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20/01/2003 | LUXEMBOURG | N°15287

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 20 janvier 2003, 15287


Tribunal administratif N° 15287 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 août 2002 Audience publique du 20 janvier 2003 Recours formé par Madame …, … et la société … s. à r.l. … contre une décision du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’autorisation d’établissement

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15287 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 22 août 2002 par Maître Edmond DAUPHIN, a

vocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, …, de...

Tribunal administratif N° 15287 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 août 2002 Audience publique du 20 janvier 2003 Recours formé par Madame …, … et la société … s. à r.l. … contre une décision du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’autorisation d’établissement

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15287 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 22 août 2002 par Maître Edmond DAUPHIN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, …, demeurant à B-…, ainsi que de la société à responsabilité limitée … s. à r.l., établie et ayant son siège social à L-…, tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation d’une décision du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement du 22 mai 2002 refusant de faire droit à la demande en autorisation d’établissement de la société … s. à r.l., pour les activités de ramonage de cheminées, de couverture de construction, de zinguerie et de charpente ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 1er octobre 2002 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 25 octobre 2002 par Maître Edmond DAUPHIN au nom des demanderesses ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 21 novembre 2002 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision ministérielle attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Mourad SEBKI, en remplacement de Maître Edmond DAUPHIN, et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 2 décembre 2002.

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La société … s. à r.l., ci-après désignée par « la société … », introduisit en date du 12 octobre 2000 une demande auprès du ministère des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement afin d’obtenir, complémentairement à celle existante, l’autorisation d’établissement au vœu de la loi modifiée du 28 décembre 1988 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales, désignée ci-

après par « la loi d’établissement », pour les activités de couvreur, ramoneur, ferblantier-

zingueur et charpentier.

La commission prévue par l’article 2 de la loi d’établissement émit en date du 28 février 2001 un avis favorable quant à la qualification professionnelle de la gérante … et défavorable au regard de son honorabilité professionnelle, en ce que Madame … serait à considérer comme personne interposée au sens de l’article 5 de la loi d’établissement.

Par référence à la prise de position de cet organe de consultation, le ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement, désigné ci-après par « le ministre », refusa de faire droit à la demande de la société …. Encore que suite à une entrevue de représentants de la société … avec des responsables du ministère en date du 30 avril 2001, ensemble la remise d’une attestation de Madame … du 20 avril précédent déclarant « assumer la responsabilité de la gérance technique de la société … pour l’activité des métiers de couvreur, ferblantier- zingueur et charpentier tels que décrit dans l’acte du 16 octobre 2000 », la commission prévisée émit en date du 2 mai 2001, à l’unanimité des quatre membres présents, un avis favorable concernant la qualification professionnelle avec la remarque « maintien de l’avis antérieur » tout en émettant également un avis favorable unanime quant à l’honorabilité professionnelle de Madame …, le ministre, par décision du 29 mai 2001, décida de maintenir sa décision du 29 mars 2001 « en l’absence de tout élément probant nouveau ».

La société … ainsi que Madame … ayant introduit un recours contentieux à l’encontre de ladite décision ministérielle du 29 mai 2001, le tribunal administratif, par jugement du 21 janvier 2002 inscrit sous le numéro 13431 du rôle, annula la décision ministérielle alors litigieuse du 29 mai 2001 pour contrariété des motifs valant absence de motifs, étant donné que « s’il doit être retenu comme étant constant que la commission, lors de sa réunion du 2 mai 2001, a statué également sur base de l’attestation du 20 avril 2001 émanant de Madame … et nouvellement produite, susceptible de justifier l’avis favorable quant à l’honorabilité professionnelle, par opposition à l’avis défavorable antérieur pris au regard de l’interposition de personnes y affirmée, l’état du dossier ainsi cristallisé à la date du 29 mai 2001 n’a certainement pas permis de justifier le maintien du refus antérieur « en l’absence de tout élément probant nouveau », ce d’autant plus que le signataire de la décision a pu suivre de vivo le processus décisionnel jusqu’à son aboutissement actuellement sous analyse ».

