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12/02/2003 | LUXEMBOURG | N°15237

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 12 février 2003, 15237


Tribunal administratif N° 15237 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 août 2002 Audience publique du 12 février 2003 Requête de Monsieur …, … en présence du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines en matière de désignation d’un commissaire spécial (exécution du jugement du 21 janvier 2002, n° 12873a du rôle)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15237 du rôle et déposée au greffe du tribunal admi

nistratif en date du 14 août 2002 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tab...

Tribunal administratif N° 15237 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 août 2002 Audience publique du 12 février 2003 Requête de Monsieur …, … en présence du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines en matière de désignation d’un commissaire spécial (exécution du jugement du 21 janvier 2002, n° 12873a du rôle)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15237 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 14 août 2002 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, conseiller de direction adjoint auprès de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, demeurant à L-…, tendant à la désignation d’un commissaire spécial en vue de l’exécution du jugement inscrit sous le numéro 12873a du rôle, rendu par le tribunal administratif en date du 21 janvier 2002 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 28 octobre 2002 par Maître André LUTGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Yves TAPPELA, en remplacement de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 30 octobre 2002 portant signification de ce mémoire à Monsieur … au domicile élu par lui en l’étude de Maître Jean-

Marie BAULER;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 27 novembre 2002 par Maître Jean-Marie BAULER au nom de Monsieur … ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 27 décembre 2002 par Maître André LUTGEN pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 27 décembre 2002 portant signification de ce mémoire à Monsieur … ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement dont l’exécution fait l’objet de la requête introductive d’instance ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Jean-Marie BAULER en ses plaidoiries à l’audience publique du 8 janvier 2003.

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Par décision du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, ci-

après désigné par « le directeur », matérialisée par deux courriers datant respectivement des 3 octobre et 15 décembre 2000, Monsieur … fut changé d’affectation à travers sa mutation à partir de la direction de l’Enregistrement « au service du contrôle extérieur de l’administration », le service ainsi désigné étant suivant son intitulé exact le « service d’imposition et de contrôle de l’impôt sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, section du contrôle des redevables des mêmes impôts ».

Le recours contentieux introduit par Monsieur … à l’encontre de ladite décision par requête déposée en date du 7 février 2001 s’est soldé par un jugement du tribunal administratif inscrit sous le numéro 12873a du rôle datant du 21 janvier 2002, aux termes duquel la décision litigieuse du directeur, concrétisée par ses courriers des 3 octobre et 15 décembre 2000, fut annulée pour violation de la loi. Ledit jugement n’ayant pas été frappé d’appel, Monsieur …, par l’intermédiaire de son mandataire, sollicita par courrier du 29 janvier 2002 sa réintégration dans son ancien bureau et dans ses fonctions antérieurement exercées.

En date du 6 février 2002, le directeur refusa de faire droit à cette demande dans les termes suivants :

« Etant donné que vous n’étiez pas d’accord avec ma décision de travailler au sein du Service Anti-Fraude, j’ai le regret de vous informer que vous ne déménagerez provisoirement pas dans le nouveau bâtiment « Omega » dans lequel seront regroupés une partie des services de l’administration. Vous resterez dans votre bureau actuel.

Mis à part les attributions de « contractual manager » qui resteront dans le Service Anti-Fraude c’est-à-dire aux mains de Monsieur …, vous êtes réhabilité dans toutes les attributions que j’ai dû déléguer à d’autres fonctionnaires en cours de votre maladie ».

Estimant que ladite décision serait intervenue en violation du jugement du tribunal administratif prévisé du 21 janvier 2002, Monsieur … fit introduire, par requête déposée en date du 14 août 2002, une demande en application de l’article 84 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif afin de voir désigner un commissaire spécial pour prendre en lieu et place du directeur les mesures nécessaires à sa réintégration.

Les questions de procédure étant à toiser avant celles touchant le fond du litige, il y a lieu d’examiner d’abord le moyen soulevé par l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg dans son mémoire en duplique tendant à voir écarter des débats le mémoire en réplique déposé par la partie demanderesse en date du 27 novembre 2002.

La partie défenderesse se prévaut à cet égard des dispositions des alinéas (5) et (6) de l’article 5 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives pour soutenir que le mémoire en réplique ne lui aurait pas été communiqué dans les formes prévues par la loi et dans le délai d’un mois à partir de la communication de son mémoire en réponse à la partie demanderesse.

