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12/02/2003 | LUXEMBOURG | N°14855

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 12 février 2003, 14855


Numéro 14855 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 avril 2002 Audience publique du 12 février 2003 Recours formé par les époux … et … …-…, … contre des bulletins de l’impôt sur le revenu, d’établissement de la valeur unitaire et de l’impôt commercial communal émis par le bureau d’imposition de … en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt commercial communal

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JUGEMENT

Vu la requête, in

scrite sous le numéro 14855 du rôle, déposée le 30 avril 2002 au greffe du tribunal administratif par Maît...

Numéro 14855 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 avril 2002 Audience publique du 12 février 2003 Recours formé par les époux … et … …-…, … contre des bulletins de l’impôt sur le revenu, d’établissement de la valeur unitaire et de l’impôt commercial communal émis par le bureau d’imposition de … en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt commercial communal

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 14855 du rôle, déposée le 30 avril 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître André ELVINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, et de son épouse Madame …, …, les deux demeurant ensemble à …, tendant à la réformation des bulletins de l'impôt commercial communal dressés pour les années 1991 à 1998, des bulletins de l'impôt sur le revenu dressés pour les années 1991 à 1998, de même que des bulletins d'établissement de la valeur unitaire établis au 1er janvier respectivement des années 1992, 1995, 1996 et 1998, émis par le bureau d'imposition de … et notifiés le 15 février 2001;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 juillet 2002;

Vu les pièces versées en cause et notamment les bulletins entrepris;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître André ELVINGER et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 octobre 2002.

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Suite aux dépôts successifs par les époux … et … …-… de leurs déclarations de l’impôt sur le revenu, d’établissement du bénéfice commercial et pour l’impôt commercial et de l’impôt sur la fortune pour les années 1991 à 1998, le service de révision de l’administration des Contributions directes procéda au cours de l’année 2001 à une révision de la comptabilité de l’entreprise de fabrication et de vente de meubles et de cercueils, exploitée sous l’enseigne commerciale « … –…» par Monsieur …, portant sur ces mêmes années d’imposition.

Comme suite à l’envoi, par le réviseur …, d’un projet de rapport en date du 30 août 2000, Monsieur … prit position quant aux constatations et aux redressements y contenus par courrier du 1er septembre 2000, réceptionné par le réviseur le 22 septembre suivant.

Après une entrevue finale en date du 25 septembre 2000, le réviseur finalisa le même jour son rapport en tenant compte dans une certaine mesure du résultat de cette entrevue. Le dit rapport retient qu’il y aurait lieu d’opérer les révisions suivantes par rapport aux déclarations des époux …-… :

 2.406.107.- LUF pour l'année 1991. dont 1.000.000.- LUF à titre de majoration des ventes, 800.000.- LUF à titre de reprise sur frais généraux, 480.000.- LUF à titre de reprise d'impôt commercial déduit par frais généraux, 61.881.- LUF à titre d'achats privés intégrés au résultat et 64.226.-

LUF à titre de redressement d'intérêts créditeurs.

 3.687.641.- LUF pour l'année 1992 dont 1.000.000.- LUF à titre de majoration des ventes, 1.700.000.- LUF à titre de reprise sur frais généraux, 645.000.- LUF à titre de reprise d'impôt commercial déduit par frais généraux, 49.366.- LUF à titre d'achats privés intégrés au résultat, 95.806.-

LUF à titre de commission épouse non déductible et 197.469.- LUF à titre de redressement d'intérêts créditeurs.

 4.547.321.- LUF pour l'année 1993 dont 1.400.000.- LUF à titre de majoration des ventes, 1.800.000.- LUF à titre de reprise sur frais généraux, 700.000.- LUF à titre de reprise d'impôt commercial déduit par frais généraux, 643.182.- LUF à titre d'achats privés intégrés au résultat et 4.139.-

LUF à titre de redressement d'intérêts créditeurs.

 3.984.869.- LUF pour l'année 1994, dont 1.400.000.- LUF à titre de majoration des ventes, 1.780.000.- LUF à titre de reprise sur frais généraux, 700.000.- LUF à titre de reprise d'impôt commercial déduit par frais généraux, 95.587.- LUF à titre d'achats privés intégrés au résultat, 4.808.-

LUF à titre de dividendes et 4.474.- LUF à titre de redressement d'intérêts créditeurs.

 4.561.982.- LUF pour l'année 1995, dont 1.800.000.- LUF à titre de majoration des ventes, 327.643.- LUF à litre de majoration des prélèvements privés en nature, 1.730.000.- LUF à titre de reprise sur frais généraux, 700.000.- LUF à titre de reprise d'impôt commercial et 4.339.- LUF à titre de redressement d'intérêts créditeurs.

 4.627.867.- LUF pour l'année 1996, dont 1.800.000.- LUF à titre de majoration des ventes, 1.730.000.- LUF à titre de reprise sur frais généraux, 700.000.- LUF à titre de reprise d'impôt commercial, 394.717.- LUF à titre d'achats privés intégrés au résultat et 3.150.- LUF à titre de dividendes.

 4.793.694.- LUF pour l'année 1997, dont 1.800.000.- LUF à titre de majoration des ventes, 62.660.- LUF à titre de majoration des prélèvements privés en nature, 1.480.000.- LUF à titre de reprise pour frais généraux, 700.000.- LUF à titre de reprise d'impôt commercial, 239.054.- LUF à titre d'achats privés intégrés au résultat, 511.000.- LUF à titre de dépréciation de stock et 980.- LUF à titre de dividendes.

 4.761.229.- LUF pour l'année 1998, dont 1.800.000.- LUF à titre de majoration des ventes, 1.650.000.- LUF à titre de reprise sur frais généraux, 700.000.- LUF à titre de reprise d'impôt commercial, 525.000.- LUF à titre de dépréciation de stock et 86.229.- LUF à titre d’achats privés intégrés au résultat.

Par courrier du 23 octobre 2000, Monsieur … prit position relativement aux constatations et conclusions figurant dans le rapport définitif de révision du 25 septembre 2000.

Le bureau d’imposition … informa les époux …-…, sur pied des disposition du paragraphe 205 (3) de la loi générale des impôts, dite « Abgabenordnung », en abrégé « AO », par lettre du 24 octobre 2000, des points sur lesquels il entendait s’écarter des déclarations d’impôt par eux soumises pour les années 1991 à 1998 et les invita à communiquer leurs objections quant aux redressements envisagés. D’après les indications non autrement énervées du dossier fiscal, Monsieur … s’est présenté en personne au bureau d’imposition pour soumettre ses observations y relatives.

Le 15 février 2001, le bureau d'imposition de … a émis à charge des époux …-… des bulletins de l'impôt commercial communal dressés pour les années 1991 à 1998, des bulletins de l'impôt sur le revenu dressés pour les années 1991 à 1998, de même que des bulletins d'établissement de la valeur unitaire établis au 1er janvier 1992, au 1er janvier 1995, au 1er janvier 1996 et au 1er janvier 1998, lesquels opérèrent l’ensemble des redressements tels qu’annoncés à travers le rapport de révision du 25 septembre 2000 et le courrier du 24 octobre 2000.

Le 10 mai 2001, les époux …-… ont introduit une réclamation contre les prédits bulletins auprès du directeur de l'administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur ».

Aucune décision du directeur n'étant intervenue dans le délai légal de six mois prévu par l'article 8 (3) 3 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation de juridictions de l'ordre administratif, les époux …-… ont introduit, par requête déposée le 30 avril 2002, inscrite sous le numéro 14855 du rôle, un recours contentieux tendant au redressement des bulletins d'impôt en question, et par requête du même jour, inscrite sous le numéro 14856 du rôle, ils ont introduit une demande tendant à ordonner le sursis à exécution des prédits bulletins, cette dernière ayant été déclarée non fondée par ordonnance du président du tribunal administratif du 15 mai 2002 (n° 14856 du rôle).

