La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/05/2003 | LUXEMBOURG | N°14299

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 mai 2003, 14299


Tribunal administratif N° 14299 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 décembre 2001 Audience publique du 15 mai 2003

=============================

Recours formé par Madame … et Madame … contre une décision du ministre de l’Environnement et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement

------------------------------------------------------------------------------------


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14299 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 12 d

écembre 2001 par Maître Marc KERGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxemb...

Tribunal administratif N° 14299 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 décembre 2001 Audience publique du 15 mai 2003

=============================

Recours formé par Madame … et Madame … contre une décision du ministre de l’Environnement et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement

------------------------------------------------------------------------------------

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14299 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 12 décembre 2001 par Maître Marc KERGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, et de Madame …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation, d’une part, d’une décision du ministre de l’Environnement du 14 septembre 2001 et, d’autre part, d’une décision du ministre de l’Intérieur du 18 octobre 2001 portant toutes les deux refus d’inclure une parcelle leur appartenant à l’intérieur du périmètre d’agglomération de la commune de Kopstal ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 12 mars 2002 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom des demanderesses au greffe du tribunal administratif le 21 mars 2002 ;

Vu le mémoire en duplique déposé par le délégué du gouvernement au greffe du tribunal administratif le 19 avril 2002 ;

Vu la rupture du délibéré, à la suite des plaidoiries de l’affaire ayant eu lieu à l’audience du 6 mai 2002, prononcée à la demande des demanderesses, avec refixation de l’affaire pour une continuation ultérieure des débats à l’audience du 3 juin 2002 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Marc KERGER, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Madame … et Madame … sont copropriétaires indivises d’une parcelle située rue du Biergerkraiz, portant le numéro cadastral …, inscrit à la section B de Bridel de la commune de Kopstal, d’une contenance de 8,14 ares.

Par délibération du 26 avril 2001, le conseil communal de Kopstal, statuant à la majorité des voix, adopta définitivement les modifications à apporter au plan d’aménagement général de la commune de Kopstal – partie graphique –, désigné ci-après par le « plan d’aménagement général », en modification de celui antérieurement en vigueur, en décidant notamment de reclasser trois terrains, dont notamment la parcelle appartenant à Mesdames … et …, situés au lieu-dit « rue Biergerkraiz » le long de la rue Biergerkraiz de la zone rurale en zone d’habitation à faible densité.

Ladite décision du conseil communal de Kopstal fut prise notamment à la suite d’un avis de la commission d’aménagement instituée auprès du ministre de l’Intérieur du 5 février 2001, qui avait émis à l’unanimité des voix un avis défavorable au sujet du projet de modification du plan d’aménagement général en s’opposant formellement à une extension le long de la rue du Biegerkraiz, « alors qu’il s’agit d’une extension tentaculaire favorisant le développement désordonné de la localité, d’autant plus que les fonds concernés sont situés à proximité de l’embouchure de la nouvelle voie de contournement avec la rue du Biergerkraiz ».

Suivant courrier du 14 septembre 2001 à l’adresse du ministre de l’Intérieur, le ministre de l’Environnement approuva « la délibération du 26 avril 2001 du conseil communal de Kopstal portant adoption définitive d’un projet de modification du projet d’aménagement général concernant des fonds sis à Kopstal, au lieu-dit « Bei Kahlscheuer ».

Le 18 octobre 2001, le ministre de l’Intérieur adressa au commissaire de district à Luxembourg une lettre suivant laquelle il n’était pas en mesure d’approuver la délibération du conseil communal de Kopstal du 26 avril 2001 portant adoption définitive du projet de modification du plan d’aménagement général, en ce qu’il concerne plus particulièrement « l’extension projetée le long de la rue du Biergerkraiz, alors qu’il importe d’éviter le développement tentaculaire de la localité en favorisant le développement concentrique des villages autour de leur noyau », en précisant encore que « cette mesure n’est réalisable que par l’urbanisation primaire des fonds non bâtis situés à l’intérieur du périmètre d’agglomération ».

Par lettre du 10 janvier 2002 à l’adresse du ministre de l’Intérieur, le ministre de l’Environnement annula et remplaça sa décision antérieure du 14 septembre 2001, précitée, en décidant d’approuver la délibération précitée du conseil communal de Kopstal du 26 avril 2001 portant adoption définitive du projet de modification du plan d’aménagement général non seulement en ce qui concerne les fonds sis à Kopstal, au lieu-dit « Bei Kahlscheier », mais également les fonds situés le long de la « rue Biergerkraiz ».

