La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/02/2003 | LUXEMBOURG | N°14965

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 février 2003, 14965


Tribunal administratif N° 14965 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 mai 2002 Audience publique du 26 février 2003

=============================

Recours formé par la société civile …, … contre une décision de la ministre des Travaux publics et une décision de l'administration des Ponts et Chaussées en matière de permission de voirie

-----------------------------------------------------------------


JUGEMENT

Vu la requête déposée le 29 mai 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean TONNAR, avocat à la Cour,

inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société civile …, avec siège à ...

Tribunal administratif N° 14965 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 mai 2002 Audience publique du 26 février 2003

=============================

Recours formé par la société civile …, … contre une décision de la ministre des Travaux publics et une décision de l'administration des Ponts et Chaussées en matière de permission de voirie

-----------------------------------------------------------------

JUGEMENT

Vu la requête déposée le 29 mai 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean TONNAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société civile …, avec siège à …, zone artisanale, représentée par ses associés MM.

…, demeurant à …, …, demeurant à …, …, demeurant à … et …. , demeurant à …, tendant à la réformation d’une décision de la ministre des Travaux publics du 11 avril 2002 ainsi que d'une décision de l'administration des Ponts et Chaussées du 29 avril 2002 portant refus de lui accorder une permission de voirie en vue de la construction d'un bâtiment administratif à édifier à L-… ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 4 novembre 2002;

Vu les pièces versées et notamment les décisions entreprises;

Ouï le juge rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Guy TONNAR et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Par courrier du 5 juin 2001, la société civile … a fait introduire auprès de l'administration des Ponts et Chaussées une demande de permission de voirie en vue de la construction d'un immeuble administratif dans la zone artisanale et commerciale de Pétange.

Par note du 13 mars 2002, le directeur adjoint des Ponts et Chaussées fit observer à la ministre des Travaux publics ce qui suit:

"Retourné à Madame le ministre des Travaux publics avec l'observation que l'objet de la présente est le reclassement d'une zone verte existant au PAG de la Commune aux fins d'avancer les constructions plus près de la route N 31 qui sur cette section fait fonction de voie de contournement. Or comme à l'époque ces zones de verdure ont justement été créées en guise de bande verte de protection, il serait à notre avis irresponsable de les supprimer maintenant dans le seul but de créer des plus-values sur ces terrains en les intégrant dans une zone à urbaniser. – Ceci est d'autant plus vrai que pour le moment une initiative législative 2 est en préparation visant l'instauration d'office de zones non-aedificandi de 15 m de largeur le long des routes et tronçons de route faisant fonction de contournement. – Je propose donc de refuser la présente demande de permission de voirie." Par décision du 11 avril 2002, la ministre des Travaux publics se rallia à la proposition de refus.

Par courrier du 29 avril 2002, l'administration des Ponts et Chaussées informa la société intéressée de ce refus, en réitérant le motif tiré de l'initiative législative tendant à instaurer d'office des zones non aedificandi de 15 mètres de largeur le long des routes et tronçons de routes faisant fonction de contournement, et en l'informant sur les voies de recours contre la décision ministérielle.

Par requête déposée le 29 mai 2002, la société … a introduit un recours en réformation dirigé contre la décision ministérielle du 11 avril 2002 ainsi que contre la décision négative de l'administration des Ponts et Chaussées du 29 avril 2002.

Elle fait exposer qu'en application de l'article 4 de la loi modifiée du 13 janvier 1843 sur la compétence des tribunaux en fait de contravention de grande voirie, de constructions et plantations le long des routes, l'autorisation du ministre compétent n'est requise que pour autant que la construction projetée est inférieure à la distance de dix mètres de la voie publique. Or, selon le projet de construction soumis à l'administration des Ponts et Chaussées, cette distance serait respectée. – En ordre subsidiaire, elle fait plaider que le pouvoir du ministre en la matière n'est pas arbitraire et qu'il doit se référer, pour refuser une permission de voirie, à un éventuel danger pour les usagers de la route. Une décision basée sur une distance à respecter de quinze mètres, non consacrée législativement, serait illégale.

