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05/03/2003 | LUXEMBOURG | N°15015

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 mars 2003, 15015


Tribunal administratif N° 15015 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 juin 2002 Audience publique du 5 mars 2003

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Recours formé par la société à responsabilité limitée … sàrl contre deux bulletins d’établissement des revenus d’entreprises collectives et de copropriétés et trois bulletins d’établissement de la valeur unitaire émis par le bureau d’imposition Sociétés III en matière d’impôt sur le revenu d’entreprises collectives

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15015 du rôle et déposée au greffe du tr...

Tribunal administratif N° 15015 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 juin 2002 Audience publique du 5 mars 2003

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Recours formé par la société à responsabilité limitée … sàrl contre deux bulletins d’établissement des revenus d’entreprises collectives et de copropriétés et trois bulletins d’établissement de la valeur unitaire émis par le bureau d’imposition Sociétés III en matière d’impôt sur le revenu d’entreprises collectives

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15015 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 12 juin 2002 par Maître Fernand ENTRINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée … sàrl, établie et ayant son siège social à L-…, agissant en sa qualité de « sociétaire chargé de la gestion de la société … sàrl et Cie secs », tendant à la réformation, sinon à l’annulation de deux bulletins d’établissement des revenus d’entreprises collectives et de copropriétés pour les exercices 1996 et 1997, émis le 13 juillet 2000, et, pour autant que de besoin, de trois bulletins d’établissement de la valeur unitaire pour les exercices 1996, 1997 et 1998 émis respectivement en date des 12 mars 1998 et 13 juillet 2000 par le bureau d’imposition Sociétés III ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 12 novembre 2002 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 novembre 2002 au nom et pour compte de la demanderesse ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les bulletins déférés ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Fernand ENTRINGER, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives.

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Le bureau d’imposition Sociétés III émit le 13 juillet 2000 deux bulletins d’établissement des revenus d’entreprises collectives et de copropriétés portant sur les années 1996 et 1997. En date du même jour, ledit bureau d’imposition émit deux bulletins d’établissement de la valeur unitaire respectivement au 1er janvier 1997 et au 1er janvier 1998, étant précisé que le bulletin relatif au 1er janvier 1996 fut émis le 12 mars 1998.

Par lettre recommandée du 29 août 2000, la société … sàrl et Cie secs, par l’intermédiaire de son mandataire, introduisit une réclamation auprès de l’administration des Contributions, bureau d’imposition Sociétés III, de la teneur suivante :

« Conc. :

… sàrl et Cie secs, n° fiscal : … n. réf. : 08/280/00 Mesdames, Messieurs, Je vous informe par la présente que le contribuable ci-dessus repris m’a chargé de la défense de ses intérêts.

Par la présente j’introduis une réclamation contre :

1. le bulletin d’établissement des revenus d’entreprises collectives 1996, 2. le bulletin d’établissement des revenus d’entreprises collectives 1997, 3. le bulletin d’établissement de la valeur unitaire au 01.01.1997, 4. le bulletin d’établissement de la valeur unitaire au 01.01.1998.

Cette réclamation est basée sur la considération suivante.

A mon sentiment, la « Geprägerechtsprechung » dont [se] prévaut l’administration luxembourgeoise à ce jour n’est pas licite, alors qu’elle ne base sur aucun texte.

Une pratique administrative ne peut pas devenir droit si elle n’a pas une base légale.

Je vous donne encore à considérer que notre loi fiscale ne connaît pas d’équivalent à l’article 15 EStG (3) numéro 2 de la loi allemande.

Je vous prie en conséquence de revoir votre position et votre imposition ».

En l’absence d’une décision directoriale à la suite de la susdite réclamation du 29 août 2000, la société à responsabilité limitée … sàrl a déposé le 12 juin 2002 une requête auprès du tribunal administratif, tendant à la réformation, sinon à l’annulation des deux bulletins d’établissement des revenus d’entreprises collectives pour les années 1996 et 1997 et, pour autant que de besoin, des bulletins d’établissement de la valeur unitaire pour les exercices 1996, 1997 et 1998.

Aux termes des dispositions combinées des articles 8 (3) 1. et 3. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et du paragraphe 228 de la loi générale des impôts modifiée du 21 mai 1931, communément appelée « Abgabenordnung », ci-après dénommée « AO », le tribunal administratif est compétent pour statuer comme juge du fond sur les recours contre les bulletins d’établissement des revenus d’entreprises collectives ainsi que sur les recours contre les bulletins d’établissement de la valeur unitaire en cas de silence du directeur pendant plus de six mois suite à une réclamation dûment introduite.

Le tribunal est dès lors compétent pour connaître du recours en réformation dans la mesure où il est dirigé contre les bulletins d’impôt prévisés. Le recours subsidiaire en annulation est partant à déclarer irrecevable.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut en ordre principal à l’irrecevabilité du recours introduit par la société à responsabilité limitée … sàrl, au motif que la prédite réclamation du 29 août 2000 serait irrecevable comme ayant été introduite par la société en commandite simple … sàrl et Cie secs respectivement par les associés commanditaires, et que « cette réclamation d’autrui, d’ailleurs irrecevable, ne profite pas à la recourante pour son recours direct contre les bulletins ».

