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10/03/2003 | LUXEMBOURG | N°15318

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 10 mars 2003, 15318


Tribunal administratif N° 15318 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 septembre 2002 Audience publique du 10 mars 2003

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Recours formé par les époux … et …, … contre une décision du ministre de l’Intérieur en présence de l’administration communale de Bous en matière d’aménagement des agglomérations

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15318 du rôle et déposée au greffe du tribunal a

dministratif en date du 4 septembre 2001 par Maître Robert LOOS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’O...

Tribunal administratif N° 15318 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 septembre 2002 Audience publique du 10 mars 2003

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Recours formé par les époux … et …, … contre une décision du ministre de l’Intérieur en présence de l’administration communale de Bous en matière d’aménagement des agglomérations

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15318 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 septembre 2001 par Maître Robert LOOS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom des époux …, …, et …, …, demeurant ensemble à L-…, tendant à l’annulation de la décision du ministre de l’Intérieur du 4 juin 2002, prise en remplacement de celle antérieure ainsi abrogée du 15 janvier 2002 portant approbation de la délibération du conseil communal de Bous du 23 janvier 2001 ayant adopté définitivement le plan d’aménagement général, parties graphique et écrite, de ladite commune, tout en déclarant notamment la réclamation adressée en leur nom au Gouvernement concernant le refus de l’extension par eux sollicitée du périmètre d’agglomération en vue de l’inclusion de partie de la parcelle inscrite au cadastre de la commune de Bous, section A du chef-lieu, au lieu-dit « An den Sauerwisen » sous le numéro 2636/6670 en vue de l’aménagement de quatre places à bâtir le long de la rue de Remich, recevable en la forme et quant au fond non justifiée à suffisance de droit ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Yves TAPPELA, en remplacement de l’huissier de justice Roland FUNK, les deux demeurant à Luxembourg, du 10 septembre 2002 portant signification de ce recours à l’administration communale de Bous ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 23 octobre 2002 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 décembre 2002 par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Bous ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 12 décembre 2002 portant notification de ce mémoire en réponse à Maître Robert LOOS ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 10 janvier 2003 par Maître Robert LOOS au nom des demandeurs ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réplique à Maître Georges KRIEGER ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 7 février 2003 ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 6 février 2003 portant notification de ce mémoire en duplique à Maître Robert LOOS ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision ministérielle attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Robert LOOS et David YURTMAN, en remplacement de Maître Georges KRIEGER, de même que Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 février 2003.

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Considérant qu’en date du 6 décembre 1995, les autorités communales de Bous ont saisi la commission d’aménagement auprès du ministère de l’Intérieur aux fins d’engager la procédure d’approbation définie à l’article 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, en vue de l’adoption d’un nouveau projet d’aménagement général, parties graphique et écrite, de la commune ;

Qu’à la suite d’une procédure à rebondissements, le conseil communal de Bous a, par délibération du 23 janvier 2001, avec six voix pour et une abstention, décidé d’adopter définitivement le nouveau plan d’aménagement général, parties graphique et écrite, de la commune de Bous, « tel qu’il a été modifié en prenant compte de l’arrêté du ministre de l’Environnement du 7 juin 2000 et des considérations du ministre de l’Intérieur du 27 novembre 2000 », désigné ci-après par « PAG » ;

Que contre cette délibération les époux … et …, préqualifiés, ont fait introduire une réclamation adressée au Gouvernement tendant à voir inclure dans le périmètre d’agglomération, partie de leur terrain situé en la commune de Bous, section A du chef-lieu, au lieu-dit « an den Sauerwisen », cadastré sous le numéro 2636/6670, longeant la route de Remich suivant une profondeur de 40 mètres mesurée à partir de la voie publique ;

Que le conseil communal de Bous a pris position quant aux réclamations introduites durant ses délibérations des 3 mai et 11 septembre 2001, indiquant à chaque fois ne pas donner une suite favorable à la réclamation présentée par les époux …-… pour les motifs développés dans leur délibération antérieure du 20 mars 2001 ;