Au vœu des dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8 (3) 3. de la loi précitée du 7 novembre 1996, le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur le recours dirigé contre des bulletins de l'impôt sur le revenu, de l'impôt commercial communal et d'établissement de la valeur unitaire déférés en cas de silence vérifié du directeur de plus de six mois suite à une réclamation dûment introduite par le contribuable.

Le délégué du Gouvernement soulève le moyen d’irrecevabilité du défaut d’intérêt à agir dans le chef de Madame … à l’encontre des bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal et des bulletins d’établissement de la valeur unitaire de l’entreprise, lesquels ne seraient destinés qu’à Monsieur … et n’affecteraient partant que sa seule situation fiscale à l’exclusion de celle de Madame ….

Au vœu du paragraphe 238 AO, « befugt, ein Rechtsmittel einzulegen, ist der, gegen den der Bescheid oder die Verfügung ergangen ist ». Il résulte de cette disposition que seul un contribuable à qui un bulletin d’impôt est destiné et dont ce dernier affecte la situation fiscale a qualité pour réclamer contre ce bulletin.

En l’espèce, il ressort des éléments en cause que Monsieur … a été considéré comme exploitant seul l’entreprise prévisée au cours des années d’imposition en cause et que les bulletins d’établissement de l’impôt commercial communal et d’établissement de la valeur unitaire pour les mêmes années d’imposition le renseignent comme seul destinataire des fixations de valeurs y contenues et redevable des cotes d’impôt y fixées. Par voie de conséquence, Madame … ne peut être qualifiée de destinataire de ces mêmes bulletins, de sorte que le recours introduit en son nom est à déclarer irrecevable dans la mesure où il entend les déférer au tribunal.

Le recours est par contre recevable pour avoir été introduit dans le formes et délai de la loi pour autant qu’introduit par Madame … à l’encontre des bulletins de l’impôt sur le revenu pour les années 1991 à 1998 lui adressés et par Monsieur … à l’égard de l’ensemble des bulletins déférés.

Quant au moyen principal relatif au rejet de la comptabilité A l’appui de leur recours, les demandeurs font valoir en ordre principal que ce serait à tort que le rapport de révision du 25 septembre 2000, à la base des redressements opérés par les bulletins déférés, a retenu que la comptabilité de l’entreprise … des années en cause ne serait pas conforme aux prescriptions du paragraphe 162 AO, de manière à ne pas pouvoir bénéficier de la présomption de régularité inscrite dans le paragraphe 208 AO. Ils relèvent que le dit rapport de révision confirmerait la réception par le réviseur des grands livres, journaux, copies de factures/clients, factures/fournisseurs et factures/frais généraux, ainsi que des extraits de comptes bancaires et inventaires, pour en déduire que l’existence de la comptabilité ne saurait être contestée quant à la nature des livres et pièces qui la constituent, alors même que certaines erreurs d’inscription auraient dû être redressées lors des entrevues et qu’ils auraient soumis certaines pièces complémentaires non comprises dans les dossiers de comptabilité seulement sur demande du réviseur.

En renvoyant à une attestation de leur comptable sur les principes appliqués pour la confection des comptes de l’entreprise …, les demandeurs affirment que les exigences formulées au paragraphe 162 AO ne constitueraient que des « Sollvorschriften » et que, dans l’appréciation de la question s’il existe une comptabilité conforme à cette disposition, il faudrait prendre en considération, à l’instar de l’article 8 du Code de commerce, la taille relativement modeste et le caractère partiellement artisanal de l’entreprise …. Il s’ensuivrait que le réviseur aurait posé certaines exigences disproportionnées quant au système de comptabilité requis, notamment en reprochant le défaut de comptabilité analytique séparant les résultats de l’atelier et du magasin et le défaut d’un « stock permanent », alors que la loi se contenterait d’un inventaire annuel. Les demandeurs dénoncent pareillement la critique du réviseur qu’ils auraient procédé à un amortissement du stock alors que la loi fiscale préverrait seulement une déduction pour dépréciation, en faisant valoir à cet égard qu’il s’agirait d’une querelle de terminologie, l’article 244 de la loi modifiée du 10 août 1915 sur les sociétés commerciales prévoyant des corrections de valeur sans spécifier si ces corrections doivent être opérées individuellement pour chaque élément de l’actif circulant ou peuvent être déduites globalement sur base de critères objectifs mais généraux, tels les changements de mode. Les demandeurs épinglent encore les exigences du réviseur quant à la répartition des postes d’achats sur les différents comptes, même si les ajustements opérés étaient sans conséquences réelles, et quant à la présence d’une caisse enregistreuse permettant d’enregistrer les réceptions de paiements en espèces, vu que les ventes d’une menuiserie avec magasin porteraient en général sur des articles peu nombreux, mais relativement importants, contrairement par exemple à un commerce de détail.

Le délégué du Gouvernement rétorque que la présomption de véracité dont bénéficie la comptabilité commerciale supposerait que les livres soient tenus selon les règles et que le but de la révision serait précisément de vérifier si les conditions de la présomption sont remplies. Etant donné que le rapport du réviseur constaterait en l’espèce un certain nombre d’imperfections non contestées de la comptabilité qui engendreraient l’incertitude, la taxation serait justifiée en son principe.

Il est constant en cause que l’entreprise exploitée par Monsieur … constitue une activité commerciale au sens de l’article 1er du code de commerce, de manière que Monsieur … était tenu, au vœu du paragraphe 160 AO, de satisfaire à l’obligation de tenir une comptabilité en partie double conforme aux articles 8 à 17 du code de commerce également dans l’intérêt de l’imposition de cette entreprise.

Le paragraphe 162 AO comporte dans ses paragraphes (2) à (7) des prescriptions complémentaires quant au caractère régulier d’une comptabilité en disposant que :

« (1) Wer nach den Vorschriften der §§ 160 und 161 oder sonst nach den Steuergesetzen Bücher zu führen oder Aufzeichnungen zu machen hat, soll die folgenden Vorschriften beachten.

(2) Die Eintragungen in die Bücher sollen fortlaufend, vollständig und richtig bewirkt werden. Der Steuerpflichtige soll sich einer lebenden Sprache und der Schriftzeichen einer solchen bedienen.

(3) Geschäftsbücher sollen keine Konten enthalten, die auf einen falschen oder erdichteten Namen lauten.

(4) Die Bücher sollen, soweit es geschäftsüblich ist, gebunden und Blatt für Blatt oder Seite für Seite mit fortlaufenden Zahlen versehen sein.

(5) An Stellen, die der Regel nach zu beschreiben sind, sollen keine 1eeren Zwischenräume gelassen werden. Der ursprüngliche Inhalt einer Eintragung soll nicht mittels Durchstreichens oder auf andere Weise unleserlich gemacht, es soll nicht radiert, auch sollen solche Veränderungen nicht vorgenommen werden, deren Beschaffenheit es ungewiss lässt, ob sie bei der ursprünglichen Eintragung oder erst später vorgenommen sind.

(6) In Bücher soll, wo dies geschäftsüblich ist, mit Tinte eingetragen werden. Trägt der Steuerpflichtige nach vorläufigen Aufzeichnungen ein, so soll er diese aufbewahren.

Belege sollen mit Nummern versehen und gleichfalls aufbewahrt werden.

(7) Kasseneinnahmen und -ausgaben sollen im geschäftlichen Verkehr mindestens täglich aufgezeichnet werden ».

