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26/02/2003 | LUXEMBOURG | N°14987

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 février 2003, 14987


Tribunal administratif N° 14987 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 juin 2002 Audience publique du 26 février 2003 Recours formé par les époux … et …, … contre une décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg et un avis de la commission des sites et monuments nationaux en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14987 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 juin 2002 par Maître Marc THEISEN, a

vocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsi...

Tribunal administratif N° 14987 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 juin 2002 Audience publique du 26 février 2003 Recours formé par les époux … et …, … contre une décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg et un avis de la commission des sites et monuments nationaux en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14987 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 juin 2002 par Maître Marc THEISEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, … et de son épouse Madame …, …, demeurant ensemble à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 15 mars 2002 portant refus d’autorisation de la construction d’un garage souterrain sur leur terrain sis à Luxembourg-

Clausen, 3, rue Jules Wilhelm, et pour autant que de besoin de l’avis de la commission des sites et monuments nationaux du 11 janvier 2002 ainsi désigné ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Yves TAPELLA agissant en remplacement de l’huissier de justice Roland FUNK, les deux demeurant à Luxembourg, du 31 mai 2002 portant signification de ce recours à l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 25 octobre 2002 par Maître Jean MEDERNACH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la Ville de Luxembourg ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réponse à Maître Marc THEISEN ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 25 novembre 2002 par Maître Marc THEISEN au nom des époux … et … ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réplique à Maître Jean MEDERNACH ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 18 décembre 2002 par Maître Jean MEDERNACH au nom de la Ville de Luxembourg ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 16 décembre 2002 portant notification de ce mémoire en duplique à Maître Marc THEISEN ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment les décision et avis déférés ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Marc THEISEN et Gilles DAUPHIN, en remplacement de Maître Jean MEDERNACH, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 8 janvier 2003 ;

Vu l’avis de rupture du délibéré du 15 janvier 2003 tendant à permettre aux parties une prise de position complémentaire concernant l’applicabilité en l’espèce des dispositions de l’article C.1 de la partie écrite du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg ;

Vu le « mémoire explicatif » déposé au greffe du tribunal administratif en date du 7 février 2003 par Maître Marc THEISEN au nom des demandeurs ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire explicatif à Maître Jean MEDERNACH ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 7 février 2003 par Maître Jean MEDERNACH au nom de la Ville de Luxembourg ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire supplémentaire à Maître Marc THEISEN ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 10 février 2003 par Maître Marc THEISEN au nom des demandeurs ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire supplémentaire à Maître Jean MEDERNACH ;

Vu les pièces supplémentaires versées au dossier ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maîtres Marc THEISEN et Gilles DAUPHIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 février 2003.

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Considérant qu’en date du 12 juin 2001, les époux … et …, préqualifiés, ont fait introduire à travers leur architecte une demande d’autorisation auprès du collège des bourgmestre et échevins de la Ville de Luxembourg concernant la construction d’un garage souterrain et la démolition pour modification d’une terrasse sur leur terrain sis à Luxembourg-

Clausen, 3, rue Jules Wilhelm, inscrit au cadastre de la Ville de Luxembourg, section LA de Clausen, sous les numéros cadastraux 21/244 et 21/1047 ;

Que sur avis négatif de la commission consultative élargie en matière de bâtisses de la Ville de Luxembourg, le bourgmestre, par décision du 15 octobre 2001, a refusé l’autorisation sollicitée notamment en ces termes :

« J’ai fait examiner votre projet par la commission consultative élargie en matière de bâtisses qui est d’avis que dans le présent cas, l’article C.1 de la partie écrite du plan général d’aménagement est d’application, alors qu’il semble établi que le mur extérieur, destiné à recevoir l’entrée de garage, fait partie des vestiges du château Mansfeld. Cet article dispose que les sites et monuments protégés, dont les vestiges du château et le domaine dit « Parc Mansfeld » sont à conserver dans leur aspect et qu’aucune transformation et aucun agrandissement qui pourraient nuire à leur valeur artistique, historique ou archéologique ne sont admis. Il est encore précisé dans cet article que dans le voisinage ou le champ de visibilité direct des sites et monuments protégés, des constructions ou transformations qui pourraient porter préjudice au site peuvent être interdites.