Par requête introduite auprès du tribunal administratif en date du 12 décembre 2001, Madame … et Madame … ont fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision précitée du ministre de l’Environnement du 14 septembre 2001, ainsi que de celle du ministre de l’Intérieur du 18 octobre 2001.

A la suite de l’indication, par le délégué du gouvernement dans son mémoire en réponse, que la décision précitée du ministre de l’Environnement du 10 janvier 2002 a remplacé celle antérieurement prise en date du 14 septembre 2001 faisant l’objet du présent recours, les demanderesses ont marqué leur accord, dans leur mémoire en réplique, avec la proposition faite par le représentant étatique suivant laquelle le recours serait sans objet dans la mesure où il est dirigé contre la décision du ministre de l’Environnement du 14 septembre 2001. Il échet partant de leur en donner acte et de retenir que le recours, dans la mesure où il est dirigé contre la décision précitée du 14 septembre 2001, est devenu sans objet en cours d’instance contentieuse.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement exprime encore le souhait de voir examiner la présente affaire ensemble avec deux autres recours introduits sous les numéros 14420 et 14451 du rôle concernant respectivement un recours introduit par l’administration communale de Kopstal contre la décision précitée du ministre de l’Intérieur du 18 octobre 2001, en présence de Madame … et de Monsieur …, dans lequel sont également intervenues les demanderesses et un recours introduit par Madame … contre la même décision du ministre de l’Intérieur du 18 octobre 2001.

S’il est vrai que les demanderesses ne s’opposent pas a priori à une telle jonction de ces affaires, il n’en reste pas moins que dans la mesure où, d’une part, il n’y a pas identité de parties dans les trois affaires en cause et où, d’autre part, le recours sous analyse concerne exclusivement les décisions critiquées dans la mesure où elles ont trait à des terrains situés le long de la rue Biergerkraiz, le recours introduit sous le numéro 14420 du rôle a trait non seulement à ces terrains, mais également à des terrains situés au lieu-dit « Bei Kahlscheier » et le troisième recours inscrit sous le numéro 14451 a exclusivement trait à un terrain situé au lieu-dit « Bei Kahlscheier », il n’y a pas non plus identité d’objet des trois recours qui, même s’ils sont dirigés contre la même décision du ministre de l’Intérieur, se réfèrent néanmoins à des aspects différents de celle-ci, de sorte qu’il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de jonction des trois causes.

Le délégué du gouvernement conclut encore à l’irrecevabilité du recours en réformation, en estimant que seul un recours en annulation serait susceptible d’être dirigé contre un acte administratif à caractère réglementaire, telle la décision sous analyse du ministre de l’Intérieur.

Concernant la compétence d’attribution du tribunal administratif, il convient de relever que, d’une part, les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire, et, d’autre part, la décision d’approbation ou de refus d’approbation du ministre de l’Intérieur participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé (cf. Cour adm. 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2002, V° Actes réglementaires (recours contre les), n° 16 et autres références y citées).

Comme en vertu de l’article 7, paragraphe 1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, seul un recours en annulation peut être introduit contre les actes administratifs à caractère réglementaire, il s’ensuit que le tribunal administratif est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal contre la décision précitée du ministre de l’Intérieur du 18 octobre 2001.

Le représentant étatique estime encore que le recours en annulation serait irrecevable pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des demanderesses. A ce titre, il soutient qu’il n’existerait aucun acte administratif de nature à faire grief aux demanderesses, en ce que le terrain portant le numéro cadastral … dont elles soutiennent être les copropriétaires indivises ne serait pas visé par la décision ministérielle critiquée, celle-ci ne visant que les terrains inscrits sous les numéros cadastraux 162/1537, 162/1638 et 162/1639.