L’Etat n’ayant pas relevé appel de ce jugement et l’affaire ayant été renvoyée devant le ministre, les demandeurs s’adressèrent une nouvelle fois au ministre moyennant courrier de leur mandataire du 11 mars 2002 afin qu’il fasse droit dans les meilleurs délais à leur demande d’autorisation d’établissement. A la suite d’une itérative intervention auprès dudit ministre, celui-ci décida en date du 22 mai 2002 de ne pas faire droit à la demande en autorisation de la société … dans les termes suivants :

« Par la présente, j’ai l’honneur de me référer à votre demande sous rubrique qui fait entre-temps l’objet de l’instruction administrative prévue à l’article 2 de la loi d’établissement du 28 décembre 1988, modifiée le 4 novembre 1997, conformément au jugement du tribunal administratif du 21 janvier 2002.

Il en résulte que Madame … remplit la condition de qualification professionnelle requise pour l’exercice des métiers de couvreur, de ferblantier-zingueur et de charpentier.

Cependant, en raison de sa déclaration à mes services de ne pas devoir assumer en réalité une responsabilité quelconque dans la société de votre mandante, la commission prévue à l’article 2 susvisé a estimé à l’unanimité que Madame … est à considérer comme personne interposée, pratique interdite de manière spécifique par l’article 5 de la loi d’établissement du 28 décembre 1988 et compromettant l’honorabilité professionnelle du dirigeant exigée par l’article 3 de la loi précitée.

En effet, ce texte stipule que « nul ne peut exercer une des activités ou professions visées par la présente loi sous le couvert d’une autre personne ou servir de personne interposée dans le but d’en éluder les dispositions ».

Par ailleurs, il s’avère que la société … et CIE s. à r. l. effectue des travaux dans les métiers actuellement envisagés sans être en possession de l’autorisation requise, donc au mépris des dispositions de l’article 1er de la loi d’établissement du 28 décembre 1988 pré-

mentionnée, et ce en parfaite connaissance de cause.

Outre les dispositions de la loi du 3 août 1977 concernant le travail clandestin qui sont susceptibles de trouver application, la commission a encore été d’avis que ces agissements compromettent également l’honorabilité de Madame …, censée être effectivement en charge de la gestion de la société … et CIE s. à r.l..

Comme je me rallie aux prises de position de cet organe de consultation, je suis au regret de ne pouvoir réserver une suite à votre demande dans l’état actuel du dossier. (…) ».

Par requête déposée en date du 22 août 2002, Madame … et la société … ont fait introduire un recours tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation pour incompétence, violation de la loi et excès et détournement de pouvoir de la décision ministérielle prérelatée du 22 mai 2002.

A l’appui de leur recours elles font exposer que conformément aux dispositions de l’article 2 (4) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le ministre dont la décision a été annulée, en décidant au fond, doit se conformer audit jugement et qu’un nouveau refus ne pourrait donc intervenir que sur base d’éléments probants nouveaux intervenus après le jugement d’annulation.

Elles reprochent plus particulièrement au ministre d’avoir fait abstraction, en toute connaissance de cause, de l’attestation écrite du 20 avril 2001 versée par Madame …, suite à sa prétendue déclaration faite aux services du ministère, attestation aux termes de laquelle elle déclare assumer la responsabilité de la gérance technique de la société … pour l’activité des métiers de couvreur, ferblantier-zingueur et charpentier. Les demanderesses estiment ainsi que la commission consultative aurait justifié son avis défavorable en se basant sur une allégation contredite par l’attestation susvisée du 20 avril 2001, de manière à s’opposer « de manière flagrante au constat non équivoque du tribunal administratif à cet égard énoncé dans son jugement du 21 janvier 2002 ».