Le service de révision de l’administration des Contributions directes a procédé en l’espèce à une vérification de la comptabilité de l’entreprise … sur pied du paragraphe 162 (9) AO qui, en disposant que « das Finanzamt kann prüfen ob die Bücher und Aufzeichnungen fortlaufend, vollständig und formell und sachlich richtig geführt werden », permet le contrôle approfondi d’une comptabilité dans le but de savoir si elle a été tenue en conformité avec les exigences ci-avant tracées et si elle peut dès lors bénéficier de la présomption de véracité érigée par le paragraphe 208 (1) AO.

En l’espèce, le refus de la reconnaissance du caractère régulier de la comptabilité de l’entreprise … est fondé sur le rapport de révision du 25 septembre 2000 et notamment sur le défaut non autrement contesté des inventaires et sur l’inscription aux bilans de stocks simplement taxés pour les années 1991 à 1993. Ce défaut constitue un manquement à l’obligation prévue par l’article 10 du code de commerce requérant de tout commerçant l’établissement annuel d’un inventaire complet des avoirs et droits de toute nature et de ses dettes, obligations et engagements de toute nature, de sorte à affecter la régularité de la comptabilité de l’entreprise … tant en la forme qu’au fond, étant donné qu’un des documents de base d’une comptabilité fait ainsi défaut en ce que la simple taxation des stocks empêche une fixation correcte des bénéfices des années concernées, voire des exercices subséquents respectifs. Il ressort en outre des constatations non énervées du réviseur que les livres de caisse des exercices soumis à vérification comportaient des lacunes par rapport aux comptes tenus par le comptable de l’entreprise …. Ces éléments constituent des indices de nature à faire ébranler la régularité tant formelle qu’au fond de la comptabilité de l’entreprise … et à autoriser le réviseur à procéder à des vérifications plus poussées pour contrôler si les éléments de la comptabilité à sa disposition permettent effectivement de retracer l’ensemble des dettes et créances ainsi que la situation de fortune de l’entreprise ….

Cette conclusion n’est pas ébranlée par le moyen des demandeurs tendant à reprocher au réviseur d’avoir formulé des exigences disproportionnées quant au système de comptabilité dont l’entreprise … aurait dû être dotée et plus particulièrement quant à l’absence d’une comptabilité analytique séparant le commerce de meubles et l’activité de l’atelier et à l’inexistence d’une caisse enregistreuse pour les opérations en liquide. En effet, le réviseur retient expressément sous le point H. de son rapport du 25 septembre 2000 qu’ « en ce qui concerne la caisse enregistreuse, le réviseur n’a point voulu forcer le contribuable d’en acquérir une, mais a uniquement voulu dire que le contrôle des recettes en liquide aurait pu être facilité au moyen d’une caisse enregistreuse », de manière que l’absence d’un tel équipement n’a pas été retenue per se comme motif par le réviseur pour considérer la comptabilité de l’entreprise … comme irrégulière. Pareillement, il est indifférent de savoir si l’entreprise … aurait dû disposer, en considération de son activité et de son envergure, d’une comptabilité analytique séparant les différentes branches de son activité, vu que les éléments défaillants ci-avant dégagés sont à eux seuls de nature à ouvrir la voie à une vérification approfondie de la comptabilité et à des redressements éventuels s’en suivant.

Dans la mesure où le cas d’ouverture pour la fixation de certains redressements se trouvait dès lors vérifié, la question de leur justification au fond se situe en l’espèce non pas au niveau du refus ou non de la reconnaissance du caractère régulier de la comptabilité, mais à celui du bien-fondé du résultat des redressements imposés par le réviseur.

En effet, le paragraphe 217 AO, en disposant que « (1) Soweit das Finanzamt die Besteuerungsgrundlagen (einschließlich solcher Besteuerungsgrundlagen, die für eine gesonderte Feststellung nicht vorgeschrieben ist) nicht ermitteln oder berechnen kann, hat es sie zu schätzen. Dabei sind alle Umstände zu berücksichtigen, die für die Schätzung von Bedeutung sind. (2) Zu schätzen ist insbesondere dann … wenn der Steuerpflichtige Bücher oder Aufzeichnungen, die er nach den Steuergesetzen zu führen hat, nicht vorlegen kann oder wenn die Bücher oder Aufzeichnungen unvollständig oder formell oder sachlich unrichtig sind », consacre le principe de la taxation d'office par voie d'estimation du bénéfice d'après les éléments et circonstances d'exploitation dans l'hypothèse d'une irrégularité au niveau de la comptabilité non clarifiée à suffisance de droit et de fait et confine ainsi les redressements admissibles aux éléments de bases d’imposition non déterminables à suffisance de droit ou aboutissant à un résultat hautement improbable. Il incombe partant au tribunal d’apprécier, quant aux différents redressements incriminés, si la comptabilité de l’entreprise ne permet pas la détermination correcte des bases d’imposition afférentes et si l’importance du redressement correspond au résultat probablement réalisé.

Le moyen principal des demandeurs tendant à voir reconnaître la régularité de la comptabilité de l’entreprise … doit partant être écarté comme n’étant pas fondé.

Quant aux différents redressements opérés Les demandeurs font valoir en guise de remarque préliminaire que l’estimation, au cas où elle est justifiée en son principe, ne pourrait se faire de manière discrétionnaire, mais devrait être fondée sur une prise en considération de toutes les circonstances favorables ou défavorables pour le contribuable qui ont de l’importance pour l’imposition, de manière à se rapprocher d’aussi près que possible de la réalité.

Le délégué du Gouvernement rétorque, d’une manière générale et sans prendre position quant aux différents redressements précisément mis en cause par les demandeurs, que le réviseur aurait soigneusement tenu compte de toutes les circonstances particulières à l’entreprise … et qu’il aurait laborieusement réuni des preuves notamment de ventes insuffisantes et de dépenses privées passées comme dépenses d’exploitation, de sorte que les reproches des demandeurs seraient immérités et qu’ils auraient la charge du risque pour la marge restante d’incertitude.

Quant aux majorations de ventes Les demandeurs critiquent les majorations de ventes à raison de 1.000.000 LUF par an pour les exercices 1991 et 1992, de 1.400.000 LUF par an pour les exercices 1993 et 1994, ainsi que de 1.800.000 LUF par an pour les exercices 1995 à 1998, soit pour un total de 12.000.000 LUF pour toute la période soumise au contrôle et ce par rapport à un total de bénéfices déclarés de 73.960.440 LUF pour la même période. Ils exposent que le réviseur a envisagé trois méthodes de détermination par estimation du revenu provenant de la vente de meubles. La première méthode de calcul d’après la fréquence de renouvellement du stock, écartée par le réviseur pour avoir mené à un résultat « invraisemblable », ne saurait effectivement trouver application, vu que la plus grande partie des ventes porterait sur des meubles ne figurant pas dans le stock, mais commandés sur base soit d’échantillons partiels, soit de prospectus et brochures, de sorte que cette méthode ne permettrait pas de conclure au caractère inexact des inventaires.

Quant à la seconde méthode d’estimation d’après la marge bénéficiaire (calcul effectué sur base d’échantillons de factures) visée, mais non retenue par le réviseur au motif d’une « diminution continuelle des marges déclarées », les demandeurs font valoir que cette diminution serait pourtant réelle, étant donné que les prix des biens fabriqués en atelier, d’une part, n’auraient pas suivi les augmentations régulières des salaires des ouvriers et artisans et, d’autre part, auraient subi l’effet du remplacement des anciennes équipes d’artisans retraités par de nouveaux artisans moins formés. Ils ajoutent que des fluctuations de marges résultant de facteurs économiques extérieurs ou internes seraient inévitables plus particulièrement à la fois pour l’artisanat, au vu de la régression des meubles faits sur commande face aux meubles produits industriellement, et pour le commerce du meuble, affecté par le développement des grandes surfaces partiellement spécialisées et à même de vendre à des prix inférieurs.

