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17/03/2003 | LUXEMBOURG | N°s15379

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 mars 2003, s15379


Tribunal administratif N°s 15379 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 septembre 2002 Audience publique du 17 mars 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural en matière d’aide agricole

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15379 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 23 septembre 2002 pa

r Maître Marc ELVINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au...

Tribunal administratif N°s 15379 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 septembre 2002 Audience publique du 17 mars 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural en matière d’aide agricole

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15379 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 23 septembre 2002 par Maître Marc ELVINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision du ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural du 21 juin 2002 portant rejet de sa demande tendant à bénéficier d’aides prévues par le règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 instituant un régime d’aide favorisant les méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de la protection de l’environnement et de l’entretien de l’espace naturel, pris sur base de la loi du 24 juillet 2001 concernant le soutien au développement rural ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 novembre 2002 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 décembre 2002 par Maître Marc ELVINGER au nom de Monsieur … ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 janvier 2003 ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment la décision ministérielle critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Marc ELVINGER et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 mars 2003.

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Considérant que par décision du 21 juin 2002, le ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural, désigné ci-après par « le ministre » a pris position comme suit par rapport à la demande de Monsieur …, préqualifié, formulée le 28 décembre 2001 en vue de l’obtention des aides en faveur de l’introduction ou du maintien de l’agriculture biologique prévues par l’article 3 du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 instituant un régime d’aides favorisant les méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de la protection de l’environnement et de l’entretien de l’espace naturel :

« Sehr geehrter Herr …, Hiermit teile ich Ihnen mit, dass laut Artikel 2 der grossherzoglichen Verordnung vom 9. November 2001 das Höchstalter zur Beantragung der Förderung des biologischen Landbaus 55 Jahre beträgt. Da Sie älter als 55 Jahre sind, kann Ihrem obengenannten Antrag nicht stattgegeben werden.

Gegen vorliegenden Bescheid kann beim Verwaltungsgericht eine Nichtigkeitsklage eingereicht werden. Dieser Regress muss innerhalb von 3 Monaten nach Zustellung der vorliegenden Entscheidung durch einen Rechtsanwalt eingeleitet werden.

Für weitere Informationen wenden Sie sich bitte an den „service agri-environnement“ der Ackerbauverwaltung (…).

Hochachtungsvoll“;

Considérant que c’est contre cette décision ministérielle du 21 juin 2002 que Monsieur … a fait introduire en date du 23 septembre 2002 un recours en réformation, sinon en annulation ;

Considérant que le délégué du Gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours en réformation en l’absence de recours au fond prévu par la loi ;

Considérant qu’aucune disposition légale ne prévoyant un recours de pleine juridiction en la matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal ;

Considérant que le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi ;

Considérant qu’à travers son recours, le demandeur critique la légalité de la condition d’âge contenue dans l’article 2 du règlement grand-ducal prévisé du 9 novembre 2001, en ce que d’après cette disposition réglementaire les candidats ayant atteint l’âge de 55 ans au 1er novembre suivant la présentation d’une première demande d’aides sont exclus d’office, à moins que leur succession ne soit assurée par une personne avec laquelle ils ont conclu un contrat d’association ;

Que le demandeur conclut à l’illégalité de la condition ainsi posée à constater par la voie de l’exception d’illégalité par rapport aux dispositions de l’article 10bis de la Constitution consacrant l’égalité des Luxembourgeois devant la loi ;

Qu’en fait, le demandeur admet ne pas remplir la condition d’âge en question et ne pas avoir présenté à l’appui de sa demande d’aides un contrat d’association tel qu’exigé par l’article 2 en question ;

Considérant que le délégué du Gouvernement conclut en ordre principal que la constatation non autrement développée par le demandeur concernant la non-conformité de la condition d’âge contenue dans l’article 2 du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 par rapport à l’article 10bis de la Constitution serait trop générale et trop générique pour être prise en considération ;

Qu’en ordre subsidiaire le représentant étatique de renvoyer à la jurisprudence fournie et constante concernant l’application des dispositions de l’article 10bis de la Constitution ;

