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24/04/2003 | LUXEMBOURG | N°15319

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 avril 2003, 15319


Tribunal administratif N° 15319 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 septembre 2002 Audience publique du 24 avril 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du conseil communal de … et une décision confirmative implicite prise par le bourgmestre de la commune de … en matière de congés

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15319 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 4 septembre 2002 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, insc

rit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, secrétaire communal en retraite, de...

Tribunal administratif N° 15319 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 septembre 2002 Audience publique du 24 avril 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du conseil communal de … et une décision confirmative implicite prise par le bourgmestre de la commune de … en matière de congés

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15319 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 4 septembre 2002 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, secrétaire communal en retraite, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du conseil communal de … du 12 décembre 2001 portant refus de l’indemniser du chef des congés non pris avant la prise de sa retraite, telle que confirmée « par la décision implicite de refus du Bourgmestre de l’Administration Communale de … intervenue suite au recours gracieux formé par le mandataire du requérant en date du 06 mars 2002 » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Carlos CALVO, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 13 septembre 2002 portant signification de ce recours à l’administration communale de … ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée du conseil communal de … du 12 décembre 2001 ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Nadia JANAKOVIC, en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER, en ses plaidoiries.

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Le 8 janvier 2001, M. … sollicita auprès de l’administration communale de … l’indemnisation intégrale de son congé légal de recréation relatif à l’année 2000, ainsi que le restant éventuel de l’année précédente. - Il convient de préciser que par la suite, le 8 mai 2001, M. … informa l’administration communale de … de ce que le total du congé dont la compensation financière était demandée par lui s’élèverait à 32 jours.

Dans sa séance publique du 12 décembre 2001, le conseil communal de …, avec 6 voix contre 3, refusa d’indemniser M. … aux motifs suivants :

« 1. Monsieur … avait parfaitement connaissance des modalités prévues par la loi sur le statut général des fonctionnaires communaux ainsi que par le règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 réglant le temps de travail et les congés des fonctionnaires communaux sans avoir toutefois proposé au collège des bourgmestre et échevins en fonction en 1999 et 2000 l’indemnisation de son congé de récréation en suspens 2. Le collège échevinal n’a pas d’autorisation pour le paiement du congé sous main à l’exception d’une attestation signée et rédigée le 18 mai 2001 par deux membres de l’ancien collège échevinal et cela après la fin de leur mandat politique 3. Le conseil communal est d’avis que Monsieur … avait la possibilité de prendre l’intégralité de son congé de récréation avant sa mise à la retraite 4. Le Conseil communal refuse de créer un cas de jurisprudence unique au Grand-

Duché en portant non-observation de la législation en vigueur ».

Par lettre du 6 mars 2002, M. …, par le biais de son mandataire, introduisit un recours gracieux auprès de l’administration communale de …. Dans le cadre de ce recours gracieux, il exposa que son départ à la retraite ayant été fixé au 31 mai 2000, il se serait vu refuser les congés qui lui restaient à prendre pour les années 1999 et 2000, que ce refus émanant de l’ancien collège échevinal aurait été motivé par le fait que la continuité des services devait était assurée jusqu’à l’arrivée de son successeur, prévue pour le 1er juin 2000, et par l’impossibilité de lui trouver un remplaçant pendant ses périodes de congés et il soutint avoir « à maintes reprises demandé une compensation financière pour les congés restants et qu’il avait régulièrement sollicité en application du statut des fonctionnaires communaux ».

Par lettre du 22 avril 2002, Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, déclarant agir pour compte de l’administration communale de …, informa le mandataire de M. … de ce que sa partie n’avait pas l’intention de revenir sur sa décision, étant donné qu’il n’existerait « aucune trace » d’une demande écrite relativement à une demande de congé que M. … aurait formulée avant son départ à la retraite.

Par lettre du 30 avril 2002, M. …, par le biais de son mandataire, transmit à l’administration communale de … deux attestations testimoniales, émanant des anciens bourgmestre et 1er échevin de la commune de …, lesquels certifient en substance avoir demandé à M. …, lors de différentes réunions du collège échevinal de …, de continuer d’effectuer son service actif de secrétaire communal jusqu’à l’entrée en service de son successeur ou jusqu’à son départ à la retraite et, ainsi, d’avoir « refusé de lui accorder son congé légal de l’exercice 2000 ainsi que le restant de son congé de l’exercice 1999 », et de ce que les raisons de ce refus ont été « plusieurs demandes de charger un autre secrétaire communal actif, ou retraité de remplir ses tâches pendant la durée de congé susdite ont échoué ; un pool de remplaçants n’était pas créé ; la nécessité absolue d’organiser les élections complémentaires du 21 et 28 mai 2000 ; par souci d’assurer un service ininterrompu et compétent au secrétariat communal face à un collège échevinal et un conseil communal inexpérimentés entrés en service seulement le 1er janvier 2000 ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 4 septembre 2002, M. … a introduit un recours contentieux tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision précitée du conseil communal de … du 12 décembre 2001 portant refus de l’indemniser du chef des congés non pris avant la prise de sa retraite, telle que cette décision a été confirmée « par la décision implicite de refus du Bourgmestre de l’Administration Communale de … intervenue suite au recours gracieux formé par le mandataire du requérant en date du 06 mars 2002 ».