Il relève plus particulièrement que dans l’hypothèse où l’Etat est représenté non pas par un délégué du Gouvernement, mais par un mandataire constitué, les mémoires de la partie adverse, conformément aux dispositions des articles 8 (1) et 10 de la prédite loi du 21 juin 1999, seraient à communiquer à celui-ci soit moyennant signification par ministère d’huissier, soit par notification par voie postale, soit encore par voie directe, mais qu’en l’espèce, le mandataire du demandeur a déposé son mémoire en réplique en date du 27 novembre 2002 au greffe du tribunal administratif sans pour autant procéder à sa communication au mandataire de l’Etat suivant l’un des modes prévus par la loi.

Il est constant que l’article 10 de la loi du 21 juin 1999 précitée dispose d’une manière générale que les communications entre avocats constitués peuvent être faites moyennant signification par ministère d’huissier ou notification par voie postale ou par voie directe, dressant ainsi un éventail de possibilités de communication auxquelles les avocats constitués peuvent avoir recours en matière de procédure devant les juridictions administratives.

L’article 8 (1) de la même loi dispose de son côté que le dépôt et la signification des mémoires en réponse, en réplique et en duplique produits par les parties autres que le délégué du Gouvernement se font d’après les règles fixées aux articles 2 et 4 pour la requête introductive.

Dans la mesure où la question litigieuse a trait précisément à la production d’un mémoire en réplique par « une partie autre que le délégué du Gouvernement », ainsi définie par les dispositions prérelatées de l’article 8 (1) de la loi de procédure, il y a dès lieu de se référer aux dispositions notamment de l’article 4 de la même loi, auxquelles il est expressément renvoyé à ce sujet.

L’hypothèse spécifique, vérifiée en l’espèce, où la partie défenderesse est l’Etat, étant expressément prévue par l’article 4 (3) de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée qui dispose que « le dépôt de la requête vaut signification à l’Etat. Il en est de même pour le dépôt des mémoires subséquents », il y a lieu de constater que la loi prévoit ainsi de manière expresse et non équivoque que par rapport à l’Etat pris en sa qualité de partie défenderesse, le simple dépôt tant de la requête que des mémoires subséquents vaut signification, sans opérer de distinction suivant que l’Etat est représenté par un avocat ou par un délégué du Gouvernement.

Dans la mesure où l’article 10 de la loi du 21 juin 1999 précitée, invoqué par l’Etat à l’appui de son moyen sous examen, traite d’une manière générale des communications entre avocats constitués, sans distinguer suivant la nature des parties représentées, tandis que l’article 4 (3) de la même loi, auquel il est expressément renvoyé par la loi au sujet de la signification des mémoires, énonce une règle de procédure précise en matière de signification ayant trait à l’hypothèse spécifique où l’Etat est partie défenderesse, il y a dès lors lieu d’admettre que ces dernières dispositions sont à considérer comme étant spéciales et partant dérogatoires par rapport à celles prévisées de l’article 10 de la même loi, ceci au-delà de toute question susceptible de se poser par ailleurs quant au principe de l’égalité des armes entrevu notamment à partir du privilège procédural ainsi accordé à l’Etat, plus particulièrement dans l’hypothèse où il est représenté par un avocat à la Cour, pareillement aux autres plaideurs en matière administrative, cette question n’ayant pas été autrement évoquée en cause.

Le mémoire en réplique de la partie défenderesse ayant été déposé au greffe du tribunal administratif en date du 27 novembre 2002, soit dans le mois de la signification du mémoire en réponse de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, ledit mémoire n’est partant pas à écarter pour cause de dépôt tardif, voire de défaut de signification valable à l’Etat. Cette conclusion ne saurait être énervée par le fait que la partie défenderesse ne s’est vu communiquer ledit mémoire en réplique qu’en date du 6 décembre 2002 par la voie du greffe, l’incidence de cette date de communication étant limitée au seul point de départ du délai conféré à la partie défenderesse pour dupliquer à son tour.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir que le directeur serait resté en défaut de prendre une décision pour se conformer au jugement du tribunal administratif prédit du 21 janvier 2002.

