La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/02/2003 | LUXEMBOURG | N°15921

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 février 2003, 15921


Tribunal administratif N° 15921 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 janvier 2003 Audience publique du 18 février 2003

=============================

Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

-------------------------


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15921 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 janvier 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de

Monsieur …, né le …, et de son épouse, Madame …, née le …, tous les deux de nationalité yougoslave, ten...

Tribunal administratif N° 15921 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 janvier 2003 Audience publique du 18 février 2003

=============================

Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

-------------------------

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15921 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 janvier 2003 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, et de son épouse, Madame …, née le …, tous les deux de nationalité yougoslave, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 4 novembre 2002, leur notifiée en date du même jour, déclarant leur demande en obtention du statut de réfugié comme étant manifestement infondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 23 décembre 2002 intervenue sur recours gracieux introduit en date du 16 décembre 2002 à l’encontre de la décision prévisée du 4 novembre 2002 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 7 février 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Ouï le juge rapporteur en son rapport, et Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, en remplacement de Maître Louis TINTI, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 février 2003.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Les époux … et … … introduisirent en date du 14 octobre 2002, une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Ils furent entendus le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur leur identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg, ainsi qu’en date du 15 octobre 2002 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de leur demande d’asile.

Le ministre de la Justice informa les époux … par lettre du 4 novembre 2002, leur notifiée par courrier recommandé expédié le même jour, que leur demande avait été rejetée comme étant manifestement infondée au motif que leur crainte de représailles de la part de la famille de Madame … ne rentrerait pas dans les prévisions de la Convention de Genève pour avoir trait à des motifs essentiellement économiques et privés.

Le recours gracieux formé par le mandataire des époux … à l'encontre de la décision ministérielle prévisée du 4 novembre 2002 ayant fait l’objet d’une décision confirmative du ministre datant du 23 décembre 2002, les époux … ont fait introduire un recours tendant à l'annulation des décisions ministérielles prévisées des 4 novembre et 23 décembre 2002 par requête déposée en date du 30 janvier 2003.

Etant donné que l'article 10 (3) de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1.

d'une procédure relative à l'examen d'une demande d'asile, 2. d'un régime de protection temporaire, dispose expressément qu'en matière de demandes d'asile déclarées manifestement infondées au sens de l'article 9 de la loi précitée de 1996, seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives, le tribunal est compétent pour connaître du recours introduit, lequel est également recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi, étant entendu que la décision confirmative sur recours gracieux du 23 décembre 2002 fut notifiée aux demandeurs par courrier recommandé expédié, suivant les annotations figurant au dossier, le 30 décembre 2002.

A l’appui de leur recours, les demandeurs font exposer que leur départ depuis leur pays d’origine, en l’occurrence le Kosovo, aurait été motivé notamment par le fait qu’ils auraient cherché à éviter de graves problèmes à cause de leur futur mariage intervenu en violation d’une certaine coutume suivant laquelle le père d’une femme serait en droit de choisir, en lieu et place de cette dernière, son époux. Dans la mesure où Madame … risquerait ainsi de devoir épouser, en cas de retour dans son pays d’origine, un homme choisi contre sa volonté par son père et qu’en raison de son mariage avec Monsieur …, elle serait exposée à des représailles de la part de son père, les demandeurs estiment que ce serait à tort que le ministre a considéré leur demande comme étant manifestement infondée, alors que les circonstances par eux avancées permettraient de regarder Madame … comme appartenant à « un groupe particulièrement vulnérable » au sens de la Convention de Genève.

Le délégué du Gouvernement estime que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New-York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement (…) ».

En vertu de l’article 3, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande ».

Il se dégage de la disposition prérelatée qu’il incombe au demandeur d’asile de soumettre aux autorités compétentes des éléments suffisamment précis permettant à celles-ci d’apprécier la réalité de la crainte de persécution par lui invoquée, de sorte que l’absence de production de tels éléments doit avoir pour conséquence que la demande d’asile est à déclarer manifestement infondée.

Le tribunal doit partant examiner, sur base de l’ensemble des pièces du dossier et des renseignements qui lui ont été fournis, si les faits pouvaient en espèce être être qualifiés de manifestement dénués de fondement par le ministre.

En l’espèce, l’examen des faits et motifs invoqués par les demandeurs à l’appui de leur demande d’asile amène le tribunal à conclure qu’ils n’ont manifestement pas établi, ni même allégué, des raisons personnelles suffisamment précises de nature à établir dans leur chef l’existence d’une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève dans leur pays de provenance, à savoir le Kosovo. - En effet, les craintes de représailles invoquées par les demandeurs à l’appui de leur recours sont d’ordre exclusivement privé et familial, Monsieur … ayant par ailleurs précisé lors de son audition qu’il veut « l’asile économique », qu’il a uniquement peur de la famille de sa femme et qu’il n’avait pas d’autre raison pour demander l’asile.

Le tribunal est partant amené à constater que les demandeurs restent en défaut de faire état d’une crainte de persécution rentrant concrètement dans les prévisions de la Convention de Genève.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le ministre a valablement pu retenir que la demande d’asile des époux … est à rejeter comme étant manifestement infondée, de sorte que le recours sous examen est à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 18 février 2003 par :

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M.Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 3


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15921
Date de la décision : 18/02/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-02-18;15921 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award