Vu l’importance et l’impact des travaux que vous vous proposez d’apporter au mur extérieur de votre propriété (brèche d’une largeur d’environ 12,00 mètres) dans le but de créer l’entrée au garage et en considération de l’article C.1 précité, je me vois obligé de refuser l’autorisation sollicitée » ;

Qu’en date du 21 décembre 2001, l’architecte en question, au nom des époux …-…, a présenté un projet remanié prévoyant notamment une brèche ramenée à 8 mètres concernant l’entrée au garage souterrain projeté, suite aux discussions sur le terrain avec des responsables de la Ville en date du 7 novembre 2001 ;

Que la commission des sites et monuments nationaux, saisie pour avis, a analysé le projet en date du 13 décembre 2001 et émis un avis négatif, transmis au bourgmestre de la Ville de Luxembourg par courrier de la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche du 11 janvier 2002 ;

Que cet avis est libellé comme suit :

« Le projet est avisé à la demande du bourgmestre de la Ville de Luxembourg. Le volet de sécurité de la circulation est brièvement évoqué, mais étant donné qu’il n’est pas de la compétence de la Cosimo, il n’est pas discuté en profondeur. Le mur en question est un édifice datant de l’époque de Vauban. En tant que partie de la fortification, il n’avait ni recul, ni retrait, ni recoin permettant de se cacher ou de se mettre à l’abri. Comme le mur a gardé, sauf quelques interventions mineures, sa configuration d’origine, tout nouveau percement est à éviter. Il serait en effet inconcevable de détériorer un témoin intact alors qu’en d’autres endroits, des vestiges datant de la même époque sont fouillés et reconstruits à grand frais.

Avis négatif unanime moins une abstention des membres présents (MM. … et … n’ont pas pris part au vote) » ;

Qu’en date du 15 mars 2002, le bourgmestre a fait part à l’architecte de son refus d’autorisation motivé comme suit :

« Cette version remaniée prévoit de ramener la largeur de la brèche à ouvrir dans le mur de la fortification de 12,00 mètres à 8,00 mètres.

Vu toutefois l’avis négatif de la commission des sites et monuments nationaux et vu de l’article C.1 de la partie écrite du plan d’aménagement général qui demande que les vestiges de la forteresse soient conservés dans leur aspect et qui interdit toute transformation pouvant nuire à leur valeur artistique, historique ou archéologique, j’ai décidé de refuser l’autorisation sollicitée » ;

Considérant que par requête déposée en date du 4 juin 2002, les époux … et … ont fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation contre la décision de refus du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 15 mars 2002 précitée « et pour autant que de besoin à l’encontre de l’avis de la commission des sites et monuments nationaux du 11 janvier 2002 » ;

Considérant que la Ville conclut à l’incompétence du tribunal pour connaître du recours principal en réformation tout en se rapportant à prudence de justice concernant la recevabilité du recours subsidiaire en annulation, en tant qu’il est dirigé contre la décision du bourgmestre du 15 mars 2002 ;

Que pour autant que ce recours en annulation est dirigé contre l’avis de la commission des sites et monuments nationaux, le recours serait irrecevable étant donné que l’avis ne constituerait point une décision de nature à faire grief ;

Considérant qu’aucune disposition légale ne prévoyant un recours de pleine juridiction en la matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;

Considérant qu’il est patent que la prise de position de la commission des sites et monuments nationaux du 13 décembre 2001, transmise au bourgmestre le 11 janvier 2002 par la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieure et de la Recherche, s’analyse en un avis d’un organisme collégial ne répondant en aucune façon aux qualificatifs d’une décision administrative individuelle faisant grief ;

Que partant le recours en annulation est irrecevable faute d’objet attaquable dans la mesure où il est dirigé contre l’avis en question ;

Considérant qu’en tant que dirigé contre la décision de refus du bourgmestre du 15 mars 2002, le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi ;