Concernant la troisième méthode de calcul par application d’un coefficient fixe au prix d’achat des biens telle que retenue par le réviseur pour fixer les majorations de ventes incriminées, les demandeurs exposent que le coefficient de 1,92, tel que par eux appliqué « avec encore des variations considérables selon les articles concernés » pour fixer le prix de vente affiché dans leur magasin, résulterait du règlement grand-ducal du 22 octobre 1975 concernant la fixation des prix de vente maxima dans le commerce des meubles meublants, prévoyant pour le prix de vente de meubles un plafond de coefficient de 1,67 majoré de 15% de TVA, soit 1,92 par rapport au prix d’acquisition. Ils soutiennent que ce coefficient constituerait « tout au plus un objectif, non un résultat », vu que le marché du meuble serait extrêmement compétitif et qu’ils seraient amenés à accorder sur les prix affichés des remises variant de 5 à 25%, voire jusqu’à 35% en périodes de soldes, alors que leurs clients négocieraient le plus souvent les prix. Les calculs du réviseur seraient partant faussés par la simple application du coefficient sans prise en considération de l’impact de la concurrence et des remises qui seraient pourtant systématiquement pratiquées et de notoriété publique. Les demandeurs critiquent encore que le réviseur aurait pratiqué le coefficient prévisé pour tous les produits vendus au prix d’achat sans différencier les meubles fabriqués dans le propre atelier d’ébénisterie de l’entreprise pour lesquels il faudrait se référer au prix de revient et par rapport auxquels la marge bénéficiaire n’excéderait traditionnellement pas les 15%.

Les demandeurs qualifient les redressements effectués par le réviseur d’arbitraires, vu qu’il répartirait uniformément les déficits de recettes sur les années 1995 à 1998 dégagés par les recalculs en retenant pour chacune de ces années une majoration de 1.800.000 LUF, mais se limiterait à fixer, sans aucune indication de raisons afférentes, les majorations à 1.000.000 LUF pour 1991 et 1992 et à 1.400.000 LUF pour 1993. Ils estiment que la deuxième méthode par examen d’échantillons de factures serait, malgré ses imperfections, la seule qui tiendrait compte de la réalité de certains résultats du moins de l’entreprise et qu’elle n’aurait abouti à aucune augmentation entre la marge résultant des déclarations et la marge recalculée pour les années 1995 et 1996, tandis que le réviseur n’aurait pas hésité à appliquer à cet endroit une majoration de 1.800.000 LUF par an. Pour l’année 1997, la différence entre ces deux marges serait de l’ordre de 10% et partant peu sensible pour n’accuser une divergence plus prononcée que pour l’année 1998.

Les demandeurs, tout en admettant que la méthode interne fondée sur les données disponibles au sein de l’entreprise concernée même serait légitime en son principe et qu’elle devrait être appliquée en premier lieu, critiquent le réviseur pour l’avoir appliquée de manière exclusive, sans avoir eu recours dans un deuxième temps, face à la « faiblesse » des résultats obtenus, à la méthode externe de la comparaison des marges avec celles d’autres entreprises comparables, alors que cette façon de procéder aurait permis au réviseur de se rendre compte de la structure et des pratiques du marché notamment quant aux remises concurrentielles.

Il se dégage du rapport de révision du 25 septembre 2000 que les majorations de ventes dégagées par le réviseur portent sur les ventes de meubles et d’objets de décoration d’une certaine valeur et que le réviseur « est d’avis que la méthode c) sub C.5.3 [calcul des recettes par application d’un coefficient fixe au prix d’achat] répond au mieux au principe du § 217 AO ». Il a ainsi retenu que l’application de cette méthode ne ferait apparaître aucune majoration de recettes pour l’année 1995, tandis que des majorations à hauteur de respectivement 850.000 LUF, 2.700.000 LUF et de 3.700.000 LUF devraient être appliquées pour les années 1996, 1997 et 1998. Il ressort du même rapport que le montant global de ces redressements à hauteur de (850.000 + 2.700.000 + 3.700.000 =) 7.250.000 LUF serait à répartir uniformément sur les quatre années d’imposition 1995 à 1998, de manière à aboutir à un redressement annuel de 1.800.000 LUF. Le réviseur a encore retenu que « les contrôles des ventes des exercices 1991 à 1994 sont impossibles, vu que le contribuable n’a pas pu déposer les détails des stocks ». Le rapport fixe finalement de manière dégressive en remontant dans le temps des majorations de 1.400.000 LUF pour les années 1993 et 1994 et de 1.000.000 LUF pour les années 1991 et 1992.

Dans la mesure où le réviseur a expressément écarté l’application de la méthode d’estimation d’après la marge bénéficiaire sur base d’échantillons de factures, le tribunal n’est pas amené à se prononcer sur les moyens y relatifs déployés par les demandeurs.

Quant aux années 1991 à 1994, force est de relever que le réviseur fait état d’une impossibilité de contrôler les ventes des années 1991 à 1994 à défaut de détails des stocks, mais ne justifie ni le principe ni le niveau des majorations par lui retenues forfaitairement pour ces années, au-delà des imperfections de la comptabilité de l’entreprise … constante en cause, par des considérations relatives à l’invraisemblance des comptes et résultats soumis par Monsieur …. Or, s’il est vrai que la comptabilité de l’entreprise … a pu être déclarée non régulière, encore faut-il que des majorations de ventes de meubles et de certains objets de décoration puissent s’appuyer sur des motifs pertinents et concluants de nature à étayer l’assertion, nécessaire à la base de telles majorations, que les montants déclarés du chef de ventes de meubles ne représentent pas le chiffre effectif de ces ventes pour les exercices en cause, étant entendu que le fait de dégager des majorations pour certains exercices subséquents ne constitue pas per se une prémisse suffisante pour justifier de tels redressements, ce d’autant plus que pour l’exercice 1995 suivant directement la période 1991-1994, aucun dépassement du bénéfice déclaré n’a pu être valablement étayé par le réviseur. Il s’ensuit qu’à défaut de motifs suffisants les sous-tendant établis en cause, les majorations des ventes de meubles et de certains objets de décoration des exercices 1991 à 1994 sont à éliminer des bénéfices respectivement fixés par les bulletins déférés correspondants.

Concernant l’année 1995, il ressort du rapport que l’application du coefficient fixe de 1,88 au prix d’achat des biens n’a pas fait apparaître un déficit de recettes de ventes de meubles et de certains objets de décoration pour cet exercice. De même, le calcul d’après la méthode de calcul de la marge bénéficiaire sur base d’échantillons de factures n’a pas dégagé une divergence entre la marge déclarée et la marge recalculée pour cet exercice. Il s’ensuit qu’aucune des deux méthodes énumérées par le réviseur, étant entendu qu’il a écarté en fin de compte la méthode fondée sur la marge bénéficiaire, ne permet la conclusion d’une insuffisance des ventes de meubles déclarées pour l’exercice 1995. La majoration à hauteur de 1.800.000 LUF est exclusivement le produit de la répartition sur quatre exercices des déficits de ventes dégagés du chef des trois exercices subséquents. Or, le principe de l’annualité de l’impôt, tel qu’ancré dans l’article 100 de la Constitution et dans l’article 1er de la loi du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, en abrégé « LIR », impose la fixation de l’impôt en fonction des bases d’imposition propres à l’année concernée sans que des bases d’imposition y étrangères et en relation avec d’autres années puissent entraîner automatiquement et péremptoirement une augmentation ou diminution du résultat imposable de l’année concernée. La majoration de 1.800.000 LUF pour l’année 1995 doit partant être retirée du bénéfice imposable de l’entreprise … de cette année d’imposition.