Quant au motif de refus ayant trait à l’exercice illégal de la profession, les demanderesses font valoir que la loi d’établissement prévoit une procédure spéciale pour ce cas, mais que le ministre n’a pas eu recours à cette procédure en l’espèce, de sorte que le ministre, en leur déniant de ce fait l’honorabilité professionnelle, sans toutefois avoir suivi la procédure légale prévue dans ce cas, aurait violé la loi et excédé ses pouvoirs. Ils relèvent que le ministre serait par ailleurs incompétent pour prononcer une sanction assimilable, en l’espèce, à une sanction qu’il appartient à d’autres autorités de prononcer.

Les parties demanderesses demandent en outre l’attribution d’une indemnité de procédure pour les sommes par elles exposées et non comprises dans les dépens, notamment pour frais d’avocat, de secrétariat, de déplacement, de perte de temps et autres, alors qu’elles se verraient de nouveau contraintes de se pourvoir en justice en raison de l’attitude hostile et irresponsable de la partie publique à leur égard qui les priverait intentionnellement des droits leur revenant à la suite du jugement du tribunal administratif du 21 janvier 2002.

Le délégué du Gouvernement rétorque que la décision ministérielle du 29 mai 2001 a été annulée par le tribunal administratif en raison d’une contrariété de motivation valant absence de motivation, de sorte qu’un nouveau refus ministériel ne devrait pas nécessairement intervenir sur la base d’éléments nouveaux intervenus après le jugement prémentionné, mais qu’il suffirait que la nouvelle décision ministérielle soit dûment motivée et que cette motivation soit cohérente. Il relève à cet égard que la commission, suivie par le ministre dans sa décision consécutive, a été d’avis, après réexamen de tous les éléments du dossier, que Madame … devrait être considérée comme une personne interposée et que ce fait compromettrait son honorabilité professionnelle. Il relève qu’il se serait avéré à deux reprises que Madame …, de son propre aveu, n’avait pas l’intention d’assurer de manière effective la gérance de la société …, ceci en dépit de la résolution de l’assemblée générale de la société lui attribuant la « gérance technique » des activités envisagées. Il signale à cet égard que Madame … aurait téléphoné à plusieurs reprises au ministère et ce avant que la demande de la société … ne soit examinée au sein de commission ministérielle en date du 28 février 2001, pour s’enquérir de l’état d’avancement de la demande en autorisation et qu’elle aurait indiqué à cette occasion aux fonctionnaires qui étaient ses interlocuteurs qu’elle « se mettait à disposition de la société … pour que l’autorisation soit délivrée » sans préjudice des termes exacts employés, de même qu’à la question de qui allait diriger concrètement l’entreprise, elle aurait encore répondu que « Monsieur … s’occupe de tout, c’est lui qui dirige l’affaire … » et « je n’ai pas de responsabilité dans cette société, j’ai signé un papier devant le notaire à cette fin », toujours sans préjudice des termes exacts, Madame … s’étant exprimée, d’après le représentant étatique, de manière assez confuse dans un mélange de français et de luxembourgeois.

En présence de ces « explications » téléphoniques, le délégué du Gouvernement fait valoir que l’attestation postérieure de Madame … du 20 avril 2001 n’aurait entraîné la conviction ni de la commission consultative, ni du ministre, de sorte qu’ils ont considéré Madame … comme étant une personne interposée afin de permettre à la société … d’obtenir l’autorisation sollicitée pour les activités supplémentaires envisagées, Monsieur … … ne disposant en effet pas de la qualification professionnelle requise.

Il relève en outre qu’il se serait entre-temps avéré que la société … effectue des travaux dans les métiers actuellement envisagés sans être en possession de l’autorisation requise, donc au mépris des dispositions de l’article 1er de la loi d’établissement et ce en parfaite connaissance de cause, de sorte qu’au-delà des dispositions de la loi du 3 août 1977 précitée, susceptibles de trouver application, la commission a encore été d’avis que ces agissements seraient de nature à compromettre l’honorabilité de Madame …, censée être effectivement en charge de la gestion de la société …. Le délégué du Gouvernement estime encore à cet égard qu’il appartiendrait au ministre de tirer les conséquences administratives d’agissements de ce type et que ce faisant il ne serait pas lié par des considérations d’ordre pénal ou judiciaire.