Considérant que le demandeur conclut en premier lieu à l’annulation de la décision déférée du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 15 mars 2002 dans la mesure où celle-

ci ferait siennes les conclusions de l’avis de la commission des sites et monuments nationaux prévisé, lequel pourtant ne répondrait pas aux exigences de l’article 4 du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, aucune méprise ne pouvant par ailleurs exister du fait que les demandeurs visent le texte en question comme étant une loi ;

Qu’ils avancent plus particulièrement que l’avis de la commission omettrait d’indiquer sa composition, le nom des membres ayant assisté à la délibération et le nombre des voix exprimées en faveur de l’avis émis, de sorte qu’en tant qu’administrés ils n’auraient pas été en mesure de vérifier si la commission a été régulièrement composée et si la procédure d’élaboration de l’avis n’a pas été viciée ;

Considérant que force est au tribunal de constater que le moyen présenté s’explique sur la toile de fond de la transmission de l’avis en question à travers le courrier ministériel précité du 11 janvier 2002, lequel relate essentiellement l’argumentaire à la base de l’avis en question, prérelaté ;

Considérant qu’entre-temps la partie défenderesse a versé parmi les pièces l’avis proprement dit du 13 décembre 2001 ;

Considérant que le tribunal est amené à retenir que l’avis en question répond aux exigences de l’article 4 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité concernant les points mis en avant par les demandeurs, en ce qu’il contient le nom des membres ayant assisté à la délibération, ainsi que ceux des membres y excusés, de même que le nombre de voix exprimées en faveur de l’avis émis, de façon unanime moins une abstention des membres présents avec spécification de deux membres n’ayant pas pris part au vote ;

Que le moyen laisse dès lors d’être fondé ;

Considérant qu’en second lieu les demandeurs mettent en avant l’expertise datée du 27 mars 2002 émanant de M. Jacques Dollar, auteur d’un livre sur Vauban à Luxembourg, suivant laquelle le mur concerné ne date pas de l’époque du célèbre bâtisseur français et qu’il n’a rien à voir avec les vestiges vaubaniens, pour conclure à l’illégalité de la décision déférée entérinant l’avis négatif de la commission des sites et monuments nationaux véhiculant l’erreur ainsi mise à nu ;

Que la Ville d’estimer que l’article C.1 PAG se réfère indistinctement aux vestiges de la forteresse de sorte qu’il importerait peu que l’avis de la commission fasse état, de façon non vérifiée, à un mur de l’époque de Vauban, pourvu qu’il fasse partie des vestiges de la forteresse, tout en précisant que la décision déférée, bien que visant ledit avis, n’y ferait pas état de l’époque de Vauban ;

Que la Ville de demander à voir écarter le rapport de Monsieur Dollar comme étant unilatéral, partant inopposable à la partie défenderesse ;

Qu’en toute occurrence la destruction d’un pan de mur avec le percement d’une brèche de 8 mètres aboutirait à nuire à la valeur historique de l’ensemble du site, ce d’autant plus que le mur en question aurait gardé sa configuration d’origine ;

Que les demandeurs de répliquer que dans la mesure où les droits de la défense de la partie défenderesse auraient été parfaitement respectés en ce que celle-ci aurait pu librement discuter l’expertise de Monsieur Dollar, le tribunal pourrait en tenir compte pour asseoir sa décision, même compte tenu de son caractère unilatéral ;

Qu’ils expliquent le fait de ne pas avoir intenté de recours contre la première décision de refus du 15 octobre 2001, précitée, par la circonstance qu’à la suite des rencontres ont eu lieu avec des responsables de la commune, desquels pourparlers serait issu le projet actuellement sous refus d’autorisation déféré ;

Que plus précisément le fait de ramener l’ouverture du garage à une brèche de 8 mètres au lieu de 12 mètres antérieurement prévus résulterait d’un accord trouvé sur place avec le bourgmestre et l’architecte de la Ville ;

Que suivant les demandeurs, l’article C.1 PAG, en renvoyant expressis verbis aux sites et monuments y énumérés, serait à appliquer en combinaison avec les dispositions de la loi du 18 juillet 1983 concernant la conservation et la protection des sites et monuments nationaux, dont plus particulièrement son article 17 alinéa 1er visant les immeubles à inscrire sur une liste appelée inventaire supplémentaire ;