L’Etat du Grand-Duché de Luxembourg fait rétorquer que ce serait à tort que Monsieur … estime qu’il y aurait lieu à nomination d’un commissaire spécial, en exposant que s’agissant des conséquences à réserver à un jugement d’annulation, la doctrine distinguerait plusieurs hypothèses, à savoir 1) celles où le remplacement de la décision annulée est obligatoire, 2) celles où le remplacement de la décision annulée se réalise de façon automatique et 3) celles où le remplacement de la décision annulée est facultatif, pour soutenir qu’en l’espèce, il s’agirait d’un cas d’annulation d’une décision de réaffectation ne rentrant pas dans le cadre des hypothèses de remplacement obligatoire. Il fait valoir plus particulièrement que la décision annulée aurait été constitutive d’un acte que l’autorité administrative n’était pas tenue d’édicter, étant donné qu’antérieurement à la décision litigieuse du 3 octobre 2000, Monsieur …, nommé conseiller de direction adjoint à l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, n’aurait fait l’objet d’aucune décision d’affectation à un service déterminé, de sorte que l’on ne saurait considérer que la décision annulée aurait modifié, abrogé ou retiré une quelconque disposition existante. Dans la mesure où le directeur aurait en l’espèce choisi de ne pas prendre de nouvelle décision d’affectation du demandeur à un service déterminé, l’Etat estime que les conditions de mise en œuvre de l’article 84 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée ne seraient pas remplies et que la demande sous analyse serait à déclarer irrecevable, sinon malfondée, cette conclusion se trouvant à son sens confirmée par le fait que le tribunal, dans son jugement du 21 janvier 2002, n’a pas renvoyé l’affaire devant l’autorité compétente.

La partie défenderesse relève en outre que la décision du 3 octobre 2000, annulée par la voie contentieuse, n’aurait opéré aucun changement au niveau des attributions de Monsieur …, l’attribution de « contractual manager » lui ayant été retirée aux termes d’une autre décision, datant en l’occurrence du 5 février 2001, de sorte que l’autorité de la chose jugée invoquée à l’appui de la requête sous analyse ne saurait être considérée comme ayant trait aux attributions de Monsieur ….

Quant au maintien du demandeur dans le bureau sis 7, rue du Plébiscite à Luxembourg, la partie défenderesse fait plaider que la détermination du bureau qu’un fonctionnaire est appelé à occuper constituerait une mesure de pure organisation matérielle et que le tribunal, en ayant statué que l’accomplissement des tâches confiées à Monsieur … ne se concevrait pas, en l’état de la législation, dans le cadre de l’activité de contrôle confiée à la section à laquelle il avait été affecté par la décision annulée, ne se serait pas pour autant prononcé sur la question matérielle de la répartition du personnel de l’administration concernée dans les locaux de celle-ci, de sorte que cette question pourrait être réglée librement par le directeur.

Dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse fait valoir que soumettre la recevabilité de la procédure en nomination d’un commissaire spécial à la mention expresse dans le jugement concerné du renvoi du dossier devant l’autorité compétente risquerait d’ôter tout effet à une décision d’annulation, de sorte qu’il y aurait lieu de considérer qu’au-delà du libellé de l’article 84, la procédure introduite serait recevable.

Quant au fond, elle expose que conformément à ce qui aurait été retenu par le tribunal dans son jugement du 21 janvier 2002, le Service Anti-Fraude n’existerait pas encore juridiquement au sein de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, de sorte que le maintien du demandeur dans son bureau actuel, rue du Plébiscite, ne ferait que confirmer son affectation au service du contrôle extérieur, laquelle fut pourtant annulée par le tribunal administratif.