Qu’il estime que le législateur aurait pu en l’espèce soumettre certaines catégories de personnes à des régimes légaux différents en ce que la différence instituée procède de disparités objectives, qu’elle est rationnellement justifiée, adéquate et proportionnée à son but ;

Qu’il explique que le régime d’aides en faveur de l’agriculture biologique prévu au chapitre 2 dudit règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 comprendrait deux pistes dont l’une viserait à encourager l’introduction de l’agriculture biologique sur une exploitation agricole et l’autre le maintien de cette méthode de production ;

Que ce serait à l’égard de la première piste susvisée que l’article 2 du règlement grand-

ducal du 9 novembre 2001 fixe une limite d’âge en ce qui concerne l’éligibilité au régime d’aides ;

Que la fixation d’une telle condition d’âge et son choix seraient justifiés par la considération que l’introduction de la méthode de production biologique a des répercussions très incisives et durables requérant une modification substantielle dans la gestion et dans la méthode de production d’une exploitation agricole, ce d’autant plus que son introduction exigerait une période d’adaptation de plus ou moins trois ans au cours de laquelle les résultats économiques seraient particulièrement faibles, fait souligné par une majoration de l’aide au cours de cette période ;

Qu’à la lumière de ces constatations et sachant que l’engagement pour participer au régime d’aide doit porter sur 5 ans, le Gouvernement aurait estimé inopportun d’encourager par des aides publiques la conversion vers l’agriculture biologique des exploitations sans successeur direct et dont les exploitants ont dépassé une certaine limite d’âge les rapprochant de l’âge de la retraite ;

Que de tels exploitants seraient plutôt enclins à réduire progressivement leur activité qu’à s’investir dans de nouvelles méthodes de production ;

Que compte tenu des contraintes inhérentes à la conversion vers l’agriculture biologique, tant au niveau de la méthode de production qu’à celui de la durée de l’engagement et de l’objectif poursuivi par le régime d’aide, à savoir l’encouragement à la conversion vers l’agriculture biologique, l’exclusion des agriculteurs ayant dépassé une certaine limite d’âge et n’ayant pas de successeur pour assurer la poursuite de l’activité agricole serait certainement rationnellement justifiée, adéquate et proportionnée et ne se heurterait partant pas au principe d’égalité édicté par l’article 10bis de la Constitution ;

Qu’à travers son mémoire en réplique, le demandeur s’accorde avec le représentant étatique sur les critères retenus par la jurisprudence concernant l’application de l’article 10bis de la Constitution, tout en soulignant leur différence de vue quant à l’incidence des critères en question sur le cas d’espèce ;

Qu’en premier lieu, en partant d’un âge légal de la retraite de 65 ans, inapplicable comme tel aux exploitants agricoles, la limite d’âge fixée à 55 ans à travers l’article 2 du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 ne remplirait pas les conditions posées par la jurisprudence relativement à l’article 10bis de la Constitution ;

Que cette constatation serait d’autant plus fondée, suivant le demandeur, que l’article 51, paragraphe 3 dudit règlement grand-ducal prévoirait l’obligation pour les bénéficiaires d’aides de s’engager à respecter toutes les conditions d’allocation de celles-ci, pendant une période de 5 ans, sous peine de remboursement des aides perçues ;

Que dès lors la condition d’âge fixée deviendrait superflue ;

Qu’en toute occurrence la période minimale de 5 ans fixée pour le respect des conditions prévues audit règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 ne justifierait pas une limite d’âge fixée à 55 ans par rapport à un âge légal à la retraite de 65 ans, même compte tenu de la période de conversion vers l’agriculture biologique mise en avant par le délégué du Gouvernement évaluée par celui-ci à plus ou moins 3 ans ;

Que du point de vue de l’objectif de la réglementation tenant à la protection de l’environnement et à la conversion conséquente d’un nombre important d’exploitations agricoles vers l’agriculture biologique, la fixation de la limite d’âge serait encore inadéquate ;

Que les auteurs de la réglementation auraient d’ailleurs entrevu cet état des choses en ce qu’ils auraient prévu qu’un bénéficiaire d’aides, qui cesse l’exploitation en régime biologique dans la quatrième ou la cinquième année, ne serait attrait à rembourser que 50% des aides reçues ;