Quant aux années 1996 à 1998 et à la méthode de calcul par application d’un coefficient fixe au prix d’achat des biens, dont le réviseur a fait usage à la base des redressements pour les années d’imposition visées par les demandeurs, il y a lieu de rappeler que la taxation consiste « à déterminer et à utiliser une valeur probable et (ou) approximative, lorsque la détermination de la valeur réelle et exacte n'est pas possible » (cf.

J. Olinger, La Procédure contentieuse en matière d'impôts directs, page 117 n° 190, in ETUDES FISCALES Nos 81 à 85, novembre 1989 ; trib. adm. 8 décembre 1999, Mathes, n° 11179, Pas. adm. 2002, v° Impôts, n° 248), de sorte qu’elle comporte nécessairement une marge d’incertitude et d’inexactitude.

En l’espèce, il ressort des développements du rapport de révision non autrement mis en cause, hormis les justifications et explications afférentes des demandeurs, que les stocks de meubles aux clôtures des exercices concernés ne sont pas complets en ce que notamment certains meubles déjà facturés par les fournisseurs, mais pas encore vendus à la fin de l’année n’y ont pas été inscrits, de manière qu’un contrôle du volume des ventes à travers une comparaison avec les entrées et sorties du stock a été impossible. En outre, les factures des exercices 1996 et 1997 ne sont pas complètes, une facture de l’année 1996 et quatre factures de l’année 1997 continuant à faire défaut même suite aux explications fournies par Monsieur ….

Le réviseur a dès lors valablement pu se fonder sur le coefficient tel que fixé par le règlement grand-ducal prévisé du 22 octobre 1975 pour vérifier le niveau de recettes déclarées du chef de cette entreprise, étant donné que ce coefficient se trouve à la base de la structure de prix de l’entreprise …. Il y a lieu de préciser par ailleurs que le réviseur s’est fondé sur le coefficient de 1,88 pour toutes les années d’imposition en cause, alors même que Monsieur … a fait usage du coefficient de 1,92 à partir d’un moment non autrement précisé se situant au sein des années d’imposition en cause.

Les majorations de recettes auxquelles le réviseur aboutit du fait de l’application du coefficient de 1,88 s’élèvent pour l’année 1996 à 850.000 LUF (majoration de 1,34% face à une recette déclarée de 63.282.155 LUF), pour l’année 1997 à 2.700.000 LUF (majoration de 5,25% face à une recette déclarée de 51.366.788 LUF) et pour l’année 1998 à 3.700.000 LUF (majoration de 5,99% face à une recette déclarée de 61.776.650 LUF). Le rapport relève en outre qu’une application de la méthode de calcul de la marge bénéficiaire sur base d’échantillons de factures aurait conduit au constat de déficits de recettes à hauteur de 150.000 LUF pour l’année 1996, de 2.000.000 LUF pour l’année 1997 et de 5.300.000 LUF pour l’année 1998.

Au vu du caractère incomplet des inventaires aux clôtures d’exercices, du défaut de certaines factures et du fait que la seconde méthode indiquée par le réviseur – quoiqu’écartée pour la fixation des majorations – et fondée sur des échantillons de factures émises par l’entreprise … même, aboutit également à des déficits de recettes soit inférieurs, soit supérieurs selon les années d’exploitation, le réviseur a valablement pu conclure que les ventes effectivement réalisées ont été supérieures aux chiffres de ventes déclarés par les demandeurs.

Concernant le montant des majorations, il y a lieu de retenir d’une manière générale, au bénéfice des développements supra quant au principe de l’annualité de l’impôt, que la majoration à mettre en compte pour un exercice concerné ne peut pas dépasser le déficit de recettes effectivement constaté du chef de cet exercice.

Pour l’exercice 1996, le réviseur a constaté un déficit de recettes à hauteur de 850.000 LUF du chef de cet exercice, mais a retenu une majoration des recettes de ventes de meubles et de certains objets de décoration de 1.800.000 LUF suite à la répartition uniforme sur les quatre exercices 1995 à 1998 des déficits de ventes dégagés du chef des trois exercices 1996 à 1998. Il s’ensuit que les bulletins relatifs à l’année 1996 doivent encourir la réformation en ce sens que ladite majoration est à réduire de 1.800.000 LUF à 850.000 LUF.

Concernant les années 1997 et 1998, force est de constater que le rapport a dégagé des montants de déficits de recettes de respectivement 2.700.000 LUF et 3.700.000 LUF, mais a fixé des redressements respectifs de 1.800.000 LUF pour ces années suite à la répartition du total des redressements sur quatre exercices, de sorte que, dans la mesure où le tribunal ne saurait statuer in pejus conformément à l’article 97 (3) 8) de la loi prévisée du 7 novembre 1996, il y a simplement lieu de confirmer les majorations dégagées par le réviseur et reprises dans les bulletins d’impôt relatifs aux années 1997 et 1998.

Il ressort des développements qui précèdent que les critiques des demandeurs quant aux majorations des ventes de meubles sont partiellement fondées et que les bulletins déférés encourent la réformation en ce que les majorations retenues pour les exercices 1991 à 1995 sont à éliminer des bénéfices imposables pour ces années et que la majoration du chef de l’année 1996 est à ramener à 850.000 LUF.

Quant aux reprises de frais généraux Quant aux frais de représentation Les demandeurs contestent d’abord les reprises opérées sur les frais de représentation d’un total de 3.306.472 LUF pour la période de 1991 à 1998 et la fixation desdits frais à un forfait invariable de 100.000 LUF par an en arguant que ce montant, équivalant à +- 8.000 LUF par mois, serait manifestement insuffisant pour une promotion raisonnable de l’entreprise vis-à-vis des clients et des fournisseurs et que la limitation de ces frais à pareil montant annuel constituerait une véritable intrusion dans la gestion de l’entreprise, étant donné que ce serait le commerçant qui devrait pouvoir déterminer, dans les limites du raisonnable non dépassées en l’espèce, s’il est opportun pour son commerce notamment d’inviter des fournisseurs ou des clients à des rencontres conviviales.

Il ressort du tableau « reprise frais généraux 1991 – 1998 » annexé au rapport de révision du 25 septembre 2000 à la base des bulletins déférés que les reprises sur le poste des frais de représentation pour les années 1991 à 1998 s’élèvent à 3.416.472 LUF en ce que le réviseur n’a reconnu sous ce poste qu’un montant annuel forfaitaire de 100.000 LUF. Ces reprises sont justifiées par le réviseur par la considération qu’il s’agirait de frais privés et que pour certains frais il serait difficile de déterminer s’il s’agissait d’une dépense d’exploitation ou privée. L’admission d’un montant annuel forfaitaire de 100.000 LUF pour le poste « frais de représentation » de dépenses d’exploitation est justifié par le défaut de données plus précises et le constat que « le contribuable avait aussi porté en déduction tous les frais privés, notamment les dépenses faites quotidiennement pendant l’heure de midi », le rapport retenant par ailleurs que la date d’une facture de restaurant aurait été modifiée à l’aide du « Tipp-Ex » pour remplacer l’année 1991 par l’année 1993.

Le tribunal est amené à constater sur base des pièces du dossier et des explications fournies que les demandeurs ne contestent pas utilement que des factures relatives à des repas de midi personnels des exploitants de l’entreprise … ont été comptabilisés malgré l’interdiction de déduction afférente portée par l’article 12 n° 1 LIR. Il s’ensuit que le principe d’un redressement du moins partiel de ce poste de dépenses d’exploitation pour les exercices concernés est justifié en l’espèce.

