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06/02/2003 | LUXEMBOURG | N°15861

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 06 février 2003, 15861


Tribunal administratif N° 15861 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 janvier 2003 Audience publique du 6 février 2003

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Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15861 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 janvier 2003 par Maître Brigitte POCHON, avocat à la Cour, inscrit au tab

leau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Mitrovica (Kosovo/Yougos...

Tribunal administratif N° 15861 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 janvier 2003 Audience publique du 6 février 2003

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Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15861 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 janvier 2003 par Maître Brigitte POCHON, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Mitrovica (Kosovo/Yougoslavie), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…endant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 12 décembre 2002, par laquelle ledit ministre a déclaré manifestement infondée sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié politique ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 31 janvier 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en ses plaidoiries.

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Monsieur … introduisit en date du 14 novembre 2002 une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Il fut entendu en date du même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Il fut en outre entendu en date du 3 décembre 2002 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre de la Justice informa Monsieur …, par lettre du 12 décembre 2002, notifiée en date du 16 décembre 2002, par voie de lettre recommandée, que sa demande a été déclarée manifestement infondée au sens de l’article 9 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, au motif qu’elle ne répondrait à aucun des critères de fond tels que définis par l’article 1er, section A.2 de la Convention de Genève. Le ministre a en effet constaté que Monsieur … reconnaissait n’avoir subi ni de mauvais traitements, ni des persécutions dans son pays d’origine et ne pas avoir eu de problèmes liés à ses opinions politiques ou religieuses, ni en raison de son appartenance à un groupe social ou national, en faisant ressortir que Monsieur … avait lui-même indiqué solliciter la reconnaissance du statut de réfugié politique pour des motifs économiques.

Par requête déposée en date du 13 janvier 2003, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 12 décembre 2002.

Il convient de relever que le fait que le demandeur n’a pas été représenté lors de l’audience fixée pour les plaidoiries ne porte pas à conséquence et le jugement est néanmoins réputé rendu contradictoirement entre parties, étant donné que la procédure devant les juridictions administratives est essentiellement écrite et que le demandeur a pris position par écrit, notamment par le fait de déposer une requête introductive d’instance.

Etant donné que l’article 10 (3) de la loi précitée du 3 avril 1996 dispose expressément qu’en matière de demandes d’asile déclarées manifestement infondées au sens de l’article 9 de la loi précitée de 1996, seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives, le tribunal est incompétent pour connaître de la demande en réformation formulée à titre principal à travers la requête sous analyse.

Le recours en annulation introduit à titre subsidiaire est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Quant au fond, le demandeur reproche au ministre de la Justice d’avoir retenu qu’il n’aurait pas invoqué de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif à la base de sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié politique, alors que tel ne serait pas le cas, dans la mesure où il aurait fait état de ce que sa vie serait en danger dans son pays d’origine et qu’il aurait peur d’y retourner de crainte d’y être « jugé et persécuté ».

Le délégué du gouvernement estime que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que son recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement ou si la demande repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures en matière d’asile ».

En vertu de l’article 3, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande».

Une demande d’asile basée exclusivement sur des motifs d’ordre personnel et familial et non sur un quelconque fait pouvant être considéré comme constituant une persécution ou une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève est à considérer comme manifestement infondée (trib. adm. 19 juin 1997, n° 10008 du rôle, Pas. adm. 2002, V° Etrangers, n° 93, p. 199 et autres références y citées).

Il convient de relever en premier lieu que la demande d’asile du demandeur a été refusée au motif que sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié politique ne répondait à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève.

Force est de constater que les faits et motifs invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande d’asile ont trait, tel que cela ressort plus particulièrement du procès-verbal d’audition du 3 décembre 2002, à des motifs économiques qu’il aurait connus dans son pays d’origine, notamment en raison du fait qu’il n’y aurait jamais travaillé, qu’il y aurait vécu d’une aide sociale de 62 €, qu’il n’y aurait eu aucun revenu et qu’il aurait l’intention de s’établir au Grand-Duché de Luxembourg « pour trouver du travail » en insistant plus particulièrement sur le fait que « les conditions de vie au Kosovo sont déplorables ».

Il se dégage des déclarations effectuées par le demandeur auxquelles il est fait référence ci-dessus que, comme l’a retenu à bon droit le ministre de la Justice, sa demande d’asile sous examen ne repose sur aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève, de sorte que c’est à bon droit que ladite demande a été rejetée comme étant manifestement infondée.

Cette conclusion ne saurait être énervée par une référence vague et générale à la situation générale existant actuellement au Kosovo, sans qu’il ne soit fait allusion à un quelconque fait précis ayant trait à la situation individuelle du demandeur permettant d’établir qu’il aurait valablement pu se fonder sur l’un des critères prévus par la Convention de Genève en vue de solliciter la reconnaissance du statut de réfugié politique dans son chef.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 6 février 2003 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 15861
Date de la décision : 06/02/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-02-06;15861 ?

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