Qu’ainsi le mur extérieur dans lequel est projeté la brèche de 8 mètres en question ne figurerait point sur l’inventaire supplémentaire, de sorte qu’il ne relèverait pas non plus des dispositions de l’article C.1 PAG, entraînant que le refus déféré se trouverait dénué d’une justification légale ;

Que les demandeurs d’invoquer encore le courrier complémentaire du président de la commission des sites et monuments nationaux du 30 octobre 2002 pour voir confirmer l’avis de Monsieur Dollar suivant lequel le mur en question ne saurait être attribué à Vauban ;

Que les affirmations y portées suivant lesquelles le mur en question fut construit à l’époque de l’érection de la Tour Malakoff et du Fort Parkhöhe, lorsque la localité de Clausen a été intégrée dans l’enceinte de la forteresse, ne serait étayée par aucun document, de sorte qu’également de ce point de vue la décision déférée n’aurait aucune base légale en ce que l’objet litigieux ne tomberait pas sous le champ d’application de l’article C.1 PAG ;

Que la commune de conclure que le PAG, à travers son article C.1, et la loi du 18 juillet 1983 précitée prévoiraient deux protections parallèles indépendantes sans corrélation obligatoire, de sorte que l’inscription à l’inventaire supplémentaire prévue par l’article 17 de ladite loi ne saurait être érigée en condition préalable pour une protection vérifiée au sens de l’article C.1 PAG ;

Considérant que les régimes de protection prévus respectivement par la loi du 18 juillet 1983, d’une part, et l’article C.1 PAG, d’autre part, sont distincts comme relevant de la compétence d’autorités différentes et répondant à des critères spécifiques inscrits de part et d’autre dans des corps de textes différents à appliquer distributivement, chacun dans son contexte propre concerné ;

Considérant que l’article C.1 PAG ne comportant plus particulièrement aucune référence à la loi du 18 juillet 1983 en question, ni plus précisément à son article 17 prévoyant l’inventaire supplémentaire y défini, l’inscription de l’immeuble protégé concerné audit inventaire ne saurait être érigée en condition préalable pour une invocation utile des dispositions dudit article C.1 PAG ;

Considérant que l’article C.1 PAG dispose que « les monuments et sites protégés énumérés ci-après :

- les vestiges de la forteresse - le rocher St. Quirin - le rocher St Crépin - la cathédrale et l’ancien couvent des Jésuites - l’église St Michel - le temple protestant - l’ancien refuge de St Maximin - le palais grand-ducal - l’hôte de ville - l’église St Jean et l’ancien couvent Neumunster - les anciens hospices du Grund et de Pfaffenthal - les vestiges du château et le domaine dit « parc Mansfeld » - les domaines et les châteaux de Dommeldange, Beggen, Bellevue et Septfontaines - les sites rocheux marqués dans la partie graphique par un astérisque, sont à conserver dans leur aspect ; aucune transformation et aucun agrandissement qui pourraient nuire à leur valeur artistique, historique ou archéologique sont admis.

Dans leur voisinage ou leur champ de visibilité direct, des constructions ou transformations qui pourraient porter préjudice au site peuvent être interdites » ;

Considérant qu’au vu du libellé de l’article C.1 PAG et de l’état des conclusions afférentes jusque lors déposées au nom des parties, le tribunal a été amené à constater que celles-ci étaient fragmentaires à un point tel que les parties n’avaient pas su dégager avec précision par rapport à quelle hypothèse de protection le mur existant actuellement litigieux devait être concrètement entrevue en fait et en droit, de sorte qu’une rupture de délibéré a été ordonnée aux fins de donner la possibilité aux parties de prendre plus amplement position par rapport aux différents aspects visés par ledit article C.1 PAG, invoqué expressément comme motif à la base de la décision de refus déférée ;