Qu’il convient de préciser à cet endroit que dans le cadre d’une demande parallèle d’élargissement du périmètre de construction portant sur la même partie de terrain du 15 novembre 2000, le conseil communal de Bous avait, par délibération du 20 mars 2001 décidé de rejeter la demande en modification du PAG présentée, sur l’avis défavorable de la commission d’aménagement et au vu de sa délibération prévisée du 23 janvier 2001 portant approbation définitive du nouveau PAG de la commune, au motif énoncé que la parcelle dont s’agit longe une route nationale à trafic très intense et que l’administration des Eaux et Forêts aurait engagé des poursuites judiciaires contre le propriétaire concerné suite au remblayage non autorisé du terrain dont s’agit ;

Qu’un recours contentieux dirigé contre ladite délibération du 20 mars 2001 a été déclaré non justifié au fond par jugement du tribunal du 6 février 2002 (n° 13784 du rôle) confirmé par arrêt de la Cour administrative du 5 novembre 2002 (n° 14688C du rôle) ;

Que dans le cadre de l’adoption du nouveau PAG de la commune de Bous, la commission d’aménagement a émis son avis en date du 10 janvier 2002, concluant au caractère non fondé de la réclamation des époux …-… ;

Que par décision du 4 juin 2002, le ministre de l’Intérieur a abrogé son arrêté ministériel d’approbation antérieur du 15 janvier 2002, en raison d’une erreur matérielle l’affectant, pour approuver la délibération prévisée du conseil communal de Bous du 23 janvier 2001 portant adoption définitive du projet d’aménagement général, parties graphique et écrite, et déclarer notamment la réclamation adressée au Gouvernement par les époux …-… recevable en la forme, mais quant au fond non motivée à suffisance de droit ;

Que le ministre motive le rejet ainsi opéré de la réclamation des époux …-… par un argumentaire épousant l’avis précité de la commission d’aménagement du 10 janvier 2002 en ces termes : « aucun argument d’ordre urbanistique ne justifierait l’inclusion du terrain concerné dans la zone d’habitation ; que l’aménagement des fonds litigieux contribuerait au développement tentaculaire de la localité de Bous, qu’il y n’y a pas lieu d’agrandir davantage le périmètre d’agglomération le long d’une route nationale ; que ledit fonds se situe à proximité d’une zone d’activités pouvant provoquer certaines nuisances ; que le terrain se situe à proximité du futur contournement à aménager ainsi qu’à proximité d’une ligne à haute tension » ;

Considérant que c’est contre cette décision ministérielle du 4 juin 2002 que les époux … et … ont fait introduire en date du 4 septembre 2002 un recours en annulation ;

Considérant qu’au titre de la recevabilité, le délégué du Gouvernement entend tirer argument d’une erreur matérielle contenue dans la requête introductive d’instance relatant qu’« aucun motif légal ne s’opposait à ce que soit rejeté [sic] leur réclamation … » utilement redressée par le mandataire des demandeurs à travers son mémoire en réplique, de sorte à être devenue sans objet ;

Que les parties défenderesse et tierce intéressée ne prennent pas autrement position quant à la recevabilité du recours ;

Considérant que le recours en annulation ayant été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi sur base des dispositions de l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, il est recevable ;

Considérant qu’au fond, les demandeurs font valoir qu’aucun motif légal sous-tendant le rejet de leur réclamation n’existerait en la matière et reprennent en substance les arguments invoqués à l’appui de cette dernière ;

Qu’ils font valoir plus particulièrement que la demande d’extension du périmètre formulée serait essentiellement faite dans l’intérêt de leurs enfants aux fins de leur conférer ensemble quatre terrains à bâtir, devant leur permettre de s’installer dans leur commune natale et de voir accroître ainsi sa population jeune ;

