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26/03/2003 | LUXEMBOURG | N°15491

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 mars 2003, 15491


Tribunal administratif N° 15491 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 octobre 2002 Audience publique du 26 mars 2003

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Recours formé par Monsieur et Madame …, … contre deux décisions prises par le ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15491du et rôle déposée au greffe du tribunal administratif le 24 octobre 2002 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avo

cats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Radzadaginija-Novi Pazar (Serbie/ex-Yougoslavie), e...

Tribunal administratif N° 15491 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 octobre 2002 Audience publique du 26 mars 2003

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Recours formé par Monsieur et Madame …, … contre deux décisions prises par le ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15491du et rôle déposée au greffe du tribunal administratif le 24 octobre 2002 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Radzadaginija-Novi Pazar (Serbie/ex-Yougoslavie), et de son épouse, Madame …, née le … à Stalina (Bosnie), tous les deux de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision prise par le ministre de la Justice le 11 avril 2002, par laquelle il n’a pas été fait droit à leur demande en obtention d’une autorisation de séjour et de la décision confirmative dudit ministre du 22 juillet 2002, suite à un recours gracieux des demandeurs ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 9 janvier 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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Le 18 février 1999, Monsieur … et son épouse, Madame … … introduisirent une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Par décision du 21 novembre 2000, confirmée sur recours gracieux le 14 mars 2001, le ministre de la Justice les informa que leur demande était rejetée, étant donné qu’ils n’allégueraient aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre leur vie intolérable dans leur pays d’origine, de sorte qu’une crainte justifiée de persécution en raison d’opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l’appartenance à un groupe social ne serait pas établie.

A la suite de l’introduction en date du 13 avril 2001 d’un recours contentieux dirigé contre les prédites décisions ministérielles, le tribunal administratif a déclaré ledit recours non justifié et en a débouté les époux … par un jugement rendu le 7 novembre 2001, confirmé sur appel par la Cour administrative le 19 février 2002.

Par une lettre du 2 avril 2002, parvenue au secrétariat du ministère de la Justice le 4 avril 2002, Monsieur R.L., voisin des époux …, introduisit auprès du ministre de la Justice une demande en régularisation de leur situation, c’est-à-dire tendant à leur faire délivrer une autorisation de séjour, en estimant qu’un retour forcé dans leur pays d’origine « signifierait pratiquement un retour dans le néant » et relevant leurs volonté et effort d’intégration au Luxembourg, de même que, eu égard à une promesse d’embauche, de la possibilité de subvenir eux-mêmes à leurs besoins, dès l’obtention des permis requis.

Sur ce, le ministre de la Justice prit une décision en date du 11 avril 2002 par laquelle il informa les époux … de ce qu’il n’était pas en mesure de leur délivrer une autorisation de séjour au motif que, d’une part, ils ne disposeraient pas de moyens d’existence personnels suffisants tels que requis par l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère et, d’autre part, ils ne feraient pas état de raisons humanitaires justifiant une autorisation de séjour au Luxembourg pour « raisons humanitaires ».

Un recours gracieux formulé par le mandataire des époux … par lettre du 11 juillet 2002 à l’encontre de la décision précitée du 11 avril 2002 fut rejeté par une décision confirmative du ministre de la Justice du 22 juillet 2002, au motif qu’ils n’auraient pas fait état d’éléments pertinents nouveaux.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 24 octobre 2002, les époux … ont fait introduire un recours en annulation contre les deux décisions ministérielles précitées des 11 avril et 22 juillet 2002.

