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17/03/2003 | LUXEMBOURG | N°15178

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 mars 2003, 15178


Tribunal administratif N° 15178 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 juillet 2002 Audience publique du 17 mars 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg en matière de discipline

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Vu la requête inscrite sous le numéro 15178 du rôle et déposée le 26 juillet 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Serge URBANY, avocat

à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …,...

Tribunal administratif N° 15178 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 juillet 2002 Audience publique du 17 mars 2003

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Recours formé par Monsieur …, … contre une délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg en matière de discipline

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Vu la requête inscrite sous le numéro 15178 du rôle et déposée le 26 juillet 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Serge URBANY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, fonctionnaire communal, demeurant à L-…, tendant à l’annulation, sinon à la réformation, d’une décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 11 mars 2002, lui communiquée par lettre du bourgmestre de la Ville de Luxembourg datant du 24 avril 2002, confirmant la décision du collège échevinal du 12 décembre 2001 ayant prononcé à son encontre la peine disciplinaire de l’amende d’un huitième d’une mensualité brute de son traitement de base ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Roland FUNK, demeurant à Luxembourg, du 30 juillet 2002 portant signification de ce recours à la Ville de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 26 septembre 2002 par Maître Jean KAUFFMAN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre KREMMER, demeurant à Luxembourg, du même jour portant signification de ce mémoire en réponse à Monsieur … ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 25 octobre 2002 par Maître Serge URBANY au nom de Monsieur … ;

Vu la notification de ce mémoire en réplique du même jour intervenue par télécopieur à l’adresse de Maître Jean KAUFFMAN ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 novembre 2002 par Maître Jean KAUFFMAN pour compte de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu la notification de ce mémoire en duplique du 19 novembre 2002 intervenue par voie de télécopieur à l’adresse de Maître Serge URBANY ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Serge URBANY et Jean KAUFFMAN en leurs plaidoiries respectives en l’audience publique du 15 janvier 2003.

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En date du 7 août 2001, le collège échevinal de la Ville de Luxembourg ordonna l’ouverture d’une instruction disciplinaire à l’encontre de Monsieur … en raison du fait qu’il a refusé en sa qualité de co-ordinateur désigné du chantier concerné, d’un coté, de participer à la préparation d’une réunion d’information à organiser par le service de la voirie et destinée à l’intention des riverains et propriétaires dans la rue des Etats Unis, et, d’un autre côté, d’assister à la réunion pour y faire la présentation technique des travaux envisagés, qu’il a de ce fait ignoré les instructions de son supérieur et qu’il lui est reproché d’avoir fait preuve d’un ton insultant et injurieux à l’égard de son supérieur hiérarchique dans une prise de position du 28 juin 2001.

Le collège des bourgmestre et échevins ayant alors prononcé en date du 12 décembre 2001 à l’encontre de Monsieur … l’amende d’un huitième d’une mensualité brute de son traitement de base, celui-ci a fait introduire, par courrier datant du 6 février 2002, un recours contre cette décision devant le conseil communal de la Ville de Luxembourg. Ce recours s’est soldé par une décision du conseil communal du 11 mars 2002 confirmant la décision du collège échevinal lui déférée du 12 décembre 2001. Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation de la décision prévisée du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 11 mars 2002 par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 26 juillet 2002.

L’article 66 de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, ci-après appelé « le statut général », disposant sous son point 1 qu’aucun recours sur le fond n’est admis contre les décisions rendues sur appel à l’encontre d’un fonctionnaire frappé d’une amende ne dépassant pas le cinquième d’une mensualité brute du traitement de base, la décision déférée ne saurait faire l’objet d’un recours en réformation devant le juge administratif, de sorte que le tribunal est incompétent pour connaître du recours subsidiaire en réformation. Le recours principal en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur invoque en premier lieu les dispositions de l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme pour soutenir que le conseil communal, même s’il suivait la procédure régulière prévue par la loi communale en la matière, ne pourrait être qualifié d’instance impartiale au sens de ladite disposition, puisqu’une partie de ses membres a déjà préalablement rendu une décision concernant les mêmes faits et la même personne et cela d’autant plus au vu du poids effectif avec lequel pèserait le collège échevinal sur les décisions de la majorité, à travers notamment la préparation de celles-ci, sans que la personne concernée n’ait été appelée à faire valoir son point de vue lors d’une procédure véritablement contradictoire et publique. Il estime que la décision déférée serait beaucoup plus qu’une simple décision administrative, puisqu’elle enlèverait, dans une matière à finalité civile et pénale, une partie du recours juridictionnel devant le tribunal administratif au requérant, étant donné que celui-ci ne dispose plus que d’un recours en annulation en la matière, aucun recours au fond n’étant admis contre le type de décision sous examen.