Qu’ils insistent que le terrain se trouvant aux abords de la route de Remich, est pourvu des infrastructures nécessaires pour servir des besoins d’habitation, à savoir la canalisation, l’eau et l’électricité, un trottoir et même des lampadaires se trouvant déjà en place ;

Que les concepts régulièrement invoqués par l’autorité ministérielle pour rejeter des réclamations adressées au Gouvernement et tenant à « l’urbanisation tentaculaire » et au « mitage du paysage » ne sauraient être servis à toutes les sauces et en toutes occasions pour devoir être vérifiés quant à leur adéquation par rapport à chaque cas d’espèce ;

Que les demandeurs d’affirmer qu’en l’occurrence l’extension du périmètre sollicitée se résoudrait en une extension urbaine « en front », c’est-à-dire en continuité de l’espace urbain existant sans être entrecoupée par aucun espace vert ;

Qu’en raison d’extensions déjà approuvées à d’autres endroits de la localité de Bous, celle sollicitée par les demandeurs aurait tout au plus pour effet de rééquilibrer l’extension globale de la localité et de contribuer ainsi à un développement concentrique du village, tel que préconisé par le Gouvernement ;

Que le motif avancé par le ministre en ce que le terrain longerait une route nationale à haute fréquentation et que de toute façon il faudrait attendre la réalisation de la route de contournement de la localité de Bous manquerait de tout fondement raisonnable et ne serait manifestement plus d’actualité ;

Que le contournement en question serait en effet projeté depuis de nombreuses années et prêt d’être construit sous peu, faisant que la route de Remich deviendrait une rue à caractère villageois utilisée en fait par les seuls riverains de la commune ;

Que les demandeurs de faire valoir qu’une nouvelle construction aurait été récemment autorisée en bout de village en direction d’Assel-Trintange également le long de la route nationale ;

Que ce serait encore à tort que le Gouvernement invoquerait le fait que le terrain en question se trouverait à proximité d’une zone d’activités provoquant certaines nuisances, étant donné que de telles nuisances seraient inexistantes et non prouvées en l’espèce ;

Que l’argument mis en avant de l’existence d’une ligne à haute tension à proximité serait encore non pertinent, étant donné qu’il n’existerait aucun obstacle à mettre celle-ci sous terre à l’endroit, ainsi que cela aurait d’ailleurs été fait à une distance d’à peine 100 mètres à l’occasion de la construction de nouvelles maisons unifamiliales au lieu-dit « Om Hiwel » ;

Que les demandeurs d’estimer devoir bénéficier des mêmes facilités que les autres constructeurs concernés ;

Qu’à travers leur mémoire en réplique, les demandeurs réitèrent leur argumentaire ainsi présenté, tout en insistant sur le caractère théorique et non pertinent en fait des arguments invoqués par le ministre à l’appui de la décision déférée, ainsi que sur la situation particulière de la localité de Bous, compte tenu de l’ouverture prochaine de la route de contournement et de sa situation presqu’exclusivement agencée autour d’axes routiers interlocaux ;

Considérant que la mutabilité des plans d’aménagement généraux relève de leur essence même, consistant à répondre à des contraintes variables à travers le temps concernant à la fois les aspects urbanistiques de l’aménagement des agglomérations et le volet politique de la vie en commun sur le territoire donné (cf. trib. adm. 7 mars 2001, Bayani-Keyvani, n° 12233 du rôle, confirmé par Cour adm. 20 décembre 2001, n° 13291C du rôle, Pas. adm.