Il convient en premier lieu de relever que nonobstant le fait que l’administration communale de …, quoi que valablement citée par exploit de l’huissier de justice Carlos CALVO du 13 septembre 2002, n’a pas constitué avocat et n’a partant pas déposé de mémoire en réponse, l’affaire est néanmoins réputée jugée contradictoirement, en vertu de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives. - Ceci étant, bien que le demandeur ne se trouve pas confronté à un contradicteur, il n’en reste pas moins que le tribunal doit examiner les mérites des différents moyens soulevés, cet examen comportant entre autres, le cas échéant, un contrôle de l’applicabilité des dispositions légales appliquées ou applicables aux données factuelles apparentes de l’espèce, c’est-à-dire une qualification de la situation de fait telle qu’elle apparaît à travers les informations qui lui ont été soumises par rapport aux règles légales applicables.

QUANT A LA COMPETENCE DU TRIBUNAL ET QUANT A LA RECEVABILITE DU RECOURS D’après l’article 41 de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, désignée ci-après par « le statut général », le recours en réformation est réservé aux décisions administratives relatives à la fixation des traitements en principal et accessoires et des émoluments, à la mise à la retraite ou à la pension des fonctionnaires communaux.

Or, la matière des congés de récréation ne rentre dans aucune des catégories prémentionnées, de sorte qu’aucun recours de pleine juridiction n’est ouvert en vue de la toiser (cf. C.E. 20 décembre 1994, n° 9058 du rôle ; trib. adm. 7 octobre 2002, n° 14677 du rôle, non encore publié).

Il convient d’ajouter qu’en l’espèce, les décisions querellées n’ont pas non plus trait à la mise à la retraite, même si elles sont intervenues, du moins médiatement, à l’occasion de celle-ci.

Ceci dit, il suit des considérations qui précèdent que le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal.

Le recours en annulation introduit suivant les formes et délai prévus par la loi est cependant recevable dans la mesure où il vise la décision du conseil communal de … du 12 décembre 2001, telle qu’elle a été confirmée par la lettre précitée du 22 avril 2002 émanant du mandataire de la commune. - Concernant une prétendue décision implicite de rejet du recours gracieux émanant du bourgmestre de la commune de …, le recours manque d’objet, étant donné qu’il est constant en cause qu’en réponse au recours gracieux du demandeur, le mandataire de la commune de … a expressément confirmé la décision du conseil communal du 12 décembre 2001.

Le demandeur soulève en premier lieu l’incompétence ratione materiae du conseil communal pour prendre une décision en matière de congés.

Il convient en premier lieu de relever que les articles 28 à 37 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 précisent que le conseil communal possède exclusivement des compétences réglementaires ou consultatives, toutes les fois que son avis est exigé par des lois ou règlements ou sollicité par « l’autorité supérieure », en matière de nomination, de révocation et de démission des fonctionnaires et employés de la commune, en matière de nomination des membres de commissions administratives, en matière de référendum communal, en matière de consultation des administrés de la commune et de budget communal, de sorte que d’après les textes précités, le conseil communal ne possède aucune compétence en matière d’exécution de lois et règlements ou de prise de décisions administratives individuelles. L’exécution des lois et règlements est au contraire confiée aux deux autres organes qui composent le corps communal, à savoir respectivement le collège des bourgmestre et échevins et le bourgmestre, avec les compétences spécifiques qui leur reviennent en application de la ventilation opérée par ladite loi.

Ceci étant rappelé, il convient en second lieu de préciser qu’en application de l’article 57-8° de la loi communale précitée, c’est le collège des bourgmestre et échevins qui est chargé « de la surveillance des fonctionnaires, employés et ouvriers de la commune [et] de l’application à ces personnes des mesures qui en découlent impérativement de dispositions législatives ou réglementaires en matière de congés, promotions et autres droits statutaires ».

Il suit des considérations qui précèdent que dans la mesure où c’est le conseil communal de … qui a pris la décision litigieuse du 12 décembre 2001 refusant de faire droit à la demande de M. … en allocation d’une compensation financière pour des congés légaux de récréation, telle qu’elle fut confirmée par la suite, cette dernière a été prise par un organe incompétent, de sorte à en entraîner l’annulation. – Il convient de préciser que cette conclusion n’est pas ébranlée par le fait constaté par le tribunal que, dans sa lettre précitée du 22 avril 2002, Maître Georges KRIEGER, préqualifié, a déclaré agir pour compte de « l’administration communale de … », étant donné qu’eu égard aux termes employés (« Ma partie maintient sa position ») et à défaut d’autres précisions afférentes, cette lettre ne saurait être interprétée comme documentant à elle-seule une décision de « reprise » ou de « ratification » par le collège échevinal de la décision litigieuse du conseil communal.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

déclare le recours en annulation sans objet en ce qu’il vise une prétendue décision implicite de rejet émanant du bourgmestre de la commune de … ;

reçoit le recours en annulation en la forme en ce qu’il vise la décision du conseil communal de … du 12 décembre 2001, telle que confirmée par le mandataire de la commune le 22 avril 2002 ;

au fond, le déclare également justifié, partant annule la décision du conseil communal de … du 12 décembre 2001, telle que confirmée par le mandataire de la commune le 22 avril 2002, et renvoie le dossier en prosécution de cause devant le collège échevinal de la commune de … ;

condamne l’administration communale de … aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 24 avril 2003, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 15319
Date de la décision : 24/04/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-04-24;15319 ?

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