Ce premier moyen repose sur la prémisse que la décision déférée du conseil communal, intervenue en matière disciplinaire, relève du domaine du contentieux du procès équitable tel que délimité par l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme qui énonce à ce titre que « 1. toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien fondé de toute accusation en matière pénale dirigé contre elle ».

Il y a lieu d’examiner d’abord la question de l’applicabilité dudit article 6.1 en l’espèce au regard notamment des considérations avancées en cause tenant à la nature des droits touchés, au caractère de la sanction appliquée, ainsi qu’à la nature du recours ouvert devant le tribunal administratif à l’encontre de la décision litigieuse.

Avant d’examiner plus en avant si la contestation soumise au tribunal porte sur des droits et obligations à caractère civil du demandeur ou bien, est à assimiler à une accusation en matière pénale dirigée contre ce dernier, il y a lieu d’examiner d’abord la décision déférée par rapport au stade procédural auquel elle est intervenue, étant donné que les critères posés par la Convention européenne des droits de l’homme dans son article 6 ne trouvent application qu’au niveau de l’instance juridictionnelle compétente pour connaître d’un recours dirigé contre une décision finale rentrant par ailleurs dans les prévisions de ladite disposition quant à sa nature.

Tandis que la Ville de Luxembourg conclut à une non application des dispositions de l’article 6.1 dans le cadre du processus décisionnel ayant abouti à la décision litigieuse au motif que celle-ci serait purement administrative et que la procédure de contrôle juridictionnel serait celle à deux degrés prévue devant les juridictions administratives. Le demandeur estime que conformément à l’esprit du statut général, en ce qu’il confère le droit d’appliquer certaines sanctions au collège échevinal et qu’il prévoit, contre cette décision, un véritable « recours » à l’autorité de nomination en prenant soin de préciser qu’aucun recours sur le fond n’est admis contre les décisions rendues sur appel, le recours en annulation ne serait pas à considérer comme étant un recours en pleine juridiction tel que requis par la Convention européenne des droits de l’homme, mais que les véritables juges du fond dans les affaires du type de celle sous examen seraient les membres du conseil communal.

S’il est certes vrai que le recours de droit commun en matière administrative, en l’occurrence un recours en annulation, est prévu à l’encontre de la décision déférée, il n’en demeure cependant pas moins que contrairement au pourvoi en cassation, sous examen dans l’affaire « Le Compte » invoquée par le demandeur à l’appui de sa thèse, le juge administratif statuant dans le cadre d’un recours en annulation n’est pas limité dans son contrôle aux seules questions de pur droit. En effet, le contrôle de légalité propre au recours en annulation emporte l’obligation d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, ainsi que la vérification si les motifs dûment établis sont de nature à justifier légalement la décision attaquée, étant entendu que dans le cadre de cet examen, le juge est amené à vérifier s’il n’existe pas de disproportion excédant les limites de la légalité entre les faits établis et l’acte posé par l’autorité administrative.

Il s’ensuit qu’un contrôle juridictionnel tel que requis par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme est prévu à l’encontre de la décision déférée, les juridictions administratives étant en effet appelées à statuer à un double degré de juridiction en la matière, chaque instance en plénitude de juridiction dans les limites de droit commun en matière administrative, étant entendu que sous peine de s’immiscer dans l’exercice du pouvoir exécutif, lequel répond entre autres à des impératifs politiques, il n’appartient en principe pas au juge administratif de statuer en lieu et place de l’administration, sauf les exceptions prévues par la loi.

Face au double degré de juridiction ainsi mis à disposition du demandeur pour se pourvoir contre la décision déférée et eu égard au fait que les décisions du collège des bourgmestre et échevins et du conseil communal ne font qu’aboutir, en suivant la procédure administrative prévue par la loi à cet égard, à une décision administrative dont le tribunal est appelé à connaître en tant qu’organe juridictionnel, le recours institué par l’article 66 du statut général ne constitue qu’un recours hiérarchique, de nature purement administrative, de sorte qu’une décision du conseil communal statuant en tant qu’instance d’appel en application dudit article est à qualifier de décision administrative n’ayant par la force des choses aucun caractère juridictionnel.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que les critiques du demandeur telles que basées sur l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme pour conclure à l’existence d’illégalités d’ordre procédural au niveau de la prise de la décision déférée, ainsi que de la procédure l’ayant précédée, laissent d’être fondées, sans qu’il y ait lieu d’examiner plus en avant la pertinence de ces critiques au regard de la nature des droits affectés par la décision litigieuse.