Considérant qu’à travers leur mémoire explicatif, les demandeurs ont essentiellement insisté derechef pour voir dire que le mur litigieux n’émanait pas des constructions de Vauban en s’appuyant avec force sur les constatations versées au dossier fournies par Monsieur Jacques DOLLAR, ainsi que les mérites de ce dernier par rapport aux ouvrages de Vauban relaissés à Luxembourg, sans autrement pousser plus en avant l’analyse des dispositions mêmes de l’article C.1 PAG ;

Qu’à travers son mémoire supplémentaire, la Ville de Luxembourg de demander acte du dépôt par elle effectué en tant que pièce d’un extrait de la partie graphique du PAG de la Ville portant sur le site en question pour retenir que force était de reconnaître qu’aucun astérisque, tel que visé par l’article C.1 PAG, n’était directement apposé sur le mur litigieux, tandis que pareille indication figurait à côté de la mention « Clausen » ;

Que la Ville de faire remarquer que compte tenu de l’échelle et de la taille de la partie graphique du PAG il était matériellement impossible de désigner spécialement tout vestige de la forteresse par un astérisque, sous peine de rendre le document illisible ;

Que la Ville d’insister encore sur la phrase in fine de l’article C.1 PAG prévoyant que dans le voisinage ou le champ de visibilité direct des monuments et sites protégés, les constructions ou transformations susceptibles de porter préjudice au site pouvaient être interdites ;

Que selon elle, le mur litigieux serait à considérer en ordre principal comme un vestige de la forteresse au sens de l’article C.1 PAG, sinon dans un ordre subsidiaire il importerait de retenir que la rue Jules Wilhelm se trouve dans le voisinage, respectivement le champ de visibilité direct des monuments et sites protégés que seraient le secteur Clausen et le Fort des Trois Glands ;

Que dans la mesure où les démolitions et transformations envisagées par les demandeurs porteraient sans aucune doute préjudice au site constitué par ledit secteur Clausen et le Fort des Trois Glands, le refus déféré serait justifié par ledit article C.1 PAG pris en sa dernière phrase ;

Que la Ville d’invoquer encore le fait que le mur litigieux se trouve placé au sein du secteur protégé des vallées de la Pétrusse et de l’Alzette et du promontoire du Rahm, ainsi que cela résulterait de la couleur rose apposée en son endroit sur ladite partie graphique, de sorte que les articles C.0 et C.5 PAG seraient appelés à trouver application en l’espèce ;

Qu’ainsi les articles C.0.1, C.0.2 et C.5 PAG insisteraient sur la valeur historique des sites ainsi désignés et sur les protections spéciales dont ceux-ci devraient bénéficier, tandis que l’article C.5.3b) prévoirait plus particulièrement que ces immeubles, dont plus précisément les façades devraient s’intégrer harmonieusement dans l’ensemble des constructions voisines existantes et respecter le caractère dudit quartier ;

Qu’en se référant aux plans de construction faisant partie intégrante des deux demandes de permis de construire, force serait de se rendre compte de l’ampleur des transformations envisagées, ainsi que du fait que celles-ci ne s’intégreraient pas harmonieusement dans l’ensemble des constructions voisines ;

Que la Ville de conclure dès lors qu’à titre tout à fait subsidiaire, la décision de refus déférée se trouverait encore justifiée par substitution de motifs à partir des dispositions des articles C.0.1 et C.5 PAG ;

Considérant qu’à travers leur mémoire supplémentaire, les demandeurs de reprendre leur conclusion suivant laquelle en l’absence de preuve formelle du contraire, il devrait être retenu en l’espèce que le mur litigieux ne serait soumis à aucune protection dans le cadre des monuments et sites protégés, pour insister encore qu’il résulterait de l’ensemble des éléments du dossier que contrairement à ce qui a pu être énoncé, notamment par la commission des sites et monuments nationaux, ledit mur ne relèverait pas de l’époque de Vauban ;

Que les demandeurs de critiquer pour le surplus comme étant avancée sans justificatif tangible l’affirmation du bourgmestre faite à travers sa décision précitée du 15 octobre 2001 suivant laquelle le mur extérieur destiné à recevoir l’entrée du garage ferait partie des vestiges du château Mansfeld ;

