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26/03/2003 | LUXEMBOURG | N°15490

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 mars 2003, 15490


Numéro 15490 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 octobre 2002 Audience publique du 26 mars 2003 Recours formé par les époux … et … …-… et consorts, contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15490 du rôle et déposée le 24 octobre 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Pol URBANY, avocat à la Cour,

assisté de Maître Pascale HANSEN, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des a...

Numéro 15490 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 octobre 2002 Audience publique du 26 mars 2003 Recours formé par les époux … et … …-… et consorts, contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15490 du rôle et déposée le 24 octobre 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Pol URBANY, avocat à la Cour, assisté de Maître Pascale HANSEN, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Monsieur …, né le…, et de son épouse, Madame …, née le…, agissant tant en leur nom personnel qu’en nom et pour compte de leurs enfants mineurs …, née le…, …, né le…, et …, né le 29 janvier 1995, tous de nationalité bosniaque, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 26 juillet 2002, leur notifiée le 29 octobre 2002, portant rejet de leur demande en obtention d’une autorisation de séjour ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 13 janvier 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Pascale HANSEN, en remplacement de Maître Pol URBANY, et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 mars 2003.

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En date du 4 décembre 2000, les époux … et …, accompagnés de leurs enfants communs …, … et …, introduisirent une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971.

L’octroi du statut de réfugié leur ayant été refusé, ils ont introduit en date du 11 juillet 2002 une demande en obtention d’une autorisation de séjour. Par décision du 26 juillet 2002, leur notifiée le 29 juillet 2002, le ministre de la Justice refusa de faire droit à cette demande au motif qu’ils ne disposeraient pas de moyens d’existence personnels suffisants conformément à l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers et que par ailleurs ils ne feraient pas état de raisons humanitaires justifiant une autorisation de séjour.

Par requête déposée en date du 24 octobre 2002, les consorts …-… ont fait introduire un recours contentieux tendant à l’annulation de la décision ministérielle prévisée du 26 juillet 2002.

Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de leur recours ils font valoir que le ministre n’aurait pas apprécié à sa juste valeur leur situation spécifique et subjective. A cet égard ils relèvent que contrairement à ce qui a été retenu par le ministre, ils auraient fait état de raisons humanitaires qui en principe devraient leur permettre d’obtenir une autorisation de séjour. Ils se réfèrent à cet égard à leur passé, ainsi qu’aux événements ayant justifié leur départ de leur pays d’origine en direction du Grand-Duché de Luxembourg en rappelant que Monsieur … aurait refusé de participer à la guerre contre la Croatie, que de ce fait il aurait été traité de déserteur et leurs enfants auraient été maltraités à l’école, et que de plus la Fédération de Bosnie-Herzégovine leur aurait réclamé des sommes d’argent importantes, de sorte que face à l’impossibilité de trouver cet argent, ils auraient décidé de retourner dans leur ville natale en République Serbe. Or, ils exposent qu’étant de religion musulmane les autorités de la République Serbe auraient refusé l’autorisation d’établissement à Monsieur … de manière à lui avoir coupé son seul moyen pour nourrir sa famille. Ils se réfèrent en outre à une prise de position du UNHCR datant de septembre 2001 relatant des problèmes majeurs ayant trait au droit de propriété existant en Bosnie-Herzégovine.

Quant au motif de refus basé sur une insuffisance de moyens d’existence personnels, les demandeurs font valoir qu’une entreprise établie à Wiltz serait prête à engager Monsieur … comme maçon au cas où il serait détenteur d’une autorisation de séjour et d’un permis de travail, de sorte que face à l’expectative de gagner ainsi au moins le salaire social minimum, ce serait à tort que le ministre a conclu qu’ils ne disposeraient pas de moyens suffisants pour subvenir à leurs besoins. Les demandeurs signalent finalement que leur famille serait parfaitement intégrée au Luxembourg, que leurs enfants seraient des élèves modèles et qu’ils pourraient parfaitement subvenir à leurs besoins sans devoir recourir à une quelconque aide étatique.