Les parties demanderesses rétorquent que le gouvernement méconnaîtrait gravement le principe de la présomption d’innocence élevée au rang de droit fondamental par l’article 6 paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l’homme, étant donné qu’aucune infraction pénale ne serait légalement établie dans le chef de Madame …. Elles estiment en outre que le fait de dénier l’honorabilité professionnelle à Madame … s’analyserait en fait en une sanction pénale, sans que les violations alléguées ne soient légalement établies, de manière à violer encore ledit article 6 paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Le délégué du Gouvernement relève dans son mémoire en duplique que les parties demanderesses confondraient manifestement sanction de nature pénale et sanction de nature administrative. Il précise que le ministre n’entendrait en effet pas incriminer Madame … par rapport à l’article 22 de la loi d’établissement, infraction dont la matérialité et la sanction correspondante relèvent des seules juridictions pénales, mais lui reprocherait ses agissements interdits à l’article 5 de la loi d’établissement en ce sens que ces agissements seraient de nature à compromettre son honorabilité professionnelle, de manière à justifier un refus administratif de délivrer l’autorisation d’établissement.

Conformément aux dispositions de l’article 2 alinéa final de la loi d’établissement, tel que modifié par la loi du 4 novembre 1997, seul un recours en annulation a pu être dirigé contre la décision litigieuse. Le recours en annulation introduit à titre principal l’ayant par ailleurs été dans les formes et délai prévus par la loi, il est recevable, le tribunal n’étant en tout état de cause pas compétent pour connaître du recours subsidiaire en réformation.

Il appartient au juge administratif saisi d’un recours en annulation d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, ainsi que de vérifier si les motifs dûment établis sont de nature à motiver légalement la décision attaquée.

En l’espèce, le ministre a dénié l’honorabilité professionnelle à Madame … d’abord au motif qu’elle serait à considérer comme personne interposée de manière à contrevenir directement à l’interdiction énoncée à l’article 5 de la loi d’établissement.

Il est constant que ledit motif de refus est basé sur le fait non contesté en cause que Madame …, lors de différents entretiens téléphoniques avec des fonctionnaires du ministère, avait affirmé, sur question afférente, qu’en dépit de sa nomination en tant que gérant technique de la société … elle n’avait pas l’intention de s’occuper réellement de la direction des affaires de la société, de manière à avoir admis directement le fait de servir de personne interposée.

Il n’est cependant pas moins constant que les affirmations prérelatées de Madame … ont par la suite été formellement contredites à travers une attestation écrite postérieure de sa part datant du 20 avril 2001, aux termes de laquelle elle déclare « assumer la responsabilité de la gérance technique de la société … et Cie pour l’activité des métiers de couvreur, ferblantier-zingueur et charpentier tels que décrits dans l’acte du 16 octobre 2000 ».

Dans la mesure où contrairement aux affirmations orales faites par Madame … à un moment où, d’après les termes mêmes du représentant étatique, elle semblait ignorer l’existence de l’interdiction prévue par l’article 5 de la loi d’établissement, son attestation écrite témoigne d’une prise de conscience subséquente des responsabilités qu’elle est supposée assumer au sein de la société, il y a lieu d’admettre, à défaut de preuve contraire, que c’est cette dernière manifestation d’intention de Madame …, rédigée par écrit et aux fins de clarifier pour les besoins de l’instruction de la demande d’autorisation litigieuse son rôle au sein de la société …, qui traduit les intentions réelles de la demanderesse … au moment de la prise de la décision litigieuse, sous peine de méconnaître les termes clairs et précis de sa déclaration laquelle traduit manifestement un revirement d’attitude par rapport à ses affirmations orales antérieures.

