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31/03/2003 | LUXEMBOURG | N°15580

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 31 mars 2003, 15580


Tribunal administratif Numéro 15580 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 novembre 2002 Audience publique du 31 mars 2003 Recours formé par Monsieur … et Madame … et consorts, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15580 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 novembre 2002 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de Monsieur …, né le …, et de son épouse, Madame …, n

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Tribunal administratif Numéro 15580 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 novembre 2002 Audience publique du 31 mars 2003 Recours formé par Monsieur … et Madame … et consorts, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15580 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 novembre 2002 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de Monsieur …, né le …, et de son épouse, Madame …, née le …, et leurs enfants … …, né le … et … …, née le …, tous de nationalité bosniaque, demeurant actuellement ensemble à L- …, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice intervenue le 3 septembre 2002, rejetant leur demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 28 janvier 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en sa plaidoirie à l’audience publique du 17 mars 2003.

Le 17 juillet 2002, Monsieur … et son épouse Madame …, agissant en leur nom personnel, ainsi qu’en celui de leurs enfants mineurs … et …, introduisirent une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour les époux …-… furent entendus par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur leur identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 6 août 2002, les époux …-… furent entendus séparément par un agent du ministère de la Justice sur leur situation et sur les motifs à la base de leur demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 3 septembre 2002, leur notifiée en date du 8 octobre 2002, le ministre de la Justice informa les époux …-… de ce que leur demande avait été refusée comme non fondée aux motifs qu’ils n’invoqueraient aucune crainte raisonnable de persécution du fait de leurs opinions politiques, de leur race, de leur religion, de leur nationalité ou de leur appartenance à un groupe social.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Les demandeurs font valoir que la décision du ministre de la Justice ainsi que toute la procédure qui l’a précédée serait irrégulière, partant nulle et à annuler pour violation des droits de la défense des demandeurs et de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme en ce que la décision du 3 septembre 2002 ne mentionne pas la présence d’un traducteur qui aurait traduit le contenu de la décision aux demandeurs. Ils avancent qu’ils seraient par conséquent en droit pour conserver leurs droits élémentaires de défense et de se voir réentendre par les différentes institutions compétentes.

Quant au fond, ils exposent qu’ils rempliraient les conditions pour bénéficier de l’asile d’autant plus qu’il résulterait d’un certificat médical du docteur … du service d’imagerie médicale du 26 octobre 2002 que Monsieur … a été blessé pendant la guerre et qu’il porterait un éclat métallique dans son poumon. Ils estiment que la décision ministérielle serait dès lors à annuler, sinon à réformer pour défaut de motifs respectivement pour erreur manifeste d’appréciation des faits.

En ce qui concerne le premier moyen soulevé par les demandeurs à savoir la violation des droits de la défense et de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme en ce que la décision soumise au tribunal ne mentionnerait pas la présence d’un traducteur, force est de constater qu’aucune disposition légale de la loi modifiée du 3 avril 1996 citée ci-

avant ne mentionne la présence d’un traducteur au moment de la notification de la décision.

L’article 5 de cette même loi dispose que « le demandeur d’asile est informé de son droit de se faire assister à titre gratuit d’un interprète et de son droit de choisir un avocat…. Le fait que ladite information a été donnée aux demandeurs d’asile devra ressortir du dossier ». Il résulte du dossier qu’aussi bien Monsieur … que Madame … ont bénéficié de la présence d’un traducteur lequel leur a traduit tout au long de leur audition les différentes questions posées par un agent du ministère de la Justice en une langue par eux compréhensible. Les demandeurs ont donc été mis en mesure d’assurer leurs droits de la défense et aucun autre élément n’ayant été soumis au tribunal lui permettant de retenir en quoi les droits de la défense de Monsieur … et Madame … n’auraient pas été respectés, il y a lieu d’écarter le moyen soulevé comme étant non fondé, d’autant plus que les demandeurs ont signé, sans aucune réserve, la réception de la décision ministérielle en date du 8 octobre 2002.

En ce qui concerne le défaut de motivation soulevé par les demandeurs force est de constater que la décision ministérielle du 3 septembre 2002 a été valablement et suffisamment motivée, de sorte que ce moyen laisse également d’être fondé.

Concernant le motif invoqué de la désertion de l’armée de la part de Monsieur …, il convient de rappeler que celle-ci n’est pas, en elle-même, un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié. Le tribunal constate que la décision ministérielle de refus est légalement justifiée par le fait que la paix s’est établie dans la région originaire des demandeurs, de sorte qu’il n’est pas établi qu’actuellement Monsieur … risque de devoir participer à des actions militaires contraires à des raisons de conscience valables. En ce qui concerne les mauvais traitements subis par Monsieur … de la part des autorités de police à la suite de sa désertion, même à les supposer établis, ils constituent des pratiques certes condamnables mais ne sont pas d’une gravité telle qu’ils justifient une crainte légitime de persécution au sens de la Convention de Genève. De même, la blessure de guerre dont il fait état n’est pas à elle-même un motif suffisant pour justifier l’octroi du statut de réfugié. En ce qui concerne Madame … elle n’a pas fait l’objet de persécutions personnelles et les craintes dont elle fait état s’analysent en substance en un sentiment général de peur et d’insécurité. A cela s’ajoute que la situation en Bosnie-Herzégovine s’est stabilisée et que ce pays est toujours sous le contrôle des forces de l’ONU.

Il suit de ce qui précède que les demandeurs n’ont pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève, susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans leur chef.

Partant, le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Malgré le fait que les demandeurs n’étaient pas représentés à l’audience des plaidoiries, l’affaire est néanmoins jugée contradictoirement, étant donné que la procédure devant les juridictions administratives est essentiellement écrite et que les demandeurs ont fait déposer une requête écrite.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 31 mars 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

SCHMIT LENERT 3


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15580
Date de la décision : 31/03/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-03-31;15580 ?

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