Par la suite, le demandeur fait valoir que les faits retenus à la base de la décision litigieuse ne seraient pas de nature à la motiver légalement.

Concernant d’abord le motif basé sur sa non-participation à une réunion d’information du collège échevinal, il soutient qu’il ne s’agirait pas, tel que retenu à la base de la décision déférée, d’un refus d’ordre, étant donné que, sans contester de n’avoir délibérément pas participé à la réunion en question, il considère ce type de réunion d’information comme ayant un caractère nettement politique dans le cadre des relations publiques du collège échevinal et du bourgmestre, de manière à se situer en dehors de ses propres fonctions de « Sachbearbeiter ». Le demandeur se prévaut à cet égard des dispositions de l’article 38 du statut général aux termes duquel le fonctionnaire ne peut être contraint de quelque façon que ce soit par son employeur de conseiller ou de seconder un parti politique ou un syndicat, pour soutenir que son refus de participer à une réunion politique du type de celle litigieuse ne saurait être interprété comme étant constitutif d’un refus d’ordre. A l’appui de ce moyen, le demandeur relève en outre que le conseil communal de la Ville de Luxembourg a voté en date du 17 décembre 2001 un règlement concernant les indemnités pour tâches extraordinaires effectuées dans l’intérêt public revenant aux fonctionnaires dirigeants de la Ville et que parmi les prestations et services effectués au profit des autorités et des citoyens de la Ville, serait énumérée expressément la participation à des séances d’information aux citoyens, pour soutenir que dans l’esprit des responsables communaux, la participation à des séances d’information aux citoyens et d’autres tâches extraordinaires ne sauraient tomber sous la responsabilité d’un fonctionnaire qui n’est pas fonctionnaire dirigeant, étant entendu que toujours suivant le même projet, les indemnités seraient allouées aux fonctionnaires ayant rang de directeur et aux fonctionnaires ayant rang de directeur-adjoint, ainsi qu’aux fonctionnaires de la carrière supérieure occupant un poste à responsabilité élevée.

Concernant ensuite le refus allégué dans son chef de préparer la réunion d’information en question, le demandeur fait valoir que le dossier ne contiendrait pas la preuve d’un tel refus, étant donné qu’il aurait fourni à son chef de service les documents techniques requis, ce qui se dégagerait de sa lettre datant du 28 juin 2001 adressée à l’ingénieur-chef de service de la voirie dans laquelle il a précisé remettre les documents techniques sous forme de papiers et sous forme numérique, ce qu’il aurait effectivement fait par après dans les délais utiles de manière à avoir permis la préparation de la réunion d’information prévue pour le mois de septembre 2001.

La Ville de Luxembourg fait rétorquer que Monsieur … aurait maintenu, malgré maints rappels à l’ordre et un ordre de service formel écrit datant du 25 juin 2001, son refus de principe de participer et de préparer les réunions d’information à l’attention des riverains et propriétaires de la rue des Etats-Unis. Elle fait relever en outre que contrairement à ce qui est soutenu par le demandeur, il ne s’agirait pas de manifestations politiques, étant donné que le but de ces manifestations serait clair, en l’occurrence celui d’informer les habitants sur le déroulement exact des travaux de réaménagement entrepris par la Ville de Luxembourg, de manière à répondre aux besoins légitimes d’information des riverains qui sont soucieux de connaître les projets communaux relatifs à l’aménagement de leur quartier d’habitation. La partie défenderesse fait valoir en outre que même si tel n’était pas le cas, il ne reviendrait certainement pas au fonctionnaire concerné de se faire juge de l’opportunité de telle ou telle réunion, de même qu’il serait irrelevant que ces réunions aient été prévues en soirée ou non, étant donné que le but poursuivi serait tout simplement celui de permettre à un maximum d’habitants de pouvoir y assister, ce qui ne pourrait être garanti qu’après les horaires normaux de travail. Elle souligne en outre que la présence du demandeur à ces réunions aurait été importante, alors qu’il résulterait à suffisance des pièces du dossier qu’il était le coordinateur du chantier concerné.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur, tout en admettant le besoin légitime d’information des citoyens, relève que sa tâche consisterait à coordonner et contrôler les différents corps de métier sur le chantier, mais qu’il n’aurait pas été engagé pour coordonner le travail de « public relations » des autorités publiques, de sorte qu’aucun refus d’ordre rentrant dans ce domaine ne saurait lui être utilement opposé.