Que rien ne justifierait par ailleurs que le producteur ayant dépassé l’âge de 55 ans doive démontrer que la succession de son exploitation est assurée au moment où il présente une demande d’aide, alors que cette question est susceptible de se résoudre utilement seulement au moment où la question de la reprise effective de l’exploitation se posera ;

Que le demandeur de conclure qu’au regard des considérations multiples par lui mises en avant, la distinction suivant la condition d’âge posée par l’article 2 du règlement grand-

ducal du 9 novembre 2001 en question serait à qualifier de discriminatoire ;

Que le délégué du Gouvernement de dupliquer qu’en fait, à côté de la pension-

vieillesse à partir de l’âge de 65 ans, existerait la pension vieillesse anticipée dès l’âge de 60 ans ou même dès celui de 57 ans en fonction de la durée de l’assurance obligatoire ;

Que d’après les statistiques établies par l’Inspection générale de la sécurité sociale, l’âge moyen des bénéficiaires dans le secteur agricole au moment de l’attribution de la pension se serait situé en 1997 à 62,5 ans et en 1998 à 62,1 ans ;

Que la limite d’âge de 55 ans fixée à travers les dispositions réglementaires actuellement critiquées tiendrait compte de cette tendance de fait observée pour les exploitants agricoles de se voir attribuer une pension de vieillesse de façon anticipée ;

Que le délégué du Gouvernement de qualifier de raisonnement par déduction inacceptable le lien mis en avant par le demandeur entre la sanction pécuniaire prévue en cas de non respect de la période d’engagement de 5 ans et la condition de la limite d’âge posée ;

Que la sanction pécuniaire en cas de non-respect de la période d’engagement et la limite d’âge de 55 ans seraient deux éléments d’un régime d’aides ayant leur propres raisons d’être, de sorte qu’ils ne sauraient être mutuellement remplacés, étant donné plus particulièrement que la sanction pécuniaire en question se justifierait par rapport aux aides publiques allouées et résulterait d’une obligation imposée par la réglementation communautaire en la matière ;

Que le délégué du Gouvernement de relever encore que la possibilité de dérogation mise en avant par le demandeur concernant le moment de la désignation d’un successeur serait peu réaliste, alors qu’en règle générale le successeur d’une exploitation agricole se trouverait en place durant plusieurs années, souvent au moment où le chef d’exploitation atteint l’âge de 55 ans en vue d’un échange de savoir faire indispensable et que dès lors, dans la très grande majorité des cas la dérogation prévue par l’article 2 du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 se verrait être vérifiée, le successeur se trouvant généralement en place à côté de l’exploitant ayant dépassé l’âge de 55 ans actuellement sujet à critique ;

Que le délégué du Gouvernement de conclure sur un plan plus général que tout exploitant agricole serait libre de se lancer dans la production selon la méthode biologique indépendamment de son âge, mais que soucieux d’être encouragé financièrement dans cette démarche, il lui incomberait néanmoins de remplir les conditions fixées audit règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 ;

Considérant que le règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 en question a été pris en exécution directe de la loi du 24 juin 2001 précitée, laquelle dispose sous son chapitre 10, intitulé « mesures en faveur de l’environnement et de la sauvegarde de la biodiversité » à travers son article 27 qu’ « (1) En vue de contribuer à l’introduction ou au maintien de pratiques de production agricole compatibles avec les exigences de la protection et de l’amélioration de l’environnement et des ressources naturelles, du paysage, des sols et de la diversité génétique et afin de tenir compte des pertes de revenu agricole qui peuvent en résulter, des règlements grand-ducaux peuvent introduire des régimes d’aides en faveur de pratiques agricoles et de méthodes de production et d’élevage conçus pour la réalisation de ces objectifs.