Concernant les contestations des demandeurs relatives au niveau du forfait annuel uniforme de 100.000 LUF retenu à travers les bulletins déférés, il échet de relever d’une manière générale que, conformément à l’article 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartient au contribuable. En outre, les frais de restaurant causés par une invitation de l’exploitant au bénéfice de fournisseurs ou clients constituent des dépenses d’exploitation s’analysant en des avantages alloués à des personnes déterminées dont le bureau d’imposition peut exiger, sur pied du paragraphe 205a (2) AO, disposant que « wenn der Steuerpflichtige beantragt, dass Betriebsausgaben oder Werbungskosten bei der Feststellung des Einkommens abgesetzt werden, so kann das Finanzamt verlangen, dass der Steuerpflichtige die Empfänger genau bezeichnet », la désignation exacte des bénéficiaires par le contribuable comme condition de la déductibilité en tant que dépenses d’exploitation. Il s’ensuit que pour les dépenses en question, le contribuable se trouve soumis à une obligation renforcée de preuve d’une relation économique avec son entreprise, entraînant qu’il devrait être en mesure de justifier concrètement le montant de frais de représentation par lui ainsi mis en avant. Dès lors, même s’il n’est pas à exclure que le montant de 100.000 LUF ne couvre pas les frais de représentation dans toute leur étendue effectivement déductible, les demandeurs restent en défaut de faire utilement état de quelconques éléments concrets quant au niveau effectif supérieur des frais de représentation déductibles, de manière qu’ils n’ont pas su, en l’état du dossier, énerver le montant annuel reconnu par le réviseur et repris à travers les bulletins déférés.

Quant aux frais de voitures Les demandeurs critiquent en deuxième lieu les reprises à hauteur de 3.800.000 LUF pour l’ensemble des exercices 1991 à 1998, telles que retenues par le réviseur, du chef de frais de voiture relatifs aux véhicules utilisés par leurs enfants pour les besoins de l’entreprise. Ils exposent à cet égard que le nombre de voitures utilisées s’expliquerait par la circonstance qu’une fille et un fils auraient travaillé dans l’entreprise et que l’administration devrait laisser au contribuable une liberté raisonnable quant au choix des véhicules et à la délimitation entre utilisations privée et commerciale, celle-ci n’étant pas toujours évidente.

Il ressort des éléments du dossier non autrement mis en cause de part et d’autre et plus particulièrement du rapport de révision du 25 septembre 2000 que le nombre de voitures particulières inscrites à l’actif du bilan de l’entreprise … était de 7 pour 1991, 4 pour 1992, 3 pour 1993 et 1 pour les années subséquentes, sauf qu’un remplacement de voiture au cours de l’année 1995 entraînait l’inscription tant de l’ancien que du nouveau véhicule. Le même rapport relate que du chef des voitures utilisées par les enfants pour les besoins de l’entreprise les frais essentiellement d’essence, d’assurances et de réparations ont été inscrits comme dépenses d’exploitation de l’entreprise … et que ces voitures ne figuraient pas comme éléments de l’actif investi dans les comptes de cette entreprise.

En principe, les frais d’usage et d’entretien d’une voiture faisant partie du patrimoine privé du contribuable ou d’un tiers travaillant dans l’entreprise et non pas de l’actif investi de l’entreprise constituent des dépenses liées à la vie privée du contribuable concerné. En outre, les frais causés par le déplacement entre le domicile du contribuable et le lieu d’exploitation de l’entreprise donnent lieu à une déduction forfaitaire régie par l’article 46 n° 9 LIR pour l’exploitant et par l’article 105bis LIR pour les salariés de l’entreprise. En cas d’utilisation partielle pour les besoins de l’entreprise d’une voiture faisant partie du patrimoine privé, les frais d’usage et d’entretien ne peuvent être pris en charge par l’entreprise en tant que dépenses d’exploitation que dans la proportion de l’utilisation effective au bénéfice de l’entreprise en dehors des trajets entre le domicile et le lieu d’exploitation de l’entreprise et il incombe au contribuable concerné d’étayer concrètement cette proportion d’utilisation au service de l’entreprise ainsi délimitée.

En l’espèce, les demandeurs restent en défaut de soumettre au tribunal des éléments concrets de nature à démontrer utilement un certain degré d’utilisation des voitures privées de leurs enfants pour les besoins de l’entreprise … dans les limites ci-avant tracées et les commentaires de Monsieur … contenus dans son courrier du 23 octobre 2000 permettent plutôt la déduction que les déplacements invoqués dans le chef de ses enfants se rapportent essentiellement à leurs déplacements entre leurs domiciles respectifs et le magasin de l’entreprise (« pour le bon fonctionnement de l’entreprise, les enfants aident dans l’administration et dans la vente. Il faut une voiture pour se rendre au travail et il est normal que les frais d’essence, d’assurance et de réparation soient payés par l’entreprise »), lesquels sont pourtant couverts par le forfait kilométrique prévisé.

Quant aux voitures inscrites à l’actif investi de l’entreprise et utilisées de manière non contestée pour partie à des fins privées par les demandeurs, il incombe au contribuable de démontrer les proportions respectives des utilisations professionnelle et privée de ces voitures et seul le pourcentage des frais pour lequel la cause professionnelle (« die berufliche Veranlassung ») de l’utilisation se trouve établie peut venir en déduction du résultat imposable en tant que dépenses d’exploitation. Dans la mesure où la preuve du degré d’utilisation professionnelle ou privée doit en principe être rapportée par un carnet de route dûment tenu (cf. trib. adm. 24 février 2000, Goeres-Slager, n° 11061), sinon par un autre moyen de preuve équivalent et où les demandeurs restent en défaut, au-delà de leur critique de la reprise forfaitaire de 25% du total des frais de voitures et d’amortissements par le bureau d’imposition, de présenter un quelconque indice concret quant au degré d’utilisation effective pour les besoins de l’entreprise des voitures successivement inscrites à l’actif de l’entreprise …, leur moyen afférent doit être écarté comme non fondé.

Quant aux emprunts et intérêts débiteurs Les demandeurs s’opposent encore à la reprise d’un total de 1.398.979 LUF du chef d’intérêts débiteurs relatifs à des prêts pour lesquels la relation économique avec l’entreprise n’a pas été reconnue par le réviseur et déclarent contester les remarques afférentes formulées par ce dernier à cet égard. Ils affirment plus particulièrement qu’ils auraient expliqué « de façon satisfaisante » dans la lettre du 23 octobre 2000 le fait que les dates des prêts ne concorderaient pas exactement avec les dates d’utilisation, sinon que les prêts n’auraient pas été entièrement utilisés aux fins initialement prévues et ils contestent une affectation des résultats de leur entreprise de ce fait, les liquidités disponibles sur les comptes en banque ayant augmenté les revenus en conséquence. Ils dénient la justification au fond de la ventilation opérée par le réviseur entre quote-parts commerciale et privée d’un prêt qu’ils déclarent être en relation avec leur entreprise.

Conformément à l’article 45 (1) LIR, les intérêts débiteurs constituent des dépenses d’exploitation dans la mesure où l’emprunt auquel ils se rapportent est affecté exclusivement aux besoins du financement de l’entreprise.

En l’espèce, les parties à l’instance sont d’abord divisées sur la question de savoir si un premier emprunt de 6.000.000 LUF contracté le 8 octobre 1991 par les demandeurs se trouve en relation causale avec l’entreprise … en ce qu’il a été affecté au financement des transformations de l’ancienne maison d’habitation des parents de Monsieur … en immeuble d’exposition.