C’est toutefois à bon droit que dans leur mémoire en réplique, les demanderesses font valoir que leur terrain se trouve bien être visé par non seulement la délibération du conseil communal de Kopstal du 16 avril 2001, précitée, mais également par la décision de refus d’approbation de ladite délibération par le ministre de l’Intérieur, en ce que celles-ci visent la parcelle portant le numéro cadastral 162/1537 qui constitue l’ancien numéro cadastral qui par la suite a été modifié pour porter dorénavant le numéro cadastral …, tel que cela ressort d’une pièce émise par l’administration du cadastre en date du 7 novembre 2002, versée sur demande du tribunal au greffe du tribunal administratif en date du 14 novembre 2002. Il s’ensuit, ensemble avec la partie graphique se trouvant à la base de la décision ministérielle précitée, telle que déférée, que les demanderesses sont bien les copropriétaires indivises de la parcelle portant anciennement le numéro cadastral 162/1537 et expressément visée par la décision déférée, de sorte que le moyen tiré de l’irrecevabilité du recours en annulation pour défaut d’intérêt à agir est à rejeter pour ne pas être fondé.

Le recours en annulation n’ayant pas été autrement contesté quant à sa recevabilité, il est à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Quant au fond, les demanderesses font exposer que le ministre de l’Intérieur aurait invoqué à la base de sa décision des considérations qui ne relèveraient pas de son champ de compétence, dans la mesure où il a refusé de faire droit à l’extension du périmètre d’agglomération pour englober trois terrains situés le long de la rue du Biergerkraiz en se référant au développement tentaculaire de la localité de Bridel, qu’il y aurait lieu d’éviter afin de favoriser un développement concentrique dudit village. Pour le surplus, elles estiment qu’en tout état de cause, il ne saurait être question d’un développement tentaculaire du fait de l’incorporation des trois terrains en question dans le périmètre d’agglomération de la localité de Bridel, étant donné qu’à côté de la parcelle leur appartenant, il existerait déjà des maisons qui feraient « partie intégrante de la localité de Bridel ». En outre, en ce qui concerne ladite localité, il y aurait lieu de relever qu’il ne s’agirait pas en l’occurrence d’un village « à développement concentrique », étant donné qu’il ressortirait de la partie graphique du plan d’aménagement général que ladite localité se serait dès sa naissance développée d’une manière tentaculaire.

Quant au motif qui aurait été invoqué par le ministre de l’Intérieur afin de justifier la décision contre laquelle le présent recours est dirigé, et tiré de ce qu’il y aurait lieu d’éviter la construction de nouveaux logements le long du chemin repris 181, les demanderesses font valoir que le lot leur appartenant se trouverait à une centaine de mètres du nouveau contournement de l’agglomération du Bridel et que cette voie, à laquelle il est fait référence sous la dénomination « chemin repris 181 » serait d’ailleurs séparée de leur parcelle par la rue du Biergerkraiz actuellement existante et qui ne serait pas supprimée du fait de l’aménagement dudit contournement. Pour le surplus, la situation de leur parelle serait exactement la même que celle des parcelles sur lesquelles se trouvent déjà les maisons voisines.

Elles font encore valoir que l’argumentation du ministre de l’Intérieur aurait pour objet de supprimer toutes les habitations le long des voies de circulation, ce qui équivaudrait à une expropriation indirecte, en ce qu’en raison de la politique suivie par le ministre de l’Intérieur, les terrains se trouvant le long dudit axe routier perdraient toute leur valeur.

Enfin, les demanderesses soutiennent que la décision ministérielle violerait le principe de l’égalité des citoyens devant la loi, en ce qu’elle leur refuserait le reclassement de leur parcelle en zone d’habitation, alors qu’à une distance beaucoup plus proche du contournement du Bridel, qualifié de chemin repris 181, la construction de deux résidences à appartements aurait été autorisée.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement, après avoir rappelé que déjà par une décision prise en date du 14 juillet 1995, le ministre de l’Intérieur avait refusé d’approuver une décision prise par le conseil communal de Kopstal tendant au reclassement de la zone rurale en zone d’habitation des mêmes terrains que ceux faisant l’objet du présent litige en invoquant le même motif que celui qui est actuellement invoqué à la base de la décision déférée du 18 octobre 2001, à savoir le développement tentaculaire de la localité du Bridel qu’il y aurait lieu d’éviter, relève le motif qui semble se trouver à la base de la décision prise par le conseil communal de Kopstal le 26 avril 2001, ayant incité la commune à prendre la décision de reclasser en zone d’habitation notamment la parcelle appartenant aux demanderesses, et qui est basé sur «les demandes de particuliers réitérées en permanence et tendant à reclasser (…) trois parcelles le long de la rue Biergerkraiz de la zone rurale en zone d’habitation à faible densité », constitue un motif qui a trait non pas à des considérations d’intérêt général que toute politique d’urbanisation devrait respecter, mais à des « intérêts purement privatifs ».