(2) Ces règlements fixent notamment :

- les conditions à respecter par les demandeurs d’aides en ce qui concerne les pratiques agricoles et les méthodes de production et d’élevage visées au paragraphe 1 ;

- les formes et les montants des aides calculés en fonction de la perte de revenu encourue, des coûts additionnels résultant de l’engagement et de la nécessité de fournir une incitation financière. Les aides peuvent être limitées à un montant maximal par bénéficiaire et être modulées en fonction de la dimension des exploitations.

Ces règlements peuvent limiter le bénéfice de certains régimes d’aides aux exploitants agricoles exerçant l’activité à titre principal ou différencier les montants des aides en fonction du statut des demandeurs d’aides » ;

Considérant que le règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 prévoit au titre des dispositions générales à travers son article 1er qu’« il est institué un ensemble de régimes d’aides visant à encourager l’introduction ou le maintien de méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de la protection de l’environnement et de l’entretien de l’espace naturel » ;

Qu’à travers son article 2 alinéa 1er ledit règlement grand-ducal du 9 novembre 2001, toujours au titre des dispositions générales, prévoit la condition d’âge actuellement critiquée à travers le recours sous analyse en ces termes : « peuvent bénéficier des régimes d’aides visés au chapitre 2 et au chapitre 3 les exploitants agricoles qui disposent d’une exploitation ayant une dimension économique correspondant à une marge brute standard (MBS) totale d’au moins 9.600 EUR calculée conformément aux dispositions de l’article 5 du règlement grand-

ducal du 11 août 2001 portant exécution de la loi du 24 juillet 2001 concernant le soutien au développement rural pour autant que l’exploitant n’ait pas atteint l’âge de 55 ans au 1er novembre qui suit la présentation d’une première demande, à moins que la succession ne soit assurée par une personne avec lequel [sic] un contrat d’association a été conclu. Le Ministre peut dispenser de l’exigence d’un contrat d’association, si la personne en question poursuit ses études dans le domaine agricole après l’obtention du certificat d’aptitude technique et professionnelle ou d’un diplôme reconnu comme équivalent au moment de l’introduction de la demande » ;

Qu’en son article 2 alinéa 3 le même règlement grand-ducal prévoit que « sont exclus des régimes d’aides visés au chapitre 2 et au chapitre 3 les exploitants agricoles qui ne répondent pas aux critères énumérés ci-avant ainsi que ceux bénéficiant d’une pension de vieillesse » ;

Considérant que l’article 10bis de la Constitution dispose que « les Luxembourgeois sont égaux devant la loi » ;

Considérant que le principe d’égalité de traitement est compris comme interdisant le traitement de manière différente de situations similaires, à moins que la différenciation soit objectivement justifiée ;

Qu’il appartient par conséquent aux pouvoirs publics, tant au niveau national, qu’au niveau communal, de traiter de la même façon tous ceux qui se trouvent dans la même situation de fait et de droit ;

Que d’un autre côté, lesdits pouvoirs publics peuvent, sans violer le principe de l’égalité, soumettre certaines catégories de personnes à des régimes légaux différents, à condition que les différences instituées procèdent de disparités objectives, qu’elles soient rationnellement justifiées, adéquates et proportionnées à leur but (cf. trib. adm. 6 décembre 2000, Elos, n° 10019 du rôle, non réformé sur ce point par Cour adm. 5 juillet 2001, n° 12777C du rôle et autres références y citées ; Pas. adm. 2002, V° Lois et règlements, n° 2, p.

389) ;

Considérant qu’en vertu de l’article 95 de la Constitution « les cours et tribunaux n’appliquent les arrêtés et règlements généraux et locaux qu’autant qu’ils sont conformes aux lois » ;

Considérant qu’en fait il est constant que Monsieur …, né le 30 janvier 1941, a dépassé l’âge limite de 55 ans, tel que prévu par l’alinéa 1er de l’article 2 du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 prérelaté ;

Qu’il n’est pas contesté que Monsieur … est de nationalité luxembourgeoise, ni qu’il exerce l’activité agricole à titre principal ;

Considérant qu’il est patent que l’article 27 de la loi du 24 juillet 2002 prerelatée ne confère nullement au pouvoir réglementaire la possibilité expresse de fixer une condition d’âge telle celle actuellement critiquée ;