Le recours est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de leur recours, les demandeurs estiment que les décisions attaquées ne seraient pas légalement motivées par la référence à l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972, au motif qu’on ne saurait reprocher à un demandeur d’asile de ne pas disposer de revenus personnels, parce qu’en sa qualité de demandeur d’asile, il lui est défendu de s’adonner à une activité salariée et qu’ils disposeraient de promesses d’embauche de deux sociétés luxembourgeoises. Ils soutiennent en outre que les effets du refus de leur accorder un permis de séjour au Luxembourg seraient disproportionnés par rapport au but recherché, étant donné qu’ils n’auraient plus de famille ni de maison dans leur pays d’origine, que toute leur famille résiderait légalement au Luxembourg, cette dernière étant en outre disposée à les prendre en charge jusqu’à ce qu’ils puissent s’adonner à des occupations rémunérées et que, pour le surplus, un retour dans leur pays d’origine les exposerait à des risques de persécution de la part des autorités en place. Sur ce, ils concluent en substance que la motivation, en ce qu’elle repose sur l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972, serait illégale, sinon inappropriée.

Le délégué du gouvernement, après avoir relevé que les demandeurs ne disposeraient pas de moyens d’existence personnels tels que légalement requis, fait valoir que seule la preuve de revenus légaux permettrait de satisfaire à la condition de l’article 2 précité, en ajoutant que ni les prises en charge par des tiers, même s’ils émanent de membres de la famille, ni des promesses d’embauche, telles celles produites en cause, ne sauraient constituer la preuve de tels moyens. Il ajoute en outre que les demandeurs ne feraient pas valoir de raisons humanitaires suffisantes justifiant l’octroi d’un permis de séjour.

L’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972 dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : (…) - qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Au vœu de l’article 2 précité, une autorisation de séjour peut dès lors être refusée notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (trib. adm. 17 février 1997, Pas. adm.

2002, V° Etrangers, II. Autorisation de séjour – Expulsion, n° 121 et autres références y citées, p. 205).

Il s’ensuit que les prises en charge produites en cause ne sauraient valoir preuve de moyens personnels suffisants légalement acquis dans le chef des demandeurs afin de supporter les frais de voyage et de séjour au Luxembourg.

En outre, la seule preuve d’une simple expectative d’un travail, non autorisé par une décision préalable du ministre du Travail et de l’Emploi, ne saurait constituer des moyens de subsistance personnels au sens de l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972. En d’autres termes, les demandeurs ont tort de soutenir qu’une promesse d’embauche établirait l’existence de moyens personnels suffisants dans leur chef, étant donné qu’ils restent en défaut d’établir l’existence d’un permis de travail, légalement requis en application de l’article 26 de la loi précitée du 28 mars 1972, qui dispose qu’aucun étranger ne pourra être occupé sur le territoire du Grand-Duché sans permis de travail. Il convient d’ajouter que cette conclusion n’est nullement ébranlée par la considération que les demandeurs ont séjourné au Luxembourg en tant que demandeurs d’asile et qu’au cours de l’instruction de leur demande, ils n’étaient pas autorisés à s’adonner à une activité professionnelle.

A défaut pour les demandeurs d’avoir rapportés la preuve de l’existence de moyens personnels, le ministre de la Justice a dès lors valablement pu refuser l’autorisation de séjour sollicitée sur base de ce motif.

Les refus ministériels ne sont pas non plus affectés par l’argumentation basée sur ce que les effets des décisions querellées seraient disproportionnés par rapport au but que le ministre aurait légalement pu poursuivre.

En effet, les éléments du dossier ne font ressortir aucune raison empêchant les demandeurs à mener une vie indépendante dans leur pays d’origine, ni en quoi leur retour dans leur pays d’origine serait pour eux une source de danger – les motifs liés à une crainte en cas de retour dans leur pays d’origine ayant fait l’objet d’un examen par les juridictions administratives dans le cadre des recours contentieux introduits contre les refus ministériels prévisés relativement à leur demande d’asile, ces décisions ayant retenu le défaut d’existence d’une telle crainte justifiée de persécution - ou en quoi il existerait entre eux et les membres de leur famille légalement établis au Luxembourg des liens de dépendance empêchant leur séparation.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que les décisions ministérielles sont légalement fondées et que les demandeurs doivent être déboutés de leur recours.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant le rejette ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Ravarani, président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 26 mars 2003, par le président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Ravarani 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 15491
Date de la décision : 26/03/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-03-26;15491 ?

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