Que les demandeurs de contester encore la thèse établie par la partie publique suivant laquelle le garage projeté ne serait point appelé à s’intégrer harmonieusement dans l’ensemble des constructions voisines existantes et ne saurait respecter le caractère du quartier ;

Que suivant les demandeurs les discussions ayant eu lieu avec les autorités et l’accord, du moins oral, trouvé, suivant eux, serait de nature à démontrer le contraire ;

Considérant que suivant l’alinéa 1er de l’article C.1 PAG prérelaté, les monuments et sites y énoncés ne jouissent pas automatiquement, concernant leur conservation dans leur aspect existant, de la protection prévue audit article, du fait de la seule énumération y faite, étant donné qu’au même alinéa 1er se trouve formulée une seconde condition cumulative consistant dans l’exigence que les monuments et sites en question soient pour le surplus marqués dans la partie graphique par un astérisque ;

Considérant que force est de reconnaître avec la partie défenderesse que le mur litigieux n’est pas marqué en tant que tel par un astérisque sur la partie graphique du PAG de la Ville de Luxembourg ;

Considérant qu’à proximité de ce mur, tant le Fort Thüngen, communément appelé Fort des Trois Glands se trouvant sur la hauteur, précisément derrière le mur en question, que l’indication de la localité Clausen portée à la hauteur de la rue Malakoff, de même que les rochers y figurant, se trouvent tous les trois marqués d’un astérisque ;

Considérant qu’en analysant plus en avant la partie graphique du PAG de la Ville de Luxembourg, force est encore de retenir que celle-ci tend effectivement à marquer d’un astérisque tous les monuments et sites visés suivant les 14 tirets marqués audit alinéa 1er de l’article C.1 PAG, prérelaté ;

Considérant que si pour des monuments précis tels que l’église St Michel, le palais grand-ducal ou l’hôtel de ville, aucune méprise n’est possible – l’astérisque étant pour le surplus placé sur la partie graphique à proximité directe du site visé – la technique graphique employée manque cependant de précision et de clarté, par la force des choses, du moment qu’il s’agit de cerner à travers un astérisque un site d’une certaine étendue, dont les confins ne sont pour le surplus pas autrement définis, ni à travers la partie graphique, ni encore au niveau de la partie écrite du PAG de la Ville ;

Que cette dernière constatation d’imprécision vaut plus particulièrement pour les deux ensembles de monuments et sites énoncés par ledit alinéa 1er de l’article C.1 PAG prérelaté, invoqués en l’espèce en rapport avec le mur litigieux, à savoir « les vestiges de la forteresse » d’une part et « les vestiges du château » et le domaine dit « Parc Mansfeld » » d’autre part ;

Considérant qu’à partir de l’exemple du Fort Thüngen – exemple pouvant être multiplié à volonté pour d’autres éléments de la forteresse – le tribunal est amené à retenir que pour que des vestiges de la forteresse puissent bénéficier de la protection instaurée par les dispositions de l’alinéa 1er de l’article C.1 PAG, il faut qu’ils soient précisément marqués dans la partie graphique par un astérisque, tel que le prévoit la disposition réglementaire sous analyse, quels que soient les inconvénients en résultant dans le chef de cet ensemble architectural historique classé entre-temps au titre de patrimoine mondial de l’UNESCO, étant donné que les interdictions et limitations portées au droit de propriété à travers les dispositions du plan d’aménagement général en réglementant l’usage sont d’interprétation stricte ;

Considérant qu’il s’ensuit qu’à défaut d’être marqué d’un astérisque, le mur litigieux ne saurait être inclus parmi les vestiges de la forteresse bénéficiant directement de la protection prévue par l’alinéa 1er de l’article C.1 PAG ;

Considérant que la Ville, à travers son mémoire supplémentaire, invoque la protection dudit alinéa 1er dans le chef du « secteur Clausen », à partir de l’astérisque marqué à côté de l’indication « Clausen » figurant à hauteur de la rue Malakoff sur la partie graphique du PAG ;