Dans son rapport du 25 septembre 2000, le réviseur a constaté qu’il n’y aurait pas eu de transformations d’une valeur de 6.000.000 LUF en 1991, que celles accomplies en 1991 auraient été payées antérieurement à la date de mise à disposition de l’emprunt qui aurait été utilisé par les demandeurs intégralement au financement d’opérations privées, dont la construction d’une maison d’habitation à ….

Dans ses courriers des 1er septembre et 23 octobre 2000, Monsieur … conteste ces conclusions du réviseur et fait valoir que les transformations de la susdite maison auraient débuté en 1988 et qu’il aurait pensé ne pas avoir besoin d’emprunt pour les financer. Etant donné néanmoins que le coût total aurait dépassé les prévisions et que le compte courant en banque aurait présenté un solde débiteur après le règlement de la majeure partie des factures relatives à ce chantier, il aurait contracté l’emprunt en cause pour combler le solde déficitaire de son compte et pour payer l’aménagement intérieur et extérieur de ladite maison. Monsieur … a affirmé à cette occasion qu’aucune partie de l’emprunt n’aurait été affectée à des fins privées et notamment au financement de la construction de la maison à …, laquelle aurait fait l’objet de deux autres emprunts spécifiques.

Cette présentation des faits est cependant contredite par le réviseur dans la partie de son rapport relative à la discussion des redressements lors de l’entrevue finale en date du 25 septembre 2000 où il retient que les conclusions par lui tirées pourraient être prouvées à l’aides extraits bancaires et il retrace sous forme de tableau les opérations bancaires ayant porté affectation du montant du prêt en cause. En outre, le relevé des factures relatives à la susdite transformation de l’ancienne maison d’habitation, tel que versé par les demandeurs dans le cadre de la procédure de révision et soumis au tribunal, ne fait état d’aucune facture qui serait postérieure au mois d’avril 1991, de manière que l’affirmation des demandeurs d’une affectation partielle de l’emprunt au paiement, après le 8 octobre 1991, des travaux d’aménagement intérieur et extérieur de leur maison d’exposition ne se trouve pas établie en cause. Il s’ensuit qu’à défaut par les demandeurs d’avoir soumis des preuves concrètes pour étayer la réalité des faits par eux avancés, ils sont restés en défaut d’ébranler les constatations précises et circonstanciées dégagées par le réviseur et se trouvant à la base des bulletins déférés, de manière qu’il y a lieu de dénier la cause commerciale de cet emprunt de 6.000.000 LUF.

Concernant le second emprunt à hauteur de 8.000.000 LUF conclu le 7 octobre 1993, le réviseur en rejette la relation économique avec l’entreprise … sur pied du constat que seul un montant de 5.587.112 LUF aurait été affecté au financement d’une machine tandis que le solde aurait été utilisé à des fins privées, entraînant que l’emprunt et les frais et intérêts débiteurs afférents devraient être ventilés en conséquence en une quote-part commerciale déductible et une quote-part privée non déductible.

Dans le cadre de ses prises de positions des 1er septembre et 23 octobre 2000, Monsieur … a argué que cet emprunt aurait servi à l’acquisition de trois machines à bois, à savoir une scie double radial MBM, une ponçeuse Linden/Sandingmaster avec aspirateur de poussière et une moulurière Weinig, investissements représentant un import total de 10.788.480 LUF, mais non pas à des fins privées, de sorte qu’il n’y aurait pas lieu de répartir cet emprunt en quote-parts.

Parallèlement à ses développements quant à l’emprunt prévisé de 6.000.000 LUF, le réviseur relève, dans le cadre de la partie de son rapport relative à la discussion des redressements lors de l’entrevue finale en date du 25 septembre 2000, que les extraits bancaires du compte de crédit confirment ses conclusions en ce que, sur un total effectivement utilisé de 7.904.000 LUF, seul un montant de 5.587.112 LUF aurait été utilisé au paiement de la scie double radial MBM et que le solde de 2.316.888 LUF aurait été transféré sur un compte à terme privé. S’y ajoute qu’il résulte des éléments du dossier que, suite à l’invitation de son établissement de crédit du 22 novembre 1994 de faire parvenir les originaux des factures de l’investissement à la base du prêt de 8.000.000 LUF en vue d’une éventuelle demande en obtention d’un crédit d’équipement auprès de la Société Nationale de Crédit et d’Investissement, Monsieur … lui a adressé des factures d’un import global de 6.167.043 LUF, relatives à la scie double radial MBM avec ses accessoires et à la ponceuse Linden/Sandingmaster, tout en précisant que « la somme totale des factures se référant au prêt mentionné ci-dessus sera en définitif (d’ici 2 mois) donc de : LFR 7.100.843.- ». En considération des éléments précis mis en avant par le réviseur, des contradictions entre les prises de position des demandeurs concernant les machines effectivement acquises au moyen des fonds empruntés et le montant total investi et compte tenu du défaut par les demandeurs de soumettre au tribunal des éléments complémentaires pertinents de nature à étayer leur thèse, il y a lieu de confirmer les bulletins litigieux en ce qu’ils ont opéré une ventilation entre quotes-parts commerciale et privée de l’emprunt en cause.

Quant aux emprunts en relation avec la maison d’habitation à … Dans le cadre de la question du niveau de déductibilité des intérêts débiteurs relatifs aux emprunts destinés à financer la construction de leur maison d’habitation à …, les demandeurs critiquent la fixation par le réviseur de la date d’achèvement de cette maison au 30 juin 1995 et entendent établir sur base de certaines factures versées en cause que l’habitabilité de cette maison n’aurait été réalisée qu’au 1er juillet 1998.

Le réviseur a fondé sa fixation de la date d’achèvement de la maison en cause au 30 juin 1995 sur les éléments suivants : achats des deux cuisines en 1993, achats d’autres meubles en 1995 et 1996, raccordements téléphonique et à l’antenne collective réalisés en 1994 et facture d’électricité renseignant une consommation de 12.652 kWh durant la période d’avril 1995 à mars 1996 pour le montant de 67.501 LUF.

Afin de corroborer leur assertion de l’habitabilité de leur dite maison pour le 1er juillet 1998 seulement, les demandeurs affirment que celle-ci resterait toujours inachevée et qu’elle aurait même servi de dépôt de meubles jusqu’en juillet 1999 et ils versent deux factures documentant l’acquisition en avril 1998 d’une machine à laver, d’un sèche-linge, d’un lave-vaisselle, d’un four encastré et d’une taque.

Ces derniers éléments produits par les demandeurs ne sont cependant pas en eux-

mêmes de nature à ébranler le bien-fondé de la date d’achèvement fixée par le réviseur, laquelle se fonde sur un faisceau concordant d’indices, dont notamment la consommation électrique d’avril 1995 à mars 1996, la date du raccordement à certaines infrastructures collectives et les acquisitions de cuisines en 1993, étant donné essentiellement que les achats documentés à travers les factures soumises par les demandeurs portent sur des équipements qui, présentés comme tels, permettent d’en tirer des conclusions multiples sans imposer une date d’achèvement postposée au 1er juillet 1998, compte tenu de l’état d’achèvement antérieur de l’équipement de ladite maison. A défaut d’autres éléments de preuve concrets mis en avant par les demandeurs pour établir la date d’achèvement par eux déclarée, celle retenue par le réviseur et les bulletins d’impôt déférés est à confirmer.

Quant aux reprises globales de frais généraux Les demandeurs dénoncent finalement les reprises globales forfaitaires opérées par le réviseur sur un certain nombre de postes - notamment les postes de frais de décoration, de cadeaux, de téléphone, de timbres, de publicité et de biens amortissables en une année - sous prétexte de la difficulté pour constater s’il s’agit de dépenses commerciales ou privées en arguant qu’une telle difficulté serait inévitable dans un commerce familial et que « l’imposition ne doit pas ériger contre le contribuable une présomption de non-

commercialité ni procéder par un forfait qui n’est à son tour pas vérifiable ».