Concernant ensuite l’affirmation faite par la partie défenderesse selon laquelle le demandeur aurait été réhabilité en date du 6 février 2002 dans toutes ses attributions autres que celles de responsable pour la maintenance du produit ESKORT, il fait valoir qu’elle serait dénuée de toute véracité, alors que deux attributions auraient été déléguées à d’autres fonctionnaires, à savoir la maintenance du produit ESKORT et la fonction de responsable Euro, étant entendu qu’en ce qui concerne le volet externe de la fonction de responsable Euro, à savoir les participations aux réunions du groupe de coordination et aux tables rondes, force serait de constater que la dernière réunion du groupe de coordination aurait eu lieu le 20 janvier 2001 et qu’aucune réunion aux tables rondes n’aurait eu lieu en 2001 et 2002 . Quant au volet interne de cette fonction, le demandeur relève que sa mutation au service du contrôle extérieur y aurait mis un terme et que cette situation aurait été connue par le directeur au plus tard en date du 29 juin 2001. Il estime qu’au vu du fait que plusieurs attributions lui auraient été retirées, dont notamment la délégation de signature pour la correspondance journalière, et qu’il lui serait impossible d’en exercer d’autres, notamment la délégation de signature pour certains actes administratifs et la surveillance générale des deux services de direction, en raison de la localisation de son bureau, force serait de constater qu’il ne disposerait plus, depuis le 1er janvier 2001, d’aucune compétence, ni attribution professionnelle et que le directeur n’aurait pas pu valablement procéder de la sorte sans violer de manière flagrante le jugement du tribunal intervenu en date du 21 janvier 2002.

La partie défenderesse fait dupliquer que le tribunal n’aurait nullement dégagé l’incompatibilité pour un conseiller de direction adjoint, au regard des articles 5 et 9 (4) de la loi du 20 mars 1970 portant réorganisation de l’administration de l’enregistrement et des domaines, d’être muté à un service d’exécution, mais qu’après avoir levé une incertitude ayant pu exister quant au service auquel le demandeur avait été affecté aux termes des décisions par lui toisées, le tribunal aurait en réalité jugé que les tâches confiées à Monsieur … aux termes des décisions litigieuses ne s’inscriraient pas dans les prévisions de l’article 9 (1) de la loi du 20 mars 1970, alors que « seule l’activité de contrôle proprement dite » se trouverait confiée à la section dite du contrôle extérieur. Elle en déduit que le tribunal aurait ainsi prononcé l’annulation des décisions litigieuses, non pas au regard du grade que revêtait le fonctionnaire concerné tel qu’allégué par le demandeur, mais au regard de l’incompatibilité des attributions confiées à l’intéressé avec le travail relevant du « service du contrôle extérieur ».

La partie défenderesse fait valoir en outre que le directeur ne serait pas obligé de se faire assister par le demandeur dans la surveillance et la direction des fonctionnaires attachés à la direction, mais qu’au contraire, il serait libre de décider si et dans quelle mesure il a besoin d’assistance dans l’exercice de ses tâches de direction et de surveillance, la seule contrainte imposée à cet égard au directeur étant celle de choisir ses assistants parmi les fonctionnaires de la carrière supérieure de l’attaché de Gouvernement.

Quant au fond, la partie défenderesse maintient dans son mémoire en duplique que depuis le 6 janvier 2002, le demandeur se trouverait réhabilité dans toutes ses attributions à l’exception de celle de « contractual manager » et que par ailleurs l’allégation de ce dernier suivant laquelle une délégation de signature pour la correspondance journalière lui aurait été retirée serait contraire à la vérité. L’Etat fait préciser à cet égard que s’agissant de la signature de la correspondance courante, le directeur y aurait mis fin par une note de service du 22 février 2000, donc antérieure à la décision de réaffectation désormais annulée et que, concernant la délégation de signature donnée par le directeur pour les actes de procédure, le demandeur, bien que s’étant vu confier une telle délégation de signature à un moment donné, n’aurait pas exercé ce pouvoir, alors qu’il ne se serait trouvé en charge d’aucune procédure dans le cadre de laquelle il aurait pu le faire.

Concernant la surveillance générale des deux services de direction et l’impossibilité alléguée d’exercer l’attribution en question en raison de la localisation du bureau actuel du demandeur, l’Etat fait préciser qu’à aucun moment Monsieur … ne se serait vu confier pareille charge de surveillance.

Conformément aux dispositions de l’article 84 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée « lorsqu’en cas d’annulation ou de réformation, coulée en force de chose jugée, d’une décision administrative qui n’est pas réservée par la Constitution à un organe déterminé, la juridiction ayant annulé ou réformé la décision a renvoyé l’affaire devant l’autorité compétente et que celle-ci omet de prendre une décision en se conformant au jugement ou à l’arrêt, la partie intéressée peut, à l’expiration d’un délai de trois mois à partir du prononcé de l’arrêt ou du jugement, saisir la juridiction qui a renvoyé l’affaire en vue de charger un commissaire spécial de prendre la décision aux lieu et place de l’autorité compétente et aux frais de celle-ci ».

