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03/02/2003 | LUXEMBOURG | N°15007

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 03 février 2003, 15007


Tribunal administratif N° 15007 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 juin 2002 Audience publique du 3 février 2003

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Recours formé par Monsieur …, … (F) contre une décision du directeur de l’administration de l’Emploi en matière de contrat de travail

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15007 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 10 juin 2002 par Maître Jean TONNAR, avocat à la Cour, inscr

it au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, ouvrier, demeurant à F-

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Tribunal administratif N° 15007 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 juin 2002 Audience publique du 3 février 2003

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Recours formé par Monsieur …, … (F) contre une décision du directeur de l’administration de l’Emploi en matière de contrat de travail

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15007 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 10 juin 2002 par Maître Jean TONNAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, ouvrier, demeurant à F-

…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du directeur de l’administration de l’Emploi du 13 mars 2002, lui refusant le bénéfice des dispositions de l’article 30 de la loi modifiée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail, suite à la faillite de la société … s. à r.l., ayant été établie à L-…, concernant l’allocation des salaires se rapportant au mois de la survenance de ladite faillite et au mois subséquent et l’attribution de l’indemnité égale à 50% du préavis ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision du 13 mars 2002 ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Mathias PONCIN, en remplacement de Maître Jean TONNAR, en ses plaidoiries.

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Monsieur … fut aux services de la société … s. à r.l., ci-après dénommée « la société … », ayant été établie à L-…, société déclarée en faillite suivant jugement rendu par le tribunal d’arrondissement de Luxembourg en date du 13 décembre 2000. La déclaration de créance du demandeur fut admise au passif privilégié de la faillite de la société … pour un montant de 406.994 francs.

Il ressort du décompte de l’administration de l’Emploi du 27 septembre 2001, ayant trait au montant garanti par la loi au travailleur touché par la faillite de l’employeur, que seul un montant de 167.036 francs net fut assigné à Monsieur ….

Suivant courrier du 8 mars 2002, Monsieur …, par l’intermédiaire de son syndicat, contesta le décompte établi par l’administration de l’Emploi et sollicita une décision susceptible de recours.

En date du 13 mars 2002, le directeur de l’administration de l’Emploi informa le syndicat de Monsieur … de ce qui suit :

« Il résulte de l’examen du dossier qu’au moment du jugement déclaratif de la faillite, soit le 13 décembre 2000, l’intéressé n’était plus occupé par l’entreprise …, mais qu’il s’était fait embaucher par l’entreprise P. à partir du 16 novembre 2000. En conséquence, le requérant ne saurait être admis au bénéfice des dispositions de l’article 30 de la loi du 24 mai 1989 sur le contrat de travail. (…) ».

Par requête déposée en date du 10 juin 2002, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation à l’encontre de la décision du directeur de l’administration de l’Emploi du 13 mars 2002 prérelatée.

Aucune disposition légale ne conférant compétence à la juridiction administrative pour statuer comme juge du fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître de la demande principale en réformation.

Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

En l’espèce, il est constant que le recours est dirigé contre une décision de refus émanant du directeur de l’administration de l’Emploi et que l’administration de l’Emploi ne jouit pas de la personnalité juridique, de sorte que compte tenu du principe de l’unicité de l’Etat et sur base des dispositions de l’article 4 (3) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le dépôt de la requête vaut signification à l’Etat.

Il s’ensuit que, bien que l’Etat n’ait pas fait déposer de mémoire, le tribunal est néanmoins amené à statuer à l’égard de toutes les parties conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi précitée du 21 juin 1999.

A l’appui de son recours, le demandeur explique que le dernier salaire touché auprès de la société … aurait daté du mois de septembre 2000 et que suite au non-paiement des salaires subséquents, il aurait dû « se procurer une deuxième fiche d’impôt » et se serait adonné à un « deuxième » travail pour subvenir aux besoins de sa famille et de soi-même. Le demandeur fait ajouter qu’à aucun moment, il n’aurait démissionné et il aurait partant toujours été employé auprès de la société faillie au jour du jugement déclaratif de faillite. Partant, ce serait à tort que l’administration de l’Emploi ne prendrait pas en charge sa déclaration de créance telle qu’admise à titre privilégié et ne le ferait pas bénéficier des dispositions de l’article 30 de la loi du 24 mai 1989 précitée.