Il ressort des annexes au rapport du 25 septembre 2000 qu’une reprise globale pour frais de décoration, cadeaux, téléphone, timbres etc. a été opérée par le réviseur à hauteur de 138.573 LUF pour l’année 1991, de 174.864 LUF pour l’année 1992, de 127.295 LUF pour l’année 1993, de 173.825 LUF pour l’année 1994, de 163.889 LUF pour l’année 1995, de 206.239 LUF pour l’année 1996, de 198.328 LUF pour l’année 1997 et de 222.261 LUF pour l’année 1998.

Cette reprise est justifiée par le réviseur par la considération que « pour certains frais, il est difficile de déterminer s’il s’agit d’une dépense privée ou d’une dépense en relation avec l’activité commerciale, surtout quand la facture n’est pas libellée clairement (p.ex. frais de magasin, frais d’atelier et de chantier, frais de voitures, frais de publicité, frais de décoration, biens amortissables en une année, cotisations et taxes, cadeaux et dons, …). Dans ces cas le réviseur a fait une reprise globale déterminée forfaitairement ».

Or, force est de constater que la majeure partie de ces postes fait déjà l’objet de reprises individuelles selon les années d’imposition en cause arrêtées à un stade antérieur du rapport de révision et que, mise à part la difficulté pratique de déterminer la relation de ces dépenses avec l’entreprise …, le réviseur reste muet sur la justification au fond de la reprise additionnelle. Or, s’il est vrai que la comptabilité de ladite entreprise a pu être déclarée non régulière, encore faut-il que les reprises de frais généraux puissent s’appuyer sur des motifs pertinents et concluants de nature à étayer l’assertion, nécessaire à la base de telles réintégrations au bénéfice imposable, que la relation économique desdites dépenses avec l’entreprise fait défaut. Il ne suffit par contre pas de faire état de difficultés de déterminer s’il s’agit de dépenses privées ou de dépenses en relation avec l’entreprise, lesquelles sont par ailleurs inhérentes à certains de ces frais, pour opérer une reprise globale et forfaitaire sur l’ensemble de ces postes de dépenses. Il s’ensuit que les bulletins déférés encourent la réformation en ce sens que les reprises globales opérées en second lieu de façon surabondante et visées ci-avant sont à éliminer du résultat imposable de l’entreprise ….

Il se dégage de l’ensemble des développements qui précèdent que le recours sous analyse est partiellement fondé et que les bulletins d’impôt litigieux encourent la réformation en ce que  les majorations des ventes de meubles et de certains objets de décoration des exercices 1991 à 1995 sont à éliminer des bénéfices respectivement fixés par les bulletins déférés correspondants  la majoration des ventes de meubles et de certains objets de décoration de l’exercice 1996 est à réduire de 1.800.000 à 850.000 LUF,  les reprises globales pour frais de décoration, cadeaux, téléphone, timbres etc.

sont à éliminer des bénéfices des exercices 1991 à 1998.

Eu égard à l’issue au fond du litige et plus particulièrement au fait que les demandeurs ont succombé à lamajeure partie de leurs prétentions, il y a lieu de faire masse des frais et de les imposer à raison de deux tiers aux demandeurs et d’un tiers à l’Etat.

Quant à la demande en ordonnance de l’effet suspensif Les demandeurs requièrent, à travers le seul dispositif de leur requête introductive, que soit ordonné, sur base de l’article 35 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, l’effet suspensif du recours pendant le délai d’appel et l’instance d’appel éventuelle.

L’article 35 de la loi prévisée du 21 juin 1999 dispose dans son alinéa 1er que « par dérogation à l’article 45, si l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif, le tribunal peut, dans un jugement tranchant le principal ou une partie du principal, ordonner l’effet suspensif du recours pendant le délai et l’instance d’appel ».

A cet égard, force est de relever que le président du tribunal administratif a pu retenir dans son ordonnance prévisée du 15 mai 2002 que tout paiement d'impôts cause au contribuable un préjudice en ce qu'il amoindrit son patrimoine, sans pour autant nécessairement constituer un préjudice grave et définitif et que le refus du paiement d'une dette fiscale ne saurait entrer en ligne de compte, pour l'appréciation de la justification d'une mesure de sursis à exécution, que pour autant que le paiement de la somme due ou réclamée risque de perturber sinon de manière irrémédiable, du moins profondément la situation financière du contribuable de telle sorte que, même en cas de gain de cause devant le juge du fond et de restitution des sommes payées indûment, cette situation ne peut être rétablie que difficilement.

Le tribunal est également amené à constater que les époux …-… bénéficient d'ores et déjà de délais de paiement importants, leur permettant de s'acquitter sur une période étendue des arriérés moyennant des paiements mensuels de 475.000 LUF et qu'ils sont restés, dans le cadre de leur requête en sursis à exécution, en défaut de produire les éléments d'appréciation nécessaires permettant de faire admettre que leur situation financière serait tendue à tel point que la continuation du paiement des échéances mensuelles risquerait de perturber profondément ou de mettre en péril la continuité de leur entreprise, de manière que le président du tribunal administratif a conclu que le caractère grave et définitif du préjudice allégué manquait d'être établi devant lui et il a rejeté la demande lui soumise.

Or, les demandeurs n’ont soumis au tribunal aucun élément complémentaire de nature à étayer utilement que leur situation financière serait tendue à tel point que la continuation du paiement des échéances mensuelles risquerait de perturber profondément ou de mettre en péril la continuité de leur entreprise. Le tribunal, en faisant siens les motifs afférents reproduits dans l’ordonnance présidentielle précitée, ne peut que conclure que la condition de l’existence d’un risque de préjudice grave et définitif dans le chef des demandeurs ne se trouve pas vérifiée à l’heure actuelle. S’y ajoute qu’au vu de l’assiette limitée de la réformation à prononcer des bulletins d’impôt déférés et de la durée globale du délai de paiement d’ores et déjà accordé, il ne ressort pas des éléments en cause que les mensualités à régler par les demandeurs durant le délai et l’éventuelle instance d’appel aillent au-delà des cotes par eux redues en tenant compte du présent jugement.

Il s’ensuit que la demande d’effet suspensif présentée est à rejeter.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, déclare le recours irrecevable dans le chef de Madame … pour autant que dirigé contre les bulletins d’établissement de l’impôt commercial communal et d’établissement de la valeur unitaire pour les années d’imposition en cause, déclare le recours recevable pour le surplus, au fond, le déclare partiellement justifié, partant, par réformation des bulletins déférés, dit que  les majorations des ventes de meubles et de certains objets de décoration des exercices 1991, 1992, 1993, 1994 et 1995 sont à éliminer des bénéfices respectivement fixés par les bulletins déférés correspondants,  la majoration des ventes de meubles et de certains objets de décoration de l’exercice 1996 est à réduire de 1.800.000 à 850.000 LUF,  les reprises globales pour frais de décoration, cadeaux, téléphone, timbres etc.

sont à éliminer des bénéfices des exercices 1991 à 1998, dit le recours non fondé pour le surplus, renvoie l’affaire devant le directeur de l’administration des Contributions directes en vue de sa transmission au bureau d’imposition compétent pour exécution, rejette la demande d’effet suspensif présentée, fait masse des frais et les impose à raison de deux tiers aux demandeurs et d’un tiers à l’Etat.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 12 février 2003 par:

M. DELAPORTE, premier vice-président, Mme LENERT, premier juge, M. SCHROEDER, juge, en présence de M. SCHMIT, greffier en chef.

SCHMIT DELAPORTE 18


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 14855
Date de la décision : 12/02/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-02-12;14855 ?

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