Considérant qu’à partir de la systématique de la technique du marquage de l’astérisque employée par ladite partie graphique ci-avant dégagée, le tribunal est encore amené à retenir que l’astérisque marqué à côté de l’indicatif « Clausen » appert comme visant « les vestiges du château » et le domaine dit « Parc Mansfeld » », étant donné que d’après les plans versés au dossier, notamment par les parties demanderesses à l’appui des indications émanant de Monsieur Jacques DOLLAR, l’implantation du château Mansfeld proprement dit coïncide approximativement avec l’indicatif « Clausen », marqué d’un astérisque tel que porté sur ladite partie graphique ;

Considérant que s’il résulte desdits plans versés au dossier, ensemble d’autres plans d’époque, que le parc Mansfeld ayant entouré ledit château Mansfeld avec une envergure certaine, s’étendait jusqu’à l’Alzette vers l’avant de même que jusque dans les parages du mur actuellement litigieux, il n’en reste pas moins que toujours d’après les plans versés au dossier, ce mur n’apparaît pas comme faisant partie des vestiges des constructions érigées à l’époque pour le gouverneur Mansfeld ;

Qu’il s’ensuit que le mur litigieux ne se trouve pas non plus être inclus parmi « les vestiges du château et le domaine dit « Parc Mansfeld » » ;

Considérant qu’à partir du second alinéa de l’article C.1 PAG prérelaté, le tribunal est amené à constater que le mur litigieux se trouve à la fois dans le voisinage et le champ de visibilité des deux monuments et sites protégés ci-avant analysés que sont le Fort Thüngen, vestige de la forteresse, marqué d’un astérisque, d’une part, se trouvant sur la hauteur, directement derrière la propriété …-… et le parc Mansfeld, d’autre part ;

Considérant qu’à partir des plans versés au dossier, le tribunal est encore amené à retenir que malgré les efforts d’adaptation déployés par l’architecte des demandeurs, l’ouverture de garage d’une largeur de 8 mètres, étendue due pour des raisons techniques à la largueur exiguë de la voie publique à l’endroit, faisant appel par la force des choses à des éléments et matériaux de l’ère contemporaine, dont le gabarit sera appelé à avoir un impact visuel certain, de sorte à porter préjudice au site et à pouvoir ainsi justifier l’interdiction portée à travers le refus déféré, sans qu’une erreur d’appréciation manifeste afférente ne puisse être retenue dans le chef de l’autorité communale ayant statué ;

Considérant que la même conclusion se dégage encore de l’application des dispositions des articles C.0 et C.5 PAG valablement invoqués à titre complémentaire par la Ville de Luxembourg à travers son mémoire supplémentaire déposé, dont plus particulièrement l’article C.5.3b), lequel en son alinéa 1er sous b) prévoit que les immeubles – en l’espèce le mur litigieux devant accuser l’ouverture de garage projetée – doivent s’intégrer harmonieusement dans l’ensemble des constructions voisines existantes en respectant le caractère du quartier et les ruptures du parcellaire en façade ;

Considérant que s’il est vrai que sur sa longue étendue le mur existant le long de la rue Jules Wilhelm – ancien chemin de Weimershof – accuse certaines ouvertures, essentiellement des portes d’entrée, celles-ci, éminemment plus étroites, accusent un impact visuel autrement peu prononcé par rapport à celui se dégageant potentiellement, d’après les plans versés, de l’ouverture de garage projetée par les demandeurs ;

Considérant qu’il s’ensuit que le recours laisse d’être fondé, en ce qu’il n’énerve pas les motifs de refus, tels que valablement complétés, notamment à travers le mémoire supplémentaire de la Ville déposé à partir de l’article C.1 PAG, dernière alinéa, ensemble les dispositions des articles C.0 et C.5 PAG ;

Considérant qu’il s’ensuit que le recours n’étant justifié en aucun de ses moyens, il est à déclarer non fondé ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

déclare le recours en annulation irrecevable pour autant que dirigé contre l’avis déféré ;

le déclare recevable pour le surplus ;

au fond le dit non justifié ;

partant en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 26 février 2003 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 11


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 14987
Date de la décision : 26/02/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-02-26;14987 ?

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