Qu’outre les conditions de fond contenues au paragraphe 2 dudit article 27, celui-ci autorise seulement le pouvoir réglementaire à « différencier les montants des aides en fonction du statut des demandeurs d’aides » ;

Considérant que la limite d’âge prévue par l’article 2 du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001, en tant que condition exclusive d’obtention d’une aide, ne répond point à la catégorie des mesures de différenciation des montants des aides prévisées in fine de l’article 27 (2) de la loi du 24 juillet 2001, tout comme elle n’est pas de nature à porter un distinguo valable au niveau du statut des demandeurs d’aide ;

Considérant que si le pouvoir réglementaire a pu valablement exclure à travers l’alinéa 3 de l’article 2 du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 des exploitants agricoles bénéficiant d’une pension de vieillesse au titre du statut des demandeurs d’aide, la condition d’âge posée pour des exploitants agricoles en activité désireux d’introduire dans le cadre de leur exploitation les pratiques de production agricole compatibles avec les exigences de la protection et de l’amélioration de l’environnement et des ressources naturelles conformément aux objectifs des lois du 24 juillet 2001 et règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 prévisés, contrevient encore aux exigences de l’article 10bis de la Constitution, concernant des exploitants de nationalité luxembourgeoise, en ce que la mesure arrêtée comporte une différenciation suivant l’âge de l’exploitant non justifiée par le texte légal à sa base dans le contexte précis de l’espèce ;

Considérant que plus particulièrement l’absence de successeur désigné conformément aux exigences portées par l’article 2, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 in fine pour un exploitant agricole désireux non seulement de se conformer aux objectifs légaux d’introduction de méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de la protection de l’environnement et de l’entretien de l’espace naturel, mais encore de donner pour l’avenir un atout supplémentaire à son exploitation en vue d’une reprise ultérieure dans le sens soutenu par le législateur, ne saurait être valablement rencontré par un refus d’aide péremptoire en raison de l’âge de l’exploitant, étant donné par ailleurs les modalités prévues à travers les articles 55 et 56 du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 dans le chef de l’Etat ayant alloué des aides prévues dans l’hypothèse où, en raison de son âge, celui-ci ne serait plus à même de poursuivre l’exploitation ;

Considérant que suivant les conclusions du délégué du Gouvernement non pas la limite d’âge contenue à l’article 2 du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001, actuellement critiquée, mais la condition du maintien des obligations contractées à la base des aides allouées pendant une période d’au moins 5 ans conformément aux dispositions des articles 51 et suivants dudit règlement grand-ducal est dictée par les exigences de subventionnement public résultant de la réglementation communautaire et plus particulièrement du règlement (CE) n° 1257/1999 du Conseil du 17 mai 1999 concernant le soutien au développement rural par le Fond Européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) et modifiant et abrogeant certains règlements, de même que le règlement (CE) n° 1750/1999 de la Commission du 23 juillet 1999 portant modalités d’application du règlement (CE) n° 1257/1999 du Conseil du 17 mai 1999 précité ;

Considérant qu’il suit de l’ensemble des développements qui précèdent que dans la mesure où l’article 2, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 9 novembre 2001 en question pose dans le chef de l’exploitant, demandeur d’aides, la condition d’âge de 55 ans tel qu’y prévue, cette disposition réglementaire à la fois excède le cadre légal posé et ne se justifie pas légalement au regard des exigences posées par l’article 10bis de la Constitution, de sorte que force est au tribunal de ne pas appliquer la disposition réglementaire en question dans ces limites, conformément aux exigences portées par l’article 95 de la Constitution ;

Considérant qu’il s’ensuit que l’exclusion des aides sollicitées par Monsieur …, prononcée à travers la décision ministérielle, manque de base légale en ce qu’elle a trait au seul âge de l’impétrant en relation avec la présentation de sa première demande afférente, de sorte qu’elle encourt l’annulation ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit justifié ;

partant annule la décision ministérielle déférée ;

renvoie le dossier devant le ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural en prosécution de cause ;

condamne l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 mars 2003 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 8


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : s15379
Date de la décision : 17/03/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-03-17;s15379 ?

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