La demanderesse fait rétorquer dans son mémoire en réplique que le délégué du gouvernement serait forclos à invoquer cette irrecevabilité au motif que dans le cadre d’une instance antérieure introduite sous le numéro 12785 du rôle par la société en commandite simple … sàrl et Cie secs et ses associés commanditaires, il aurait uniquement conclu que la loi du 7 novembre 1996, précitée, n’admettrait en matière de contributions directes qu’un recours contre la décision du directeur ou, à défaut, contre la décision dévolue au directeur par réclamation, mais non contre un prétendu silence et il n’aurait à l’époque pas invoqué d’autre irrecevabilité en relation avec la prédite lettre de réclamation du 29 août 2000. A cela s’ajouterait que le tribunal aurait vidé cette instance et rejeté par jugement du 17 octobre 2001 la requête au seul motif qu’elle avait été introduite moins de six mois après l’écoulement du délai légal imparti au directeur pour répondre, sans pour autant contester la régularité de la lettre de réclamation du 29 août 2000, de sorte que le tribunal aurait implicitement reconnu le caractère régulier de ladite lettre de réclamation. Finalement, ladite lettre préciserait les bulletins entrepris, de même que le contribuable et le destinataire des bulletins, et il ne serait pas nécessaire d’indiquer l’organe par lequel le contribuable agit et que la présomption de régularité serait de droit sauf preuve contraire.

Il échet de préciser d’emblée, au vu de la lettre de réclamation du 29 août 2000 citée ci-avant, que seule a réclamé contre les bulletins litigieux la société en commandite simple … sàrl et Cie secs, à l’exclusion de ses associés commanditaires et de son associé commandité, la société à responsabilité limitée … sàrl.

S’il est exact que le tribunal administratif, dans son jugement précité du 17 octobre 2001, a déclaré irrecevable le recours introduit à la suite de l’envoi de la lettre de réclamation du 29 août 2000 pour avoir été introduit prématurément en date du 17 janvier 2001, le même tribunal, dans son jugement du 30 mai 2002 (n° 14105 du rôle), rendu entre les mêmes parties, a conclu qu’au regard de la loi fiscale, les sociétés de personnes, parmi lesquelles sont rangées les sociétés en commandite simple, n’ont pas une individualité juridique propre et ne sont pas passibles de l’impôt sur le revenu des collectivités et que même si les bulletins déférés ont été adressés à la société … sàrl et Cie secs, celle-ci ne saurait être considérée comme étant un contribuable, c’est-à-dire un sujet de droit fiscal, qui disposerait du droit de réclamer ou d’introduire un recours, dans la mesure où ce n’est pas elle qui est matériellement imposée, mais les associés qui sont personnellement et directement imposables sur leur part dans les bénéfices de la société. Pour le surplus, ledit jugement a encore retenu que pour l’hypothèse d’espèce, à savoir l’établissement séparé et en commun des revenus d’une entreprise commerciale collective et la fixation de la valeur unitaire d’une entreprise commerciale collective, l’exercice des voies de recours appartient au seul sociétaire chargé de la gestion de l’exploitation, à savoir la société à responsabilité limitée … sàrl.

C’est dès lors à tort que la demanderesse invoque une reconnaissance implicite par le tribunal de la régularité de la lettre de réclamation du 29 août 2000, le contraire ressortant de la motivation du jugement précité du 30 mai 2002, qui n’a pas été frappé d’appel.

C’est également à juste titre que le délégué du gouvernement estime que cette réclamation d’autrui de la part de la société … sàrl et Cie secs ne saurait profiter à la société à responsabilité limitée … sàrl.

En effet, il échet de rappeler qu’au vœu des dispositions combinées des articles 8 (3) de la loi du 7 novembre 1996, précitée, et du paragraphe 228 AO, le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur les recours contre un bulletin d’établissement des revenus d’entreprises collectives ainsi que sur les recours contre les bulletins d’établissement de la valeur unitaire en cas de silence du directeur suite à une réclamation dûment introduite par le contribuable.

Or, en l’absence d’une réclamation dûment introduite par le contribuable, le recours contentieux introduit encourt l’irrecevabilité omisso medio dans la mesure où il est introduit au nom d’une personne juridique différente.

Il s’ensuit qu’à défaut pour la société à responsabilité limitée … sàrl d’avoir réclamé contre lesdits bulletins, son recours contentieux dirigé contre le silence de l’administration suite à la susdite réclamation du 29 août 2000 est irrecevable omisso medio en ce qu’elle n’a pas saisi préalablement l’administration d’une réclamation dirigée contre les bulletins d’établissement des revenus d’entreprises collectives et d’établissement de la valeur unitaire précités.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

se déclare compétent pour connaître du recours en réformation ;

déclare le recours en réformation irrecevable ;

déclare encore le recours subsidiaire en annulation irrecevable ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge M. Spielmann, juge et lu à l’audience publique du 5 mars 2003 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schockweiler 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 15015
Date de la décision : 05/03/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-03-05;15015 ?

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