Il se dégage des considérations qui précèdent qu’à défaut d’autres éléments de nature à soustendre utilement l’affirmation qu’au moment de la prise de la décision litigieuse Madame … avait l’intention de servir uniquement de personne interposée à la gérance technique de la société …, le premier motif de refus consistant à lui dénier l’honorabilité professionnelle de ce chef laisse de reposer sur des faits établis à suffisance de droit.

La décision ministérielle déférée est motivée en outre par le fait que la société … a effectué des travaux dans les métiers actuellement envisagés sans être en possession de l’autorisation requise, soit au mépris des dispositions de l’article 1er de la loi d’établissement et ce en parfaite connaissance de cause et sous la gérance technique de Madame …, de sorte que l’honorabilité professionnelle de cette dernière s’en trouverait ternie.

En vertu des dispositions de l’alinéa 1er de l’article 3 de la loi d’établissement « l’autorisation ne peut être accordée à une personne physique que si celle-ci présente les garanties nécessaires d’honorabilité et de qualification professionnelles ». Au vœu de l’alinéa final du même article 3 « l’honorabilité s’apprécie sur base des antécédents judiciaires du postulant et de tous les éléments fournis par l’enquête administrative ». Ainsi, toutes les circonstances révélées par l’enquête administrative et pouvant avoir une incidence sur la manière de l’exercice de la profession faisant l’objet de la demande d’autorisation, peuvent être prises en compte par le ministre pour apprécier l’honorabilité dans le chef du demandeur en autorisation, étant entendu qu’elle s’analyse pour les personnes morales en les personnes de leurs représentants légaux.

Concernant plus particulièrement des faits qui sont par ailleurs pénalement répréhensibles et qui ne sont pas contestés quant à leur existence, il y a lieu de retenir qu’ils peuvent le cas échéant entrer en considération dans le cadre de l’appréciation de l’honorabilité professionnelle d’un demandeur en autorisation d’établissement, même s’il ne saurait pour autant être admis que le seul constat de la matérialité de ces faits puisse suffire à lui seul pour dénier l’honorabilité professionnelle au dirigeant de société, sous peine d’ériger en un automatisme l’application d’une sanction administrative grave de conséquences, l’exercice d’une activité commerciale s’en trouvant en effet empêché.

En l’espèce, force est de constater que les agissements reprochés à Madame …, en l’occurrence l’exercice, sous sa gérance, par la société … d’activités professionnelles en l’absence d’autorisation valable, sont révélateurs d’une attitude pour le moins peu respectueuse des lois réglementant précisément l’exercice de la profession faisant l’objet de la demande d’autorisation, de sorte que le ministre a valablement pu estimer que l’honorabilité professionnelle de Madame … s’en trouve ébranlée au point d’en justifier un défaut de garantie suffisante au sens de l’article 1er, alinéa 3 de la loi d’établissement.

Il se dégage en effet des pièces versées au dossier et il n’est pas contesté en cause que la société … a établi des devis et effectué des travaux de toiture, par ailleurs dénoncés au ministre comme ayant été extrêmement mal exécutés par un client s’étant renseigné sur l’existence d’une autorisation d’établissement dans le chef de la société …, sans avoir été au préalable en possession de l’autorisation légalement requise, de sorte à témoigner directement d’une manière d’exercer la profession litigieuse qui a valablement pu être considérée comme portant atteinte à l’honorabilité professionnelle du gérant de cette société.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent le recours en annulation laisse d’être fondé, la décision ministérielle déférée étant motivée à suffisance de droit et de fait par le seul motif de refus basé sur le fait qu’il s’est avéré que la société … a effectué de façon répétée des travaux dans les métiers actuellement envisagés sans être en possession de l’autorisation requise.

Eu égard à l’issue du litige, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande en attribution d’une indemnité de procédure formulée par les parties demanderesses.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit non justifié et en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu à attribution d’une indemnité de procédure ;

condamne les demanderesses aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 20 janvier 2003 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 7


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15287
Date de la décision : 20/01/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-01-20;15287 ?

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