Le délégué du gouvernement se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours en la forme. Au fond, il demande la confirmation de la décision entreprise pour les motifs exposés dans la décision. Il ajoute que l'élargissement de la zone non aedificandi de dix à quinze mètres s'impose pour des impératifs de sécurité des usagers de la voirie et des riverains.

La lettre de l'administration des Ponts et Chaussées informant la demanderesse de la décision ministérielle du 11 avril 2002 ne constitue pas une décision administrative autonome.

Elle ne fait que porter à la connaissance de l'administré une décision prise antérieurement par la ministre des Travaux publics, compétente en la matière.

Le recours est partant irrecevable en tant que dirigé contre la lettre de l'administration des Ponts et Chaussées du 29 avril 2002.

En revanche, la décision de la ministre des Travaux publics du 11 avril 2002 constitue une véritable décision administrative de nature à faire grief et comme telle susceptible d'un recours contentieux devant le tribunal administratif.

L'article 4, alinéa 2 de la loi modifiée du 13 janvier 1843, précitée, prévoyant que le tribunal administratif statue comme juge du fond en matière de recours dirigés contre le refus d'une permission de voirie, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre la décision ministérielle de refus du 11 avril 2002. – Le recours ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

3 Au fond, il y a lieu de constater qu'en vertu des articles 4 et 5 de la loi modifiée du 13 janvier 1843, une autorisation ministérielle est nécessaire pour toute construction à une distance inférieure de dix mètres des routes.

Le ministre ne saurait, prétendant anticiper le vœu du législateur, modifier ladite distance légale en l'étendant à quinze mètres, sous peine de se substituer au pouvoir législatif qui seul dispose du pouvoir de modifier la loi du 13 janvier 1843 au moment et dans la mesure qu'il juge opportuns. En fixant d'une manière générale et impersonnelle une distance de quinze mètres que les constructions doivent respecter par rapport aux axes routiers, le ministre commet une violation de la loi.

En l'espèce, il se dégage des plans versés que la distance minimale par rapport à la route nationale N 31 (contournement de Pétange) de l'immeuble projeté est de 11,93 mètres.

Il s'ensuit qu'en vertu des dispositions légales actuellement en vigueur, aucune permission de voirie telle qu'exigée par la loi modifiée du 13 janvier 1843 n'est nécessaire pour la construction de l'immeuble administratif tel que projeté par la demanderesse.

Il y a lieu d'ajouter, à titre surabondant, que les deux immeubles situés respectivement à gauche et à droite de l'immeuble projeté sont distants, l'un et l'autre, de dix mètres de l'axe routier prémentionné, de sorte que l'implantation de l'immeuble litigieux n'aura aucune influence sur la sécurité de la circulation, et on ne saurait considérer qu'elle aboutira à supprimer une bande verte de protection comme il est affirmé dans l'avis de la direction de l'administration des Ponts et Chaussées auquel la ministre des Travaux publics s'est ralliée pour refuser la permission de voirie sollicitée.

Comme une permission de voirie telle que prévue par la loi modifiée du 13 janvier 1843 n'est pas requise dans le cas d'espèce, le tribunal ne saurait, par réformation de la décision ministérielle de refus, la délivrer, mais doit se borner à annuler la décision de refus.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

déclare le recours irrecevable en tant qu'il est dirigé contre la lettre de l'administration des Ponts et Chaussées du 29 avril 2002;

le déclare recevable pour le surplus;

dit qu'une permission de voirie telle qu'exigée par la loi modifiée du 13 janvier 1843 n'est pas requise en l'espèce, annule la décision ministérielle de refus d'accorder une permission de voirie du 11 avril 2002, condamne l'Etat aux frais.

4 Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 26 février 2003 par:

M. Ravarani, président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Ravarani


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 14965
Date de la décision : 26/02/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-02-26;14965 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award