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05/03/2003 | LUXEMBOURG | N°15283

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 mars 2003, 15283


Tribunal administratif N° 15283 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 août 2002 Audience publique du 5 mars 2003 Recours formé par la société anonyme … S.A., … contre une décision du directeur de l’administration des contributions directes en matière de remise d’impôts

JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15283 du rôle, déposée en date du 22 août 2002 au greffe du tribunal administratif par Monsieur …, expert comptable, pour compte de la société anonyme … S.A., ayant son siège social à L-…, tendant à la réformation d’u

ne décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 23 mai 2002 refusant d...

Tribunal administratif N° 15283 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 août 2002 Audience publique du 5 mars 2003 Recours formé par la société anonyme … S.A., … contre une décision du directeur de l’administration des contributions directes en matière de remise d’impôts

JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15283 du rôle, déposée en date du 22 août 2002 au greffe du tribunal administratif par Monsieur …, expert comptable, pour compte de la société anonyme … S.A., ayant son siège social à L-…, tendant à la réformation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 23 mai 2002 refusant de faire droit à une demande de remise gracieuse du 1er février 2002 portant sur des intérêts de retard pour les années d’imposition 1997 à 2002 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé le 16 décembre 2002 au greffe du tribunal administratif ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision directoriale litigieuse ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Marie KLEIN en ses plaidoiries à l’audience publique du 5 février 2003.

Par lettre du 1er février 2002, entrée le 4 février 2002 au bureau d’imposition Sociétés II, Monsieur …, expert comptable, introduisit, pour le compte de la société anonyme … S.A., auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, une demande de remise gracieuse des intérêts de retard dus pour les années d’imposition de 1996 à 2001 d’un montant de 2.328.320 Luf.

Suite à un courrier de la direction des Contributions du 20 février 2002 sollicitant la régularisation de la procédure en versant une procuration qui établit le mandat exprès et spécial de Monsieur … pour l’instance introduite, celui-ci versa la procuration demandée le 6 mai 2002.

Le 23 mai 2002, le directeur de l’administration des Contributions directes refusa de faire droit à la demande de remise gracieuse des intérêts de retard au motif suivant : « in Erwägung, dass im vorliegndem Falle keine Härte im Sinne des Pargraphen 131 AO vorliegt ».

Par requête déposée le 28 août 2002 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a introduit pour le compte d’… S.A. un recours contentieux contre la décision directoriale du 23 mai 2002 en sollicitant la remise gracieuse des intérêts de retard d’un montant de 59.593,41 € pour les années d’imposition 1997 à 2002 incluse.

La requête ne spécifiant pas si le recours tend à la réformation ou à l’annulation de la décision critiquée, il y a lieu d’admettre d’après les données de l’espèce que la demanderesse a entendu introduire le recours admis par la loi. Etant donné que le paragraphe 131 de la loi générale des impôts, dite « Abgabenordnung » (AO), prévoit en la matière un recours de pleine juridiction, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation ainsi introduit.

Le recours, ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Au fond, la demanderesse expose que la société … S.A. serait une société avec siège au Luxembourg et dont l’objet social consiste dans la gestion des débiteurs pour le compte d’entreprises agissant en Europe. Elle met en avant un différend entre une société similaire et l’administration allemande des contributions se cristallisant autour de la question de la compétence des autorités allemandes ou luxembourgeoises pour procéder à l’imposition pour faire valoir que le non-paiement des impôts et des avances d’impôt pour les années 1996 à 2002 serait dû à l’appréhension de devoir payer également des impôts en Allemagne ce qui aurait conduit à des difficultés de liquidité considérables. Elle expose que suite à la détermination de l’Etat luxembourgeois comme Etat compétent, elle serait maintenant en mesure de procéder pour le 31 janvier 2002 aux différentes déclarations d’impôt manquantes, à savoir pour les années 1998, 1999 et 2000 et de procéder au paiement de l’impôt éventuellement dû. Elle ajoute que pour les années 1998 à 2000, au vu de l’absence d’un bénéfice effectué, aucun impôt ne serait dû, de sorte que les avances seraient de toute façon à annuler.

