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17/03/2003 | LUXEMBOURG | N°15465

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 mars 2003, 15465


Tribunal administratif Numéro 15465 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 octobre 2002 Audience publique du 17 mars 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié Vu la requête inscrite sous le numéro 15465 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 octobre 2002 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de Monsieur …, né le …, de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à

la réformation d’une décision du ministre de la Justice intervenue le 5 mars 2...

Tribunal administratif Numéro 15465 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 octobre 2002 Audience publique du 17 mars 2003 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié Vu la requête inscrite sous le numéro 15465 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 octobre 2002 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de Monsieur …, né le …, de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice intervenue le 5 mars 2002 rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision implicite de confirmation dudit ministre se dégageant de son silence observé pendant plus de trois mois par rapport au recours gracieux par lui introduit en date du 17 juin 2002 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 10 janvier 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Frank WIES, en remplacement de Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 mars 2003.

Le 27 décembre 2001, Monsieur … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour, il fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 24 janvier 2002, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 5 mars 2002, lui notifiée en date du 16 mai 2002, le ministre de la Justice informa Monsieur … de ce que sa demande a été refusée comme non fondée aux motifs qu’il n’invoquerait aucune crainte raisonnable de persécution du fait de ses opinions politique, de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de son appartenance à un groupe social.

Par courrier de son mandataire datant du 17 juin 2002, Monsieur … fit introduire un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle prévisée du 5 mars 2002. Ce courrier n’ayant pas fait l’objet d’une décision du ministre dans les trois mois qui s’en suivirent, Monsieur … a fait déposer un recours en réformation contre la décision ministérielle de refus du 5 mars 2002 et celle implicite confirmative se dégageant du silence observé par le ministre par rapport à son recours gracieux, par requête datant du 17 octobre 2002.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées. Le recours en réformation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Quant au fond, le demandeur fait exposer qu’il est originaire du Kosovo, de nationalité yougoslave, de confession musulmane et qu’il appartient à la minorité ethnique des Goranis. Il fait valoir que son départ aurait été dicté par le fait que sa vie serait sérieusement menacée d’un côté de la part des Albanais et d’un autre côté de la part des Serbes et ce uniquement en raison de son appartenance à la minorité des Goranis. Il ajoute que de nombreux écrits mettraient l’accent actuellement sur des difficultés rencontrées par les non-albanais, d’autant plus que l’administration civile mise en place au Kosovo ne serait pas en mesure d’éviter les nombreuses exactions de la part de la communauté albanaise. En ce qui concerne l’analyse faite par l’autorité administrative quant à la possibilité d’une fuite interne, il remarque que les autorités serbes refuseraient l’établissement permanent des minorités non serbes sur leur territoire et cela d’autant plus qu’il se verrait menacé en Serbie tant par les réfugiés kosovars serbes que par les Serbes eux-mêmes en raison de son nom de consonance albanaise. Il ajoute que le ministère de la Justice resterait par ailleurs en défaut de rapporter une possibilité de fuite interne effective dans son chef.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que son recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

L’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures non contentieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit, des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er , section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, concernant les persécutions commises par des tiers et non par les autorités étatiques, le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit une crainte personnelle de persécution voire une incapacité des autorités en place d’assurer sa protection. En effet, il résulte de son audition que Monsieur …, qui habite d’ailleurs à Belgrade, n’a pas fait l’objet de persécutions personnelles et que les seuls faits qu’il fait valoir, à savoir des coups de téléphone anonymes et des remarques désobligeantes, ne revêtent pas un caractère de gravité suffisant afin de pouvoir valoir comme crainte caractérisée de persécution au sens de la Convention de Genève, mais s’analysent en un sentiment général d’insécurité.

Quant au moyen soulevé par Monsieur … que le ministère de la Justice resterait en défaut de rapporter la preuve d’une possibilité de fuite interne dans son chef, il y a lieu de retenir qu’il incombe au demandeur d’apporter des raisons suffisantes justifiant son impossibilité de s’installer dans une autre région de son pays. Ce moyen ne saurait donc être retenu pour invalider les deux décision de refus du ministre de la Justice.

En l’espèce, le demandeur reste dès lors en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit une crainte personnelle de persécution, voire une incapacité des autorités en place d’assurer sa protection, de sorte que le recours laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur au frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 mars 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15465
Date de la décision : 17/03/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-03-17;15465 ?

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