En réponse aux moyens développés par les demanderesses, le représentant étatique rétorque que non seulement le ministre de l’Intérieur aurait été compétent pour prendre la décision litigieuse en sa qualité d’autorité de tutelle des communes, mais qu’en outre la décision aurait été prise conformément à l’intérêt général qui ne saurait se confondre avec l’intérêt « strictement privé » d’un propriétaire particulier désirant ériger des maisons d’habitation en dehors du périmètre d’agglomération d’une localité.

Quant à la pertinence des motifs de refus avancés par le ministre de l’Intérieur à l’appui de sa décision, le délégué du gouvernement expose qu’au vue de la pression foncière et démographique existant au Luxembourg, le gouvernement se serait donné comme directive générale le développement concentrique des localités en essayant d’éviter une urbanisation désordonnée voire tentaculaire le long des principales artères de circulation. Il fait dans ce contexte référence à une décision du gouvernement en Conseil du 11 juillet 1986 concernant les révisions des directives générales du programme directeur de l’aménagement du territoire telle que publiée au Mémorial B du 7 août 1986, p. 797. Cette politique aurait par ailleurs pour objet d’éviter le mitage de l’espace disponible par la création d’ilôts de constructions isolées, en favorisant au contraire l’extension de l’espace urbain existant.

Il fait dans ce contexte référence au fait que le mitage du paysage et la création d’ilôts d’habitation à l’extérieur des noyaux d’urbanisation aurait pour conséquence un coût important tant pour la collectivité locale que pour les particuliers, en raison des coûts liés à la charge de l’aménagement et du fonctionnement des équipements et des services publics.

En l’espèce, le reclassement du terrain litigieux, situé en dehors et à l’extrêmité de la localité de Bridel, le long de la rue du Biergerkraiz, en zone d’habitation à faible densité, contribuerait indéniablement, d’après le représentant étatique, au développement tentaculaire de la localité, et conduirait plus particulièrement à une avancée uniligne et tentaculaire du tissu urbain le long d’une voie publique.

Par ailleurs, un tel reclassement empêcherait, ou du moins rendrait peu crédible, tout futur refus d’approbation d’un développement ultérieur de l’ilôt d’habitation ainsi créé le long de la rue du Biergerkraiz.

Quant au reproche tiré d’une expropriation indirecte du terrain des demanderesses du fait du refus de le reclasser en zone d’habitation à faible densité, le délégué du gouvernement se réfère aux pouvoirs accordés aux communes sur base de la loi précitée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes en vue de réglementer l’usage du droit de propriété en conformité des objectifs fixés par ladite loi. Cette limitation du droit de propriété serait par ailleurs conforme au protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales suivant lequel, d’après l’alinéa second de l’article 1er, il ne serait pas porté atteinte à la protection de la propriété du fait du droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur des lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général, ce qui serait le cas en l’espèce, en ce que le refus d’autoriser le reclassement décidé par le conseil communal de Kopstal serait conforme à des critères d’intérêt général, de sorte qu’il ne saurait être question d’une quelconque expropriation indirecte.

Enfin, concernant le moyen tiré de la violation du principe de l’égalité des citoyens devant la loi, le délégué du gouvernement expose que faute d’avoir connaissance de la situation exacte des immeubles litigieux auxquels il a été fait référence, ce moyen devrait être écarté comme n’étant pas pertinent, d’autant plus que le ministre de l’Intérieur n’aurait aucune compétence en matière de délivrance d’autorisations de construire qui relèverait de la seule compétence des bourgmestres.

Dans leur mémoire en réplique, les demanderesses soutiennent qu’il ne faudrait pas confondre, d’une part, l’évolution tentaculaire d’un village avec l’extension du périmètre d’agglomération le long des principales voies de circulation, et, d’autre part, l’extension du périmètre d’agglomération à l’intérieur d’une localité par rapport à l’extension du périmètre d’agglomération à l’extérieur d’une localité, en relevant qu’en l’espèce le terrain dont elles sont propriétaires serait situé à l’intérieur de la localité du Bridel, de sorte qu’il ne saurait être considéré comme constituant un ilôt au sens topographique du terme, étant entendu toutefois qu’ils sont d’accord pour estimer que ledit terrain se trouve néanmoins « quelque peu détaché du reste du village, compte tenu justement de la topographie et plus précisément de la vallée du Roudenbësch longeant le Nord de la route CR 181 ».