Concernant le motif de refus avancé dans la décision litigieuse et tiré du défaut de moyens d’existence personnels dans le chef des demandeurs, l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972 dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : – qui est dépourvu de papiers de légitimation prescrits, et de visa si celui-ci est requis, – qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Au vœu de l’article 2 précité, une autorisation de séjour peut dès lors être refusée notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (trib. adm. 17 février 1997, Pas. adm. 2002, v° Etrangers, 2. Autorisations de séjour – Expulsions, n° 121 et autres références y citées, p.149).

Le ministre dispose d'un pouvoir d’appréciation dans chaque espèce pour déterminer si la condition de disposer de moyens personnels suffisants est remplie et si elle justifie l'octroi ou le refus de l'entrée et du séjour au Grand-Duché de Luxembourg, étant entendu que ses décisions sont susceptibles d’être soumises au juge administratif dans le cadre d’un recours en annulation (Cour adm. 12 novembre 2002, …, n° 15102C, non encore publié).

En outre, la seule preuve de la possibilité de percevoir des sommes, en principe suffisantes pour permettre à l'intéressé d'assurer ses frais de séjour au pays, est insuffisant, il faut encore que les revenus soient légalement perçus (trib. adm. 15 avril 1998, n° 10376 du rôle, Pas. adm 2002, v° Etrangers, n° 125). Ne remplissent pas cette condition les revenus perçus par un étranger qui occupe un emploi alors qu'il n'est pas en possession d'un permis de travail et qu'il n'est dès lors pas autorisé à occuper un emploi au Grand-Duché de Luxembourg et à toucher des revenus provenant de cet emploi (trib. adm. 30 avril 1998, n° 10508 du rôle, Pas. adm 2002, v° Etrangers, n° 125 et autres références y citées).

En l’espèce, force est de constater qu’il ne se dégage ni des éléments du dossier, ni des renseignements qui ont été fournis au tribunal que les demandeurs étaient, à la date de la prise de la décision ministérielle attaquée, autorisés à travers un permis de travail à occuper un poste de travail au Grand-Duché, voire s’adonnaient légalement à une activité indépendante, et qu’ils pouvaient partant disposer de moyens personnels propres suffisants et légalement acquis. Plus particulièrement, eu égard aux considérations ci-avant faites, la promesse d’engagement invoquée par les demandeurs à l’appui de leur recours en faveur de Monsieur … ne peut être considérée comme preuve suffisante de l’existence de moyens de subsistance personnels à défaut de permis de travail pour ce poste.

A défaut par les demandeurs d’avoir rapporté la preuve de l’existence de moyens personnels, le défaut de tels moyens constitue en principe un motif valable pour refuser l’autorisation de séjour aux demandeurs.

Il y a lieu d’analyser ensuite les motifs ayant amené le ministre à ne pas reconnaître l’existence de raisons humanitaires de nature à justifier la délivrance d’une autorisation de séjour.

Force est de constater à cet égard que les difficultés rencontrées par les demandeurs dans leur pays d’origine invoquées pour illustrer les raisons humanitaires lesquels justifieraient selon eux l’octroi d’une autorisation de séjour, ont été examinées dans le cadre de l’examen de leur demande en obtention du statut de réfugié qui s’est soldée par un refus ministériel confirmé en phase contentieuse tant par le tribunal que par la Cour administrative, cette dernière ayant statué par un arrêt du 9 avril 2002 à ce sujet.

A défaut par les demandeurs de fournir d’autres éléments justifiant l’octroi d’une autorisation de séjour dans leur chef, ainsi que d’indiquer une quelconque base légale dont la violation devrait emporter l’annulation de la décision ministérielle litigieuse, le recours laisse également d’être fondé quant à ce volet.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en annulation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 26 mars 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. SCHMIT, greffier en chef.

Schmit Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15490
Date de la décision : 26/03/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-03-26;15490 ?

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