Il se dégage du libellé de la disposition prérelatée que l’intervention d’un commissaire spécial n’est prévue que dans l’hypothèse particulière où l’autorité compétente à laquelle l’affaire fut renvoyée à la suite d’une annulation ou d’une réformation est appelée à émettre une nouvelle décision afin de se conformer au jugement ou à l’arrêt en question, cette hypothèse se confondant en pratique le plus souvent avec le cas d’une décision annulée ou réformée qui a toisé une demande adressée à l’administration.

En l’espèce, il est constant à partir des faits à la base du jugement rendu en date du 21 janvier 2002 que la décision alors litigieuse du directeur, véhiculée par deux courriers datant respectivement du 3 octobre et du 15 décembre 2000, était intervenue d’office et en dehors de l’initiative de la personne concernée, de sorte que son annulation, prononcée de manière pure et simple et sans restriction, a abouti concrètement à l’anéantissement de l’ensemble des éléments décisionnels contenus dans les courriers directoriaux des 3 octobre et 15 décembre 2000 en question, sans que la prise d’une nouvelle décision du directeur n’ait été requise en exécution dudit jugement.

Dans la mesure où le directeur a retenu dans son courrier du 3 octobre 2000 que les attributions de Monsieur … restent les mêmes et que les seuls éléments décisionnels proprement dits contenus dans les courriers litigieux des 3 octobre et 15 décembre 2000 se sont limités à l’affectation du demandeur au « service du contrôle extérieur » à partir du 1er janvier 2001, ainsi qu’à l’attribution à ce dernier du bureau n° 503 au cinquième étage à Luxembourg, 7, rue du Plébiscite, le demandeur, par l’effet du jugement d’annulation du 21 janvier 2002 fut concrètement désaffecté du « service de contrôle extérieur », de même que l’attribution d’un nouveau bureau décidée par le directeur en date du 15 décembre 2000 est à considérer comme étant nulle et non avenue, cet élément décisionnel propre au courrier du directeur du 15 décembre 2000 ayant en effet également fait l’objet de l’annulation globalement prononcée. Quant aux attributions du demandeur, force est de constater qu’elles n’ont été touchées ni par les décisions annulées par jugement du 21 janvier 2002, ni a fortiori par les effets dudit jugement.

Quant à l’objet de la requête sous examen, force est de constater qu’au-delà de toute question relative à la nécessité de prendre une nouvelle décision afin de se conformer au jugement du 21 janvier 2002, le directeur a en l’espèce pris la décision de maintenir le demandeur dans le bureau lui attribué par la décision annulée du 15 décembre 2000, ainsi que de le réhabiliter dans toutes ses attributions à l’exception de celle de contractual manager du projet ESKORT, cette décision se dégageant de son courrier du 6 février 2002 faisant suite précisément aux interrogations de Monsieur … quant aux conséquences réservées par le directeur au jugement non appelé du tribunal administratif du 21 janvier 2002.

Dans la mesure où, au moment de l’introduction de la demande en désignation d’un commissaire spécial, l’autorité administrative avait dès lors déjà statué en exécution dudit jugement, la demande basée sur les dispositions de l’article 84 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée est irrecevable, étant entendu que l’analyse de la question de savoir si cette décision s’est conformée en tous points audit jugement est appelée à être effectuée dans le cadre du recours dont le tribunal fut également saisi par requête inscrite sous le numéro 15238 du rôle et toisée par jugement de ce jour (cf. trib. adm. 17 décembre 2001, n° 12896 du rôle, Pas. adm. 2002, V° Procédure contentieuse, n° 317).

La procédure devant les juridictions administratives étant essentiellement écrite, le tribunal est amené à statuer contradictoirement encore que l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg n’ait pas été représenté à l’audience à laquelle l’affaire fut plaidée, l’absence de son mandataire y ayant été excusée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, déclare la requête irrecevable ;

condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 12 février 2003 par:

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 7


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15237
Date de la décision : 12/02/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-02-12;15237 ?

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