Quant aux équipements publics auxquels il a été fait référence dans le mémoire en réponse du délégué du gouvernement, les demanderesses font valoir que leur terrain serait relié au réseau public du gaz, de l’électricité, de l’eau potable, de l’éclairage, des canalisations, des ordures et des arrêts de bus.

En ce qui concerne enfin le reproche tiré de la rupture de l’égalité des citoyens devant la loi du fait de la construction de deux résidences à proximité immédiate du contournement du Bridel, les demanderesses admettent ne pas être en possession d’informations supplémentaires quant à ces projets en ignorant notamment si l’autorisation de ces constructions a été délivrée conformément au plan d’aménagement général ou si un plan d’aménagement particulier a fait l’objet d’une approbation pour servir de base à la délivrance des permis de construire afférents.

Dans son mémoire en duplique, le délégué du gouvernement insiste pour retenir que le terrain litigieux se situe manifestement en dehors du périmètre d’agglomération tel que défini par la partie graphique du plan d’aménagement général et portant plus particulièrement sur la localité du Bridel, de sorte que la distinction faite par les demanderesses suivant laquelle leur terrain serait situé à l’intérieur de la localité du Bridel et non pas à l’extérieur de celle-ci, serait indifférente.

Concernant le motif de refus d’approbation de la décision du conseil communal du 26 avril 2001, le délégué du gouvernement tient à préciser que la décision ministérielle litigieuse du 18 octobre 2001 n’aurait en aucune manière interdit la construction le long de la nouvelle voie du contournement de la localité de Bridel, mais qu’elle aurait simplement entendu interdire de nouvelles constructions le long des routes interlocales, afin d’éviter un trafic intense sur de telles routes au détriment des routes de l’Etat et afin de préserver la qualité de vie des riverains d’une telle route interlocale que constituerait en l’espèce le chemin repris 181, à savoir la route du Biergerkraiz. Ainsi, la proximité du terrain litigieux du contournement de Bridel ne constituerait pas un des motifs de refus de l’extension sollicitée du périmètre d’agglomération de Bridel.

En ce qui concerne tout d’abord le motif de refus basé sur ce qu’il y aurait lieu d’interdire toute nouvelle construction le long des axes routiers interlocaux, à savoir en l’occurrence le chemin repris 181, dénommé également « rue du Biergerkraiz », il échet de constater que s’il est vrai qu’au moment où le ministre de l’Intérieur a statué, ledit chemin repris constituait encore un axe de communication interlocal, il n’en reste pas moins qu’il ressort clairement des plans versés par les demanderesses à l’appui de leur requête, et ayant plus particulièrement trait au réaménagement du chemin repris 181 et à la mise en place du contournement du Bridel, que l’actuelle rue du Biegerkraiz le long de laquelle est situé le terrain litigieux, constitue actuellement une impasse, de sorte qu’elle ne saurait plus être considérée comme un axe de communication interlocal comme il a été allégué non seulement par le ministre de l’Intérieur dans sa décision litigieuse, mais également par le délégué du gouvernement dans ses différents mémoires. Ce motif de refus d’approbation de la décision du conseil communal de Kopstal du 26 avril 2001 ne saurait partant plus justifier la décision sous analyse, d’autant plus qu’au jour de la décision, le ministre a nécessairement dû avoir eu connaissance du projet relatif à la route de contournement du Bridel. Il suit encore de ce qui précède que dans la mesure où le moyen basé sur une prétendue expropriation indirecte de leur terrain n’a été soulevé par les demanderesses que par rapport au motif de refus tiré de la situation du terrain le long d’un axe de communication, et que cette situation de fait s’est révélée ne plus correspondre à la réalité, il n’y a pas lieu d’y prendre position, étant donné que, comme il a été retenu ci-avant, ce motif de refus n’est pas de nature à justifier légalement la décision déférée.

Concernant pour le surplus le bien-fondé de la décision attaquée, il échet de rappeler que la mission du juge de la légalité conférée au tribunal à travers l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute (cf. trib. adm. 7 mars 2001, n° 12282 du rôle, confirmé par Cour adm. 23 octobre 2001, n° 13319C du rôle, Pas. adm. 2002, V° Urbanisme, n° 9 et trib. adm. 3 avril 2003, n° 14842 du rôle, non encore publié).