Quant au refus de participer à la préparation de la réunion litigieuse, la Ville de Luxembourg précise dans son mémoire en duplique que Monsieur … aurait avoué les faits lui reprochés dans sa prise de position écrite du 28 juin 2001.

Conformément aux dispositions de l’article 11 (1) du statut général, le fonctionnaire doit se conformer aux instructions du collège des bourgmestre et échevins qui ont pour objet l’accomplissement régulier de ses devoirs ainsi qu’aux ordres de service de ses supérieurs. Le même article dispose sous son point 4 que « lorsque le fonctionnaire estime qu’un ordre reçu est entâché d’irrégularité, ou que son exécution peut entraîner des inconvénients graves, il doit, par écrit, et par la voie hiérarchique, faire connaître son opinion au supérieur dont l’ordre émane. Si celui-ci confirme l’ordre par écrit, le fonctionnaire doit s’y conformer, à moins que l’exécution de cet ordre ne soit pénalement répressible. Si les circonstances l’exigent, la contestation et le maintien de l’ordre peuvent se faire verbalement. Chacune des parties doit confirmer sa position sans délai par écrit ».

En l’espèce, il se dégage des pièces versées au dossier que par courrier datant du 25 juin 2001, notifié à Monsieur … le même jour, son supérieur hiérarchique s’est adressé à lui dans les termes suivants :

« Ordre de service à Monsieur ….

A maintes reprises déjà je vous ai signalé qu’il fallait penser à la préparation de la réunion d’information destinée à l’intention des riverains et des propriétaires dans la rue des Etats-Unis. La réponse était toujours la même : je refuse de participer à une telle réunion.

Par la présente, je vous somme de prendre position par écrit endéans trois jours pour quelle raison vous motivez ce refus, alors que ces réunions organisées dans l’intérêt des citoyens de la Ville de Luxembourg servent à fournir un service aux clients indéniable, raison pour laquelle vous êtes fonctionnaire.

Subsidiairement je voudrais savoir pour quelle raison vous refusez de m’assister dans la présentation de la réunion en me préparant les documents nécessaires sur POWER PRINT, WORD et AUTOCAD pour ensuite être présentés sur ordinateur et projecteur dans la réunion même par vos soins ».

Il se dégage du contenu non ambigu de ce courrier que le demandeur a reçu de la part de son supérieur hiérarchique deux ordres de service distincts, en l’occurrence celui de participer à la réunion d’information litigieuse, ainsi que celui de contribuer à sa préparation par la mise à disposition des documents nécessaires sur différents supports y clairement identifiés, à savoir POWERPRINT, WORD et AUTOCAD.

En réponse à ce double ordre de service, Monsieur … a pris position par écrit comme suit en date du 28 juin 2001 :

« Conc. : Réunion de propagande politique dans la rue des Etats-Unis Retourné à Monsieur l’ingénieur-chef du service de la voirie avec les constatations et justifications suivantes :

Dans votre lettre du 25 juin 2001 vous me reprochez de refuser de participer à une réunion avec les riverains et propriétaires, une réunion qui d’après vous fournirait un service indéniable au client. Pour moi ces réunions ne sont rien d’autre que des réunions électorales ; nous n’avons en outre pas de clients mais des administrés et nous n’avons pas besoin de les cajoler.

Pour mettre au courant le public, la voie usuelle est suffisante ; je considère comme voie usuelle la procédure prévue dans la loi du 27 juillet 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, c’est-à-dire un avis de presse et la publication des plans dans la maison communale. Je considère comme de la propagande politique tout ce qui dépasse cette procédure. Je n’ais pas refusé tout court sans indiquer une raison comme vous l’écrivez dans votre lettre, mais j’ai fait référence à l’article 38 du statut général des fonctionnaires communaux, ce qui fait une grande différence. Le fait que vous ne mentionnez pas cela prouve que vous êtes d’une mauvaise fois extrême. Il en est pareil de votre question subsidiaire ; il n’est tout simplement pas vrai que je ne voudrais pas vous fournir les documents techniques. Je vous ai dit que je vous donnerai les documents techniques sous forme de papier et sous forme numérique. Je vous prie partant de ne pas détourner les faits. Il appartient alors à vous d’écrire dessus « Um richtegen Wee matt der DP ».

