trois ou cinq personnes se seraient présentées auprès de lui avant le 25 juin 2002, mais que vu que Madame … se serait bien intégrée dans la société, il « demande qu’elle puisse continuer dans notre entreprise ».

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen, en soutenant que le motif tiré de l’absence de déclaration du poste vacant a valablement pu être invoqué par le ministre à la …se de la décision litigieuse, en se référant à l’article 10 (1) du règlement grand-ducal modifié du 12 mai 1972, précité, dans sa teneur lui conféré par le règlement grand-ducal du 29 avril 1999.

Le susdit article 10(1) dispose dans son deuxième alinéa que « la non-déclaration formelle et explicite de la vacance de poste à l’administration de l’Emploi, conformément à l’article 9 (2) de la loi modifiée du 21 février 1976 concernant l’organisation et le fonctionnement de l’administration de l’Emploi et portant création d’une commission nationale de l’Emploi, constitue un motif valable et suffisant de refus du permis de travail ».

En l’espèce, il se dégage de la déclaration d’engagement que la société A.-L. a engagé Madame … avec effet au 25 juin 2002, ladite déclaration n’ayant été introduite auprès de l’ADEM qu’en date du 13 août 2002. Il est encore constant que le dossier ne renseigne aucune autre déclaration de poste vacant au nom de la société A.-L. et que, d’après le représentant étatique non-contredit sur ce point, uniquement le sieur C.M., gérant de ladite société, a déclaré en date du 24 mai 2002 sous son numéro de matricule personnel une vacance de poste pour un plongeur, de sorte que le tribunal est encore amené à retenir que Madame … a été occupée d’une manière irrégulière depuis le 25 juin 2002.

Face au caractère clair et précis de la disposition réglementaire précitée et eu égard aux circonstances de l’espèce, le ministre a partant valablement pu refuser le permis de travail sollicité au seul motif que le poste de travail ne fut pas déclaré vacant par l’employeur, de sorte que l’examen des autres motifs à la …se de l’arrêté ministériel déféré, de même que des moyens d’annulation y afférents invoqués par la demanderesse, devient surabondant.

Il suit des considérations qui précèdent que le recours est à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 22 mai 2003, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 15801
Date de la décision : 22/05/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-05-22;15801 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award