Le délégué du gouvernement fait valoir que la peur d’une double imposition ne saurait valoir comme motif justifiant le non-paiement des avances demandées, d’autant plus qu’au dossier ne figurerait aucune demande sollicitant un délai de payement. Il souligne encore le retard considérable dans le dépôt des déclarations de revenus et invoque l’article 155, paragraphe 4 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu (LIR) qui précise que toute réduction d’une cote d’impôt donne lieu à un recalcul des intérêts de retard encourus.

Au vu du paragraphe 131 AO cité ci-avant, une remise gracieuse se conçoit « dans la mesure où la perception d’un impôt dont la légalité n’est pas contestée entraînerait une rigueur incompatible avec l’équité, soit objectivement selon la matière, soit subjectivement dans la personne du contribuable ».

Une remise gracieuse, à condition que la légalité de l’impôt ne soit pas contestée, n'est justifiée que si ou bien la situation personnelle du contribuable est telle que le paiement de l'impôt compromet son existence économique et le prive des moyens de subsistance indispensables, ou bien si objectivement l'application de la législation fiscale conduit à un résultat contraire à l'intention du législateur (cf. Trib. adm. 18 novembre 1998, n° 10364 du rôle, Pas. adm. 2002, V° Impôts, sous IX. Remise gracieuse, n° 205, p. 344 et autres décisions y citées).

L’existence d’une rigueur subjective s’apprécie au jour où le tribunal statue (Trib.

adm. 12 janvier 2000, Pas. adm. 2002, V° Impôts, sous IX. Remise gracieuse, n° 209, p. 344).

En l’espèce, force est de constater que l’argumentation développée par la demanderesse, à savoir la peur d’être également imposée en Allemagne ne saurait être retenue comme rigueur subjective incompatible avec l’équité. A cela s’ajoute que le différend dont elle se prévaut pour asseoir sa peur, à supposer qu’il existe réellement, n’est pas un différend où elle-même est impliquée, mais une soi disant société similaire. En plus les difficultés de liquidités avancées par la demanderesse en cas de double imposition n’existent plus au jour où le tribunal statue parce qu’il est établi que le Luxembourg est compétent pour procéder à l’imposition. Pour le surplus, la société … ne soumet au tribunal aucun autre élément permettant de retenir l’existence d’une rigueur subjective dans son chef au jour où il statue. A ce titre il convient d’ajouter que c’est à bon droit que le délégué du gouvernement a invoqué l’article 155, paragraphe 4 LIR qui précise que toute réduction d’une cote d’impôt donne lieu à un recalcul des intérêts de retard encourus.

En ce qui concerne la rigueur objective, force est de constater que la demanderesse omet de faire valoir des circonstances particulières établissant un cas de rigueur objective justifiant que la dette relative aux intérêts de retard soit remise par la voie gracieuse.

Il s’ensuit que le recours dirigé contre la décision directoriale laisse d’être fondé et doit être rejeté.

Nonobstant le fait que la société … S.A. n’était pas représentée à l’audience publique à laquelle l’affaire avait été fixée pour les débats oraux, l’affaire est jugée contradictoirement à l’égard de toutes les parties, la procédure étant essentiellement écrite devant les juridictions administratives et le délégué du gouvernement ayant déposé un mémoire en réponse au greffe du tribunal administratif.

Le délégué du gouvernement a demandé à l’audience publique que le tribunal rédige son jugement à intervenir en langue allemande. A considérer que Monsieur …, de nationalité allemande est la partie principalement intéressée à une rédaction en langue allemande du jugement et non pas le délégué du gouvernement qui comprend parfaitement la langue française, le tribunal estime qu’il n’y a pas lieu de faire droit à cette demande, d’autant plus que le représentant de la société … S.A. ne s’est pas présenté à l’audience, ni n’y a a fortiori conclu dans le sens du délégué, aucune revendication afférente ne se trouvant par ailleurs dans sa requête introductive d’instance.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en la forme, au fond le dit cependant non justifié, partant le rejette, condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 5 mars 2003 :

M. Delaporte, premier vice-président, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M.Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15283
Date de la décision : 05/03/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-03-05;15283 ?

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