Dans cette démarche de vérification des faits et des motifs à la base de l’acte déféré, le tribunal est encore amené à analyser si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits dont l’existence est vérifiée, une erreur d’appréciation étant susceptible d’être sanctionnée, dans la mesure où elle est manifeste, au cas notamment où une flagrante disproportion des moyens laisse entrevoir un usage excessif du pouvoir par l’autorité qui a pris la décision, voire un détournement du même pouvoir par cette autorité (cf. Cour adm. 21 mars 2002, n° 14261C du rôle, Pas. adm. 2002, V° Recours en annulation, n° 10).

A la lumière des considérations qui précèdent, il convient d’analyser le motif tiré de ce que l’extension du périmètre d’agglomération sollicitée par les demanderesses contribuerait à un développement tentaculaire de la localité de Bridel et favoriserait le mitage du paysage.

D’après les renseignements soumis au tribunal par les demanderesses, ainsi que par le délégué du gouvernement, la parcelle litigieuse se trouve située à l’extrémité de la localité du Bridel en direction du Biergerkraiz, en zone rurale, d’après la partie graphique du plan d’aménagement général actuellement en vigueur et elle est située à environ 100 mètres de la limite actuellement en vigueur du périmètre d’agglomération de la localité de Bridel.

Une extension du périmètre d’agglomération au niveau du terrain des demanderesses, même en tenant compte du fait que deux autres terrains immédiatement adjacents à leur terrain, en face desquels ne se trouve aucune autre construction, aboutit à un prolongement d’un village contribuant ainsi à rendre plus difficile un développement cohérent et concentrique de la localité et est partant contraire au concept urbanistique exposé par le ministre (cf. trib. adm. 10 juillet 2002, n° 14378 du rôle, confirmé par Cour adm. 26 novembre 2002, n° 15233C du rôle, non encore publiés). Il en est a fortiori ainsi en l’espèce, étant donné que les parcelles litigieuses et plus particulièrement celle des demanderesses ne sont pas adjacentes au périmètre d’agglomération mais séparées par une route et une ou plusieurs autres parcelles appartenant à des tiers. Ainsi, l’objectif du ministre de l’Intérieur à travers sa décision litigieuse du 18 octobre 2001 s’inscrit entièrement dans le cadre de la décision du gouvernement en Conseil du 11 juillet 1986 concernant la révision des directives générales du programme directeur de l’aménagement du territoire, tel que mis en avant dans les mémoires en réponse du délégué du gouvernement.

S’il est vrai que le tissu urbain de la localité de Bridel n’est pas à proprement dire concentrique pour ne pas être disposé à partir d’un noyau central, tel que cela ressort de la partie graphique du plan d’aménagement général, il n’en reste pas moins, comme l’a exposé à juste titre le délégué du gouvernement, qu’une extension au niveau du terrain des demanderesses, ainsi que des deux terrains adjacents, loin de simplifier un aménagement valable, contribuerait encore à rendre plus difficile un développement cohérent et concentrique tel que souhaité par les autorités étatiques.

Il suit de l’ensemble des développements qui précèdent que loin d’avoir versé dans une erreur d’appréciation à sanctionner par le tribunal, le ministre de l’Intérieur a agi sur base de considérations légales d’ordre urbanistique tendant à une finalité d’intérêt général.

Il échet encore de rajouter que le fait que des infrastructures se trouvent déjà en place à l’endroit de la situation de la parcelle litigieuse n’est pas de nature à énerver la conclusion ci-

avant retenue, compte tenu de ce qu’aucun droit acquis ne saurait être tiré de cette situation de fait.

Enfin, en ce qui concerne la prétendue rupture de l’égalité des citoyens devant la loi, il échet de relever que ce moyen n’a pas été sérieusement corroboré par les demanderesses au-

delà de leurs affirmations et exemples cités, de sorte que le tribunal administratif n’est pas en mesure d’apprécier concrètement la pertinence de ce moyen qui est de ce fait à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

rejette la demande tendant à la jonction de la présente affaire avec les affaires inscrites sous les numéros du rôle 14420 et 14551 ;

donne acte aux parties à l’instance de ce que le recours est devenu sans objet en cours d’instance contentieuse en ce qu’il a été dirigé contre la décision du ministre de l’Environnement du 14 septembre 2001 ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié, partant en déboute ;

condamne les demanderesses aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, Mme Lamesch, juge, et lu à l’audience publique du 15 mai 2003 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 10


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 14299
Date de la décision : 15/05/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-05-15;14299 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award