En guise de conclusion je vous confirme mon refus de participer à ladite réunion ainsi qu’à sa préparation et ceci en vertu de l’article 38 du statut général des fonctionnaires communaux. (cf plus bas). IL y a lieu d’envoyer quelqu’un à cette réunion qui s’identifie avec les objectifs politiques de la droite comme vous-même et/ou un « incolore, inodore et insipide ; de préférence quelqu’un qui brigue une nomination hors-cadre ou quelqu’un qui prépare son changement de carrière ou encore quelqu’un qui a déjà fait de la carrière avec sa carte politique.

« So viel ist gewonnen wenn einer aufsteht und nein sagt » - Berthold Brecht: Leben des Galilei » ;

Monsieur … ayant maintenu son refus de réserver une suite favorable au double ordre de service lui ainsi adressé, la procédure disciplinaire ayant abouti à la décision litigieuse prit son cours.

A l’appui de la décision déférée, le conseil communal a retenu les faits reprochés à l’intéressé comme étant établis. Tandis que ce constat ne fait pas de doute quant au refus de Monsieur … de participer à la réunion d’information litigieuse au regard des prises de position concordantes en cause, le demandeur estime que la preuve d’un refus dans son chef de fournir les documents techniques requis pour la préparation de cette réunion ne serait pas rapportée.

Force est de constater à cet égard que contrairement aux affirmations du demandeur le dossier tel que soumis au tribunal renseigne un refus clair et net du demandeur formulé par écrit dans sa prise de position du 28 juin 2001 en ce qu’il y a confirmé, en guise de conclusion, son « refus de participer à ladite réunion ainsi qu’à sa préparation ». Dans la mesure où le demandeur n’a de son côté apporté aucun élément de preuve, ni formulé d’offre de preuve tendant à établir qu’il aurait effectivement préparé les documents nécessaires tel que requis par son supérieur sur POWERPOINT, WORD et AUTOCAD, son moyen basé sur l’inexactitude du fait lui ainsi reproché laisse d’être fondé.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le refus d’ordre reproché à Monsieur … est établi en fait dans ses deux volets, de sorte qu’il y a lieu d’examiner plus en avant les arguments par lui invoqués pour justifier son refus d’ordre et lui permettre de conclure au caractère illégal de la sanction disciplinaire litigieuse.

Force est de constater à cet égard que les considérations avancées en cause tenant au fait que la réunion en question relèverait de la propagande politique et que conformément aux dispositions de l’article 38 du statut général il ne pourrait être contraint à une quelconque collaboration afférente, sont dénuées de fondement en ce qu’il ne saurait être retenu que la participation d’un fonctionnaire communal à la préparation et à la tenue d’une réunion d’information technique sur des travaux à effectuer dans un quartier déterminé de la ville l’amène à conseiller ou à seconder un parti politique, étant donné que si toute activité communale revêt par essence un caractère politique pour traduire une certaine conception de la gestion de la vie en commun, le choix des élus locaux concernant la façon dont ils entendent présenter un projet de chantier au public ne saurait pour autant se confondre avec l’activité d’un parti politique au sens de l’article 38 du statut général qui vise le parti politique en tant que tel et non les activités exercées par ses membres dans le cadre des attributions qui sont les leurs au niveau des différents postes par eux occupés où ils figurent en tant qu’élus.

Au-delà des conclusions ci-avant dégagées, force est encore de constater que les arguments avancés par le demandeur pour justifier son refus d’ordre laissent en tout état de cause de s’inscrire dans les prévisions de l’article 11 du statut général qui impose au fonctionnaire qui s’est vu confirmer un ordre de service par écrit, tel le cas en l’espèce, de s’y conformer, à moins que l’exécution de cet ordre ne soit pénalement répressible, cette exception n’étant à l’évidence pas applicable en l’espèce.

Dans la mesure où les faits ainsi établis en cause revêtent à eux seuls une gravité suffisante pour justifier la décision déférée, eu égard notamment aux impératifs tenant à assurer la bonne marche des affaires de la commune d’après des méthodes légitimes que les élus compétents ont pu juger politiquement et techniquement les plus appropriées et dont ils assument par ailleurs la responsabilité politique vis-à-vis de leurs électeurs, le recours en annulation laisse partant d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 mars 2003 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 8


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15178
Date de la décision : 17/03/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-03-17;15178 ?

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