Le tribunal tient à relever en premier lieu que Monsieur …, suivant décompte de l’administration de l’Emploi du 27 septembre 2001, a bénéficié d’une prise en charge conformément à l’article 30 de la loi précitée du 24 mai 1989 pour un montant de 167.036 francs net concernant les arriérés de salaire des mois d’octobre et novembre 2000, l’indemnité pour congé non pris et la prime de fin d’année. Partant, le refus opposé par le directeur de l’administration de l’Emploi par sa décision du 13 mars 2002 ne vise que les prétendus arriérés de salaire postérieurs à la date d’entrée du demandeur auprès de son nouvel employeur, ainsi que les montants correspondant au mois de survenance de la faillite et au mois subséquent, et l’indemnité de 50% du préavis légal.

Aux termes de l’article 30 (1) de la loi précitée du 24 mai 1989 :

« Sans préjudice des dispositions de l’article 36 de la présente loi, le contrat de travail est résilié avec effet immédiat en cas de cessation des affaires par suite de décès, d’incapacité physique ou de déclaration en état de faillite de l’employeur.

Sauf continuation des affaires par le curateur ou le successeur de l’employeur, le salarié a droit :

1. au maintien des salaires ou traitements se rapportant au mois de la survenance de l’événement et au mois subséquent et 2. à l’attribution d’une indemnité égale à 50% des mensualités se rapportant au délai de préavis auquel le salarié aurait pu prétendre conformément aux dispositions de l’article 20 de la présente loi (…) ».

D’après l’article 46 de la loi précitée du 24 mai 1989 :

« (1) En cas de faillite de l’employeur, le fonds pour l’emploi garantit les créances résultant du contrat de travail sous les conditions et dans les limites fixées au présent article.

(2) Sont garantis jusqu’à concurrence du plafond visé à l’article 2101, paragraphe 2 du code civil, les créances des rémunérations et indemnités de toute nature dues au salarié à la date du jugement déclaratif de la faillite pour les six derniers mois de travail et celles résultant de la rupture du contrat de travail ».

Il résulte de la lecture combinée de ces deux dispositions légales que l’administration de l’Emploi, respectivement le fonds pour l’emploi ne garantit que les créances des rémunérations et indemnités de toute nature dues au salarié suite à la résiliation de par la loi du contrat de travail avec effet immédiat en raison de la cessation des affaires de l’employeur en état de faillite.

Or, en l’espèce, force est de constater que Monsieur … ne se tenait plus à la disposition de son employeur depuis le 16 novembre 2000, mais s’adonnait à un travail auprès de son nouvel employeur la société P.. Il s’ensuit que la relation de travail avec la société … n’existait plus « de facto » depuis le 16 novembre 2000.

Or, les dispositions légales précitées de la loi précitée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail poursuivent comme principaux objectifs la garantie du paiement des salaires et des indemnités pour les prestations effectuées en relation avec leur contrat de travail, mais non encore payées par l’entreprise lors de la survenance d’une faillite, de même que le maintien des salaires ou traitements du mois de survenance de la faillite et du mois subséquent, ainsi que la moitié de l’indemnité légale de préavis pour les salariés victimes d’une résiliation avec effet immédiat par l’effet de la déclaration en état de faillite de l’employeur, c’est à dire les travailleurs qui du jour au lendemain se retrouvent sans le moindre revenu et dans l’incertitude la plus totale quant à leur avenir professionnel.

Tel ne fut précisément pas le cas de Monsieur …, qui n’était plus à la disposition de la société …, mais qui avait déjà retrouvé un travail rémunéré auprès de la société P.

pratiquement un mois avant la survenance de la faillite litigieuse.

Partant, c’est à juste titre que le directeur de l’administration de l’Emploi a estimé que Monsieur … ne saurait bénéficier des dispositions de l’article 30 de la loi précitée du 24 mai 1989.

Il s’ensuit que le recours est à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme;

au fond, le dit non justifié et en déboute;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 3 février 2003, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 15007
Date de la décision : 03/02/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-02-03;15007 ?

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