2002, V° Urbanisme, n° 46, p. 574) ;

Considérant que dans le cadre du recours en annulation ouvert suivant les dispositions de l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée, la mission du juge de la légalité exclut le contrôle des considérations d’opportunité, notamment d’ordre politique, à la base d’un acte administratif attaqué, mais inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration soient matériellement établis à l’exclusion de tout doute ;

Considérant que plus particulièrement le souci de limiter l’urbanisation le long d’une route au périmètre délimité selon l’ancien plan d’aménagement général relève de considérations d’ordre urbanistique susceptibles d’être prises en compte dans l’intérêt général ;

Considérant que plus particulièrement dans le cadre du recours en annulation porté devant lui, le juge chargé du contrôle de légalité ne saurait avoir égard à des considérations de pure opportunité, notamment d’ordre politique, telle l’option prise par les autorités compétentes en faveur de la limitation du périmètre d’agglomération retenue à l’endroit de la rue en question plutôt que pour une autre variante d’urbanisation du terrain concerné (cf. trib.

adm. 7 mars 2001, Flies, n° 12282 du rôle, confirmé par Cour adm. 23 octobre 2001, n° 13319C du rôle, Pas. adm. 2002, V° Urbanisme, n° 56, p. 577) ;

Considérant que s’agissant d’un recours en annulation, le juge est amené à statuer par rapport à la situation cristallisée au moment où l’acte administratif a été pris, soit en l’espèce, concernant la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur à la date du 4 juin 2002 ;

Considérant que force est de reconnaître en fait que si le terrain des demandeurs ayant donné lieu à réclamation se situe à proximité du futur contournement à aménager, le ministre n’a pas pu valablement en tirer de façon dirimante un argument de refus, étant donné que son impact précis relève du domaine de la pure spéculation, n’ayant été par essence non cristallisé au moment où l’acte ministériel a été posé, de sorte à être susceptible, le cas échéant, de fonder dans un avenir plus ou moins rapproché une extension du périmètre dans le sens voulu par les demandeurs, compte tenu de la limitation des flux de circulation à l’intérieur de la localité de Bous s’en dégageant prévisiblement, mais pas nécessairement ;

Considérant que le ministre a pu valablement justifier la limitation actuelle du périmètre d’agglomération en s’appuyant sur la situation du terrain concerné le long de la route nationale et le développement tentaculaire de la localité de Bous ainsi engendré à l’endroit au-delà des limites jusque lors arrêtées et en l’absence d’existence du futur contournement au moment où il a statué ;

Considérant que dans la mesure où aucune rupture d’égalité n’a été sérieusement corroborée par les demandeurs au-delà des affirmations et exemples par eux cités, le tribunal est amené à retenir sur base des développements qui précèdent que la décision de refus de faire droit à la réclamation présentée par les époux …-… est justifiée en l’état du dossier à la date où le ministre a statué, à travers les éléments de développement tentaculaire le long de la route nationale par lui mis en avant en l’absence de contournement d’ores et déjà aménagé ;

Que cette conclusion est appelée à prévaloir encore au-delà de la proximité affirmée du terrain concerné par rapport à une zone d’activité dont la potentialité de nuisances n’est pas autrement précisée par le ministre, en l’absence de toute décision par les autorités compétentes concernant une mise utile sous terre de la ligne à haute tension également avancée en argument par l’autorité de tutelle ;

Qu’enfin, le fait que des infrastructures se trouvent déjà en place à l’endroit n’est pas dirimant compte tenu du caractère essentiellement mutable des plans d’aménagement généraux, encore qu’il puisse militer dans le futur en faveur d’une inclusion dans le périmètre d’agglomération du terrain litigieux, une fois la situation cristallisée compte tenu du contournement à ériger et du rétrécissement de l’actuelle route nationale devant l’accompagner, étant constant que la question de la destination des terrains à bâtir projetés en faveur des enfants des demandeurs est d’ordre éminemment politique en ce qu’elle concerne des possibilités à offrir aux descendants de la population locale de s’installer dans leur village natal ;

Qu’il se dégage de l’ensemble des développements qui précèdent que le recours laisse d’être fondé en l’état actuel des choses, telles que présentées devant le tribunal ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours recevable en la forme ;

au fond le dit non justifié ;

partant en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 10 mars 2003 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15318
Date de la décision : 10/03/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-03-10;15318 ?

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